ÉLECTIONS QUÉBEC 2022

Un premier test avant les débats pour les chefs des partis politiques

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L'immigration et l'identité s'invitent dans la campagne


Les cinq chefs ont vécu leur premier grand rendez-vous télévisé dimanche soir en se prêtant à des entrevues serrées à la télévision de Radio-Canada face à Patrice Roy, Céline Galipeau et Anne-Marie Dussault. Compte-rendu.


François Legault


 

L’exercice a débuté par le premier ministre sortant et candidat de la Coalition Avenir Québec (CAQ), François Legault. Questionné sur le climat actuel de tensions, voire de violence, observé cette semaine, il a reconnu que les mesures sanitaires y ont « en partie » contribué. « C’est pour ça que j’ai lancé un appel » pour que les Québécois [ne] soient pas violents dans leur propos. »


Sur l’abandon de la promesse de 2018 d’offrir un médecin de famille à chacun, il a répété que tous les Québécois auront plutôt accès à un groupe de médecine familiale. Relancé à ce sujet, François Legault a reproché à Céline Galipeau « de reprendre les arguments de l’opposition », critique qu’il a formulé de nouveau plus tard durant l’exercice.


Sur le déclin du français, il a répété que la solution « passait par l’immigration ». M. Legault n’a toutefois pas dit comment il comptait convaincre le fédéral d’accepter. « lI faut aller chercher un rapport de force. La majorité des Québécois sont d’accord avec ça, pas mal plus d’accord qu’avec un référendum sur la souveraineté », a-t-il dit. Pas question toutefois d’accueillir plus de 50 000 immigrants par année ou de reculer sur certaines contraintes qui leur sont imposées depuis la loi 96 comme le réclament des gens d’affaires.


Sur le troisième lien, le chef de la CAQ s’est montré particulièrement cinglant. « Il faut que les gens de Montréal arrêtent de regarder de haut les gens de Québec et Lévis », a-t-il lancé. À Patrice Roy, qui le pressait de rendre publiques les études sur le projet d’ici l’élection, il a répété que les données étaient dépassées en raison de la pandémie et du recours grandissant au télé-travail.


Pas question non plus de taxer les véhicules utilitaires sports pour réduire les gaz à effet de serre.


Dominique Anglade


 

C’est la cheffe libérale, Dominique Anglade, qui a suivi. Aussi interrogée sur le climat de violence qui entoure les élus, elle a jeté le blâme sur la violence observée sur les médias sociaux « qui se prolonge maintenant dans la vie réelle ».


Cette semaine sa candidate Marwah Rizqy, avait affirmé que le chef conservateur, Éric Duhaime, était en partie responsable de la hausse des violences envers les élus. Mme Anglade n’a pas voulu aller là.


« Je pense qu’on n’est pas dans une situation où on doit dire c’est la faute d’un tel, c’est la faute d’un tel », indique Mme Anglade.


Répétant des propos qu’elle a maintes fois tenus dans les derniers mois, la cheffe du Parti libéral (PLQ) s’est engagée à « donner de l’oxygène » aux Québécois, frappés de plein fouet par l’inflation. Elle entend baisser leurs impôts, sans couper dans les services.


« On est dans un contexte complètement différent aujourd’hui » que l’austérité du gouvernement de Philippe Couillard, a-t-elle dit.


Toujours parce qu’elle veut donner de l’oxygène aux contribuables, Mme Anglade assure qu’elle ne leur imposera pas de « malus » ou de taxes sur la pollution. Elle compte sur son projet « Éco » pour réduire de 45 % les émissions de gaz à effets de serre en 2030 par rapport aux niveaux de 1990.


Dominique Anglade attendra de lire des études avant de se prononcer sur un troisième lien Québec-Lévis. Elle veut un tramway, mais l’ex-ingénieure ne sait pas encore s’il passerait sous le fleuve ou par-dessus. « Des plans et des devis j’en ai vu dans ma vie. Il faut des études », a-t-elle soutenu.


Gabriel Nadeau-Dubois


 

Le co-porte-parole de Québec Solidaire a profité de l’entrevue pour montrer qu’il avait mûri depuis la crise étudiante de 2012. « Quand la mobilisation a commencé, j’avais 20 ans. J’avais aussi le niveau de maturité qui va avec », a-t-il dit. « Ce que j’ai essayé de faire dans les 10 dernières années, c’est changer sans me trahir. »


Les animateurs l’ont noté, Gabriel Nadeau-Dubois semble s’être « adouci ». Pas question par exemple de réduire le financement de la police ou de leur enlever des armes comme le parti l’a déjà évoqué dans le passé. « Ce n’est pas le temps de faire ça », a-t-il dit en évoquant la montée de la violence à Montréal.


Même chose pour l’idée d’imposer la gratuité scolaire de la maternelle à l’Université qui n’est plus au programme. « La priorité, c’est de ramener une vraie gratuité au primaire et au secondaire ».


Mais la priorité des priorités, c’est la lutte aux changements climatiques, a répété Gabriel Nadeau-Dubois. Son parti entend réduire les GES de 55 % en cinq ans, défi qui ne semble guère réaliste au vu du maigre 3 % de réduction atteint depuis 30 ans au Québec.


« On n’a pas le choix », a-t-il dit. « Ce plan-là est solide. Mon message aux Québécois, c’est : on est capables ».


À propos de la taxe que son parti compte imposer sur l’achat de véhicules utilitaires sport (VUS), le chef solidaire a insisté sur le fait que les familles nombreuses en seraient exemptées, tout comme les gens ayant besoin de ce type de véhicule pour le travail.


Le chef solidaire n’a toutefois pas trouvé d’arguments pour justifier le fait que l’exemption de la TVQ qu’il propose bénéficie aussi aux plus riches. « C’est une mesure temporaire pour aider les gens », a-t-il soutenu en insistant qu’il fallait proposer une mesure d’urgence qui « peut s’appliquer rapidement ».


Paul St-Pierre Plamondon


 

Le chef du Parti québécois (PQ), Paul St-Pierre Plamondon, se sent « privilégié » de mener pour sa formation politique « l’élection de l’espoir ». Face aux commentaires de ceux qui voient le PQ mourir le 3 octobre, « PSPP » répond : « laissez-moi au moins inspirer [les Québécois] avec un avenir qui serait pas mal plus le fun ».


Seul chef de parti à ne pas avoir proposé de baisses d’impôts ou de taxes, il a attaqué les propositions « irresponsables » à ses yeux des quatre autres partis.


Tant les caquistes que les libéraux et les conservateurs veulent baisser les impôts. Mais cette proposition constitue un « aller simple vers l’austérité ». Quant au congé de taxe proposé par Québec solidaire, il « avantage les plus riches », selon M. St-Pierre Plamondon, qui s’engage à verser des chèques de jusqu’à 1200 $ aux familles moins bien nanties.


Le chef péquiste a profité de cette émission spéciale pour attaquer de plein front les propositions sur la langue française de la CAQ, qui ont des allures d’« aplaventrisme » selon lui. « On a consulté des experts. Ils disent que la “loi 96” ne renversera pas le déclin », a-t-il signifié.


En plus d’imposer la loi 101 au cégep, un gouvernement péquiste agirait sur les seuils d’immigration pour freiner le déclin de la langue de Molière au Québec. Paul St-Pierre Plamondon soutient qu’il annoncera ses seuils demain et qu’ils seront de « moins de 50 000 ».


Éric Duhaime


 

Cinquième chef à se prêter au jeu, Éric Duhaime du Parti Conservateur a passé une grande partie de l’entrevue à répondre à des questions sur la pandémie. « Moi je me fais la voix de celles et ceux qui sont présentement mécontents de ce que le gouvernement a fait », a-t-il dit lorsqu’interrogé sur son rôle dans les tensions actuelles.


Concernant la forte présence de complotistes parmi ses partisans (50 % selon une étude), il a répondu du tac au tac en disant ne pas avoir le « monopole » des complotistes puisqu’ils comptaient aussi pour 30 % des gens adhérant au Parti Québécois et au Parti libéral.


M. Duhaime a aussi dû répondre à plusieurs questions sur l’absence de cibles de réduction des GES dans son programme. Il a rétorqué qu’à ses yeux, le plus étonnant, était qu’on « puisse croire » les cibles peu réalistes des quatre autres partis. Ces derniers, a-t-il poursuivi, doivent dire ce que les gens devront « sacrifier » au nom de la lutte aux changements climatiques. « Qu’est-ce que vous allez couper ? Combien entreprises vous allez fermer ? Combien de gens ne pourront plus conduire leurs véhicules ? », a-t-il mentionnant aussi l’impact notamment sur les conducteurs de motos et de motoneiges.


À propos du troisième lien routier entre Québec et Lévis, il a souligné que son projet était différent et « moins cher » que celui de M. Legault. Pour ce qui est de son impact sur les paysages de l’Île d’Orléans, il a lancé que l’acceptabilité sociale du projet ne devait pas uniquement être mesurée auprès des insulaires mais notamment dans la ville de Québec.



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