"Un mariage de raison"

Économie - Québec dans le monde


par Mercure, Philippe; Cousineau, Sophie - Le président d'Alcan, Dick Evans, et celui de Rio Tinto, Tom Albanese, viennent de s'entendre sur un "mariage de raison" qui risque de déboucher sur la plus grosse transaction minière de l'histoire. La Presse Affaires s'est entretenue avec les deux hommes.
Q Alcan a annoncé ce matin dans la foulée de la transaction avec Rio Tinto que sa division d'emballage serait vendue. Pourquoi?
R Dick Evans, d'Alcan: Nous en étions déjà chez Alcan à revoir notre stratégie concernant notre division d'emballage - nous étions tout prêt de prendre une décision finale pour nous en départir. Quand nous avons acquis Pechiney, il y avait un gros ménage à faire dans notre entreprise. Nous avons amélioré cette division et nous pensons maintenant qu'elle a plus de valeur pour quelqu'un d'autre. Cette décision n'est pas reliée à l'acquisition annoncée aujourd'hui - en fait, nous avions dû retarder notre décision quand Alcoa a déposé son offre hostile.
Q Rio Tinto a la réputation d'être une entreprise conservatrice vous avez n'avez pas été impliqués dans la grande vague de fusions et acquisitions qui déferle sur l'industrie minière depuis deux ans. Vous nous arrivez aujourd'hui avec une offre qui représenterait la plus grosse transaction de l'histoire de l'industrie minière. Y a-t-il un changement de philosophie chez Rio Tinto?
R Tom Albanese: Nous ne faisons pas de fusions ou d'acquisitions chaque année, mais nous faisons celles qui comptent. Ni notre stratégie, ni nos valeurs n'ont changé.
Q Une chose a changé, par contre, et c'est votre niveau d'endettement. Les analystes estiment maintenant votre ratio dette-équité à 64%, et l'agence de cotation Moody's a annoncé qu'elle réévaluerait peut-être votre cote de crédit. Êtes-vous inquiet?
R Tom Albanese: C'est notre intention de ramener notre niveau d'endettement à des valeurs plus basses très rapidement. Nous considérons cette transaction non seulement comme créatrice de valeur, mais aussi créatrice de revenus - et ce dès l'année prochaine, malgré les intérêts que nous aurons à payer sur nos emprunts.
Q En acquérant Alcan, vous ne devenez pas seulement le plus gros producteur d'aluminium de la planète, mais aussi le leader mondial de la bauxite. Qu'est-ce que ça signifie du point de vue stratégique?
R Tom Albanese: Nous avons maintenant des actifs très complémentaires, et c'est de là que découleront certaines des synergies. Nous allons garder le gros de la bauxite pour nous, mais aussi continuer à en vendre à d'autres acteurs de l'industrie... si cela crée de la valeur.
Q La bauxite sera extraite en Australie, l'aluminium sera fabriquée au Canada. Il y a toutefois une étape intermédiaire entre les deux: l'extraction de l'alumine à partir de la bauxite. Est-il plus stratégique d'établir ces usines d'extraction en Australie ou au Canada?
R Dick Evans: La tendance, dans le futur, sera d'établir les usines d'extraction à proximité des réserves de bauxite.
Q La bauxite étant en Australie, vos usines d'alumine seront donc là aussi. Qu'est-ce que ça veut dire pour l'usine d'alumine québécoise de Vaudreuil?
R Dick Evans: La décision concernant Vaudreuil est complètement indépendante de cette transaction. Il y a un prix de marché pour l'alumine, et c'est sur lui que s'aligne l'usine de Vaudreuil. Tant que l'usine sera rentable comme elle l'est aujourd'hui, elle sera en opération. Nous savons que c'est une vieille usine qui fermera ses portes à un moment ou un autre. Mais pour l'instant, elle génère de l'argent et elle demeure ouverte.
Q Qui seront les membres d'Alcan qui siégeront sur le conseil d'administration de Rio Tinto?
R Dick Evans: D'abord, je dois dire que les élections n'ont pas encore eu lieu. Mais l'intention est d'y inclure Yves Fortier (président du conseil d'administration d'Alcan), Paul Tellier (membre du conseil d'Alcan), et moi-même.
Illustration(s) :
photo John Morstad, Bloomberg News
"Nous ne faisons pas de fusions ou d'acquisitions chaque année, mais nous faisons celles qui comptent. Ni notre stratégie ni nos valeurs n'ont changé", a dit en entrevue Tom Albanese, président et chef de la direction de Rio Tinto.


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