« Un malheureux retour en arrière »

Le Génie québécois : turbulences annoncées



Moins de deux semaines après le dépôt du rapport Bouchard-Taylor sur les pratiques d'accommodements raisonnables, le très respecté sociologue Guy Rocher dénonce le travail des deux commissaires.
Dans une entrevue à Radio-Canada, M. Rocher, qui est considéré comme le doyen de la sociologie au Québec, critique plusieurs plans du rapport, surtout dans sa manière de voir et de penser la société québécoise.
« Cette majorité francophone est très souvent traitée comme une minorité », dit-il d'entrée de jeu avant d'ajouter que le rapport occulte plusieurs éléments essentiels de la société actuelle. « La montée du statut majoritaire du Québec, des francophones québécois au cours des 50 dernières années, c'est un événement majeur de l'histoire du Québec. »
M. Rocher soutient aussi qu'il s'agit d'une erreur de la part des commissaires de définir les Québécois comme des Canadiens français, ce qu'il considère comme un recul. « Revenir à Canadien français, c'est revenir à notre définition de minoritaire dans le Canada. Moi je le vois comme un malheureux retour en arrière. »
Le spectre de Trudeau
Le sociologue voit dans le rapport Bouchard-Taylor la continuation, en quelque sorte, du travail de l'ancien premier ministre Pierre- Elliott Trudeau et de son concept de multiculturalisme dont l'objectif était, selon lui, de noyer les Québécois dans l'ensemble canadien.

Il dit d'ailleurs que le concept d'interculturalisme, où les minoritaires s'intègrent à la majorité francophone, prôné par les commissaires, est beaucoup trop nébuleux. « Moi, je serais très inquiet alors pour que cet interculturalisme soit la porte d'entrée pour la reconnaissance du multiculturalisme canadien », dit-il.
Daniel Marc Weinstock, professeur en philosophie à l'Université de Montréal et membre du comité-conseil de la commission Bouchard-Taylor, abonde dans le même sens. « À mon avis, on a beaucoup exagéré la différence entre le multiculturalisme et l'interculturalisme », dit-il. Une position partagée par Jacques Beauchemin, professeur en sociologie à l'Université du Québec à Montréal et aussi membre du comité-conseil de la commission Bouchard-Taylor. « Objectivement, le rapport se situe dans une perspective qui ressemble à celle-là [...] de Pierre-Elliott Trudeau. »
En ce qui concerne la réaction de la population québécoise au rapport, Guy Rocher croit que la majorité francophone le recevra comme un blâme et le rejettera, car, selon lui, les Québécois se définissent comme des gens tolérants, ouverts et hospitaliers.


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