«Spleen» météo et politique

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Actuellement, notre ciel démocratique semble bien gris





La période politique au Québec est déprimante, à l’image de notre météo.


En découvrant la pluie tomber vendredi matin sur Québec pour un énième jour consécutif, des vers du poème Spleen, de Baudelaire (dans ma tête, chantés par Léo Ferré), me sont rapidement revenus: «Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle [...] Il nous verse un jour noir plus triste que les nuits [...] Quand la pluie étalant ses immenses traînées / D’une vaste prison imite les barreaux.»


Les prévisions météo n’annoncent pas une libération rapide de ce monde devenu «un cachot humide».


Les inondations ont peut-être réjoui certains communicateurs du parti au pouvoir, car l’attention médiatique était détournée loin du Parlement. Face à une catastrophe naturelle, les gouvernements réussissent souvent à se démarquer (avec des exceptions: pensons à la catastrophe de la tempête de neige sur l’autoroute 13, cet hiver).


Mais quelle épreuve terrible pour ceux qui vivent cette agression des eaux. On les a vus, depuis des jours, se battre pour dresser des murs de sacs de sable, installer des pompes, tenter de sauver les meubles, au sens propre. Ou encore, refuser les évacuations obligatoires. Les suites seront éprouvantes: champignons, démolitions à contrecœur, difficultés, voire impossibilités d’obtenir de l’aide.


Partisanerie dépassée


Les trois principaux chefs de parti ont annulé les travaux parlementaires mardi et se sont retrouvés ensemble, sur la ligne de front, remplissant des sacs, pataugeant dans l’eau brune. Nombre de Québécois sont réconfortés et rassurés par ces moments où les querelles partisanes s’évaporent.


Le spectacle de «serrage de coude» change des échanges habituellement très acrimonieux – et souvent débilitants – en Chambre.


Bien sûr, la démocratie, c’est la division: en camps, en partis, en courants d’idées. Il faut s’y faire; même profiter des chocs d’idées. Et se méfier de ceux qui fantasment sur une société totalement unie, sans débats.


Affligeants débats


Mais actuellement, notre ciel démocratique semble bien gris, «bas et lourd [...] comme un couvercle».


Notre État fait des surplus, mais à quel prix et, compte tenu du vieillissement rapide de la population, pour combien de temps?


Le Dominion est dans le rouge; dépense à tout venant. Mais peu ici. Et malgré le contingent de députés libéraux envoyés par les Québécois à la Chambre des communes, Ottawa semble totalement sourd à nos demandes. Voilà qui contredit un argument central des pourfendeurs du Bloc québécois: «Il faut être avec le parti au pouvoir pour influer sur les décisions...» Quarante, ça ne suffit pas?


Car même si l’inspiration venait de Montréal, même si Montréal compte des firmes d’ingénierie, même si l’expertise financière y est (Caisse de dépôt), le gouvernement Trudeau a choisi Toronto pour loger la Banque d’infrastructure du Canada.


La réponse du leader libéral Jean-Marc Fournier? Déprimante comme la pluie, affligeante de partisanerie: «Dans un régime fédéral, il arrive qu’on ne gagne pas toutes les batailles. Mais, sous la séparation du Québec, il n’y aurait pas de Banque de l’infrastructure du Canada, certainement, à Montréal.»


Il faut lutter contre la déprime en relativisant nos malheurs. Encore là, tout est dans la manière. Aux oppositions qui critiquaient le gouvernement vendredi, l’ancien ministre Robert Poëti a lancé sans rire au caquiste Éric Caire: «Si le député [...] s’était réveillé ce matin en Syrie, il aurait peut-être trouvé ça autrement.»


Affligeant, vous dis-je... Vivement un vrai printemps.







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