Se garder des outils

Rien ne prouve jusqu'à maintenant que la lumière ne peut pas être faite dans l'industrie de la construction par les voies déjà existantes.

Crime organisé et politique - collusion (privatisation de l'État)


(Québec) «À utiliser au moment jugé opportun.» En rejetant hier une motion de l'ADQ réclamant une enquête publique dans l'industrie de la construction, les libéraux ont fait leur cette formule. Il est sage de considérer une commission d'enquête comme un moyen de dernier recours.
Il est vrai que des allégations troublantes portant sur l'industrie de la construction au Québec s'accumulent depuis le printemps. Collusion, blanchiment d'argent, intrusion du crime organisé à la FTQ, traitement privilégié au Fonds de solidarité de la FTQ. Bref, rien pour rassurer. Le gouvernement n'est cependant pas resté les bras croisés. Il y a des enquêtes policières en cours. Des ressources ont aussi été ajoutées à la Sûreté du Québec.
L'ADQ et le PQ estiment qu'une enquête publique est essentielle. Leur principal argument est que la gestion des fonds publics est en jeu. Or justement, par souci d'une bonne gestion des fonds publics, le gouvernement ne doit pas automatiquement répondre oui à une telle demande.
Les commissions d'enquête sont longues et coûteuses. C'est un exercice qu'un gouvernement doit enclencher uniquement si c'est le seul moyen à sa disposition pour atteindre un objectif et pour s'assurer que son cadre légal n'est pas systématiquement contourné.
Rien ne prouve jusqu'à maintenant que la lumière ne peut pas être faite dans l'industrie de la construction par les voies déjà existantes. Rien n'indique que des délinquants resteront impunis. Si la conclusion diffère un jour, il sera toujours temps pour le gouvernement de sortir l'artillerie lourde pour procéder à un grand ménage et resserrer les règles. Et ce, même si toutes les enquêtes policières ne sont pas terminées.
L'opposition soutient qu'il faut agir vite, car le Québec doit débourser jusqu'à 30 % de plus qu'ailleurs au Canada pour réaliser des travaux de construction. Le gouvernement consacrant plus de 40 milliards $ à des travaux d'infrastructures, des milliards de dollars seraient ainsi dépensés sans que les routes, les écoles ou autres édifices publics ne soient en meilleur état.
La donnée est certes inquiétante, mais d'où l'ADQ l'a-t-elle tirée? D'un tableau d'une étude de Claude Garcia, de l'Institut économique de Montréal, s'intitulant «Comment la privatisation d'Hydro-Québec permettrait-elle d'enrichir les citoyens québécois?» et montrant des dépassements de budget dans cinq projets de construction depuis 2001. Dans le rapport de deux économistes, remis à la commission d'enquête sur la Gaspésia en 2005, qui relevait que les coûts de construction au Québec étaient de 25 % supérieurs à ceux des États-Unis. Et enfin, dans une étude présentée en 2003 à la Corporation des entrepreneurs généraux du Québec sur les conséquences économiques du Bureau des soumissions déposées du Québec.
En 2006, la Commission de la construction du Québec avait elle aussi procédé à des comparaisons. Selon la commission, il coûtait moins cher de construire un magasin de détail, un immeuble d'appartements en hauteur ou une manufacture à Montréal, qu'à Toronto, à Ottawa, à Calgary ou à Vancouver. Les coûts étaient cependant moins élevés dans les Maritimes. La Commission a amorcé une mise à jour de son étude.
Qui dit vrai? Difficile à dire puisqu'on ne mesure pas et ne compare pas les mêmes choses. La prudence est donc de mise avant de généraliser un cas à toute une industrie. Il faut également se rappeler qu'à travers le pays, les gouvernements injectent des milliards de dollars dans leurs infrastructures pour stimuler l'économie en crise. Les prix de la main-d'oeuvre et des matériaux de construction risquent immanquablement de grimper au Québec et dans toutes les autres provinces. Alors, corruption dans l'industrie ou simple résultat d'une pression accrue sur la demande?


Laissez un commentaire



Aucun commentaire trouvé