SABLES BITUMINEUX

Science et propagande

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Les oeillères de Harper

Si le gouvernement Obama donne son aval à la construction du pipeline Keystone XL, les émissions de gaz à effet de serre pourraient augmenter quatre fois plus que ce qui était prévu par le Secrétariat d’État américain, affirment des chercheurs de l’Institut de Stockholm pour l’environnement. Qui dit vrai ?

La société TransCanada attend toujours l’autorisation du gouvernement Obama pour achever la construction de l’oléoduc Keystone XL, qui doit transporter le pétrole des sables bitumineux vers les raffineries du sud des États-Unis. À cause des élections de mi-mandat qui auront lieu cet automne, la probabilité est forte que la décision ne soit pas annoncée avant plusieurs mois, au grand dam du gouvernement Harper.

En attendant, la guerre des mots se poursuit, avec force études et contre-études à l’appui.

Difficile de trancher en lisant les conclusions de la dernière en date publiée par deux chercheurs américains sur le site Web de la revue internationale Nature Climate Change. Difficile parce qu’il s’agit de résultats obtenus en intégrant les données connues dans un simple modèle économique d’équilibre offre-demande.

Il s’agit donc d’une projection théorique. Comme le sont à peu près toutes les études du genre, y compris celle du Secrétariat d’État américain qui a permis à ses auteurs d’en arriver à des résultats opposés à cause du choix du modèle utilisé et de la qualité des données ayant servi à alimenter la bête mathématique.

Dans le cas qui nous concerne, les chercheurs américains de l’Institut de Stockholm pour l’environnement en arrivent à prévoir que l’augmentation de la quantité de pétrole transportée par pipeline vers les États-Unis fera augmenter sensiblement l’offre globale de ce produit. Par conséquent, son prix diminuera, la demande augmentera et il en sera de même des émissions de gaz à effet de serre (GES).

À cela, le gouvernement canadien répond : c’est faux ! L’augmentation de la capacité d’expédition du brut n’aura aucun effet sur la quantité de pétrole consommée et sur les émissions de GES puisque le produit canadien ne fera que remplacer du pétrole importé d’Europe, d’Afrique ou d’ailleurs.

Qui dit vrai ? Seul le temps permettra de le dire…

Selon les défenseurs du projet de pipeline, les 800 000 barils de brut qui seraient acheminés chaque jour vers les raffineries américaines n’équivaudraient qu’à 1 % de la demande mondiale. Cela peut paraître minime, mais c’est oublier qu’ils s’ajoutent aux centaines de milliers de barils tirés du schiste et qu’il existe d’autres projets d’oléoducs en préparation au Canada, dont Northern Gateway (525 000 barils par jour destinés à l’Asie) et Énergie Est (1,1 million de barils par jour qui transiteraient par le Québec).

Au total, l’industrie canadienne des sables bitumineux prévoit doubler sa production d’ici 2030, et la plus grande partie de ce pétrole est destinée à l’exportation. Peut-on raisonnablement en déduire qu’il ne s’agit pas seulement de remplacer des approvisionnements existants, mais d’en ajouter ? Peut-on aussi convenir que la préoccupation première de l’actuel gouvernement conservateur canadien n’est pas la réduction des gaz à effet de serre, mais l’accroissement de la capacité d’exportation du brut de l’Ouest ?

Les études se suivent et se contredisent, c’est de bonne guerre. Ce qui l’est moins, c’est cet acharnement du gouvernement Harper à ne voir qu’un seul côté de la médaille… en cette matière comme en d’autres, malheureusement.


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