Électricité

S'endetter pour le privé

Hydro brade la ressource... pour justifier le lancement de nouveaux projets

Aluminerie Alouette


Contrairement à son habitude, c'est sans faire trop de vagues et surtout sans fournir de détails que le premier ministre Jean Charest a annoncé, lundi, qu'il réservait un bloc de 500 MW d'électricité pour l'agrandissement de l'aluminerie Alouette.
Voilà une bonne nouvelle pour Sept-Îles, même si l'investissement de 1,5 milliard ne créera que 300 nouveaux emplois à terme. Le problème, c'est que le cadeau est coûteux puisqu'Alouette n'investira pas un cent pour construire les centrales et ne paiera quand même que 4,5 ¢ du kilowattheure pour de l'électricité qui coûtera le double à produire.
Sur la durée, les Québécois doivent donc s'attendre à consentir largement plus que 1 milliard pour cet agrandissement, à même leurs tarifs et le manque à gagner pour les coffres publics.
Pour fournir Alouette en électricité, il faut construire des barrages. Et pour construire, il faut emprunter. Hydro-Québec verra donc sa dette grimper de l'équivalent des coûts de la première phase du projet tant contesté de la Romaine, qui entrera en service à peu près au même moment.
En temps normal, s'endetter pour investir est normal puisque cela «crée de la richesse», selon l'expression à la mode chez les «lucides». Le hic, c'est que dans le cas des alumineries, la dette assumée par Hydro-Québec remplace carrément celle que la compagnie devrait contracter pour s'alimenter en énergie. Ici, ce sont les contribuables qui assument cette partie de l'investissement en lieu et place des actionnaires, alourdissant d'autant cette dette totale du Québec qui fait tant rugir les chambres de commerce.
Heureusement qu'un projet de cette ampleur s'accompagne de retombées économiques et fiscales! Mais comme c'est souvent le cas pour les ressources, la transformation de l'aluminium reste très marginale au Québec. Comme en 2002, Alouette s'engage à créer 1000 emplois dans la transformation, sans qu'on sache où, quand et de quel type de transformation il sera question.
À cause des mauvaises prévisions d'Hydro-Québec, la société d'État est aux prises avec des excédents jusqu'en 2022. Le premier ministre Charest voulait qu'Hydro construise pour exporter, mais comme le prix de l'électricité est au plus bas chez nos voisins, Hydro brade la ressource... pour justifier le lancement de nouveaux projets.
C'est ainsi qu'en plus d'avoir signé un contrat à long terme de vente au rabais avec l'État du Vermont, Hydro verse 150 millions chaque année depuis 2008 à TransCanada Energy pour qu'elle ne produise pas à sa centrale de Bécancour. Un contrat si mal négocié qu'Hydro ne peut même pas exiger de TCE qu'elle lui fournisse de l'électricité en hiver, seul moment de l'année où elle doit en importer à grands frais! Si c'est cela le prix à payer pour «mettre fin à l'immobilisme», avouons au moins qu'il est très élevé!


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