Raffinerie Shell: cette fois, c'est la fin

DELEK - SHELL


François Desjardins - Dans l'est de Montréal, pour plus de 500 travailleurs et quelques milliers de personnes qui en bénéficient indirectement, c'est la consternation. Un peu plus d'une semaine après le redémarrage des pourparlers entre Shell et l'acheteur potentiel pour sa raffinerie de Montréal-Est, les négociations ont échoué et Shell va maintenant concentrer toute son attention sur la conversion du site en simple terminal de carburants.
Sans que la raison soit évoquée publiquement, il est d'ores et déjà convenu que les négociations ont été rendues difficiles par le seul fait que la raffinerie n'a pas subi les entretiens nécessaires au cours de la dernière année, un irritant majeur aux yeux de l'acheteur intéressé, Delek US.
«Nous remercions Delek US de son intérêt», a dit Richard Oblath, vice-président de Shell, dans un communiqué conjoint avec Delek. «Ainsi prend fin un processus que nous avons mené pendant plus d'une année afin de trouver un acheteur. Plus de 100 entreprises ont été contactées, mais aucune n'a envisagé un avenir acceptable pour l'établissement en tant que raffinerie.»
D'un commun accord
De son côté, Uzi Yemin, le président de Delek US, division d'un conglomérat israélien, a dit que «malheureusement, après des efforts considérables pour s'entendre sur un grand nombre de questions complexes, les deux parties ont décidé de ne pas poursuivre les négociations».
Shell a indiqué qu'elle va maintenant travailler sur «la transformation sécuritaire de la raffinerie en terminal et sur l'approvisionnement adéquat en carburants de nos clients au Québec, dans les provinces de l'Atlantique et dans l'est de l'Ontario». M. Oblath a précisé que l'examen réglementaire n'est pas terminé.
Au fil des semaines, Shell a essuyé de vives critiques. Entre autres, certains lui ont reproché de n'avoir jamais voulu vraiment vendre sa raffinerie et ont affirmé que l'exercice de mise en vente relevait davantage d'un exercice de relations publiques pour cacher son souhait réel qu'est sa transformation en simple terminal. Shell a toujours dit qu'elle était de bonne foi.
«Mascarade»
«Ça met fin à une grosse mascarade», a lancé lors d'un entretien Jean-Claude Rocheleau, président de la section locale 121 SCEP-FTQ. «Ça signifie des milliers d'emplois, un effet domino potentiel [pour la raffinerie Suncor à côté et l'industrie pétrochimique], une perte pour la sécurité énergétique du Québec, une perte pour l'économie dans l'est de Montréal, etc. On a l'impression de s'être fait flouer.»
«Il apparaît pour le syndicat que Shell a rendu inutilisables plusieurs équipements de la raffinerie en ne procédant pas aux travaux d'entretien requis, ce qui aura rendu l'installation invendable», a-t-il ajouté dans un communiqué.
Le syndicat a obtenu une injonction qui empêche Shell de démanteler quoi que ce soit d'ici le 10 septembre. Aussi, il affirme que Shell doit décontaminer tous les terrains, pas seulement la partie du raffinage.
La société Delek US, qui aurait aussi voulu acheter les stations-service, a déjà déploré publiquement que la raffinerie ferme ses portes après le mois de septembre, car elle n'a pas subi les arrêts d'entretien nécessaires en 2009 et 2010. Et que Delek, en gros, ne souhaitait pas acheter un complexe inopérant.
Les négociations entre Shell et Delek ont échoué en juin. Cependant, après une réunion extraordinaire du Comité de l'industrie le 20 juillet à Ottawa, la direction de Shell, interrogée sur la place publique, a proposé à Delek de retourner à la table. C'était le 22 juillet. Les pourparlers auront duré environ une semaine.
Shell a annoncé la mise en vente de ses installations à l'été 2009. En janvier 2010, elle a annoncé qu'il n'y avait pas d'acheteur et a dit qu'elle les transformerait en terminal de carburants. Un comité de relance composé de syndicalistes, d'élus et de gens d'affaires — présidé par Michael Fortier — a cependant été mis en place, et c'est là que Delek a fait des offres. La dernière était de 200 millions. En l'absence d'une entente, Shell, entre-temps, a poursuivi la planification de la fermeture.
Fin des livraisons de brut
Le temps pressait, car l'équipement pour l'entretien de la raffinerie n'avait pas été commandé et les livraisons de pétrole, qui arrivent par pipeline en provenance du Maine, se termineront en août. Ce qui signifie qu'au-delà de septembre, la raffinerie devra arrêter. Progressivement, l'essence vendue dans les stations-service de Shell proviendra des livraisons maritimes au port de Montréal.
Au cours de la réunion du Comité de l'industrie, la direction de Delek avait été claire sur le fait qu'une raffinerie en voie de fermeture représentait pour elle un problème. Delek en possède une autre au Texas.
«La mise à niveau est le plus gros problème. Il y a beaucoup d'autres questions en jeu, beaucoup de problèmes à résoudre, mais ce n'est pas insurmontable, avait dit Jim Boles, de Delek. Par contre, pour celui-là, il n'y a plus assez de temps.»


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