PQ: étranger dans sa propre maison

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« À défaut de souveraineté dans l’immédiat, où sont les raisons essentielles, existentielles pour un nationaliste de voter pour le PQ ? »

Jean-François Lisée a reçu une lettre dont l’auteur a eu la gentillesse de m’envoyer une copie.


Je vous en parle parce que je suis sûr que des dizaines de milliers de gens pensent comme cet homme, dont moi.


À mon humble avis, le chef péquiste fait une excellente campagne : il est énergique, vif, allumé, ce qui n’étonne pas quand on le connaît.


Il est partout, tout en n’étant nulle part sur l’essentiel.


C’est aussi ce que dit cette lettre.


Malaise


L’auteur est un fervent admirateur de M. Lisée : il a, dit-il, lu tous ses livres, échangé avec lui, repris sa carte du PQ à cause de lui, et le considère comme un de nos hommes publics les plus intelligents, ce qui est indiscutable.


Et pourtant, dit-il, je ne voterai pas pour vous. Il expose ensuite son malaise.


Le PQ était jadis une coalition gauche-droite. Il n’est plus qu’un parti de gauche.


Le flirt avec l’extrême gauche de QS – qui, tel un « vautour », dit-il, n’attend que le moment de fondre sur ses restes – l’a sidéré.


Cet homme, qui se définit comme un nationaliste modéré, un tantinet conservateur, ne reconnaît plus sa maison.


De quoi lui parle « son » chef ? Des lunchs à l’école et de covoiturage.


À défaut de souveraineté dans l’immédiat, où sont les raisons essentielles, existentielles pour un nationaliste de voter pour le PQ ?


Où sont les idées fortes sur l’immigration, la laïcité, la langue, l’identité ?


Le PQ joue au gentil parti progressiste 2.0, branché sur les milléniaux, « givré », « full cool », faisant une fausse lecture de l’épisode de la charte des valeurs, tétanisé par la peur d’être accusé de ne pas être « ouvert ».


Le PQ perd son âme, dit-il. On ne le reconnaît plus. La défense inspirée de la gestion de l’offre fut un cadeau des circonstances.


Vous auriez tort de croire que ce monsieur est un baby-boomer de 70 ans, nostalgique de Jacques Parizeau.


Il a 40 ans et s’estime assez représentatif de ces gens qui habitent le 450 ou le 418 – aujourd’hui des terres « caquistes » –, et qui étaient la clientèle naturelle du PQ lors de sa dernière victoire majoritaire, quand il obtint... 43 % des votes... en 1998.


Je fais partie, dit-il, de ceux que vous devez convaincre, mais vous ne me parlez plus...


Égarés ?


Comment lui donner tort ?


Comment ne pas avoir le sentiment que cette campagne sans aspérités, qui sent la lavande et le patchouli, semble viser ceux que Richard Martineau appelle « les petits lapins » ?


En début de campagne, M. Lisée a lancé un appel aux souverainistes « égarés ». Plus rien depuis.


Et si ces gens étaient restés les mêmes ? Et si c’était plutôt le PQ qui s’était égaré ?