Pour lutter contre le coronavirus, faut-il nous traquer via nos smartphones ?

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On nous fait accepter le Big Brother sanitaire au nom de la pandémie

 Pour suivre la progression du Covid-19 et de futures épidémies, la Commission Européenne discute avec les opérateurs mobiles, pour pouvoir accéder aux données de localisation de nos smartphones en Europe, sur le modèle de ce qui se fait déjà en Asie, mais avec quelques différences marquantes, côté vie privée.


 - Cédric Ingrand



Accéder à la localisation des malades pour comprendre - à l'échelle de l'Europe - comment se répand le virus. Voilà en une phrase ce que voudrait mettre en place Thierry Breton, commissaire européen, qui organisait aujourd'hui une rencontre en vidéoconférence avec l'essentiel des opérateurs mobiles du continent, et la GSMA, le syndicat qui représente l'industrie mobile toute entière.


Un projet qui ne serait pas nouveauté à proprement parler, plutôt une version bien plus light de choses déjà vues ailleurs : on sait que le procédé a servi en Chine, en parallèle à une stratégie de confinement généralisé. En Corée-du-Sud, c'est à une politique de tests de dépistage administrés à grande échelle que la géolocalisation a été utilisée, ce qui aurait même permis au pays d'éviter d'en passer par le confinement. Mais dans les deux cas, c'est une géolocalisation précise et nominative de chaque malade qui été mise en place, pour remonter dans leurs déplacements, comprendre où ils étaient et avec qui ils auraient pu être en contact, et considérer ces personnes comme de potentiels cas à risque. 




En Corée, chaque cas déclaré est ainsi affiché sur une carte disponible pour tous, sur un site dédié. Surtout, les personnes mises en quarantaine voient leur localisation suivie en quasi-temps réel, pour vérifier - avec d'autres données - qu'elles se conforment bien à l'ordre de confinement, et ne sortent pas de chez elles, sous peine d'amendes massives. En Chine aussi, la géolocalisation a permis de vérifier que les consignes qui interdisaient les déplacements dans le pays étaient bien suivies. Mais les deux pays ont - dans des modalités très différentes - des normes de contrôle social et de civilité qui diffèrent beaucoup des nôtres. De quoi soulever jusqu'aux objections du gouvernement quand on lui suggère de répliquer les mêmes solutions chez nous.




eric bothorel ⌨️@ebothorel


"La Corée du sud ne se contente pas uniquement de tester les personnes. Elle a généralisé le tracking des données personnelles."

Comme @olivierveran , je ne suis pas favorable à nous ruer sur la collecte de datas et au tracking de masse.



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Un "tracking" européen compatible avec la vie privée



Dans ses discussions avec les opérateurs, Thierry Breton semble vouloir devancer craintes et critiques : pour lui, l'utilisation des données des opérateurs sur les déplacements de leurs abonnés devront être anonymisées. Surtout, ce ne sont pas les communications elles-même qui seraient analysées, mais ce que l'on appelle les méta-données, toutes les données qui entourent nos usages du mobile, dont leur localisation. De quoi analyser dans ses grandes lignes la propagation de l'épidémie, plutôt qu'un malade à la fois.


Dans un communiqué, la commission le précise : les données fournies par les opérateurs seraient là pour "contribuer à l’analyse des modèles de diffusion du coronavirus, d’une manière qui soit pleinement conforme au RGPD et à la législation relative à la vie privée (...) ". Une précision utile, mais surtout logique : on verrait mal, même face à une épidémie, l'Europe aller à l'encontre des protections d'un règlement dont elle était l'auteur.