Une lectrice porte à notre attention ce texte, plus que jamais pertinent, de l'abbé Raymond Gravel, paru dans Le Devoir et repris aussitôt sur Vigile en 2006
Depuis plusieurs années, dans nos sociétés dites laïques, des dirigeants, des gouvernants, des juges, des personnes qui occupent des postes de responsabilités voudraient bien bannir le mot «Noël» du temps des Fêtes, sous prétexte qu'il comporte une connotation religieuse chrétienne.
Il est vrai qu'à l'origine de la fête, on célébrait le solstice d'hiver, Solis invecti, moment de l'année où les jours commencent à allonger et que les chrétiens ont récupéré pour en faire la fête de la naissance du Christ, Natalis dies, que Pâques a révélé comme l'étoile du matin, le soleil de la justice, dans tout l'Empire romain du IVe siècle.
Si, en français, le mot «Noël» a conservé à la fois son origine païenne (du grec néos hélios, nouveau soleil) et sa transformation chrétienne (du latin Natalis dies, nativité), contrairement aux autres langues latines qui ont adopté son étymologie latine seulement (Natal en portugais, Natividad ou Navidad en espagnol et Natale en italien), il m'apparaît évident que, dans les pays de langue française, on peut continuer à utiliser le terme de Noël, parce que celui-ci correspond à tout ce qu'on veut bien lui apposer comme signification.
La fête qui s'adapte
Alors, pourquoi la fête de Noël ne serait-elle pas l'occasion d'une réconciliation, puisque chacun y trouve son compte? Qu'on soit chrétien, athée, agnostique ou croyant d'autres confessions, la fête de Noël peut s'adapter à toutes les cultures et à toutes les religions.
Ce peut être la fête de la lumière pour toutes les populations de l'hémisphère Nord, qui illuminent leurs maisons, leurs arbres et leurs rues par des décorations de toutes sortes; ce peut être la fête des enfants, qui attendent fébrilement la visite du bon vieux père Noël, qui descend une fois l'an pour distribuer allègrement ses cadeaux; ce peut être la fête des familles, qui se retrouvent, qui se rassemblent et qui échangent des voeux autour d'une table bien garnie; ce peut être la fête des pauvres, qui bénéficient, en cette période de l'année, de la générosité des riches et des bien nantis; ce peut être enfin la fête de la naissance du Christ, moment où les chrétiens de toutes les dénominations célèbrent leur Dieu, qui renaît sans cesse dans l'aujourd'hui de leur histoire.
Par ailleurs, quel que soit le sens qu'on donne à Noël, c'est toujours une fête de l'Amour, où on oublie nos rivalités, nos disputes et nos divergences pour célébrer ensemble ce qui nous unit: la Vie.
Si Noël a su s'adapter, à travers les siècles, aux différentes cultures et traditions, pourquoi voudrait-on aujourd'hui l'amputer, au nom d'un accommodement raisonnable, de ses lumières, de ses boules, de sa crèche, de ses cantiques, de son réveillon et de toutes ses manifestations? Qu'il s'agisse de la naissance du soleil pour les uns ou de la naissance du Christ pour les autres, il n'en demeure pas moins que c'est la lumière qu'on célèbre, la lumière qui éclaire, qui réchauffe, qui nous fait nous regarder les uns les autres et qui nous invite à plus d'humanité.
Se souhaiter joyeux Noël, c'est se souhaiter de renaître à la lumière de l'accueil, de l'ouverture, de la tolérance, de la paix, de la réconciliation, de l'espérance et de l'Amour.
Mais peut-on encore célébrer Noël? Pour les uns, les non-croyants, comme pour les autres, les croyants, il faut que nos souhaits deviennent réalités; sinon, ils ne sont que vanités et Noël ne peut être célébré, car même après deux mille ans de christianisme, tout reste encore à réaliser: «En effet, bien que nous chantions: "Gloire à Dieu dans les cieux et paix sur la terre", il n'y a aujourd'hui ni gloire de Dieu ni paix sur la terre. Aussi longtemps que cela reste une faim encore inassouvie, et tant que nous n'aurons pas déraciné la violence de notre civilisation, le Christ n'est pas encore né.» (Gandhi)
Joyeux Noël!
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Raymond Gravel
Prêtre et député fédéral de Repentigny
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