Nous avons été nombreux au Québec à ridiculiser l’idée de mur de Donald Trump. Quelle idée odieuse, simpliste et farfelue que de dépenser des milliards pour bâtir un mur entre deux pays ! Or, je commence à croire qu’il y a aussi une part de ridicule dans l’autre extrême : un pays où un petit chemin de terre transforme la frontière en passoire.
Dans le cas du Canada, nous commençons à avoir de véritables motifs d’inquiétude. Si vous décortiquez les propos tenus cette semaine par le ministre David Heurtel, le petit chemin de terre Roxham à Lacolle semble être devenu mondialement connu.
Le ministre québécois de l’Immigration a apporté des précisions importantes concernant la crise des migrants. D’abord sur l’ampleur. Déjà à la mi-avril, le Québec a accueilli trois fois plus de migrants illégaux que l’an passé à pareille date.
Les évaluations de son ministère prédisent que nous pourrions connaître des journées de 400 arrivants durant la belle saison qui approche.
La faute de Trump ?
Le ministre nous a aussi dressé le nouveau portrait des migrants tel qu’il se dessine en 2018. Radicalement différent de l’an dernier. En 2017, nous avions été habitués à voir arriver des gens ayant passé plusieurs années aux États-Unis, ayant obtenu un statut de protection temporaire.
Ceux-ci venaient au Canada sous la menace de Donald Trump de les expulser. Parmi eux, beaucoup d’Haïtiens qui avaient quitté leur pays après le tremblement de terre.
Les plus récents arrivants n’ont jamais vécu aux États-Unis et n’y ont jamais eu de statut. Ils sont arrivés à un aéroport du nord-est des États-Unis avec une idée précise en tête : traverser vers le Canada et y demander un statut de réfugié. Plusieurs arrivent du Nigéria. Rien à voir avec Trump.
Il s’agit d’un changement majeur puisque cela revient à dire que ces gens ont entendu parler du chemin Roxham à partir de l’autre bout de l’Afrique.
Cela revient aussi à dire que la facilité d’entrer au Canada par un chemin de terre est devenue une affaire mondialement connue.
L’invitation de Trudeau
Cela veut dire que l’appel à tous les mal pris du monde lancé maladroitement sur les réseaux sociaux par Justin Trudeau a eu cet immense écho.
Et depuis ce jour, le gouvernement canadien n’a jamais pu retomber sur ses pattes et s’occuper adéquatement de la frontière. Cette fois-ci, ce n’est plus la faute de Trump, mais de Trudeau !
Le gouvernement canadien n’a rien fait de valable depuis un an. Le gouvernement québécois lance un cri d’alarme poli et doux, mais c’est quand même un cri d’alarme. Justifié.
Au Canada, la demande d’un statut de réfugié devrait être étudiée en 60 jours. C’est la loi. Avec cette entrée massive, les délais ont allongé à deux ans ! Sans parler du temps pour rendre une décision et des délais d’appel. Une personne pourrait vivre quatre ou cinq ans ici, avoir deux ou trois enfants en sol canadien, avant que son dossier soit finalisé.
Qui osera les expulser ensuite, même s’ils ne respectent aucun critère ?