News of the World: le scandale s'étend aux États-Unis

Actualité internationale - L'affaire Murdoch



Richard Hétu, collaboration spéciale La Presse (New York) - Le scandale des écoutes téléphoniques du News of the World a traversé l'Atlantique et atteint les États-Unis, où l'empire médiatique de Rupert Murdoch possède quelques-uns de ses joyaux les plus prestigieux, influents et profitables.
À la demande d'élus démocrates et républicains du Congrès, le FBI a ouvert une enquête pour déterminer si le groupe de Murdoch, News Corporation, a cherché à pirater le téléphone de victimes du 11 septembre aux États-Unis.
Dans une lettre adressée à Robert Mueller, directeur du FBI, le représentant républicain de New York, Peter King, a notamment repris les allégations publiées par le journal britannique Daily Mirror selon lesquelles le défunt News of the World aurait offert de l'argent à un ex-policier de New York en échange du numéro de téléphone de victimes du 11 septembre et de détails concernant les appels que celles-ci ont passés ou reçus dans les jours qui ont précédé les attentats.
«Si ces allégations sont prouvées, une telle conduite mériterait des accusations criminelles» pour tentative de corruption d'un fonctionnaire et violation de la loi sur les écoutes téléphoniques, écrit l'élu de Long Island, qui est président de la commission de la Chambre des représentants sur la sécurité intérieure.
Robert Menendez et Frank Lautenberg, sénateurs démocrates du New Jersey, et leur collègue de Virginie-Occidentale, Jay Rockefeller, avaient déjà réclamé une enquête sur News Corporation. Contrairement à Peter King, ils ont souvent critiqué Rupert Murdoch, qui appuie plusieurs causes conservatrices et politiciens républicains, notamment par le truchement de la chaîne d'information Fox News, du quotidien New York Post et de la page éditoriale du Wall Street Journal.
Il y a plus d'une semaine, Rupert Murdoch a fermé News of the World dans l'espoir d'apaiser la fureur soulevée en Grande-Bretagne par les révélations sur les agissements de ce journal. Peine perdue. Au cours de la semaine, d'autres journaux de l'empire du magnat australo-américain, le Sun et le Sunday Times, ont également été accusés de pratiques non éthiques et criminelles.
Aux États-Unis, l'enquête du FBI pourrait bien ne pas être la seule répercussion de l'affaire. Le scandale risquait déjà d'éclabousser le Wall Street Journal, le quotidien national le plus important des États-Unis, dont Rupert Murdoch est devenu propriétaire en 2007, lorsqu'il a acheté le groupe de presse Dow Jones pour 5 milliards de dollars.
Le groupe Dow Jones et le Wall Street Journal sont aujourd'hui dirigés par Les Hinton, ancien président directeur de News International, propriétaire du défunt News of the World. À ce titre, Hinton a juré en 2007 devant une commission parlementaire britannique que les écoutes téléphoniques de l'hebdomadaire n'étaient le fait que d'un seul journaliste.
Cette pratique était courante au News of the World, mais elle s'étendait peut-être également au Sun et au Sunday Times, deux autres journaux sur lesquels Hinton a régné. Que savaient vraiment Les Hinton, Rupert Murdoch et compagnie de ces pratiques, et quand l'ont-ils su? Cette question renvoie évidemment à une affaire célèbre aux États-Unis, celle du Watergate, à laquelle plusieurs journalistes et commentateurs américains ont fait allusion dans la foulée du scandale des écoutes téléphoniques en Grande-Bretagne.
«Le Watergate de Murdoch?» C'est le titre d'un article publié cette semaine dans l'hebdomadaire Newsweek et signé par Carl Bernstein, qui a joué un rôle majeur, avec Bob Woodward, dans la chute de Richard Nixon.
Bernstein écrit: «Les circonstances des pratiques présumément illégales de News Corp ressemblent plus qu'un peu aux méthodes de Richard Nixon, qui a orchestré une conspiration criminelle dans laquelle il s'arrangeait pour ne rien savoir de nombreux actes illégaux alors que lui-même autorisait des pratiques qui menaient naturellement à des comportements illégaux et inconstitutionnels.»


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