Jacques Parizeau (1930-2015)

"Monsieur" n'est plus

Tribune libre

Avec le décès de Jacques Parizeau, c’est tout un pan de l’histoire du mouvement souverainiste québécois qui disparaît. Et avec lui, la détermination sans borne avec laquelle il a consacré sa vie à la cause souverainiste. À preuve cette citation de celui que l’on surnomma « Monsieur » en 1997, soit deux ans après la défaite crève-cœur du référendum de 1995 : « Parce que c’est certain qu’il y aura une prochaine fois. On n’arrête pas comme ça le désir d’indépendance, lorsque l’idée a progressé avec autant de force au sein d’un peuple, juste en disant que ce peuple-là n’existe pas. »


Moins d’un an avant sa mort, en août 2014 à Montréal, à l’occasion d’un congrès de militants indépendantistes, il répétera que le Parti québécois n’a que lui à blâmer pour ses insuccès dont la cause tient à sa propension à cacher ses motivations. «À force de brouiller les cartes, de toujours passer à côté et de cacher ce qui est l’objectif même du mouvement souverainiste, il ne faut pas s’étonner qu’à un moment donné, tout ça se dissout.»

Jacques Parizeau aura incarné l’homme d’une idée tout au cours de sa vie, à savoir l’accession du Québec à son indépendance. Malheureusement, il n’aura pu assister à la réalisation de son rêve. Toutefois, on peut se consoler qu’il nous ait tracé la voie…Pour cela, « Monsieur », nous vous sommes extrêmement reconnaissants!

En guise de tableau de l’homme, je vous laisse sur ces citations de monsieur Parizeau parues sur le site de vigile.net le 5 novembre 2009 :

« La souveraineté telle que nous la concevons est le contraire du repli sur soi. » - 1994

« La souveraineté du Québec, c’est le prolongement de cette volonté d’ouverture, de participation au concert des nations, aux échanges des idées, des cultures et des produits. » - 1994

« Notre tâche donc est de convaincre ces Québécois qui ont le goût et la volonté de prendre en main leur destinée qu’il n’y a qu’une façon d’être plus autonome, c’est d’être souverain. » - 1994

« Plusieurs d’entre vous seront surpris d’apprendre qu’à ce jour, la Constitution canadienne et les institutions canadiennes refusent de reconnaître l’existence des sept millions de Québécois en tant que nation, en tant que peuple, ou en tant que société distincte. » - 1995 (devant l’Institut France-Amérique)

« Toute l’histoire du Québec, avant même la bataille des plaines d’Abraham, est une quête : celle de la reconnaissance de ce que nous sommes et de l’égalité avec les autres peuples. » - 1995

« La force politique du Québec au sein du Canada s’efface progressivement. Il faut en sortir. » - 1995

« Son intervention dans notre débat est massive, les budgets illimités, les scrupules inexistants. » - 1995 (sur la stratégie du gouvernement fédéral)

« Car si on se dit non, on sera de nouveau condamnés à la stratégie de la survivance, au repli défensif pour tenter de protéger notre langue et notre culture avec les moyens
du bord : ceux d’une province, ceux d’un peuple non reconnu, d’un peuple condamné à être de plus en plus minoritaire, avec tous les risques que comporte le statut minoritaire. » - 1995

« Le camp du Non a réussi à dépenser en une journée presque la somme totale respectée par le camp du Oui pour toute la campagne. Les infractions massives infligées à notre cadre démocratique ne seront pas oubliées. » - 1995

« J’ai changé d’option quand je me suis rendu compte que dressés l’un contre l’autre, le Québec et le Canada se neutralisent, n’arrivent plus à bouger, s’enfoncent dans des conflits souvent dérisoires. Je n’en veux pas à ceux qui ont décidé d’être canadiens. Moi j’ai choisi, comme bien d’autres, d’être québécois. » - 1996

« Est québécois qui veut l’être. » - 1996

« Bien des années plus tard, en voyant avec quelle facilité la Slovaquie se sépare paisiblement de la République tchèque avec un simple vote de son parlement, j’aurai comme un coup de coeur. » - 1997

« Je demeure convaincu que le seul critère important quant à l’orientation du vote sur la souveraineté, c’est la langue. Ce n’est pas ni la race, ni la couleur ; c’est la langue. Je connais beaucoup de souverainistes d’origine haïtienne alors que je n’en connais aucun chez les Jamaïcains... » - 1997

« On a trop souvent reproché à la France de nous avoir abandonnés. C’est oublier les difficultés de l’époque qui contraignaient la France à s’occuper d’affaires plus immédiates. C’est oublier surtout la volonté du conquérant britannique de briser tous les liens qui pouvaient exister entre la France et son ancienne terre d’Amérique. »

« La société britannique fonctionne naturellement en anglais et d’aucune façon on ne s’imaginerait un instant qu’elle soit raciste ou xénophobe. [...] Je sais que les adversaires de l’idée de souveraineté nous disent "Vouloir fonctionner en français dans cette société, cela a des relents, peut-être de racisme ou de xénophobie". Il faut répondre : non, non, c’est la normalité des choses. »

« Qu’est-ce qu’un Québécois ? Un Québécois, c’est quelqu’un qui habituellement habite au Québec, accepte les règles de vie de cette société, de plus en plus aime ces règles, veut être québécois, accepte de l’être, indépendamment de ses origines. Est-ce que j’ai dit les règles ? Je pourrais dire les valeurs. »

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Henri Marineau2033 articles

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Né dans le quartier Limoilou de Québec en 1947, Henri Marineau fait ses études classiques à l’Externat Classique Saint-Jean-Eudes entre 1959 et 1968. Il s’inscrit par la suite en linguistique à l’Université Laval où il obtient son baccalauréat et son diplôme de l’École Normale Supérieure en 1972. Cette année-là, il entre au Collège des Jésuites de Québec à titre de professeur de français et participe activement à la mise sur pied du Collège Saint-Charles-Garnier en 1984. Depuis lors, en plus de ses charges d’enseignement, M. Marineau occupe divers postes de responsabilités au sein de l’équipe du Collège Saint-Charles-Garnier entre autres, ceux de responsables des élèves, de directeur des services pédagogiques et de directeur général. Après une carrière de trente-et-un ans dans le monde de l’éducation, M. Marineau prend sa retraite en juin 2003. À partir de ce moment-là, il arpente la route des écritures qui le conduira sur des chemins aussi variés que la biographie, le roman, la satire, le théâtre, le conte, la poésie et la chronique. Pour en connaître davantage sur ses écrits, vous pouvez consulter son site personnel au www.henrimarineau.com





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2 commentaires

  • Henri Marineau Répondre

    2 juin 2015

    Un des grands mérites du professeur est de donner confiance à ses élèves en leur insufflant le désir de relever des défis. En écoutant les nombreux témoignages des personnes qui ont côtoyé Jacques Parizeau, un élément est apparu souvent, à savoir l’enseignant ancré en lui.
    De François Gendron à Pauline Marois en passant par Louise Beaudoin sans oublier son chef de cabinet, Jean Royer, tous ont fait ressortir les qualités de pédagogue exceptionnelles de Monsieur Parizeau lorsqu’ils se retrouvaient devant des défis qui leur créaient des inquiétudes. Professeur aux HEC, les étudiants assistaient à ses cours même s'ils n'y étaient pas inscrits, tellement on voulait apprendre de lui.
    Quand on lui demandait ce qui le dépeignait le mieux, Jacques Parizeau répondait que son penchant pour l’enseignement était sans contredit le talent de pédagogue qu’il avait développé lors de ses passages aux HEC. Monsieur le professeur aura été un de ceux, sinon le plus grand, qui nous aura révélé à tous que nous étions capables comme Québécois de relever les plus grands défis.
    Et, quand vous avez atteint comme professeur un si haut niveau de performance, c’est que vous avez accompli avec succès votre mission…Adieu Monsieur le professeur!

  • Archives de Vigile Répondre

    2 juin 2015

    Il faudrait aussi parler de sa présence et celle d'André Marier dans la création de notre Québec moderne celui qui nous a sorti de l'asservissement (avait) à l'étranger. je dis avait car le Québec est encore en voie de se donner servilement à des voleurs de pays.