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«Même Toe Blake parlait bien français» - Serge Savard

Serge Savard est déçu, certes, mais pas surpris.

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Jonathan Bernier - À l'image de la majorité des observateurs et des partisans francophones du Canadien, Serge Savard s'est montré fort déçu que Pierre Gauthier fasse d'un entraîneur unilingue anglophone le successeur de Jacques Martin.
Directeur général du Canadien de 1983 à 1995, Savard ne remet pas en question les aptitudes de travail ni le talent de Randy Cunneyworth.
Joint au téléphone, Savard lui reproche plutôt de ne pas être en mesure de s'adresser à un groupe d'amateurs qui constitue la majorité des partisans de l'équipe.
« L'entraîneur du Canadien s'adresse aux médias et, par conséquent, à la population chaque jour. C'est primordial qu'il soit capable de s'exprimer dans les deux langues, insiste-t-il. Dans mon temps, jamais une chose pareille n'aurait été permise. Ronald Corey ne m'aurait jamais laissé faire. »
MacNeil, le dernier
Pourtant, Savard n'est-il pas celui qui avait rapatrié Bob Berry lors de son entrée en fonction à l'été 1983?
« Berry parlait français, tient-il à rectifier. Il a grandi à Ville Mont-Royal. Dans sa jeunesse, il a évolué avec les Maple Leafs de Verdun. »
Savard indique qu'il faut remonter à Al MacNeil, embauché à titre intérimaire (tout comme Cunneyworth) en décembre 1970, pour retrouver le dernier pilote unilingue anglophone du CH.
« Il n'avait été engagé que pour finir la saison », précise-t-il.
Capitaine du tricolore de 1979 à 1981, Savard va même plus loin.
« Jusqu'à hier (samedi), MacNeil avait été le seul entraîneur unilingue anglophone depuis Dick Irvin (de 1940 à 1955). »
Et Toe Blake?
« Même Toe Blake parlait bien français. Sa mère était une francophone originaire du nord de l'Ontario. Ce n'est pas pour rien que son véritable prénom était Hector », souligne celui qui a joué sous ses ordres à sa saison recrue.
Philosophie de longue date
Serge Savard est déçu, certes, mais pas surpris.
Le « Sénateur » estime que cette décision s'inscrit dans la foulée de la philosophie adoptée par l'organisation à son départ, en 1995.
« À partir de ce jour-là, le Canadien a arrêté de repêcher dans la LHJMQ. Ce qui était pourtant vital pour nous à l'époque. Du moins, à talent égal », rappelle-t-il.
Une priorité devenue si importante que, en 1993, 13 des 27 noms de joueurs gravés sur la coupe Stanley étaient Québécois.
« Quand je suis arrivé, en 1983, il n'y avait plus que deux ou trois francophones. J'ai renversé la vapeur. Tant et si bien qu'à un moment donné, nous en comptions une douzaine », lance-t-il à ce sujet.
Cependant, Savard note une différence entre les joueurs étrangers d'aujourd'hui et ceux de son époque : l'ouverture de ces derniers à la langue parlée dans leur terre d'accueil.
« Ils sont plusieurs à avoir appris le français. D'ailleurs, Ken Dryden, Bob Gainey, Larry Robinson le parlaient couramment. »
Pour Savard, multiplier le nombre de joueurs issus du coin n'était pas seulement une question d'implication au sein de la communauté. Cette priorité cachait également une stratégie.
« Les joueurs locaux sont obligés de rester dans le coin une fois la saison terminée. C'est tannant de devoir répondre tout l'été aux questions des partisans insatisfaits. »
Aujourd'hui, la plupart d'entre eux prennent effectivement la poudre d'escampette au lendemain de l'élimination. Cette motivation supplémentaire n'est, par conséquent, plus présente.




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