Loi 21 : Un juge anti-laïcité entend la cause et Sonia Lebel se traîne les pieds

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Bastien dénonce la mollesse caquiste sur le dossier de la loi 21

La cause sur la loi 21 est présidée désormais par un juge anti-laïcité et la procureure générale, Sonia Lebel, se traîne les pieds dans cette affaire.


Le 19 décembre la juge en chef adjointe de la Cour supérieure, Eva Petras, a dessaisi sa collègue Johanne Mainville du dossier de la loi 21. Celle-ci est la femme du juge Robert Mainville, de la Cour d’appel du Québec, qui avait rendu l’opinion la plus favorable à la loi 21 dans la cause en suspension de celle-ci Le 12 décembre dernier. Elle a plutôt confié l’affaire à Marc-André Blanchard, un magistrat qui a rendu une décision défavorable à la loi libérale sur la neutralité religieuse de l’État. Celle-ci, très minimaliste, exigeait qu’on reçoive et qu’on donne un service à visage découvert.


Il y a plus d’une centaine de magistrats à la Cour supérieure pour le territoire de Montréal. Or il fallait que le dossier tombe dans les mains de celui pour qui, en 2018, le fait d’exiger qu’une femme enlève sa burqa ou son niqab pour recevoir ou donner un service public causait une grave injustice. Selon les mots du juge à l’époque, « un préjudice irréparable sera causé aux femmes musulmanes à partir du 1er juillet si la suspension n’est pas accordée et il est urgent d’agir ». Pas plus que je ne crois au père noël, je ne crois à une coïncidence dans le choix de ce magistrat au lieu de la juge Mainville pour entendre la cause sur la loi 21.


On notera par ailleurs que le juge est très avenant avec IMK, les avocats de l’Association des Canadiens musulmans. Il leur propose constamment d’envoyer, s’ils en ont besoin, des citations à comparaître pour leur permettre d’obtenir des documents gouvernementaux et faire comparaître des témoins. Il va au-delà des demandes des plaignantes, ce qui est pour le moins inhabituel. A l’inverse il se montre intraitable avec les avocats défendant la loi 21 et a même refusé qu’un père d’un élève ayant une enseignante portant le voile puisse intervenir dans la cause pour défendre la loi. Cela fait en sorte que les intervenants contre la loi sont douze contre quatre qui la défendent.


Dans ce contexte, il est déplorable de voir la façon dont cette affaire est menée par l’équipe de la procureure générale. Lors de l’audience en Cour d’appel l’automne dernier, le procureur Éric Cantin a erré concernant le caractère prétendument discriminatoire de la loi 21. Référant aux enseignantes qui ne pouvaient enseigner voilées, la juge Dominique Bélanger lui a demandé s’il n’était pas « clair ici qu’il y a des droits fondamentaux qui sont brimés ». « Peut-être » a répondu l’avocat Cantin. Ce qu’il fallait plaider est que la prestation de service sous influence religieuse brime la liberté de conscience des élèves. Au lieu de cela nous avons droit à une admission que les droits fondamentaux des musulmanes sont peut-être bafoués.


Pour revenir à la Cour supérieure, alors que les opposants vont faire venir au moins huit experts pour témoigner, le gouvernement n’en a qu’un. Il devait remettre son rapport en décembre dernier mais on attend toujours. Heureusement deux groupes pro-laïcité se sont joints à la cause et présentent trois autres experts. Il reste qu’il y aura huit experts anti-laïcité contre quatre pour celle-ci, donc deux fois plus de temps et de gens pour attaquer la loi 21 que pour la défendre.


Le gouvernement entendait par ailleurs déposer une requête en irrecevabilité visant la plainte, frivole à certains égards, d’une des opposantes à la loi 21, Andréa Lauzon. Fervente catholique, celle-ci allègue dans un document déposé en cour qu’elle a le droit de « s'habiller de façon conforme à ses valeurs chrétiennes, par exemple en portant des robes ou des jupes ». Il s’agit d’un élément essentiel de son identité. Qu’est-ce que tout cela a à voir avec loi 21? Or, le 20 janvier dernier, après avoir demandé que la plainte ne puisse être entendue, les procureurs du gouvernement ont annoncé qu’ils avaient reçu instruction de laisser tomber leur requête en irrecevabilité. Deux choses sont ici possibles, soit il y a un manque de ressources, soit il y a un manque de volonté politique. En tout cas cette volte-face indique un manque flagrant de sérieux.


Quand j’ai révélé les agissements répréhensibles de la juge Duval-Hesler, lorsque la Cour d’appel entendait la demande de suspension de la loi 21, j’avais demandé à la procureure générale Sonia Lebel de demander la récusation de la juge en chef. Madame Lebel ne l’a pas fait et, comme on pouvait le prévoir, Madame Hesler a rendu un jugement minoritaire défavorable à la loi 21.


Nos adversaires sont déterminés, ils sont mobilisés comme jamais. Depuis l’adoption de la loi 21 jusqu’à aujourd’hui, Sonia Lebel fait preuve de tiédeur dans ce dossier. La défense de la loi 21 doit pourtant être la priorité absolue. Elle doit s’engager à en faire davantage et nous rassurer à ce sujet. Si elle continue à se traîner les pieds, le premier ministre François Legault doit mettre à sa place quelqu’un qui va sauter dans le ring et se battre round après round pour sauver la loi 21.


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Frédéric Bastien167 articles

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Titulaire d'un doctorat en relations internationales de l'Institut universitaire des hautes études internationales de Genève, Frédéric Bastien se spécialise dans l'histoire et la politique internationale. Chargé de cours au département d'histoire de l'Université du Québec à Montréal, il est l'auteur de Relations particulières, la France face au Québec après de Gaulle et collabore avec plusieurs médias tels que l'Agence France Presse, L'actualité, Le Devoir et La Presse à titre de journaliste. Depuis 2004, il poursuit aussi des recherches sur le développement des relations internationales de la Ville de Montréal en plus d'être chercheur affilié à la Chaire Hector-Fabre en histoire du Québec.