Le système dans lequel nous vivons met de plus en plus de pression pour nous forcer à utiliser les nouvelles technologies. Le mot « forcer » est peut-être un peu fort, me direz-vous. Après tout, ne sommes-nous pas consentants ? C’est peut-être donc de là que le changement doit naître.
Nous effectuons nos transactions bancaires en ligne, nous recevons nos factures en ligne, nous achetons nos billets de cinéma sur un écran tactile plutôt que de faire affaire avec un être humain. Et ensuite, on se demande pourquoi les gens perdent leur emploi. Ah, mais on nous dit qu’il s’est créé x emplois au pays dans les x dernières semaines ! Le taux de chômage est à la baisse ! Mais remplace-t-on les emplois de service à la clientèle dans les banques et les emplois des facteurs par des emplois à temps partiel au salaire minimum ? Et que faisons-nous des gens désillusionnés qui cessent carrément de chercher du travail ? Ça fait baisser le taux de chômage, ça.
L’espèce humaine en est une sociale. L’interaction avec nos semblables est une base fondamentale de qui nous sommes en tant qu’humains. Si, plutôt que de côtoyer des humains, nous côtoyons des machines, que reste-t-il ?
Et on nous incite à lire le journal en ligne plutôt qu’en format papier. C’est bon pour l’environnement, qu’on nous dit. Ce n’est pas ce que nous apprenait Charles Côté de La Presse, dans son article « Votre portable consomme comme deux frigos » du 26 août 2013. Il écrivait : « En fait, si on tient compte de toute l’infrastructure de télécommunication qui est nécessaire pour rendre disponibles et diffuser des contenus 24 heures sur 24, un appareil mobile consomme autant d’électricité que deux frigos, selon le spécialiste américain Mark P. Mills. » J’aimerais également ajouter que les appareils électroniques sont conçus de façon à devenir désuets rapidement. Et ce, de façon préméditée, forçant ainsi les consommateurs à en acheter de nouveaux.
Va-t-on nous faire croire que cette consommation excessive est bonne pour l’environnement ? Ah, mais on peut recycler, pourra-t-on nous rétorquer. D’une part, les composantes des appareils électroniques ne sont pas toutes recyclables. D’autre part, il peut prendre des millénaires à la Terre pour créer les composantes nécessaires pour fabriquer les appareils électroniques. Les ordinateurs portatifs ne poussent pas dans les arbres ; le papier journal… oui ! Suffit de ne pas oublier de planter des arbres.
Si nous n’achetons pas le journal en format papier, si nous n’utilisons pas les services de Postes Canada, si nous n’aidons pas les employés des banques à conserver leur emploi, alors ces options qui s’offrent à nous cesseront d’exister.
Notre liberté en sera affectée. Il sera plus facile pour les grandes entreprises de nous contrôler puisque nous n’aurons plus aucune autre option sur laquelle nous rabattre, nous n’aurons plus de pouvoir de négociation. Les appareils électroniques seront fabriqués de manière à devenir désuets de plus en plus rapidement ; et nous dépenserons de plus en plus d’argent ; et il n’y aura rien que l’on pourra faire, à part sourire et acquiescer.
Or, il y a la musique. Les oeuvres d’art. La nourriture de l’esprit. Un album de musique enregistrée doit être respecté. Une oeuvre artistique n’est pas un pur produit comme un autre ; on ne doit pas la diviser ou en disposer sans égards. Un album est un tout. Alors lorsqu’on télécharge (légalement ou illégalement) les quelques pistes qui nous accrochent, on perd l’esprit de l’album, on perd la richesse de l’album. Et même si l’on télécharge un album en entier, on perd la pochette et le livret de l’album, qui font eux aussi partie du concept de l’album. Mais bien plus important encore, le fait d’avoir de la musique sur un appareil portable fait en sorte que nous écoutons la musique dans des contextes (par exemple dans l’autobus, en faisant son jogging, etc.) où les distractions externes nous empêchent d’accorder à la musique toute l’attention qu’elle mérite. On ne peut pas dans de telles circonstances apprécier la richesse et l’esprit de la musique. Moi, je préconise le vinyle !
Alors, il est vrai qu’il est important de voter lorsqu’il y a une élection, mais on peut également voter avec notre argent et avec nos choix, et ce, chaque jour de notre vie. Lorsque nous décidons des services que nous utilisons et au moment de prendre des décisions de consommation, nous déterminons le monde dans lequel nous vivrons demain. L’élite de la société n’a aucun pouvoir. Le peuple a tout le pouvoir. Suffit d’en prendre conscience.
Marco Saccaro est diplômé de la Faculté de gestion de l’Université McGil
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