Finance internationale

Les "pushers" de Wall Street

Les banques et les cartels de drogue, même combat !

Chronique de Richard Le Hir

Décidément, la crise financière n’a pas fini de nous en faire voir de toutes les couleurs.
En début de semaine, un article du New York Times, nous apprenait que la banque d’affaires Goldman Sachs avait mis sur pied un subterfuge permettant à certains pays tels la Grèce, le Portugal, l’Espagne, l’Italie et l’Irlande de maquiller leurs comptes publics pendant des années pour cacher le véritable état de leurs finances et pouvoir emprunter l’argent que la banque américaine mettait obligeamment à leur disposition.
Pour les pays emprunteurs, le subterfuge permettait de ne pas trop s’éloigner du critère de 3 % du PIB établi par le Traité de Maastricht comme limite supérieure des déficits, pour Goldman Sachs, il était source de juteux profits, et pour les « golden boys » qui l’avaient inventé et ceux qui recrutaient cette clientèle, la manne tombait du ciel sous forme de primes mirobolantes dépassant parfois pour une seule personne les 100 millions $ US.
Maintenant qu’il est éventé, les pays « bénéficiaires », et au premier chef la Grèce, voient leur « malhonnêteté » dénoncée devant la communauté internationale, se voient rappelés à l’ordre par la Communauté européenne et sa banque centrale qui les prient d’adopter illico les mesures de redressement radicales nécessaires, et vivent des heures difficiles devant l’impopularité des mesures d’austérité qu’ils ont dû décréter.
Cette nouvelle crise fait ressortir la faiblesse des institutions politiques européennes et ébranle la confiance dans l’euro qui a été en recul marqué toute la semaine sur tous les marchés de change. Dans certaines officines, on évoque même la possibilité que l’euro ne puisse y survivre, ou à tout le moins que certains pays membres de la Communauté soient obligés de se retirer de l’union monétaire européenne.
Or ce nouveau chapitre de la crise financière internationale a les mêmes origines que la première. En effet, c’est la titrisation des prêts hypothécaires à risque (subprimes) qui a gonflé le stock de liquidités des banques de Wall Street et qui a laissé entre leurs mains tout cet argent qu’il leur fallait ensuite prêter. Entre temps, les « p’tits joueurs », tels la Caisse de dépôt et placement du Québec et la banque nationale accumulaient, dans des circonstances qui restent encore à éclaircir, des titres (le fameux PCCA) qui allaient se révéler sans valeur lorsque la bulle spéculative immobilière éclata aux États-Unis.
À en juger par ses effets, tout cet argent est devenu une véritable drogue à laquelle les banques et leur personnel sont devenus « accros ». Et pour poursuivre sur cette analogie, comme c’est le cas pour la drogue, ils tentent de nourrir leur vice en le répandant. Les banques et les « golden boys » de Wall Street sont devenus des « pushers » de fric, et comme c’est également le cas pour la drogue, leurs activités sont cachées par le voile de la corruption en sous-main du pouvoir politique.
Qui eût pu jamais penser que les banques, ces institutions jadis pépères et ronronnantes, deviendraient un jour ces nouveaux bastions de la flibuste ? Les banques et les cartels de drogue, même combat ! Quelle époque !
En attendant, la prochaine fois que vous croiserez le regard fébrile d’un petit trafiquant de « coke » au détour d’une ruelle obscure, dites-vous qu’il s’agit peut-être d’un « golden boy » de Wall Street en stage de formation.


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