La présence Mi’kmaq est bien absente de l’Histoire du Canada anglophone et de la Nouvelle Ecosse, l’ancienne Acadie française.
Il est en effet difficile en remontant dans le passé, de trouver des références importantes, dans la presque totalité des textes de l’histoire coloniale anglaise de ce peuple amérindien. Au vu des traitements infligés à ces Premières Nations, les historiens anglophones ne peuvent pas avoir fait une omission si cruciale sans que cela ne nous interroge… Alors que la vie des Français d’Acadie a été largement répertoriée et bien décrite y compris au moment de leur inique déportation dans les colonies anglaises, pour la majorité d’entre eux.
Lors de l‘arrivée des Français avec Pierre Dugua de Mons et Samuel de Champlain en 1604, les Mi’kmaq/Micmac et leur chef Membertou qui vivaient dans la région située au bord de la baie, qu’ils avaient appelée tout simplement Baie des Français, à force de les voir aller et venir dans cette baie, (aujourd’hui baie de Fundy) les avaient accueillis avec bienveillance et sympathie, au moment de leur installation à cet endroit, lors de la construction du petit fort de Port Royal en 1605 puis très rapidement s’était créée avec eux une profonde amitié, elle ne s’est jamais démentie depuis, ils sont restés sans cesse présents à leurs côtés durant plus d’un siècle et demi, édifiant de vrais et solides liens d’amitié avec eux.
Ce peuple venu de France était arrivé en ami, et non en conquérant sur leur sol. Les Français avaient apporté le réel savoir-faire de leur pays, un savoir-faire qui leur a permis de rendre toutes ces terres fertiles, ajouté à leur travail acharné. Ils sont arrivés à cultiver toutes sortes de légumes ou de fruits inconnus jusqu’ici des Amérindiens, de ces régions… Les Mi’kmaq/Micmac auprès d’eux se sont beaucoup mieux nourris que lors de leurs seules chasses, pêches ou cueillettes…Ils ont toujours considéré les Français d’Acadie comme des frères, et lorsque l’adversité les submergeait, on les a chaque fois trouvés à leurs côtés ! Ils ont encore été là auprès des Acadiens, résistant tout autant qu’eux contre l’envahisseur anglo-saxon, les aidant pour tout y compris à s’emparer d’un bâtiment anglais, comme cela s’est produit dans le havre à l’étang, une goélette qui amenait du ravitaillement aux Anglais de Port Royal, - devenu Annapolis -, et tant de nombreuses autres actions de résistance ont été ainsi répertoriées, une résistance menée conjointement Acadiens et Micmac ! Ils étaient là aussi au moment où l’escadre du duc d’Anville, envoyée en 1646 par la France, était attendue pour tenter de reprendre la forteresse de Louisbourg.
Les Français avaient réussi à bâtir ce pays d’Acadie années après années entourés par les Mi’kmaq, malgré les mille déboires dus aux Anglais leur jalousant ce pays, et les terres qu’ils avaient défrichées grâce à un labeur intense sur plusieurs générations. Ces Français, devenus au fil des ans des Acadiens, ne désiraient qu’une chose, celle de vivre en paix et surtout de rester « Neutres » au milieu des différends existant entre les deux couronnes française et anglaise, jusqu’au moment où l’ennemi d’Angleterre s’attaquera directement à eux !
Cela dura ainsi plus d’un siècle malgré les Anglais qui ne cessaient à intervalles réguliers de s’emparer de leur pays et d’en chasser les Français, parce qu’au gré des différents traités, l’Acadie était ensuite rendue à la France.
La France s’était établie en Amérique septentrionale où elle avait créé la Nouvelle France comprenant dès 1605 l’Acadie, puis le Canada avec le fort de Québec en 1608 le long du Saint Laurent. Au fil des explorations menées par des Français peu ordinaires, qui s’élanceront à travers cet immense pays, en plantant des croix fleurdelisées au nom du Roi de France, au fur et à mesure de leurs avancées, la Nouvelle France s’agrandira sans cesse avec de nouveaux territoires, jusqu’à la Baie d’Hudson au Nord, jusqu’aux Rocheuses à l’Ouest et jusqu’au golfe du Mexique au Sud, lors de la découverte de la grande Louisiane. Mais cependant, la France et les Français n’avaient aucunement l’intention, et cela s’est confirmé tout le long que dura le siècle et demi du Régime français, de déposséder les Premières Nations ni de leur liberté ni des richesses de leur pays et encore moins de leurs coutumes ou de leur façon de vivre. Rien ne changea en effet pour elles dans leur façon de vivre, aussi longtemps que les Français restèrent. Cette entente s’est largement observée aux nombreux rapprochements amicaux entre ces peuples pourtant si différents, et même des rapprochements plus qu’amicaux eurent lieu sans étonner personne, lors des mariages franco-amérindiens. Des personnages fort connus comme Pierre Boucher en Nouvelle France qui avait épousé une Wendat, ou Charles de la Tour, lieutenant général d’Acadie une Mi’kmaq, pour seuls exemples.
Cependant lorsque de grands remous apparaissaient en Europe cela se répercutait inévitablement en Amérique septentrionale, ainsi au moment de la succession d’Espagne, cela se termina par le traité d’Utrecht en 1713 où la France dut céder aux Anglais, non seulement la Baie d’Hudson, mais également l’Acadie. Ces derniers s’empressèrent de la rebaptiser «Nouvelle Ecosse » comme ils l’avaient déjà fait une première fois en 1613, mais cette fois définitivement. Les Mi’kmaq avaient assisté aux cruautés que ces étrangers d’Angleterre ne cessaient de faire aux autres Abénaquis de Pentagouët, mais aussi à tous les Acadiens, les « French Neutral » comme ils les appelaient, dès qu’ils le pouvaient depuis un siècle. Ils redoutaient terriblement avec raison la victoire des Anglais et de ceux des colonies de Nouvelle Angleterre sur les Français d’Acadie, comprenant parfaitement que cela serait tragique aussi pour eux.
Le Traité d’Utrecht sonnera alors le glas de l’Acadie française.
Lorsque les Anglais occupèrent définitivement l’Acadie et la Baie d’Hudson au traité d’Utrecht en 1713, la population Mi’kmaq était alors importante ce qui permit sans doute à cette nation amérindienne de pouvoir résister et survivre, aux nombreuses attaques contre elle.
Dès lors, les Anglais, une fois installés en conquérants, ont pu bien plus aisément continuer à s’attaquer aux Acadiens, et les résistances et les luttes de ces derniers pour tenter de survivre ont été d’autant plus rudes, que ces nouveaux venus sur ce sol les détestaient. Certes ils étaient considérés comme d’affreux papistes, certes ils étaient aussi comme des frères avec les Sauvages, mais pire que tout ils détenaient -pour les avoir eux-mêmes défrichées- les meilleures terres ! Ils ne voulaient qu’une chose se débarrasser d’eux, ce qu’ils arrivèrent à faire en fin de compte avec une inhumanité peu commune, lors d’une déportation barbare et monstrueuse, avec ce « Grand Dérangement » en 1755. Les Mi’kmaq étaient encore présents aux côtés des Acadiens, au moment où a eu lieu ces épouvantables arrestations, un grand nombre d’entre eux réussit à échapper aux Anglais et à s’enfuir à travers les bois, avant même d’être embarqués de force sur les navires pour être déportés. Ils tentèrent de rejoindre la partie de la Nouvelle France encore française, à la fois par terre ou encore en tentant de suivre les fleuves et les rivières ainsi que la vallée de la Matapédia. Les Mi’kmaq partagèrent aussi le triste sort des Acadiens, au cours de ce terrible et glacial hiver de 1756-57 au camp des réfugiés de Miramichi, soutenus, autant qu’il le pouvait lui-même, par le lieutenant Charles de Boishébert et le régiment français.
Il s’était créé entre ces Français d’Acadie et les tribus Mi’kmaq une telle fraternité que chacun alors protégeait l’autre des attaques anglaises. Cette protection mutuelle était fondée sur cette longue et profonde amitié mais aussi sur l’admiration, le respect de la culture de l’autre. Cette alliance indéfectible développée entre ces Français et les Mi’kmaq provenait également de l’esprit profond de la diplomatie de la France, préconisant naturellement ce vivre ensemble, proposant ainsi sans aucune différence l’instruction des enfants des Amérindiens, autant que ceux des enfants des Français. C’est ainsi que parmi ces Premières Nations si certains désiraient se rendre en France, ils pouvaient le faire tout autant qu’un « naturel François ».
Les alliances nouées par les Anglais avec les tribus amérindiennes n’étaient pour la plus grande part fondées que sur leur propre avantage, et s’ils se sont alliés avec certaines tribus, souvent les plus belliqueuses, ces alliances basées sur le seul intérêt loin de toute véritable amitié, ne duraient que le temps, où les deux côtés y trouvaient leur bénéfice, comme avec les Iroquois, ces ennemis ancestraux des Mi’kmaq.
Les Iroquois (Odinossonis) appelés aussi peuple des Cinq Cantons à cette époque, n’étaient cependant ni pour les Anglais ni pour les Français ils étaient pour les Iroquois ! C’est pourquoi on les verra au long des années pencher pour les uns ou pour les autres selon leurs seuls intérêts.
Les Micmac/Mi’kmaq d’Acadie faisaient partie de la confédération Waban Aqui, ainsi que les Abénaquis et les Malécites. Ce peuple algonquin de la côte Nord-Est de l’Amérique du Nord se répartissait sur de nombreux territoires d’Acadie, de l’île Saint Jean, de Gaspésie, ou de Terre-Neuve… Ceux vivant dans la région de la Listuguj/ Restigouche et autour de la Baie des Chaleurs, portaient un saumon comme emblème. Pour ceux de la région de Miramichi leur emblème représentait un guerrier armé d’une lance et d’un arc. Certains habitaient sur l’île Royale, aujourd’hui appelée Cap Breton, les Micmac l’avaient dénommée Onamag, elle est devenue le siège de leur grand Sachem ; Ils vivaient de chasse, de pêche et de cueillette, de racines sauvages et de fruits secs, à l’automne comme la grande majorité des autres peuples Amérindiens, ils partaient pour la chasse au caribou. Parents avec les Abénaquis de Pentagouët de Nouvelle Angleterre et les Malécites du Nouveau Brunswick, ils n’étaient pourtant pas agriculteurs. Ils n’habitaient pas dans des Tipis en peau, mais dans des Wigwam coniques qui étaient fabriqués sur la base d’un treillis de bois d’épinette, recouvert d’écorces de bouleau. Sur le sol, ils disposaient des branches fines de sapins qu’ils recouvraient de confortables fourrures. Leurs wigwams pouvaient être démontés et remontés facilement selon les besoins de leurs déplacements. Les hommes et les femmes portaient des vêtements à franges fabriqués en peau de Caribou, ils portaient tous les cheveux longs, autant les uns que les autres. Ils se servaient de deux sortes de raquettes, les plus grandes pour la neige poudreuse, les plus petites lorsque la neige était dure. Les funérailles chez ses peuples Mi’kmaq donnaient lieu à des cérémonies qui rassemblaient toute la tribu, et qui se terminaient par un grand festin. Ils se noircissaient le visage pendant trois jours entiers en signe de deuil, pourtant ils n’avaient pas particulièrement soigné leurs malades vieillissants, ils ne le nourrissaient plus et le chaman pour activer le décès, versait de l’eau glacée au niveau du nombril des vieillards ! Selon les personnes, certaines préparaient eux-mêmes leur propre mort, sans doute pour l’activer, connaissant le peu de soin qu’ils apportaient aux mourants, car les malades pouvaient aussi être purement et simplement abandonnés à leur sort !
Depuis la main mise anglaise sur l’Acadie devenue alors Nouvelle Ecosse les dirigeants anglais avaient tout tenté pour mettre les tribus Mi’kmaq de leur côté et les séparer des Français. Ils instaurèrent dans ce but de leur faire signer des traités, visant à obtenir leur soumission ni plus ni moins à la domination britannique ! Pourtant un des gouverneurs Edward Cornwallis déclarera sans s’en cacher : « les traités ne valent rien, seule la force prévaudra » Et c’est ce qui se passera, puisqu’ils étaient là pour prendre les terres de ces « Indiens » et pour y établir le plus de colons possibles !
La résistance à la domination britannique s’est encore accrue car les gouvernements anglais ont continué à faire venir de nombreux colons anglophones, à leur concéder des terres, y compris des concessions faisant plusieurs milliers d’acres, sans tenir compte de l’opposition acharnée des Mi’kmaq. Cette usurpation de terres sans leur consentement pouvait faire craindre aux autorités anglaises que ces derniers, à juste titre, ne tentent de faire cesser cette agression des Anglais en se retournant violemment contre eux. Ceux-ci pour se justifier arguaient que les Mi’kmaq avaient perdu leur droit de propriété sur la Nouvelle Ecosse parce qu’ils avaient pris les armes contre eux, ou encore que la France leur avait donné toutes leurs terres en même temps que le pays ! Ce que réfuta les Mi’kmaq, jamais les Français ne leur avaient pris leurs terres, ils ne pouvaient donc pas avoir pu les leur céder !
Après le départ de la France de l’Acadie, les exactions sur les Acadiens et sur les Mi’kmaq par les Britanniques n’eurent plus de mesures. Cette province de la Nouvelle France devenue province anglaise devait être colonisée et elle le serait !
Il fallait faire vite, si les hostilités reprenaient entre Français et Britanniques ils savaient parfaitement que les Mi’kmaq n’hésiteraient pas un instant à soutenir les Français. En 1740 les Anglais pressaient sans cesse les Acadiens de signer le serment d’allégeance à la couronne britannique, et les Acadiens subirent de plus en plus de contrôles dans leur vie de tous les jours, tout en augmentant le prix des impôts sur toutes leurs marchandises. En 1744 une nouvelle guerre, celle de la succession d’Autriche se déclara en Europe, se répercuta entre la France et l’Angleterre, aussitôt le Mi’kmaq prirent faits et causes pour les Français et se mirent sans surprise de leur côté.
Le gouvernement français de Québec jugeant que leurs vies étaient en danger envisagea de faire venir du côté français et d’y réinstaller tous ceux qui le désireraient, Acadiens et Micmacs. Certains acceptèrent mais ils ne furent pas nombreux, comment quitter sa maison et tout ce qui avait fait leur vie depuis un siècle et demi ? Ces lieux mêmes où leurs ancêtres français venus de France avaient si solidement replanté leurs racines et bâti ce pays ? Alors ceux qui restèrent furent soumis à des traitements si barbares de la part des Anglais, que les Acadiens avec les Mi’kmaq à leurs côtés n’ont pas eu d’autre choix que de résister, eux qui jusque-là voulaient rester Neutres… Mais tout était déjà bien orchestré et élaboré depuis Londres sous la direction de Lord Halifax. Ainsi en 1749 ce nouveau commissaire du Commerce et des Plantations fit venir encore davantage de colons protestants pour supplanter ces Français catholiques et repousser tous les Amérindiens et Edward Cornwallis, le gouverneur, établit une base militaire pour parer à la menace franco-amérindienne que cela allait déclencher. Immédiatement une nouvelle ville sera construite au nom de ce lord, ce sera Halifax, soigneusement entourée de fortifications.
Le 1er octobre 1749 Cornwallis lors du conseil qu’il réunit dans le port d’Halifax sur le navire le Beaufort, démontra sa parfaite cruauté en obtenant l’approbation de tous pour déclarer officiellement la guerre aux Mi’kmaq avec l’institution de la prime aux scalps ! « …Il ne faut pas les confirmer comme un peuple libre et indépendant, nous devons les traiter comme des bandits et des rebelles au gouvernement de sa majesté. Il faut donc les poursuivre jusque dans leurs repaires et leur montrer qu’ils ne sont nulle part en sécurité dans la province. » Aussitôt ils levèrent une compagnie de 50 personnes volontaires pour les pourchasser dans les bois dirigés par John Gorham, ils firent venir une autre compagnie de cent hommes pour les renforcer en prévision de l’hiver, sans oublier une récompense de dix guinées pour tout Mi’kmaq fait prisonnier…ou tué ! Une tentative d’éliminer les Mi’kmaq était donc bien commencée, au coût de dix guinées pour le Trésor du gouvernement fédéral anglophone. Ce n’était pas la première fois que Cornwallis démontrait autant d’inhumanité mais ses conseillers n’étaient certes pas à exempter !! Edward Cornwallis avait été le lieutenant-colonel stationné en Ecosse, il avait participé à la terrible bataille de Culloden, fin avril 1746, il avait encouragé et contribué avec ses troupes à la maltraitance barbare des Ecossais.
Le traité de 1749 renouvela celui de 1725 c’est-à-dire déposséder les Amérindiens Mi’kmaq et les autres petites nations, de leur liberté et de leurs terres. Les chefs Malécites ratifièrent ce traité de paix le 4 septembre 1749, les Mi’kmaq quant à eux ne l’acceptèrent pas, mais l’abandon d’une partie de leurs alliés Malécites, qui se mirent ainsi du côté de l’envahisseur anglais, leur démontra parfaitement qu’à présent leur situation allait se dégrader encore plus rapidement. Malgré cette perspective peu réjouissante, ils poursuivirent courageusement la résistance pour leur survie, avec l’aide des Acadiens aussi maltraités qu’eux, et de quelques petits groupes Malécites tenaces.
Dès septembre il est réaffirmé aux chefs Mi’kmaq ce qu’on leur demande depuis 1725 de se soumettre ni plus ni moins à la domination britannique confirmant leur crainte pour de nouveaux plans de la colonisation britannique. Très inquiets les Mi’kmaq non seulement renouvelèrent leur déclaration de guerre mais attaquèrent des cibles militaires et commerciales. Devant cette résistance, à l’expropriation de leurs terres à laquelle ils s’attendaient, les autorités par la voix du gouverneur affirma que cette guerre ne devrait pas se terminer par un accord de paix, mais « par l’éradication pure et simple de tous ces Mi’kmaq de la péninsule, une bonne fois pour toute » !
La vie d’un Amérindien semblait bien en effet n’avoir aucune valeur pour les Anglo-saxons ils ne lui accordaient aucun droit civil ou humain, cela avait été largement constaté depuis l’implantation même des colonies de Nouvelle Angleterre en 1620, depuis l’arrivée des premiers colons, les pères pèlerins ces fathers pilgrims, si un Anglais tuait un Indien cela n’était pas considéré comme un crime et restait totalement impuni.
Les Micmac/ Mi’kmaq ont lutté pour préserver leur liberté mais la proclamation barbare de 1749 a été dévastatrice pour eux, puisqu’en effet ont été massacrés autant les hommes que les femmes, les enfants, ou encore les vieillards et les infirmes, tous ceux que les chasseurs de prime ont pu attraper, ont été scalpés. Un groupe de rangers de Gorham ayant rapporté 25 scalps, a réclamé la prime de dix livres pour chacun. Mais tous ces scalps ne venaient pourtant pas uniquement d’Indiens certains venaient sans aucun doute possible de Blancs, c’est-à-dire des Français d’Acadie !
Cela ne les interpella pas un instant, sachant que parmi les Acadiens certains étaient métissés, ils les considéraient tout autant que les Sauvages ! Cette chasse aux scalps entraîna des réactions chez les Français de Louisbourg, écœurés de voir ce qui se passait dans leur ancienne Acadie, ils encouragèrent les Mi’kmaq à répliquer, en leur offrant à eux aussi une prime non pour des scalps anglais mais uniquement pour des soldats anglais faits prisonniers et vivants. A noter, cela ne visait pas les civils et encore moins les femmes et les enfants ! Cependant les soldats prisonniers amenés à la forteresse de Louisbourg étaient rapidement libérés sains et saufs par les Français, à la différence des prisonniers Mi’kmaq détenus par les Anglais, soit ils étaient détenus indéfiniment, soit envoyés à Boston pour y être pendus.
L’Abbé le Loutre, terriblement consterné de ce que les Anglais faisaient subir comme cruautés aux Acadiens et à « ses » Micmac/ Mi’kmaq dont il était le missionnaire attitré, n’a cessé de les défendre et certes s’il les a encouragés à ne pas se laisser faire, à résister, c’était parce que les Anglais eux-mêmes ne cessaient de brutaliser ces deux peuples et d’entreprendre des représailles envers eux, depuis des années. Cependant, en se mettant franchement avec eux, en travers des projets des Anglais, Le Loutre a, bien entendu, été détesté par ces derniers, qui ne cessaient d’être déterminés à chasser les Acadiens et à déposséder et assujettir totalement les Mi’kmaq. Excédés ils mirent la tête de l’abbé Le Loutre à prix !l C’est pourquoi les descriptions acerbes, et même davantage, que font les autorités anglaises et principalement le gouverneur Edward Cornwallis de ce prêtre, qui n’a jamais cessé de défendre les Mi’kmaq et les Acadiens et de les soutenir contre eux, ne sont donc pas étonnantes ! Un homme comme le Loutre s’il a considérablement aidé les tribus à faire face à leur situation, il a également proposé des arrangements de paix importants entre les Mi’kmaq et les Anglais, mais tous ont été repoussés avec mépris et… dérision ! Les Mi’kmaq s’étaient réunis en conseil le 23 août 1754, ils auraient été prêts à céder la plus grande partie de leur pays contre un plus petit territoire, où ils auraient pu rester et vivre tranquilles pour toujours, et même le partager avec des Malécites et d’autres petites nations. Leur lettre apportée par l’Abbé Le Loutre à Halifax pouvait amener une grande avancée pour les Britanniques, mais il fallait pour cela qu’ils désirent vraiment cette paix avec les Mi’kmaq. Bien au contraire le gouverneur Lawrence et tout le conseil rejetèrent les propositions, ils ne voulaient rien céder, et surtout pas un seul morceau de bonnes terres aux Indiens.
Après s’être lâchement et cruellement débarrassé des Acadiens en 1755 et 1758 il aurait été facile de penser néanmoins, puisque les Anglais avaient enfin réussi à s’emparer de l’Acadie puis à en chasser les Acadiens, comme les feuilles au vent sur le rivage, qu’ils allaient peut-être mener une politique coloniale moins épouvantable par rapport aux Mi’kmaq, ce premier peuple vivant sur ce sol, depuis des milliers d’années. Ils ont préféré accroître la pression sur ces tribus pour tenter de les assujettir, et si possible à long terme de s’en débarrasser comme ils s’étaient débarrassés des Acadiens en tentant de les exterminer, que ce soit par la force militaire ou les mauvais traitements, car ces tribus qu’ils décimaient jours après jours, représentaient encore pour eux une force à craindre.
Entre les Mi’kmaq et les Anglais tout ne se termina donc pas du tout tranquillement après la Déportation inhumaine des Acadiens, ni même après le traité de 1763 et le départ définitif de la France, de cette Amérique septentrionale, qu’ils revendiquaient pour leur seul bénéfice.
Après le précédent traité d’Utrecht, les Britanniques avaient enfin récupéré au traité de Paris de 1763, soit cinquante ans plus tard, la totalité de cette Nouvelle France qu’ils désiraient depuis plus d’un siècle. Une fois le traité signé, la guerre de conquête terminée les Mi’kmaq qui avaient déjà largement subi les gouvernements anglais depuis 1713 perdirent tout espoir. En effet ils avaient assisté mais partagé aussi durant toutes ces années, ce qu’ils avaient fait subir d’épouvantable aux Français d’Acadie, avec cette politique anglaise visant avec cruauté à soumettre ces « French Neutral » comme ils les appelaient, dans l’espoir d’en débarrasser toute la province, ce qu’ils arrivèrent à faire lors du monstrueux « Grand Dérangement » de 1755 suivi trois ans plus tard de celui de l’île Saint Jean en 1758.
Evidemment dans ces circonstances les tribus Mi’kmaq n’acceptèrent pas de faire la paix avec le conquérant anglais, une paix uniquement dictée par ces derniers pour leur seul bénéfice, les affrontements continuèrent… Ils s’amplifièrent encore davantage au moment où une grande révolte contre Londres se développa chez les colons anglais de Nouvelle Angleterre, ces colons révoltés furent désignés par Londres comme des « Insurgents ». Les Mi’kmaq prirent faits et causes pour eux espérant que s’ils gagnaient leur indépendance, cela aiderait les Français à revenir en Nouvelle France et à en chasser les Anglais ! Certains parmi eux se rendirent au Massachusetts et signèrent le traité de Watertown en juillet 1779, mais de leurs côté les Britanniques pour inciter les Mi’kmaq à rester neutres et à les empêcher de rejoindre les Insurgés leur fourniront aussitôt tout ce qui sera nécessaire à leur survie, ce qui perdura seulement jusqu’à la fin de la guerre d’indépendance des colonies britanniques avec le traité de 1783. En ces difficiles temps de rébellion dans leurs colonies de Nouvelle Angleterre ce n’était effectivement pas le moment pour eux d’avoir une autre guerre avec les Indiens.
Tout aussitôt les autres colons anglais restés loyaux à l’Angleterre arrivèrent alors très nombreux en Acadie et au Nouveau Brunswick, afin d’échapper aux représailles de ces nouveaux étasuniens, qu’ils n’avaient pas soutenus dans leur révolte. Ces Loyalistes comme ils ont été appelés, ont été au nombre de cinquante mille environ à se réfugier au Canada, récemment devenu anglais. Ils obtinrent immédiatement des terres du gouvernement britannique et dès 1783 presque quinze mille d’entre eux s’étaient déjà installés dans les provinces maritimes, repoussant toujours plus loin les Mi’kmaq sur leur sol.
Le gouvernement institua très officiellement pour ces tribus Mi’kmaq, des terrains qui seraient « réservés pour leur usage et leur bien ! » Les Réserves visaient à séparer les « Blancs » des « Peaux Rouges » méthode largement utilisée par les Anglo-saxons partout, que ce soit au Canada devenu anglais, en Nouvelle Ecosse mais aussi aux États-Unis d’Amérique…
En 1821 au total 20.765 acres au milieu de marécages, des tourbières ou des montagnes pierreuses, sans doute à grand-peine 10% de tous leurs immenses territoires. Hélas, repoussés sur ces terres incultes et arides, ils vont devenir des parias sur le sol de leur propre pays. A mesure que leurs territoires diminuaient, à mesure qu’ils furent installés dans ces terrains sordides, les Micmac commencèrent à devenir semi sédentaires, puis totalement sédentaires étant dans l’impossibilité de se nourrir sur leurs anciennes terres, dans leur propre pays !
Ainsi, ils subirent cette préemption de tous leurs territoires lors de l’arrivée de plus en plus nombreuse de colons anglais et écossais, qui empiétèrent même dans les « réserves » où ils avaient été assignés, ils assistèrent stupéfiés à l’abattage de leurs forêts restreignant l’habitat de l’Orignal et du Caribou, et par voie de conséquences, tous les autres animaux se sont également raréfiés. Mais les bouleversements ne s’arrêteront pas là, il se rajoutera également des barrages sur les rivières, noyant parfois des portions entières de leurs terres. Leur source alimentaire principale ainsi diminuée réduisit encore davantage ces tribus à des états de famine. Dépossédés de tout leur pays, de leurs moyens de subsistances, de leurs libertés et de leur dignité, les Mi’kmaq durant les années qui suivirent cessèrent, contraints et forcés, leurs hostilités se retrouvant seuls, les Français d’Acadie avaient été déportés et les Français étaient repartis en France ! De plus impossible de compter sur les insurgés anglo-saxons devenus grâce à la France les nouveaux étatsuniens, qui ne leur démontrèrent aucune reconnaissance pour leur précédent soutien, pas plus d’ailleurs qu’à la France !! Seule restait une petite population canadienne française le long du Saint Laurent elle aussi bien assujettie sous la main mise anglaise. Alors frappés par la pauvreté les Mi’kmaq furent contraints d’accepter une paix humiliante et injuste. Leur espoir du retour de la France s’amenuisa de plus en plus, seule une petite flamme s’alluma encore pour eux au moment de la Révolution française, qui espérèrent-ils alors, aurait pu permettre ce retour.
Ils durent vivre sous cette « English Liberty » qu’on leur imposait et sont devenus des proscrits dans leur propre pays, et pire en voie d’extinction. Malgré cela les Anglais les considéraient toujours comme une menace
La population Mi’kmaq avait continué à décliner jusqu’en 1847, elle était à un niveau si bas qu’elle faisait craindre la disparition totale de leur race, puis les observateurs ont vu leur nombre légèrement remonter en 1867, au moment de la Confédération où elle atteignit à grand peine 1600 personnes ce que confirmera le commissaire aux Affaires Indiennes Abraham Gesner. Mais cela non pas grâce à de meilleurs traitements, qui auraient favorisé de nouvelles naissances, mais dû au retour de Mi’kmaq d’autres régions, comme l’île saint Jean/ Prince Edouard, le Nouveau Brunswick, peut-être du Canada ou même des nouveaux états unis d’Amérique.
Un triste siècle passa ainsi pour les Mi’kmaq !
Ils virent le gouvernement de la Nouvelle Ecosse instaurer la loi sur les Indiens en 1842 A l’issue de cette loi Joseph Howe nommé commissaire des Affaires indiennes s’employa à soutenir la politique en faveur des Mi’kmaq avec le gouverneur Falkland. Sans ces deux personnages assez compatissants leur disparition, étant largement programmée, aurait été inévitable. Joseph Howe blâmait fortement le gouvernement pour avoir permis depuis tant d’années une telle pauvreté et une telle mortalité chez ce peuple. Il faisait le constat que les Amérindiens pouvaient parfaitement continuer à avoir eux aussi leur langue et leur culture. Il citait l’exemple des Acadiens, certains d’entre eux ayant survécu à la déportation honteuse et à leur terrible exil étaient revenus, depuis maintenant 80 ans, démontrant que les descendants Français vivant au milieu d’une population britannique étaient toujours Français ! Les Mi’kmaq ont accepté de vivre dans les réserves pensant que c’était leur seul moyen de survivre en tant que peuple distinct.
Après s’être emparés de leur pays, après plus de 119 ans les premières mesures d’éducation de la Loi sur les Indiens de 1876 se mirent en place, même si c’était principalement dans le but de les assimiler et de détruire leur langue amérindienne tout autant que leur culture Mi’kmaq ! « Cette loi n’a pas été élaborée pour voir prospérer les Indiens mais pour leur porter un coup fatal en les assimilant » Cf. Dany Paul un Micmac.
Les Indiens qui acceptaient de vivre dans les Réserves avaient été divisés en bandes ou groupes, permettant de les transformer en unités distinctes et de les diviser. Effectivement cela a élevé des frontières entre chaque communauté puisqu’il leur a été interdit de circuler librement sans avoir auparavant demandé l’accord des autres groupes y compris même par quel chemin passer. Impensable pour eux qui avaient toujours vécu libres sur tous ces immenses territoires se déplaçant au gré des saisons, de la pêche et de la chasse… Cette loi énonçait certes la souveraineté des Premières Nations, mais le gouvernement et les fonctionnaires ne cessaient ensuite de la nier, tout comme était reconnue l’indépendance des « bandes et de leurs conseils », mais par la suite ils s’efforçaient de les rendre complètement dépendants ! Pourtant, pire que tout, par cette loi le gouvernement anglais se permettait de décider qui avait le droit de se considérer Indien ou non. Ainsi une personne ayant réussi des études et obtenu un diplôme universitaire, perdait de fait, son statut d’Indien. Les études n’étaient pas interdites mais cette finalité a empêché bien des Indiens d’obtenir un diplôme. Le racisme était tel, qu’il était difficile à un Micmac d’aller en classe avec des anglophones, une jeune institutrice Micmac était parvenue à terminer ses études et enseignait dès lors dans les écoles. Félicitée pour son courage d’avoir résisté pendant ses années d’études au racisme anglais ambiant, elle expliqua qu’elle n’avait aucun mérite car elle avait toujours eu l’habitude, depuis toute petite, d’aller à l’école avec des Acadiens, ces Français ne connaissaient aucun racisme envers eux, cela l’avait confortée sur ce qu’elle était et sur l’égalité réelle de tous les êtres humains. Elle détailla alors que leurs liens d’amitié et d’estime avec les Français remontaient depuis Membertou et Samuel de Champlain, Pierre Dugua des Monts, Jean de Poutrincourt et tous les autres Français par la suite, ces liens n’avaient jamais faibli depuis.
Dans la loi sur les Indiens, une indienne qui épousait un non Indien perdait son statut d’indienne, mais une blanche qui épousait un Indien devenait indienne. C’était pourtant fondamental d’être inscrit sur le registre des Indiens pour affirmer ses droits ancestraux.
Cette discrimination par le sexe a été finalement abrogée … le 17 avril 1985.
Joseph Howe a poussé le gouvernement à faire davantage. Il est difficile de retrouver précisément tout ce qu’il a fait comme Surintendant aux affaires indiennes dans les archives. Est-ce que cela a été mis de côté parce qu’il dévoilait trop le racisme qui avait cours en Nouvelle Ecosse, causant tant de souffrances et de morts aux Indiens ? De même cela est des plus compliqué de trouver des rapports sur la politique des scalps induisant la conduite barbare des fonctionnaires anglais.
Les Mi’kmaq subirent les sanctions du gouvernement et des fonctionnaires gouvernementaux mais ils discernèrent en George Monk Surintendant aux affaires indiennes tout comme par la suite en Joseph Howe et Abraham Gesner des personnes qui ont eu de la compassion pour eux et ont tenté dans la mesure de leurs moyens de les soutenir.
Individuellement de nombreux colons anglais ont été également compatissants et ont cherché à les aider et à soutenir ceux mourant de faim, certains ont même établi des pétitions pour peser sur le gouvernement mais sans résultat, le gouvernement a toujours fermé les yeux sur leurs détresses, même si parfois il consentait à allouer une petite somme pour des vivres et des couvertures, cela était insuffisant et les Indiens ont continué à souffrir sans vêtements et sans soins médicaux.
De date en date leur existence est devenue de plus en plus épouvantable :
*Vers 1800 en plus de leurs ennuis sans fin de nombreuses maladies sont arrivées en Nouvelle Ecosse avec les nouveaux colons anglais et les migrants écossais, ainsi des épidémies de variole eurent lieu en 1826, de même un vaisseau porteur lui aussi de cette grave maladie infectieuse avait accosté au cap Breton puis suivirent le typhus et la fièvre thyroïde, tout cela terrassa facilement les Mi’kmaq, trop affaiblis physiquement.
*En 1831 leur situation, décrite par une nouvelle pétition, est désespérée.
*En 1838 un rapport sur la vie des Mi’kmaq indiquai qu’ils s’élevaient alors le 22 aout 1838 à 1425 individus, seuls restant alors sur les 200.000, recensés au moment de l’arrivée anglaise sur leur sol. Cela ne fit changer aucune politique à leur égard, avaient-ils alors l’intention d’attendre encore quelques années pour que le problème indien de la fin des Mi’kmaq se règle tout seul ?
*En 1834, Rien ne change là encore, que ce soit pour ceux de Windsor ou du Cap breton
*En 1840 la Nouvelle Ecosse était un pays florissant et abondant où tout poussait sur les bonnes terres des Acadiens, maintenant aux mains des Anglais. Peu de colons anglophones se trouvaient démunis, hormis les Mi’kmaq et les Acadiens dont certains avaient essayé de revenir vivre sur leur terre d’Acadie après le traité de 1763.
*En 1841 le grand chef Louis Benjamin Paul ou Passauhmigh de Shubenacadie désespéré pour son peuple ne recevant aucune réponse du gouvernement provincial écrivit à la reine Victoria, il lui exposa comment l’homme blanc d’Angleterre avait pris tout ce qui leur appartenait et lui demandant d’intervenir pour arrêter cette politique honteuse contre eux.
*En 1843 Joseph Howe envoya « des versements de charité » mais son inquiétude était grandissante, si on ne changeait pas davantage de politique envers eux, la race des Mi’kmaq risquait de s’éteindre dans les décennies suivantes.
*En 1846 malgré ces appels rien de plus n’étant entrepris, cela continua à s’aggraver et ceux de Digby continuèrent à mourir faute de nourriture
*En 1851 au Cap Breton la famine était là aussi, affreuse !
*En 1855 Ceux de New Glasgow étant presque tous morts de faim et la même chose pour ceux de Pictou en 1856 en 1861 le Surintendant des affaires indiennes les décrivit en 1861 « comme indigents et misérables »
Il a fallu attendre 1867 et la Confédération pour que le gouvernement fédéral reprenne à son compte leur terrible condition, mais il le fit du bout des lèvres, si bien que les années passèrent encore, sans que cela n’améliore vraiment leur triste existence.
Dans des années plus récentes encore, en 1982 un médecin, Virginia Miller, écrivit un rapport décrivant la totale misère des Mi’kmaq.
Les Premières Nations ont enduré toutes ces souffrances afin de conserver leur identité, si elles avaient accepté de s’assimiler elles n’existeraient plus ! Elles ont été ignorées et le gouvernement a conçu le Livre Blanc cependant « préserver la culture des Premières Nations n’était pas le but du gouvernement, les dirigeants voulaient qu’ils se fondent et disparaissent dans le grand creuset commun anglais » Pour établir ce Livre Blanc de nombreuses consultations ont été certes tenues avec les Premières Nations, mais subtilement avec ceux, parmi les Indiens, qui correspondaient aux idées proposées par le gouvernement anglais, alors « les consultations furent de pures … Plaisanteries. »
Le Livre Blanc explique parfaitement que les Premières Nations ont bien été victimes de discriminations ! Pourtant, le racisme, qui a été primordial pour entraîner ces ségrégations tant financières, économiques, ou éducatives, loin d’être retracé a été dissimulé voire occulté ! A cause de ce refus de la société de les faire participer à la vie économique du pays, les Amérindiens ont été dépendants des gouvernements, qui agissant avec un paternalisme humiliant, les ont empêchés d’améliorer les conditions consternantes de leur vie, dans laquelle on les a plongés.
Les Premières Nations de l’Amérique septentrionale vivaient sur ce sol depuis des milliers d’années avec leur civilisation et leurs cultures propres. Les Amérindiens ont été marginalisés sous tous les gouvernements canadiens anglophones successifs, privant ces peuples de leurs terres, de leurs ressources naturelles et les ont sans cesse contrôlés et assujettis. Joseph Howe lors de son discours anti-fédéraliste en 1867 avait exprimé sa tristesse, mais aussi son admiration pour les Mi’kmaq :
« … Leur race est en perdition mais même dans les jours de décadence et d’humiliation elle a toujours relevé le défi de conserver le respect. Quand le dernier des Micmac inclinera la tête dans son campement solitaire et qu’il confiera son âme à son créateur, il pourra repenser avec fierté à son passé et remercier le Grand Esprit que son peuple ne compte aucun Tupper ni Henry, ni Archibald ou Mc Cully… »
Sources
Archives de la Nouvelle Ecosse, le Canada français documents sur l’Acadie
Archives de la Confidency of Mainland Micmac
Documents publics
Modification Loi sur les Indiens 1876 à 1996
Loi du Canada « les Indiens inscrits deviennent citoyens canadiens » du 7 juin 1956
Registre général des Réserves
Daniel N. Paul responsable des affaires indiennes « Ce n’était pas nous les Sauvages » Editions le bouton d’or d’Acadie juin 2020
Les Mi’kmaq autant anéantis que les Français d’Acadie !
La présence Mi’kmaq est bien absente de l’Histoire du Canada anglophone et de la Nouvelle Ecosse, l’ancienne Acadie française.
Il est en effet difficile en remontant dans le passé, de trouver des références importantes, dans la presque totalité des textes de l’histoire coloniale anglaise de ce peuple amérindien. Au vu des traitements infligés à ces Premières Nations, les historiens anglophones ne peuvent pas avoir fait une omission si cruciale sans que cela ne nous interroge… Alors que la vie des Français d’Acadie a été largement répertoriée et bien décrite y compris au moment de leur inique déportation dans les colonies anglaises, pour la majorité d’entre eux.
Lors de l‘arrivée des Français avec Pierre Dugua de Mons et Samuel de Champlain en 1604, les Mi’kmaq/Micmac et leur chef Membertou qui vivaient dans la région située au bord de la baie, qu’ils avaient appelée tout simplement Baie des Français, à force de les voir aller et venir dans cette baie, (aujourd’hui baie de Fundy) les avaient accueillis avec bienveillance et sympathie, au moment de leur installation à cet endroit, lors de la construction du petit fort de Port Royal en 1605 puis très rapidement s’était créée avec eux une profonde amitié, elle ne s’est jamais démentie depuis, ils sont restés sans cesse présents à leurs côtés durant plus d’un siècle et demi, édifiant de vrais et solides liens d’amitié avec eux.
Ce peuple venu de France était arrivé en ami, et non en conquérant sur leur sol. Les Français avaient apporté le réel savoir-faire de leur pays, un savoir-faire qui leur a permis de rendre toutes ces terres fertiles, ajouté à leur travail acharné. Ils sont arrivés à cultiver toutes sortes de légumes ou de fruits inconnus jusqu’ici des Amérindiens, de ces régions… Les Mi’kmaq/Micmac auprès d’eux se sont beaucoup mieux nourris que lors de leurs seules chasses, pêches ou cueillettes…Ils ont toujours considéré les Français d’Acadie comme des frères, et lorsque l’adversité les submergeait, on les a chaque fois trouvés à leurs côtés ! Ils ont encore été là auprès des Acadiens, résistant tout autant qu’eux contre l’envahisseur anglo-saxon, les aidant pour tout y compris à s’emparer d’un bâtiment anglais, comme cela s’est produit dans le havre à l’étang, une goélette qui amenait du ravitaillement aux Anglais de Port Royal, - devenu Annapolis -, et tant de nombreuses autres actions de résistance ont été ainsi répertoriées, une résistance menée conjointement Acadiens et Micmac ! Ils étaient là aussi au moment où l’escadre du duc d’Anville, envoyée en 1646 par la France, était attendue pour tenter de reprendre la forteresse de Louisbourg.
Les Français avaient réussi à bâtir ce pays d’Acadie années après années entourés par les Mi’kmaq, malgré les mille déboires dus aux Anglais leur jalousant ce pays, et les terres qu’ils avaient défrichées grâce à un labeur intense sur plusieurs générations. Ces Français, devenus au fil des ans des Acadiens, ne désiraient qu’une chose, celle de vivre en paix et surtout de rester « Neutres » au milieu des différends existant entre les deux couronnes française et anglaise, jusqu’au moment où l’ennemi d’Angleterre s’attaquera directement à eux !
Cela dura ainsi plus d’un siècle malgré les Anglais qui ne cessaient à intervalles réguliers de s’emparer de leur pays et d’en chasser les Français, parce qu’au gré des différents traités, l’Acadie était ensuite rendue à la France.
La France s’était établie en Amérique septentrionale où elle avait créé la Nouvelle France comprenant dès 1605 l’Acadie, puis le Canada avec le fort de Québec en 1608 le long du Saint Laurent. Au fil des explorations menées par des Français peu ordinaires, qui s’élanceront à travers cet immense pays, en plantant des croix fleurdelisées au nom du Roi de France, au fur et à mesure de leurs avancées, la Nouvelle France s’agrandira sans cesse avec de nouveaux territoires, jusqu’à la Baie d’Hudson au Nord, jusqu’aux Rocheuses à l’Ouest et jusqu’au golfe du Mexique au Sud, lors de la découverte de la grande Louisiane. Mais cependant, la France et les Français n’avaient aucunement l’intention, et cela s’est confirmé tout le long que dura le siècle et demi du Régime français, de déposséder les Premières Nations ni de leur liberté ni des richesses de leur pays et encore moins de leurs coutumes ou de leur façon de vivre. Rien ne changea en effet pour elles dans leur façon de vivre, aussi longtemps que les Français restèrent. Cette entente s’est largement observée aux nombreux rapprochements amicaux entre ces peuples pourtant si différents, et même des rapprochements plus qu’amicaux eurent lieu sans étonner personne, lors des mariages franco-amérindiens. Des personnages fort connus comme Pierre Boucher en Nouvelle France qui avait épousé une Wendat, ou Charles de la Tour, lieutenant général d’Acadie une Mi’kmaq, pour seuls exemples.
Cependant lorsque de grands remous apparaissaient en Europe cela se répercutait inévitablement en Amérique septentrionale, ainsi au moment de la succession d’Espagne, cela se termina par le traité d’Utrecht en 1713 où la France dut céder aux Anglais, non seulement la Baie d’Hudson, mais également l’Acadie. Ces derniers s’empressèrent de la rebaptiser «Nouvelle Ecosse » comme ils l’avaient déjà fait une première fois en 1613, mais cette fois définitivement. Les Mi’kmaq avaient assisté aux cruautés que ces étrangers d’Angleterre ne cessaient de faire aux autres Abénaquis de Pentagouët, mais aussi à tous les Acadiens, les « French Neutral » comme ils les appelaient, dès qu’ils le pouvaient depuis un siècle. Ils redoutaient terriblement avec raison la victoire des Anglais et de ceux des colonies de Nouvelle Angleterre sur les Français d’Acadie, comprenant parfaitement que cela serait tragique aussi pour eux.
Le Traité d’Utrecht sonnera alors le glas de l’Acadie française.
Lorsque les Anglais occupèrent définitivement l’Acadie et la Baie d’Hudson au traité d’Utrecht en 1713, la population Mi’kmaq était alors importante ce qui permit sans doute à cette nation amérindienne de pouvoir résister et survivre, aux nombreuses attaques contre elle.
Dès lors, les Anglais, une fois installés en conquérants, ont pu bien plus aisément continuer à s’attaquer aux Acadiens, et les résistances et les luttes de ces derniers pour tenter de survivre ont été d’autant plus rudes, que ces nouveaux venus sur ce sol les détestaient. Certes ils étaient considérés comme d’affreux papistes, certes ils étaient aussi comme des frères avec les Sauvages, mais pire que tout ils détenaient -pour les avoir eux-mêmes défrichées- les meilleures terres ! Ils ne voulaient qu’une chose se débarrasser d’eux, ce qu’ils arrivèrent à faire en fin de compte avec une inhumanité peu commune, lors d’une déportation barbare et monstrueuse, avec ce « Grand Dérangement » en 1755. Les Mi’kmaq étaient encore présents aux côtés des Acadiens, au moment où a eu lieu ces épouvantables arrestations, un grand nombre d’entre eux réussit à échapper aux Anglais et à s’enfuir à travers les bois, avant même d’être embarqués de force sur les navires pour être déportés. Ils tentèrent de rejoindre la partie de la Nouvelle France encore française, à la fois par terre ou encore en tentant de suivre les fleuves et les rivières ainsi que la vallée de la Matapédia. Les Mi’kmaq partagèrent aussi le triste sort des Acadiens, au cours de ce terrible et glacial hiver de 1756-57 au camp des réfugiés de Miramichi, soutenus, autant qu’il le pouvait lui-même, par le lieutenant Charles de Boishébert et le régiment français.
Il s’était créé entre ces Français d’Acadie et les tribus Mi’kmaq une telle fraternité que chacun alors protégeait l’autre des attaques anglaises. Cette protection mutuelle était fondée sur cette longue et profonde amitié mais aussi sur l’admiration, le respect de la culture de l’autre. Cette alliance indéfectible développée entre ces Français et les Mi’kmaq provenait également de l’esprit profond de la diplomatie de la France, préconisant naturellement ce vivre ensemble, proposant ainsi sans aucune différence l’instruction des enfants des Amérindiens, autant que ceux des enfants des Français. C’est ainsi que parmi ces Premières Nations si certains désiraient se rendre en France, ils pouvaient le faire tout autant qu’un « naturel François ».
Les alliances nouées par les Anglais avec les tribus amérindiennes n’étaient pour la plus grande part fondées que sur leur propre avantage, et s’ils se sont alliés avec certaines tribus, souvent les plus belliqueuses, ces alliances basées sur le seul intérêt loin de toute véritable amitié, ne duraient que le temps, où les deux côtés y trouvaient leur bénéfice, comme avec les Iroquois, ces ennemis ancestraux des Mi’kmaq.
Les Iroquois (Odinossonis) appelés aussi peuple des Cinq Cantons à cette époque, n’étaient cependant ni pour les Anglais ni pour les Français ils étaient pour les Iroquois ! C’est pourquoi on les verra au long des années pencher pour les uns ou pour les autres selon leurs seuls intérêts.
Les Micmac/Mi’kmaq d’Acadie faisaient partie de la confédération Waban Aqui, ainsi que les Abénaquis et les Malécites. Ce peuple algonquin de la côte Nord-Est de l’Amérique du Nord se répartissait sur de nombreux territoires d’Acadie, de l’île Saint Jean, de Gaspésie, ou de Terre-Neuve… Ceux vivant dans la région de la Listuguj/ Restigouche et autour de la Baie des Chaleurs, portaient un saumon comme emblème. Pour ceux de la région de Miramichi leur emblème représentait un guerrier armé d’une lance et d’un arc. Certains habitaient sur l’île Royale, aujourd’hui appelée Cap Breton, les Micmac l’avaient dénommée Onamag, elle est devenue le siège de leur grand Sachem ; Ils vivaient de chasse, de pêche et de cueillette, de racines sauvages et de fruits secs, à l’automne comme la grande majorité des autres peuples Amérindiens, ils partaient pour la chasse au caribou. Parents avec les Abénaquis de Pentagouët de Nouvelle Angleterre et les Malécites du Nouveau Brunswick, ils n’étaient pourtant pas agriculteurs. Ils n’habitaient pas dans des Tipis en peau, mais dans des Wigwam coniques qui étaient fabriqués sur la base d’un treillis de bois d’épinette, recouvert d’écorces de bouleau. Sur le sol, ils disposaient des branches fines de sapins qu’ils recouvraient de confortables fourrures. Leurs wigwams pouvaient être démontés et remontés facilement selon les besoins de leurs déplacements. Les hommes et les femmes portaient des vêtements à franges fabriqués en peau de Caribou, ils portaient tous les cheveux longs, autant les uns que les autres. Ils se servaient de deux sortes de raquettes, les plus grandes pour la neige poudreuse, les plus petites lorsque la neige était dure. Les funérailles chez ses peuples Mi’kmaq donnaient lieu à des cérémonies qui rassemblaient toute la tribu, et qui se terminaient par un grand festin. Ils se noircissaient le visage pendant trois jours entiers en signe de deuil, pourtant ils n’avaient pas particulièrement soigné leurs malades vieillissants, ils ne le nourrissaient plus et le chaman pour activer le décès, versait de l’eau glacée au niveau du nombril des vieillards ! Selon les personnes, certaines préparaient eux-mêmes leur propre mort, sans doute pour l’activer, connaissant le peu de soin qu’ils apportaient aux mourants, car les malades pouvaient aussi être purement et simplement abandonnés à leur sort !
Depuis la main mise anglaise sur l’Acadie devenue alors Nouvelle Ecosse les dirigeants anglais avaient tout tenté pour mettre les tribus Mi’kmaq de leur côté et les séparer des Français. Ils instaurèrent dans ce but de leur faire signer des traités, visant à obtenir leur soumission ni plus ni moins à la domination britannique ! Pourtant un des gouverneurs Edward Cornwallis déclarera sans s’en cacher : « les traités ne valent rien, seule la force prévaudra » Et c’est ce qui se passera, puisqu’ils étaient là pour prendre les terres de ces « Indiens » et pour y établir le plus de colons possibles !
La résistance à la domination britannique s’est encore accrue car les gouvernements anglais ont continué à faire venir de nombreux colons anglophones, à leur concéder des terres, y compris des concessions faisant plusieurs milliers d’acres, sans tenir compte de l’opposition acharnée des Mi’kmaq. Cette usurpation de terres sans leur consentement pouvait faire craindre aux autorités anglaises que ces derniers, à juste titre, ne tentent de faire cesser cette agression des Anglais en se retournant violemment contre eux. Ceux-ci pour se justifier arguaient que les Mi’kmaq avaient perdu leur droit de propriété sur la Nouvelle Ecosse parce qu’ils avaient pris les armes contre eux, ou encore que la France leur avait donné toutes leurs terres en même temps que le pays ! Ce que réfuta les Mi’kmaq, jamais les Français ne leur avaient pris leurs terres, ils ne pouvaient donc pas avoir pu les leur céder !
Après le départ de la France de l’Acadie, les exactions sur les Acadiens et sur les Mi’kmaq par les Britanniques n’eurent plus de mesures. Cette province de la Nouvelle France devenue province anglaise devait être colonisée et elle le serait !
Il fallait faire vite, si les hostilités reprenaient entre Français et Britanniques ils savaient parfaitement que les Mi’kmaq n’hésiteraient pas un instant à soutenir les Français. En 1740 les Anglais pressaient sans cesse les Acadiens de signer le serment d’allégeance à la couronne britannique, et les Acadiens subirent de plus en plus de contrôles dans leur vie de tous les jours, tout en augmentant le prix des impôts sur toutes leurs marchandises. En 1744 une nouvelle guerre, celle de la succession d’Autriche se déclara en Europe, se répercuta entre la France et l’Angleterre, aussitôt le Mi’kmaq prirent faits et causes pour les Français et se mirent sans surprise de leur côté.
Le gouvernement français de Québec jugeant que leurs vies étaient en danger envisagea de faire venir du côté français et d’y réinstaller tous ceux qui le désireraient, Acadiens et Micmacs. Certains acceptèrent mais ils ne furent pas nombreux, comment quitter sa maison et tout ce qui avait fait leur vie depuis un siècle et demi ? Ces lieux mêmes où leurs ancêtres français venus de France avaient si solidement replanté leurs racines et bâti ce pays ? Alors ceux qui restèrent furent soumis à des traitements si barbares de la part des Anglais, que les Acadiens avec les Mi’kmaq à leurs côtés n’ont pas eu d’autre choix que de résister, eux qui jusque-là voulaient rester Neutres… Mais tout était déjà bien orchestré et élaboré depuis Londres sous la direction de Lord Halifax. Ainsi en 1749 ce nouveau commissaire du Commerce et des Plantations fit venir encore davantage de colons protestants pour supplanter ces Français catholiques et repousser tous les Amérindiens et Edward Cornwallis, le gouverneur, établit une base militaire pour parer à la menace franco-amérindienne que cela allait déclencher. Immédiatement une nouvelle ville sera construite au nom de ce lord, ce sera Halifax, soigneusement entourée de fortifications.
Le 1er octobre 1749 Cornwallis lors du conseil qu’il réunit dans le port d’Halifax sur le navire le Beaufort, démontra sa parfaite cruauté en obtenant l’approbation de tous pour déclarer officiellement la guerre aux Mi’kmaq avec l’institution de la prime aux scalps ! « …Il ne faut pas les confirmer comme un peuple libre et indépendant, nous devons les traiter comme des bandits et des rebelles au gouvernement de sa majesté. Il faut donc les poursuivre jusque dans leurs repaires et leur montrer qu’ils ne sont nulle part en sécurité dans la province. » Aussitôt ils levèrent une compagnie de 50 personnes volontaires pour les pourchasser dans les bois dirigés par John Gorham, ils firent venir une autre compagnie de cent hommes pour les renforcer en prévision de l’hiver, sans oublier une récompense de dix guinées pour tout Mi’kmaq fait prisonnier…ou tué ! Une tentative d’éliminer les Mi’kmaq était donc bien commencée, au coût de dix guinées pour le Trésor du gouvernement fédéral anglophone. Ce n’était pas la première fois que Cornwallis démontrait autant d’inhumanité mais ses conseillers n’étaient certes pas à exempter !! Edward Cornwallis avait été le lieutenant-colonel stationné en Ecosse, il avait participé à la terrible bataille de Culloden, fin avril 1746, il avait encouragé et contribué avec ses troupes à la maltraitance barbare des Ecossais.
Le traité de 1749 renouvela celui de 1725 c’est-à-dire déposséder les Amérindiens Mi’kmaq et les autres petites nations, de leur liberté et de leurs terres. Les chefs Malécites ratifièrent ce traité de paix le 4 septembre 1749, les Mi’kmaq quant à eux ne l’acceptèrent pas, mais l’abandon d’une partie de leurs alliés Malécites, qui se mirent ainsi du côté de l’envahisseur anglais, leur démontra parfaitement qu’à présent leur situation allait se dégrader encore plus rapidement. Malgré cette perspective peu réjouissante, ils poursuivirent courageusement la résistance pour leur survie, avec l’aide des Acadiens aussi maltraités qu’eux, et de quelques petits groupes Malécites tenaces.
Dès septembre il est réaffirmé aux chefs Mi’kmaq ce qu’on leur demande depuis 1725 de se soumettre ni plus ni moins à la domination britannique confirmant leur crainte pour de nouveaux plans de la colonisation britannique. Très inquiets les Mi’kmaq non seulement renouvelèrent leur déclaration de guerre mais attaquèrent des cibles militaires et commerciales. Devant cette résistance, à l’expropriation de leurs terres à laquelle ils s’attendaient, les autorités par la voix du gouverneur affirma que cette guerre ne devrait pas se terminer par un accord de paix, mais « par l’éradication pure et simple de tous ces Mi’kmaq de la péninsule, une bonne fois pour toute » !
La vie d’un Amérindien semblait bien en effet n’avoir aucune valeur pour les Anglo-saxons ils ne lui accordaient aucun droit civil ou humain, cela avait été largement constaté depuis l’implantation même des colonies de Nouvelle Angleterre en 1620, depuis l’arrivée des premiers colons, les pères pèlerins ces fathers pilgrims, si un Anglais tuait un Indien cela n’était pas considéré comme un crime et restait totalement impuni.
Les Micmac/ Mi’kmaq ont lutté pour préserver leur liberté mais la proclamation barbare de 1749 a été dévastatrice pour eux, puisqu’en effet ont été massacrés autant les hommes que les femmes, les enfants, ou encore les vieillards et les infirmes, tous ceux que les chasseurs de prime ont pu attraper, ont été scalpés. Un groupe de rangers de Gorham ayant rapporté 25 scalps, a réclamé la prime de dix livres pour chacun. Mais tous ces scalps ne venaient pourtant pas uniquement d’Indiens certains venaient sans aucun doute possible de Blancs, c’est-à-dire des Français d’Acadie !
Cela ne les interpella pas un instant, sachant que parmi les Acadiens certains étaient métissés, ils les considéraient tout autant que les Sauvages ! Cette chasse aux scalps entraîna des réactions chez les Français de Louisbourg, écœurés de voir ce qui se passait dans leur ancienne Acadie, ils encouragèrent les Mi’kmaq à répliquer, en leur offrant à eux aussi une prime non pour des scalps anglais mais uniquement pour des soldats anglais faits prisonniers et vivants. A noter, cela ne visait pas les civils et encore moins les femmes et les enfants ! Cependant les soldats prisonniers amenés à la forteresse de Louisbourg étaient rapidement libérés sains et saufs par les Français, à la différence des prisonniers Mi’kmaq détenus par les Anglais, soit ils étaient détenus indéfiniment, soit envoyés à Boston pour y être pendus.
L’Abbé le Loutre, terriblement consterné de ce que les Anglais faisaient subir comme cruautés aux Acadiens et à « ses » Micmac/ Mi’kmaq dont il était le missionnaire attitré, n’a cessé de les défendre et certes s’il les a encouragés à ne pas se laisser faire, à résister, c’était parce que les Anglais eux-mêmes ne cessaient de brutaliser ces deux peuples et d’entreprendre des représailles envers eux, depuis des années. Cependant, en se mettant franchement avec eux, en travers des projets des Anglais, Le Loutre a, bien entendu, été détesté par ces derniers, qui ne cessaient d’être déterminés à chasser les Acadiens et à déposséder et assujettir totalement les Mi’kmaq. Excédés ils mirent la tête de l’abbé Le Loutre à prix !l C’est pourquoi les descriptions acerbes, et même davantage, que font les autorités anglaises et principalement le gouverneur Edward Cornwallis de ce prêtre, qui n’a jamais cessé de défendre les Mi’kmaq et les Acadiens et de les soutenir contre eux, ne sont donc pas étonnantes ! Un homme comme le Loutre s’il a considérablement aidé les tribus à faire face à leur situation, il a également proposé des arrangements de paix importants entre les Mi’kmaq et les Anglais, mais tous ont été repoussés avec mépris et… dérision ! Les Mi’kmaq s’étaient réunis en conseil le 23 août 1754, ils auraient été prêts à céder la plus grande partie de leur pays contre un plus petit territoire, où ils auraient pu rester et vivre tranquilles pour toujours, et même le partager avec des Malécites et d’autres petites nations. Leur lettre apportée par l’Abbé Le Loutre à Halifax pouvait amener une grande avancée pour les Britanniques, mais il fallait pour cela qu’ils désirent vraiment cette paix avec les Mi’kmaq. Bien au contraire le gouverneur Lawrence et tout le conseil rejetèrent les propositions, ils ne voulaient rien céder, et surtout pas un seul morceau de bonnes terres aux Indiens.
Après s’être lâchement et cruellement débarrassé des Acadiens en 1755 et 1758 il aurait été facile de penser néanmoins, puisque les Anglais avaient enfin réussi à s’emparer de l’Acadie puis à en chasser les Acadiens, comme les feuilles au vent sur le rivage, qu’ils allaient peut-être mener une politique coloniale moins épouvantable par rapport aux Mi’kmaq, ce premier peuple vivant sur ce sol, depuis des milliers d’années. Ils ont préféré accroître la pression sur ces tribus pour tenter de les assujettir, et si possible à long terme de s’en débarrasser comme ils s’étaient débarrassés des Acadiens en tentant de les exterminer, que ce soit par la force militaire ou les mauvais traitements, car ces tribus qu’ils décimaient jours après jours, représentaient encore pour eux une force à craindre.
Entre les Mi’kmaq et les Anglais tout ne se termina donc pas du tout tranquillement après la Déportation inhumaine des Acadiens, ni même après le traité de 1763 et le départ définitif de la France, de cette Amérique septentrionale, qu’ils revendiquaient pour leur seul bénéfice.
Après le précédent traité d’Utrecht, les Britanniques avaient enfin récupéré au traité de Paris de 1763, soit cinquante ans plus tard, la totalité de cette Nouvelle France qu’ils désiraient depuis plus d’un siècle. Une fois le traité signé, la guerre de conquête terminée les Mi’kmaq qui avaient déjà largement subi les gouvernements anglais depuis 1713 perdirent tout espoir. En effet ils avaient assisté mais partagé aussi durant toutes ces années, ce qu’ils avaient fait subir d’épouvantable aux Français d’Acadie, avec cette politique anglaise visant avec cruauté à soumettre ces « French Neutral » comme ils les appelaient, dans l’espoir d’en débarrasser toute la province, ce qu’ils arrivèrent à faire lors du monstrueux « Grand Dérangement » de 1755 suivi trois ans plus tard de celui de l’île Saint Jean en 1758.
Evidemment dans ces circonstances les tribus Mi’kmaq n’acceptèrent pas de faire la paix avec le conquérant anglais, une paix uniquement dictée par ces derniers pour leur seul bénéfice, les affrontements continuèrent… Ils s’amplifièrent encore davantage au moment où une grande révolte contre Londres se développa chez les colons anglais de Nouvelle Angleterre, ces colons révoltés furent désignés par Londres comme des « Insurgents ». Les Mi’kmaq prirent faits et causes pour eux espérant que s’ils gagnaient leur indépendance, cela aiderait les Français à revenir en Nouvelle France et à en chasser les Anglais ! Certains parmi eux se rendirent au Massachusetts et signèrent le traité de Watertown en juillet 1779, mais de leurs côté les Britanniques pour inciter les Mi’kmaq à rester neutres et à les empêcher de rejoindre les Insurgés leur fourniront aussitôt tout ce qui sera nécessaire à leur survie, ce qui perdura seulement jusqu’à la fin de la guerre d’indépendance des colonies britanniques avec le traité de 1783. En ces difficiles temps de rébellion dans leurs colonies de Nouvelle Angleterre ce n’était effectivement pas le moment pour eux d’avoir une autre guerre avec les Indiens.
Tout aussitôt les autres colons anglais restés loyaux à l’Angleterre arrivèrent alors très nombreux en Acadie et au Nouveau Brunswick, afin d’échapper aux représailles de ces nouveaux étasuniens, qu’ils n’avaient pas soutenus dans leur révolte. Ces Loyalistes comme ils ont été appelés, ont été au nombre de cinquante mille environ à se réfugier au Canada, récemment devenu anglais. Ils obtinrent immédiatement des terres du gouvernement britannique et dès 1783 presque quinze mille d’entre eux s’étaient déjà installés dans les provinces maritimes, repoussant toujours plus loin les Mi’kmaq sur leur sol.
Le gouvernement institua très officiellement pour ces tribus Mi’kmaq, des terrains qui seraient « réservés pour leur usage et leur bien ! » Les Réserves visaient à séparer les « Blancs » des « Peaux Rouges » méthode largement utilisée par les Anglo-saxons partout, que ce soit au Canada devenu anglais, en Nouvelle Ecosse mais aussi aux États-Unis d’Amérique…
En 1821 au total 20.765 acres au milieu de marécages, des tourbières ou des montagnes pierreuses, sans doute à grand-peine 10% de tous leurs immenses territoires. Hélas, repoussés sur ces terres incultes et arides, ils vont devenir des parias sur le sol de leur propre pays. A mesure que leurs territoires diminuaient, à mesure qu’ils furent installés dans ces terrains sordides, les Micmac commencèrent à devenir semi sédentaires, puis totalement sédentaires étant dans l’impossibilité de se nourrir sur leurs anciennes terres, dans leur propre pays !
Ainsi, ils subirent cette préemption de tous leurs territoires lors de l’arrivée de plus en plus nombreuse de colons anglais et écossais, qui empiétèrent même dans les « réserves » où ils avaient été assignés, ils assistèrent stupéfiés à l’abattage de leurs forêts restreignant l’habitat de l’Orignal et du Caribou, et par voie de conséquences, tous les autres animaux se sont également raréfiés. Mais les bouleversements ne s’arrêteront pas là, il se rajoutera également des barrages sur les rivières, noyant parfois des portions entières de leurs terres. Leur source alimentaire principale ainsi diminuée réduisit encore davantage ces tribus à des états de famine. Dépossédés de tout leur pays, de leurs moyens de subsistances, de leurs libertés et de leur dignité, les Mi’kmaq durant les années qui suivirent cessèrent, contraints et forcés, leurs hostilités se retrouvant seuls, les Français d’Acadie avaient été déportés et les Français étaient repartis en France ! De plus impossible de compter sur les insurgés anglo-saxons devenus grâce à la France les nouveaux étatsuniens, qui ne leur démontrèrent aucune reconnaissance pour leur précédent soutien, pas plus d’ailleurs qu’à la France !! Seule restait une petite population canadienne française le long du Saint Laurent elle aussi bien assujettie sous la main mise anglaise. Alors frappés par la pauvreté les Mi’kmaq furent contraints d’accepter une paix humiliante et injuste. Leur espoir du retour de la France s’amenuisa de plus en plus, seule une petite flamme s’alluma encore pour eux au moment de la Révolution française, qui espérèrent-ils alors, aurait pu permettre ce retour.
Ils durent vivre sous cette « English Liberty » qu’on leur imposait et sont devenus des proscrits dans leur propre pays, et pire en voie d’extinction. Malgré cela les Anglais les considéraient toujours comme une menace
La population Mi’kmaq avait continué à décliner jusqu’en 1847, elle était à un niveau si bas qu’elle faisait craindre la disparition totale de leur race, puis les observateurs ont vu leur nombre légèrement remonter en 1867, au moment de la Confédération où elle atteignit à grand peine 1600 personnes ce que confirmera le commissaire aux Affaires Indiennes Abraham Gesner. Mais cela non pas grâce à de meilleurs traitements, qui auraient favorisé de nouvelles naissances, mais dû au retour de Mi’kmaq d’autres régions, comme l’île saint Jean/ Prince Edouard, le Nouveau Brunswick, peut-être du Canada ou même des nouveaux états unis d’Amérique.
Un triste siècle passa ainsi pour les Mi’kmaq !
Ils virent le gouvernement de la Nouvelle Ecosse instaurer la loi sur les Indiens en 1842 A l’issue de cette loi Joseph Howe nommé commissaire des Affaires indiennes s’employa à soutenir la politique en faveur des Mi’kmaq avec le gouverneur Falkland. Sans ces deux personnages assez compatissants leur disparition, étant largement programmée, aurait été inévitable. Joseph Howe blâmait fortement le gouvernement pour avoir permis depuis tant d’années une telle pauvreté et une telle mortalité chez ce peuple. Il faisait le constat que les Amérindiens pouvaient parfaitement continuer à avoir eux aussi leur langue et leur culture. Il citait l’exemple des Acadiens, certains d’entre eux ayant survécu à la déportation honteuse et à leur terrible exil étaient revenus, depuis maintenant 80 ans, démontrant que les descendants Français vivant au milieu d’une population britannique étaient toujours Français ! Les Mi’kmaq ont accepté de vivre dans les réserves pensant que c’était leur seul moyen de survivre en tant que peuple distinct.
Après s’être emparés de leur pays, après plus de 119 ans les premières mesures d’éducation de la Loi sur les Indiens de 1876 se mirent en place, même si c’était principalement dans le but de les assimiler et de détruire leur langue amérindienne tout autant que leur culture Mi’kmaq ! « Cette loi n’a pas été élaborée pour voir prospérer les Indiens mais pour leur porter un coup fatal en les assimilant » Cf. Dany Paul un Micmac.
Les Indiens qui acceptaient de vivre dans les Réserves avaient été divisés en bandes ou groupes, permettant de les transformer en unités distinctes et de les diviser. Effectivement cela a élevé des frontières entre chaque communauté puisqu’il leur a été interdit de circuler librement sans avoir auparavant demandé l’accord des autres groupes y compris même par quel chemin passer. Impensable pour eux qui avaient toujours vécu libres sur tous ces immenses territoires se déplaçant au gré des saisons, de la pêche et de la chasse… Cette loi énonçait certes la souveraineté des Premières Nations, mais le gouvernement et les fonctionnaires ne cessaient ensuite de la nier, tout comme était reconnue l’indépendance des « bandes et de leurs conseils », mais par la suite ils s’efforçaient de les rendre complètement dépendants ! Pourtant, pire que tout, par cette loi le gouvernement anglais se permettait de décider qui avait le droit de se considérer Indien ou non. Ainsi une personne ayant réussi des études et obtenu un diplôme universitaire, perdait de fait, son statut d’Indien. Les études n’étaient pas interdites mais cette finalité a empêché bien des Indiens d’obtenir un diplôme. Le racisme était tel, qu’il était difficile à un Micmac d’aller en classe avec des anglophones, une jeune institutrice Micmac était parvenue à terminer ses études et enseignait dès lors dans les écoles. Félicitée pour son courage d’avoir résisté pendant ses années d’études au racisme anglais ambiant, elle expliqua qu’elle n’avait aucun mérite car elle avait toujours eu l’habitude, depuis toute petite, d’aller à l’école avec des Acadiens, ces Français ne connaissaient aucun racisme envers eux, cela l’avait confortée sur ce qu’elle était et sur l’égalité réelle de tous les êtres humains. Elle détailla alors que leurs liens d’amitié et d’estime avec les Français remontaient depuis Membertou et Samuel de Champlain, Pierre Dugua des Monts, Jean de Poutrincourt et tous les autres Français par la suite, ces liens n’avaient jamais faibli depuis.
Dans la loi sur les Indiens, une indienne qui épousait un non Indien perdait son statut d’indienne, mais une blanche qui épousait un Indien devenait indienne. C’était pourtant fondamental d’être inscrit sur le registre des Indiens pour affirmer ses droits ancestraux.
Cette discrimination par le sexe a été finalement abrogée … le 17 avril 1985.
Joseph Howe a poussé le gouvernement à faire davantage. Il est difficile de retrouver précisément tout ce qu’il a fait comme Surintendant aux affaires indiennes dans les archives. Est-ce que cela a été mis de côté parce qu’il dévoilait trop le racisme qui avait cours en Nouvelle Ecosse, causant tant de souffrances et de morts aux Indiens ? De même cela est des plus compliqué de trouver des rapports sur la politique des scalps induisant la conduite barbare des fonctionnaires anglais.
Les Mi’kmaq subirent les sanctions du gouvernement et des fonctionnaires gouvernementaux mais ils discernèrent en George Monk Surintendant aux affaires indiennes tout comme par la suite en Joseph Howe et Abraham Gesner des personnes qui ont eu de la compassion pour eux et ont tenté dans la mesure de leurs moyens de les soutenir.
Individuellement de nombreux colons anglais ont été également compatissants et ont cherché à les aider et à soutenir ceux mourant de faim, certains ont même établi des pétitions pour peser sur le gouvernement mais sans résultat, le gouvernement a toujours fermé les yeux sur leurs détresses, même si parfois il consentait à allouer une petite somme pour des vivres et des couvertures, cela était insuffisant et les Indiens ont continué à souffrir sans vêtements et sans soins médicaux.
De date en date leur existence est devenue de plus en plus épouvantable :
*Vers 1800 en plus de leurs ennuis sans fin de nombreuses maladies sont arrivées en Nouvelle Ecosse avec les nouveaux colons anglais et les migrants écossais, ainsi des épidémies de variole eurent lieu en 1826, de même un vaisseau porteur lui aussi de cette grave maladie infectieuse avait accosté au cap Breton puis suivirent le typhus et la fièvre thyroïde, tout cela terrassa facilement les Mi’kmaq, trop affaiblis physiquement.
*En 1831 leur situation, décrite par une nouvelle pétition, est désespérée.
*En 1838 un rapport sur la vie des Mi’kmaq indiquai qu’ils s’élevaient alors le 22 aout 1838 à 1425 individus, seuls restant alors sur les 200.000, recensés au moment de l’arrivée anglaise sur leur sol. Cela ne fit changer aucune politique à leur égard, avaient-ils alors l’intention d’attendre encore quelques années pour que le problème indien de la fin des Mi’kmaq se règle tout seul ?
*En 1834, Rien ne change là encore, que ce soit pour ceux de Windsor ou du Cap breton
*En 1840 la Nouvelle Ecosse était un pays florissant et abondant où tout poussait sur les bonnes terres des Acadiens, maintenant aux mains des Anglais. Peu de colons anglophones se trouvaient démunis, hormis les Mi’kmaq et les Acadiens dont certains avaient essayé de revenir vivre sur leur terre d’Acadie après le traité de 1763.
*En 1841 le grand chef Louis Benjamin Paul ou Passauhmigh de Shubenacadie désespéré pour son peuple ne recevant aucune réponse du gouvernement provincial écrivit à la reine Victoria, il lui exposa comment l’homme blanc d’Angleterre avait pris tout ce qui leur appartenait et lui demandant d’intervenir pour arrêter cette politique honteuse contre eux.
*En 1843 Joseph Howe envoya « des versements de charité » mais son inquiétude était grandissante, si on ne changeait pas davantage de politique envers eux, la race des Mi’kmaq risquait de s’éteindre dans les décennies suivantes.
*En 1846 malgré ces appels rien de plus n’étant entrepris, cela continua à s’aggraver et ceux de Digby continuèrent à mourir faute de nourriture
*En 1851 au Cap Breton la famine était là aussi, affreuse !
*En 1855 Ceux de New Glasgow étant presque tous morts de faim et la même chose pour ceux de Pictou en 1856 en 1861 le Surintendant des affaires indiennes les décrivit en 1861 « comme indigents et misérables »
Il a fallu attendre 1867 et la Confédération pour que le gouvernement fédéral reprenne à son compte leur terrible condition, mais il le fit du bout des lèvres, si bien que les années passèrent encore, sans que cela n’améliore vraiment leur triste existence.
Dans des années plus récentes encore, en 1982 un médecin, Virginia Miller, écrivit un rapport décrivant la totale misère des Mi’kmaq.
Les Premières Nations ont enduré toutes ces souffrances afin de conserver leur identité, si elles avaient accepté de s’assimiler elles n’existeraient plus ! Elles ont été ignorées et le gouvernement a conçu le Livre Blanc cependant « préserver la culture des Premières Nations n’était pas le but du gouvernement, les dirigeants voulaient qu’ils se fondent et disparaissent dans le grand creuset commun anglais » Pour établir ce Livre Blanc de nombreuses consultations ont été certes tenues avec les Premières Nations, mais subtilement avec ceux, parmi les Indiens, qui correspondaient aux idées proposées par le gouvernement anglais, alors « les consultations furent de pures … Plaisanteries. »
Le Livre Blanc explique parfaitement que les Premières Nations ont bien été victimes de discriminations ! Pourtant, le racisme, qui a été primordial pour entraîner ces ségrégations tant financières, économiques, ou éducatives, loin d’être retracé a été dissimulé voire occulté ! A cause de ce refus de la société de les faire participer à la vie économique du pays, les Amérindiens ont été dépendants des gouvernements, qui agissant avec un paternalisme humiliant, les ont empêchés d’améliorer les conditions consternantes de leur vie, dans laquelle on les a plongés.
Les Premières Nations de l’Amérique septentrionale vivaient sur ce sol depuis des milliers d’années avec leur civilisation et leurs cultures propres. Les Amérindiens ont été marginalisés sous tous les gouvernements canadiens anglophones successifs, privant ces peuples de leurs terres, de leurs ressources naturelles et les ont sans cesse contrôlés et assujettis. Joseph Howe lors de son discours anti-fédéraliste en 1867 avait exprimé sa tristesse, mais aussi son admiration pour les Mi’kmaq :
« … Leur race est en perdition mais même dans les jours de décadence et d’humiliation elle a toujours relevé le défi de conserver le respect. Quand le dernier des Micmac inclinera la tête dans son campement solitaire et qu’il confiera son âme à son créateur, il pourra repenser avec fierté à son passé et remercier le Grand Esprit que son peuple ne compte aucun Tupper ni Henry, ni Archibald ou Mc Cully… »
Sources
Archives de la Nouvelle Ecosse, le Canada français documents sur l’Acadie
Archives de la Confidency of Mainland Micmac
Documents publics
Modification Loi sur les Indiens 1876 à 1996
Loi du Canada « les Indiens inscrits deviennent citoyens canadiens » du 7 juin 1956
Registre général des Réserves
Daniel N. Paul responsable des affaires indiennes « Ce n’était pas nous les Sauvages » Editions le bouton d’or d’Acadie juin 2020
Les Mi’kmaq autant anéantis que les Français d’Acadie !
La présence Mi’kmaq est bien absente de l’Histoire du Canada anglophone et de la Nouvelle Ecosse, l’ancienne Acadie française.
Il est en effet difficile en remontant dans le passé, de trouver des références importantes, dans la presque totalité des textes de l’histoire coloniale anglaise de ce peuple amérindien. Au vu des traitements infligés à ces Premières Nations, les historiens anglophones ne peuvent pas avoir fait une omission si cruciale sans que cela ne nous interroge… Alors que la vie des Français d’Acadie a été largement répertoriée et bien décrite y compris au moment de leur inique déportation dans les colonies anglaises, pour la majorité d’entre eux.
Lors de l‘arrivée des Français avec Pierre Dugua de Mons et Samuel de Champlain en 1604, les Mi’kmaq/Micmac et leur chef Membertou qui vivaient dans la région située au bord de la baie, qu’ils avaient appelée tout simplement Baie des Français, à force de les voir aller et venir dans cette baie, (aujourd’hui baie de Fundy) les avaient accueillis avec bienveillance et sympathie, au moment de leur installation à cet endroit, lors de la construction du petit fort de Port Royal en 1605 puis très rapidement s’était créée avec eux une profonde amitié, elle ne s’est jamais démentie depuis, ils sont restés sans cesse présents à leurs côtés durant plus d’un siècle et demi, édifiant de vrais et solides liens d’amitié avec eux.
Ce peuple venu de France était arrivé en ami, et non en conquérant sur leur sol. Les Français avaient apporté le réel savoir-faire de leur pays, un savoir-faire qui leur a permis de rendre toutes ces terres fertiles, ajouté à leur travail acharné. Ils sont arrivés à cultiver toutes sortes de légumes ou de fruits inconnus jusqu’ici des Amérindiens, de ces régions… Les Mi’kmaq/Micmac auprès d’eux se sont beaucoup mieux nourris que lors de leurs seules chasses, pêches ou cueillettes…Ils ont toujours considéré les Français d’Acadie comme des frères, et lorsque l’adversité les submergeait, on les a chaque fois trouvés à leurs côtés ! Ils ont encore été là auprès des Acadiens, résistant tout autant qu’eux contre l’envahisseur anglo-saxon, les aidant pour tout y compris à s’emparer d’un bâtiment anglais, comme cela s’est produit dans le havre à l’étang, une goélette qui amenait du ravitaillement aux Anglais de Port Royal, - devenu Annapolis -, et tant de nombreuses autres actions de résistance ont été ainsi répertoriées, une résistance menée conjointement Acadiens et Micmac ! Ils étaient là aussi au moment où l’escadre du duc d’Anville, envoyée en 1646 par la France, était attendue pour tenter de reprendre la forteresse de Louisbourg.
Les Français avaient réussi à bâtir ce pays d’Acadie années après années entourés par les Mi’kmaq, malgré les mille déboires dus aux Anglais leur jalousant ce pays, et les terres qu’ils avaient défrichées grâce à un labeur intense sur plusieurs générations. Ces Français, devenus au fil des ans des Acadiens, ne désiraient qu’une chose, celle de vivre en paix et surtout de rester « Neutres » au milieu des différends existant entre les deux couronnes française et anglaise, jusqu’au moment où l’ennemi d’Angleterre s’attaquera directement à eux !
Cela dura ainsi plus d’un siècle malgré les Anglais qui ne cessaient à intervalles réguliers de s’emparer de leur pays et d’en chasser les Français, parce qu’au gré des différents traités, l’Acadie était ensuite rendue à la France.
La France s’était établie en Amérique septentrionale où elle avait créé la Nouvelle France comprenant dès 1605 l’Acadie, puis le Canada avec le fort de Québec en 1608 le long du Saint Laurent. Au fil des explorations menées par des Français peu ordinaires, qui s’élanceront à travers cet immense pays, en plantant des croix fleurdelisées au nom du Roi de France, au fur et à mesure de leurs avancées, la Nouvelle France s’agrandira sans cesse avec de nouveaux territoires, jusqu’à la Baie d’Hudson au Nord, jusqu’aux Rocheuses à l’Ouest et jusqu’au golfe du Mexique au Sud, lors de la découverte de la grande Louisiane. Mais cependant, la France et les Français n’avaient aucunement l’intention, et cela s’est confirmé tout le long que dura le siècle et demi du Régime français, de déposséder les Premières Nations ni de leur liberté ni des richesses de leur pays et encore moins de leurs coutumes ou de leur façon de vivre. Rien ne changea en effet pour elles dans leur façon de vivre, aussi longtemps que les Français restèrent. Cette entente s’est largement observée aux nombreux rapprochements amicaux entre ces peuples pourtant si différents, et même des rapprochements plus qu’amicaux eurent lieu sans étonner personne, lors des mariages franco-amérindiens. Des personnages fort connus comme Pierre Boucher en Nouvelle France qui avait épousé une Wendat, ou Charles de la Tour, lieutenant général d’Acadie une Mi’kmaq, pour seuls exemples.
Cependant lorsque de grands remous apparaissaient en Europe cela se répercutait inévitablement en Amérique septentrionale, ainsi au moment de la succession d’Espagne, cela se termina par le traité d’Utrecht en 1713 où la France dut céder aux Anglais, non seulement la Baie d’Hudson, mais également l’Acadie. Ces derniers s’empressèrent de la rebaptiser «Nouvelle Ecosse » comme ils l’avaient déjà fait une première fois en 1613, mais cette fois définitivement. Les Mi’kmaq avaient assisté aux cruautés que ces étrangers d’Angleterre ne cessaient de faire aux autres Abénaquis de Pentagouët, mais aussi à tous les Acadiens, les « French Neutral » comme ils les appelaient, dès qu’ils le pouvaient depuis un siècle. Ils redoutaient terriblement avec raison la victoire des Anglais et de ceux des colonies de Nouvelle Angleterre sur les Français d’Acadie, comprenant parfaitement que cela serait tragique aussi pour eux.
Le Traité d’Utrecht sonnera alors le glas de l’Acadie française.
Lorsque les Anglais occupèrent définitivement l’Acadie et la Baie d’Hudson au traité d’Utrecht en 1713, la population Mi’kmaq était alors importante ce qui permit sans doute à cette nation amérindienne de pouvoir résister et survivre, aux nombreuses attaques contre elle.
Dès lors, les Anglais, une fois installés en conquérants, ont pu bien plus aisément continuer à s’attaquer aux Acadiens, et les résistances et les luttes de ces derniers pour tenter de survivre ont été d’autant plus rudes, que ces nouveaux venus sur ce sol les détestaient. Certes ils étaient considérés comme d’affreux papistes, certes ils étaient aussi comme des frères avec les Sauvages, mais pire que tout ils détenaient -pour les avoir eux-mêmes défrichées- les meilleures terres ! Ils ne voulaient qu’une chose se débarrasser d’eux, ce qu’ils arrivèrent à faire en fin de compte avec une inhumanité peu commune, lors d’une déportation barbare et monstrueuse, avec ce « Grand Dérangement » en 1755. Les Mi’kmaq étaient encore présents aux côtés des Acadiens, au moment où a eu lieu ces épouvantables arrestations, un grand nombre d’entre eux réussit à échapper aux Anglais et à s’enfuir à travers les bois, avant même d’être embarqués de force sur les navires pour être déportés. Ils tentèrent de rejoindre la partie de la Nouvelle France encore française, à la fois par terre ou encore en tentant de suivre les fleuves et les rivières ainsi que la vallée de la Matapédia. Les Mi’kmaq partagèrent aussi le triste sort des Acadiens, au cours de ce terrible et glacial hiver de 1756-57 au camp des réfugiés de Miramichi, soutenus, autant qu’il le pouvait lui-même, par le lieutenant Charles de Boishébert et le régiment français.
Il s’était créé entre ces Français d’Acadie et les tribus Mi’kmaq une telle fraternité que chacun alors protégeait l’autre des attaques anglaises. Cette protection mutuelle était fondée sur cette longue et profonde amitié mais aussi sur l’admiration, le respect de la culture de l’autre. Cette alliance indéfectible développée entre ces Français et les Mi’kmaq provenait également de l’esprit profond de la diplomatie de la France, préconisant naturellement ce vivre ensemble, proposant ainsi sans aucune différence l’instruction des enfants des Amérindiens, autant que ceux des enfants des Français. C’est ainsi que parmi ces Premières Nations si certains désiraient se rendre en France, ils pouvaient le faire tout autant qu’un « naturel François ».
Les alliances nouées par les Anglais avec les tribus amérindiennes n’étaient pour la plus grande part fondées que sur leur propre avantage, et s’ils se sont alliés avec certaines tribus, souvent les plus belliqueuses, ces alliances basées sur le seul intérêt loin de toute véritable amitié, ne duraient que le temps, où les deux côtés y trouvaient leur bénéfice, comme avec les Iroquois, ces ennemis ancestraux des Mi’kmaq.
Les Iroquois (Odinossonis) appelés aussi peuple des Cinq Cantons à cette époque, n’étaient cependant ni pour les Anglais ni pour les Français ils étaient pour les Iroquois ! C’est pourquoi on les verra au long des années pencher pour les uns ou pour les autres selon leurs seuls intérêts.
Les Micmac/Mi’kmaq d’Acadie faisaient partie de la confédération Waban Aqui, ainsi que les Abénaquis et les Malécites. Ce peuple algonquin de la côte Nord-Est de l’Amérique du Nord se répartissait sur de nombreux territoires d’Acadie, de l’île Saint Jean, de Gaspésie, ou de Terre-Neuve… Ceux vivant dans la région de la Listuguj/ Restigouche et autour de la Baie des Chaleurs, portaient un saumon comme emblème. Pour ceux de la région de Miramichi leur emblème représentait un guerrier armé d’une lance et d’un arc. Certains habitaient sur l’île Royale, aujourd’hui appelée Cap Breton, les Micmac l’avaient dénommée Onamag, elle est devenue le siège de leur grand Sachem ; Ils vivaient de chasse, de pêche et de cueillette, de racines sauvages et de fruits secs, à l’automne comme la grande majorité des autres peuples Amérindiens, ils partaient pour la chasse au caribou. Parents avec les Abénaquis de Pentagouët de Nouvelle Angleterre et les Malécites du Nouveau Brunswick, ils n’étaient pourtant pas agriculteurs. Ils n’habitaient pas dans des Tipis en peau, mais dans des Wigwam coniques qui étaient fabriqués sur la base d’un treillis de bois d’épinette, recouvert d’écorces de bouleau. Sur le sol, ils disposaient des branches fines de sapins qu’ils recouvraient de confortables fourrures. Leurs wigwams pouvaient être démontés et remontés facilement selon les besoins de leurs déplacements. Les hommes et les femmes portaient des vêtements à franges fabriqués en peau de Caribou, ils portaient tous les cheveux longs, autant les uns que les autres. Ils se servaient de deux sortes de raquettes, les plus grandes pour la neige poudreuse, les plus petites lorsque la neige était dure. Les funérailles chez ses peuples Mi’kmaq donnaient lieu à des cérémonies qui rassemblaient toute la tribu, et qui se terminaient par un grand festin. Ils se noircissaient le visage pendant trois jours entiers en signe de deuil, pourtant ils n’avaient pas particulièrement soigné leurs malades vieillissants, ils ne le nourrissaient plus et le chaman pour activer le décès, versait de l’eau glacée au niveau du nombril des vieillards ! Selon les personnes, certaines préparaient eux-mêmes leur propre mort, sans doute pour l’activer, connaissant le peu de soin qu’ils apportaient aux mourants, car les malades pouvaient aussi être purement et simplement abandonnés à leur sort !
Depuis la main mise anglaise sur l’Acadie devenue alors Nouvelle Ecosse les dirigeants anglais avaient tout tenté pour mettre les tribus Mi’kmaq de leur côté et les séparer des Français. Ils instaurèrent dans ce but de leur faire signer des traités, visant à obtenir leur soumission ni plus ni moins à la domination britannique ! Pourtant un des gouverneurs Edward Cornwallis déclarera sans s’en cacher : « les traités ne valent rien, seule la force prévaudra » Et c’est ce qui se passera, puisqu’ils étaient là pour prendre les terres de ces « Indiens » et pour y établir le plus de colons possibles !
La résistance à la domination britannique s’est encore accrue car les gouvernements anglais ont continué à faire venir de nombreux colons anglophones, à leur concéder des terres, y compris des concessions faisant plusieurs milliers d’acres, sans tenir compte de l’opposition acharnée des Mi’kmaq. Cette usurpation de terres sans leur consentement pouvait faire craindre aux autorités anglaises que ces derniers, à juste titre, ne tentent de faire cesser cette agression des Anglais en se retournant violemment contre eux. Ceux-ci pour se justifier arguaient que les Mi’kmaq avaient perdu leur droit de propriété sur la Nouvelle Ecosse parce qu’ils avaient pris les armes contre eux, ou encore que la France leur avait donné toutes leurs terres en même temps que le pays ! Ce que réfuta les Mi’kmaq, jamais les Français ne leur avaient pris leurs terres, ils ne pouvaient donc pas avoir pu les leur céder !
Après le départ de la France de l’Acadie, les exactions sur les Acadiens et sur les Mi’kmaq par les Britanniques n’eurent plus de mesures. Cette province de la Nouvelle France devenue province anglaise devait être colonisée et elle le serait !
Il fallait faire vite, si les hostilités reprenaient entre Français et Britanniques ils savaient parfaitement que les Mi’kmaq n’hésiteraient pas un instant à soutenir les Français. En 1740 les Anglais pressaient sans cesse les Acadiens de signer le serment d’allégeance à la couronne britannique, et les Acadiens subirent de plus en plus de contrôles dans leur vie de tous les jours, tout en augmentant le prix des impôts sur toutes leurs marchandises. En 1744 une nouvelle guerre, celle de la succession d’Autriche se déclara en Europe, se répercuta entre la France et l’Angleterre, aussitôt le Mi’kmaq prirent faits et causes pour les Français et se mirent sans surprise de leur côté.
Le gouvernement français de Québec jugeant que leurs vies étaient en danger envisagea de faire venir du côté français et d’y réinstaller tous ceux qui le désireraient, Acadiens et Micmacs. Certains acceptèrent mais ils ne furent pas nombreux, comment quitter sa maison et tout ce qui avait fait leur vie depuis un siècle et demi ? Ces lieux mêmes où leurs ancêtres français venus de France avaient si solidement replanté leurs racines et bâti ce pays ? Alors ceux qui restèrent furent soumis à des traitements si barbares de la part des Anglais, que les Acadiens avec les Mi’kmaq à leurs côtés n’ont pas eu d’autre choix que de résister, eux qui jusque-là voulaient rester Neutres… Mais tout était déjà bien orchestré et élaboré depuis Londres sous la direction de Lord Halifax. Ainsi en 1749 ce nouveau commissaire du Commerce et des Plantations fit venir encore davantage de colons protestants pour supplanter ces Français catholiques et repousser tous les Amérindiens et Edward Cornwallis, le gouverneur, établit une base militaire pour parer à la menace franco-amérindienne que cela allait déclencher. Immédiatement une nouvelle ville sera construite au nom de ce lord, ce sera Halifax, soigneusement entourée de fortifications.
Le 1er octobre 1749 Cornwallis lors du conseil qu’il réunit dans le port d’Halifax sur le navire le Beaufort, démontra sa parfaite cruauté en obtenant l’approbation de tous pour déclarer officiellement la guerre aux Mi’kmaq avec l’institution de la prime aux scalps ! « …Il ne faut pas les confirmer comme un peuple libre et indépendant, nous devons les traiter comme des bandits et des rebelles au gouvernement de sa majesté. Il faut donc les poursuivre jusque dans leurs repaires et leur montrer qu’ils ne sont nulle part en sécurité dans la province. » Aussitôt ils levèrent une compagnie de 50 personnes volontaires pour les pourchasser dans les bois dirigés par John Gorham, ils firent venir une autre compagnie de cent hommes pour les renforcer en prévision de l’hiver, sans oublier une récompense de dix guinées pour tout Mi’kmaq fait prisonnier…ou tué ! Une tentative d’éliminer les Mi’kmaq était donc bien commencée, au coût de dix guinées pour le Trésor du gouvernement fédéral anglophone. Ce n’était pas la première fois que Cornwallis démontrait autant d’inhumanité mais ses conseillers n’étaient certes pas à exempter !! Edward Cornwallis avait été le lieutenant-colonel stationné en Ecosse, il avait participé à la terrible bataille de Culloden, fin avril 1746, il avait encouragé et contribué avec ses troupes à la maltraitance barbare des Ecossais.
Le traité de 1749 renouvela celui de 1725 c’est-à-dire déposséder les Amérindiens Mi’kmaq et les autres petites nations, de leur liberté et de leurs terres. Les chefs Malécites ratifièrent ce traité de paix le 4 septembre 1749, les Mi’kmaq quant à eux ne l’acceptèrent pas, mais l’abandon d’une partie de leurs alliés Malécites, qui se mirent ainsi du côté de l’envahisseur anglais, leur démontra parfaitement qu’à présent leur situation allait se dégrader encore plus rapidement. Malgré cette perspective peu réjouissante, ils poursuivirent courageusement la résistance pour leur survie, avec l’aide des Acadiens aussi maltraités qu’eux, et de quelques petits groupes Malécites tenaces.
Dès septembre il est réaffirmé aux chefs Mi’kmaq ce qu’on leur demande depuis 1725 de se soumettre ni plus ni moins à la domination britannique confirmant leur crainte pour de nouveaux plans de la colonisation britannique. Très inquiets les Mi’kmaq non seulement renouvelèrent leur déclaration de guerre mais attaquèrent des cibles militaires et commerciales. Devant cette résistance, à l’expropriation de leurs terres à laquelle ils s’attendaient, les autorités par la voix du gouverneur affirma que cette guerre ne devrait pas se terminer par un accord de paix, mais « par l’éradication pure et simple de tous ces Mi’kmaq de la péninsule, une bonne fois pour toute » !
La vie d’un Amérindien semblait bien en effet n’avoir aucune valeur pour les Anglo-saxons ils ne lui accordaient aucun droit civil ou humain, cela avait été largement constaté depuis l’implantation même des colonies de Nouvelle Angleterre en 1620, depuis l’arrivée des premiers colons, les pères pèlerins ces fathers pilgrims, si un Anglais tuait un Indien cela n’était pas considéré comme un crime et restait totalement impuni.
Les Micmac/ Mi’kmaq ont lutté pour préserver leur liberté mais la proclamation barbare de 1749 a été dévastatrice pour eux, puisqu’en effet ont été massacrés autant les hommes que les femmes, les enfants, ou encore les vieillards et les infirmes, tous ceux que les chasseurs de prime ont pu attraper, ont été scalpés. Un groupe de rangers de Gorham ayant rapporté 25 scalps, a réclamé la prime de dix livres pour chacun. Mais tous ces scalps ne venaient pourtant pas uniquement d’Indiens certains venaient sans aucun doute possible de Blancs, c’est-à-dire des Français d’Acadie !
Cela ne les interpella pas un instant, sachant que parmi les Acadiens certains étaient métissés, ils les considéraient tout autant que les Sauvages ! Cette chasse aux scalps entraîna des réactions chez les Français de Louisbourg, écœurés de voir ce qui se passait dans leur ancienne Acadie, ils encouragèrent les Mi’kmaq à répliquer, en leur offrant à eux aussi une prime non pour des scalps anglais mais uniquement pour des soldats anglais faits prisonniers et vivants. A noter, cela ne visait pas les civils et encore moins les femmes et les enfants ! Cependant les soldats prisonniers amenés à la forteresse de Louisbourg étaient rapidement libérés sains et saufs par les Français, à la différence des prisonniers Mi’kmaq détenus par les Anglais, soit ils étaient détenus indéfiniment, soit envoyés à Boston pour y être pendus.
L’Abbé le Loutre, terriblement consterné de ce que les Anglais faisaient subir comme cruautés aux Acadiens et à « ses » Micmac/ Mi’kmaq dont il était le missionnaire attitré, n’a cessé de les défendre et certes s’il les a encouragés à ne pas se laisser faire, à résister, c’était parce que les Anglais eux-mêmes ne cessaient de brutaliser ces deux peuples et d’entreprendre des représailles envers eux, depuis des années. Cependant, en se mettant franchement avec eux, en travers des projets des Anglais, Le Loutre a, bien entendu, été détesté par ces derniers, qui ne cessaient d’être déterminés à chasser les Acadiens et à déposséder et assujettir totalement les Mi’kmaq. Excédés ils mirent la tête de l’abbé Le Loutre à prix !l C’est pourquoi les descriptions acerbes, et même davantage, que font les autorités anglaises et principalement le gouverneur Edward Cornwallis de ce prêtre, qui n’a jamais cessé de défendre les Mi’kmaq et les Acadiens et de les soutenir contre eux, ne sont donc pas étonnantes ! Un homme comme le Loutre s’il a considérablement aidé les tribus à faire face à leur situation, il a également proposé des arrangements de paix importants entre les Mi’kmaq et les Anglais, mais tous ont été repoussés avec mépris et… dérision ! Les Mi’kmaq s’étaient réunis en conseil le 23 août 1754, ils auraient été prêts à céder la plus grande partie de leur pays contre un plus petit territoire, où ils auraient pu rester et vivre tranquilles pour toujours, et même le partager avec des Malécites et d’autres petites nations. Leur lettre apportée par l’Abbé Le Loutre à Halifax pouvait amener une grande avancée pour les Britanniques, mais il fallait pour cela qu’ils désirent vraiment cette paix avec les Mi’kmaq. Bien au contraire le gouverneur Lawrence et tout le conseil rejetèrent les propositions, ils ne voulaient rien céder, et surtout pas un seul morceau de bonnes terres aux Indiens.
Après s’être lâchement et cruellement débarrassé des Acadiens en 1755 et 1758 il aurait été facile de penser néanmoins, puisque les Anglais avaient enfin réussi à s’emparer de l’Acadie puis à en chasser les Acadiens, comme les feuilles au vent sur le rivage, qu’ils allaient peut-être mener une politique coloniale moins épouvantable par rapport aux Mi’kmaq, ce premier peuple vivant sur ce sol, depuis des milliers d’années. Ils ont préféré accroître la pression sur ces tribus pour tenter de les assujettir, et si possible à long terme de s’en débarrasser comme ils s’étaient débarrassés des Acadiens en tentant de les exterminer, que ce soit par la force militaire ou les mauvais traitements, car ces tribus qu’ils décimaient jours après jours, représentaient encore pour eux une force à craindre.
Entre les Mi’kmaq et les Anglais tout ne se termina donc pas du tout tranquillement après la Déportation inhumaine des Acadiens, ni même après le traité de 1763 et le départ définitif de la France, de cette Amérique septentrionale, qu’ils revendiquaient pour leur seul bénéfice.
Après le précédent traité d’Utrecht, les Britanniques avaient enfin récupéré au traité de Paris de 1763, soit cinquante ans plus tard, la totalité de cette Nouvelle France qu’ils désiraient depuis plus d’un siècle. Une fois le traité signé, la guerre de conquête terminée les Mi’kmaq qui avaient déjà largement subi les gouvernements anglais depuis 1713 perdirent tout espoir. En effet ils avaient assisté mais partagé aussi durant toutes ces années, ce qu’ils avaient fait subir d’épouvantable aux Français d’Acadie, avec cette politique anglaise visant avec cruauté à soumettre ces « French Neutral » comme ils les appelaient, dans l’espoir d’en débarrasser toute la province, ce qu’ils arrivèrent à faire lors du monstrueux « Grand Dérangement » de 1755 suivi trois ans plus tard de celui de l’île Saint Jean en 1758.
Evidemment dans ces circonstances les tribus Mi’kmaq n’acceptèrent pas de faire la paix avec le conquérant anglais, une paix uniquement dictée par ces derniers pour leur seul bénéfice, les affrontements continuèrent… Ils s’amplifièrent encore davantage au moment où une grande révolte contre Londres se développa chez les colons anglais de Nouvelle Angleterre, ces colons révoltés furent désignés par Londres comme des « Insurgents ». Les Mi’kmaq prirent faits et causes pour eux espérant que s’ils gagnaient leur indépendance, cela aiderait les Français à revenir en Nouvelle France et à en chasser les Anglais ! Certains parmi eux se rendirent au Massachusetts et signèrent le traité de Watertown en juillet 1779, mais de leurs côté les Britanniques pour inciter les Mi’kmaq à rester neutres et à les empêcher de rejoindre les Insurgés leur fourniront aussitôt tout ce qui sera nécessaire à leur survie, ce qui perdura seulement jusqu’à la fin de la guerre d’indépendance des colonies britanniques avec le traité de 1783. En ces difficiles temps de rébellion dans leurs colonies de Nouvelle Angleterre ce n’était effectivement pas le moment pour eux d’avoir une autre guerre avec les Indiens.
Tout aussitôt les autres colons anglais restés loyaux à l’Angleterre arrivèrent alors très nombreux en Acadie et au Nouveau Brunswick, afin d’échapper aux représailles de ces nouveaux étasuniens, qu’ils n’avaient pas soutenus dans leur révolte. Ces Loyalistes comme ils ont été appelés, ont été au nombre de cinquante mille environ à se réfugier au Canada, récemment devenu anglais. Ils obtinrent immédiatement des terres du gouvernement britannique et dès 1783 presque quinze mille d’entre eux s’étaient déjà installés dans les provinces maritimes, repoussant toujours plus loin les Mi’kmaq sur leur sol.
Le gouvernement institua très officiellement pour ces tribus Mi’kmaq, des terrains qui seraient « réservés pour leur usage et leur bien ! » Les Réserves visaient à séparer les « Blancs » des « Peaux Rouges » méthode largement utilisée par les Anglo-saxons partout, que ce soit au Canada devenu anglais, en Nouvelle Ecosse mais aussi aux États-Unis d’Amérique…
En 1821 au total 20.765 acres au milieu de marécages, des tourbières ou des montagnes pierreuses, sans doute à grand-peine 10% de tous leurs immenses territoires. Hélas, repoussés sur ces terres incultes et arides, ils vont devenir des parias sur le sol de leur propre pays. A mesure que leurs territoires diminuaient, à mesure qu’ils furent installés dans ces terrains sordides, les Micmac commencèrent à devenir semi sédentaires, puis totalement sédentaires étant dans l’impossibilité de se nourrir sur leurs anciennes terres, dans leur propre pays !
Ainsi, ils subirent cette préemption de tous leurs territoires lors de l’arrivée de plus en plus nombreuse de colons anglais et écossais, qui empiétèrent même dans les « réserves » où ils avaient été assignés, ils assistèrent stupéfiés à l’abattage de leurs forêts restreignant l’habitat de l’Orignal et du Caribou, et par voie de conséquences, tous les autres animaux se sont également raréfiés. Mais les bouleversements ne s’arrêteront pas là, il se rajoutera également des barrages sur les rivières, noyant parfois des portions entières de leurs terres. Leur source alimentaire principale ainsi diminuée réduisit encore davantage ces tribus à des états de famine. Dépossédés de tout leur pays, de leurs moyens de subsistances, de leurs libertés et de leur dignité, les Mi’kmaq durant les années qui suivirent cessèrent, contraints et forcés, leurs hostilités se retrouvant seuls, les Français d’Acadie avaient été déportés et les Français étaient repartis en France ! De plus impossible de compter sur les insurgés anglo-saxons devenus grâce à la France les nouveaux étatsuniens, qui ne leur démontrèrent aucune reconnaissance pour leur précédent soutien, pas plus d’ailleurs qu’à la France !! Seule restait une petite population canadienne française le long du Saint Laurent elle aussi bien assujettie sous la main mise anglaise. Alors frappés par la pauvreté les Mi’kmaq furent contraints d’accepter une paix humiliante et injuste. Leur espoir du retour de la France s’amenuisa de plus en plus, seule une petite flamme s’alluma encore pour eux au moment de la Révolution française, qui espérèrent-ils alors, aurait pu permettre ce retour.
Ils durent vivre sous cette « English Liberty » qu’on leur imposait et sont devenus des proscrits dans leur propre pays, et pire en voie d’extinction. Malgré cela les Anglais les considéraient toujours comme une menace
La population Mi’kmaq avait continué à décliner jusqu’en 1847, elle était à un niveau si bas qu’elle faisait craindre la disparition totale de leur race, puis les observateurs ont vu leur nombre légèrement remonter en 1867, au moment de la Confédération où elle atteignit à grand peine 1600 personnes ce que confirmera le commissaire aux Affaires Indiennes Abraham Gesner. Mais cela non pas grâce à de meilleurs traitements, qui auraient favorisé de nouvelles naissances, mais dû au retour de Mi’kmaq d’autres régions, comme l’île saint Jean/ Prince Edouard, le Nouveau Brunswick, peut-être du Canada ou même des nouveaux états unis d’Amérique.
Un triste siècle passa ainsi pour les Mi’kmaq !
Ils virent le gouvernement de la Nouvelle Ecosse instaurer la loi sur les Indiens en 1842 A l’issue de cette loi Joseph Howe nommé commissaire des Affaires indiennes s’employa à soutenir la politique en faveur des Mi’kmaq avec le gouverneur Falkland. Sans ces deux personnages assez compatissants leur disparition, étant largement programmée, aurait été inévitable. Joseph Howe blâmait fortement le gouvernement pour avoir permis depuis tant d’années une telle pauvreté et une telle mortalité chez ce peuple. Il faisait le constat que les Amérindiens pouvaient parfaitement continuer à avoir eux aussi leur langue et leur culture. Il citait l’exemple des Acadiens, certains d’entre eux ayant survécu à la déportation honteuse et à leur terrible exil étaient revenus, depuis maintenant 80 ans, démontrant que les descendants Français vivant au milieu d’une population britannique étaient toujours Français ! Les Mi’kmaq ont accepté de vivre dans les réserves pensant que c’était leur seul moyen de survivre en tant que peuple distinct.
Après s’être emparés de leur pays, après plus de 119 ans les premières mesures d’éducation de la Loi sur les Indiens de 1876 se mirent en place, même si c’était principalement dans le but de les assimiler et de détruire leur langue amérindienne tout autant que leur culture Mi’kmaq ! « Cette loi n’a pas été élaborée pour voir prospérer les Indiens mais pour leur porter un coup fatal en les assimilant » Cf. Dany Paul un Micmac.
Les Indiens qui acceptaient de vivre dans les Réserves avaient été divisés en bandes ou groupes, permettant de les transformer en unités distinctes et de les diviser. Effectivement cela a élevé des frontières entre chaque communauté puisqu’il leur a été interdit de circuler librement sans avoir auparavant demandé l’accord des autres groupes y compris même par quel chemin passer. Impensable pour eux qui avaient toujours vécu libres sur tous ces immenses territoires se déplaçant au gré des saisons, de la pêche et de la chasse… Cette loi énonçait certes la souveraineté des Premières Nations, mais le gouvernement et les fonctionnaires ne cessaient ensuite de la nier, tout comme était reconnue l’indépendance des « bandes et de leurs conseils », mais par la suite ils s’efforçaient de les rendre complètement dépendants ! Pourtant, pire que tout, par cette loi le gouvernement anglais se permettait de décider qui avait le droit de se considérer Indien ou non. Ainsi une personne ayant réussi des études et obtenu un diplôme universitaire, perdait de fait, son statut d’Indien. Les études n’étaient pas interdites mais cette finalité a empêché bien des Indiens d’obtenir un diplôme. Le racisme était tel, qu’il était difficile à un Micmac d’aller en classe avec des anglophones, une jeune institutrice Micmac était parvenue à terminer ses études et enseignait dès lors dans les écoles. Félicitée pour son courage d’avoir résisté pendant ses années d’études au racisme anglais ambiant, elle expliqua qu’elle n’avait aucun mérite car elle avait toujours eu l’habitude, depuis toute petite, d’aller à l’école avec des Acadiens, ces Français ne connaissaient aucun racisme envers eux, cela l’avait confortée sur ce qu’elle était et sur l’égalité réelle de tous les êtres humains. Elle détailla alors que leurs liens d’amitié et d’estime avec les Français remontaient depuis Membertou et Samuel de Champlain, Pierre Dugua des Monts, Jean de Poutrincourt et tous les autres Français par la suite, ces liens n’avaient jamais faibli depuis.
Dans la loi sur les Indiens, une indienne qui épousait un non Indien perdait son statut d’indienne, mais une blanche qui épousait un Indien devenait indienne. C’était pourtant fondamental d’être inscrit sur le registre des Indiens pour affirmer ses droits ancestraux.
Cette discrimination par le sexe a été finalement abrogée … le 17 avril 1985.
Joseph Howe a poussé le gouvernement à faire davantage. Il est difficile de retrouver précisément tout ce qu’il a fait comme Surintendant aux affaires indiennes dans les archives. Est-ce que cela a été mis de côté parce qu’il dévoilait trop le racisme qui avait cours en Nouvelle Ecosse, causant tant de souffrances et de morts aux Indiens ? De même cela est des plus compliqué de trouver des rapports sur la politique des scalps induisant la conduite barbare des fonctionnaires anglais.
Les Mi’kmaq subirent les sanctions du gouvernement et des fonctionnaires gouvernementaux mais ils discernèrent en George Monk Surintendant aux affaires indiennes tout comme par la suite en Joseph Howe et Abraham Gesner des personnes qui ont eu de la compassion pour eux et ont tenté dans la mesure de leurs moyens de les soutenir.
Individuellement de nombreux colons anglais ont été également compatissants et ont cherché à les aider et à soutenir ceux mourant de faim, certains ont même établi des pétitions pour peser sur le gouvernement mais sans résultat, le gouvernement a toujours fermé les yeux sur leurs détresses, même si parfois il consentait à allouer une petite somme pour des vivres et des couvertures, cela était insuffisant et les Indiens ont continué à souffrir sans vêtements et sans soins médicaux.
De date en date leur existence est devenue de plus en plus épouvantable :
*Vers 1800 en plus de leurs ennuis sans fin de nombreuses maladies sont arrivées en Nouvelle Ecosse avec les nouveaux colons anglais et les migrants écossais, ainsi des épidémies de variole eurent lieu en 1826, de même un vaisseau porteur lui aussi de cette grave maladie infectieuse avait accosté au cap Breton puis suivirent le typhus et la fièvre thyroïde, tout cela terrassa facilement les Mi’kmaq, trop affaiblis physiquement.
*En 1831 leur situation, décrite par une nouvelle pétition, est désespérée.
*En 1838 un rapport sur la vie des Mi’kmaq indiquai qu’ils s’élevaient alors le 22 aout 1838 à 1425 individus, seuls restant alors sur les 200.000, recensés au moment de l’arrivée anglaise sur leur sol. Cela ne fit changer aucune politique à leur égard, avaient-ils alors l’intention d’attendre encore quelques années pour que le problème indien de la fin des Mi’kmaq se règle tout seul ?
*En 1834, Rien ne change là encore, que ce soit pour ceux de Windsor ou du Cap breton
*En 1840 la Nouvelle Ecosse était un pays florissant et abondant où tout poussait sur les bonnes terres des Acadiens, maintenant aux mains des Anglais. Peu de colons anglophones se trouvaient démunis, hormis les Mi’kmaq et les Acadiens dont certains avaient essayé de revenir vivre sur leur terre d’Acadie après le traité de 1763.
*En 1841 le grand chef Louis Benjamin Paul ou Passauhmigh de Shubenacadie désespéré pour son peuple ne recevant aucune réponse du gouvernement provincial écrivit à la reine Victoria, il lui exposa comment l’homme blanc d’Angleterre avait pris tout ce qui leur appartenait et lui demandant d’intervenir pour arrêter cette politique honteuse contre eux.
*En 1843 Joseph Howe envoya « des versements de charité » mais son inquiétude était grandissante, si on ne changeait pas davantage de politique envers eux, la race des Mi’kmaq risquait de s’éteindre dans les décennies suivantes.
*En 1846 malgré ces appels rien de plus n’étant entrepris, cela continua à s’aggraver et ceux de Digby continuèrent à mourir faute de nourriture
*En 1851 au Cap Breton la famine était là aussi, affreuse !
*En 1855 Ceux de New Glasgow étant presque tous morts de faim et la même chose pour ceux de Pictou en 1856 en 1861 le Surintendant des affaires indiennes les décrivit en 1861 « comme indigents et misérables »
Il a fallu attendre 1867 et la Confédération pour que le gouvernement fédéral reprenne à son compte leur terrible condition, mais il le fit du bout des lèvres, si bien que les années passèrent encore, sans que cela n’améliore vraiment leur triste existence.
Dans des années plus récentes encore, en 1982 un médecin, Virginia Miller, écrivit un rapport décrivant la totale misère des Mi’kmaq.
Les Premières Nations ont enduré toutes ces souffrances afin de conserver leur identité, si elles avaient accepté de s’assimiler elles n’existeraient plus ! Elles ont été ignorées et le gouvernement a conçu le Livre Blanc cependant « préserver la culture des Premières Nations n’était pas le but du gouvernement, les dirigeants voulaient qu’ils se fondent et disparaissent dans le grand creuset commun anglais » Pour établir ce Livre Blanc de nombreuses consultations ont été certes tenues avec les Premières Nations, mais subtilement avec ceux, parmi les Indiens, qui correspondaient aux idées proposées par le gouvernement anglais, alors « les consultations furent de pures … Plaisanteries. »
Le Livre Blanc explique parfaitement que les Premières Nations ont bien été victimes de discriminations ! Pourtant, le racisme, qui a été primordial pour entraîner ces ségrégations tant financières, économiques, ou éducatives, loin d’être retracé a été dissimulé voire occulté ! A cause de ce refus de la société de les faire participer à la vie économique du pays, les Amérindiens ont été dépendants des gouvernements, qui agissant avec un paternalisme humiliant, les ont empêchés d’améliorer les conditions consternantes de leur vie, dans laquelle on les a plongés.
Les Premières Nations de l’Amérique septentrionale vivaient sur ce sol depuis des milliers d’années avec leur civilisation et leurs cultures propres. Les Amérindiens ont été marginalisés sous tous les gouvernements canadiens anglophones successifs, privant ces peuples de leurs terres, de leurs ressources naturelles et les ont sans cesse contrôlés et assujettis. Joseph Howe lors de son discours anti-fédéraliste en 1867 avait exprimé sa tristesse, mais aussi son admiration pour les Mi’kmaq :
« … Leur race est en perdition mais même dans les jours de décadence et d’humiliation elle a toujours relevé le défi de conserver le respect. Quand le dernier des Micmac inclinera la tête dans son campement solitaire et qu’il confiera son âme à son créateur, il pourra repenser avec fierté à son passé et remercier le Grand Esprit que son peuple ne compte aucun Tupper ni Henry, ni Archibald ou Mc Cully… »
Sources
Archives de la Nouvelle Ecosse, le Canada français documents sur l’Acadie
Archives de la Confidency of Mainland Micmac
Documents publics
Modification Loi sur les Indiens 1876 à 1996
Loi du Canada « les Indiens inscrits deviennent citoyens canadiens » du 7 juin 1956
Registre général des Réserves
Daniel N. Paul responsable des affaires indiennes « Ce n’était pas nous les Sauvages » Editions le bouton d’or d’Acadie juin 2020
Les Mi’kmaq autant anéantis que les Français d’Acadie !
La présence Mi’kmaq est bien absente de l’Histoire du Canada anglophone et de la Nouvelle Ecosse, l’ancienne Acadie française.
Il est en effet difficile en remontant dans le passé, de trouver des références importantes, dans la presque totalité des textes de l’histoire coloniale anglaise de ce peuple amérindien. Au vu des traitements infligés à ces Premières Nations, les historiens anglophones ne peuvent pas avoir fait une omission si cruciale sans que cela ne nous interroge… Alors que la vie des Français d’Acadie a été largement répertoriée et bien décrite y compris au moment de leur inique déportation dans les colonies anglaises, pour la majorité d’entre eux.
Lors de l‘arrivée des Français avec Pierre Dugua de Mons et Samuel de Champlain en 1604, les Mi’kmaq/Micmac et leur chef Membertou qui vivaient dans la région située au bord de la baie, qu’ils avaient appelée tout simplement Baie des Français, à force de les voir aller et venir dans cette baie, (aujourd’hui baie de Fundy) les avaient accueillis avec bienveillance et sympathie, au moment de leur installation à cet endroit, lors de la construction du petit fort de Port Royal en 1605 puis très rapidement s’était créée avec eux une profonde amitié, elle ne s’est jamais démentie depuis, ils sont restés sans cesse présents à leurs côtés durant plus d’un siècle et demi, édifiant de vrais et solides liens d’amitié avec eux.
Ce peuple venu de France était arrivé en ami, et non en conquérant sur leur sol. Les Français avaient apporté le réel savoir-faire de leur pays, un savoir-faire qui leur a permis de rendre toutes ces terres fertiles, ajouté à leur travail acharné. Ils sont arrivés à cultiver toutes sortes de légumes ou de fruits inconnus jusqu’ici des Amérindiens, de ces régions… Les Mi’kmaq/Micmac auprès d’eux se sont beaucoup mieux nourris que lors de leurs seules chasses, pêches ou cueillettes…Ils ont toujours considéré les Français d’Acadie comme des frères, et lorsque l’adversité les submergeait, on les a chaque fois trouvés à leurs côtés ! Ils ont encore été là auprès des Acadiens, résistant tout autant qu’eux contre l’envahisseur anglo-saxon, les aidant pour tout y compris à s’emparer d’un bâtiment anglais, comme cela s’est produit dans le havre à l’étang, une goélette qui amenait du ravitaillement aux Anglais de Port Royal, - devenu Annapolis -, et tant de nombreuses autres actions de résistance ont été ainsi répertoriées, une résistance menée conjointement Acadiens et Micmac ! Ils étaient là aussi au moment où l’escadre du duc d’Anville, envoyée en 1646 par la France, était attendue pour tenter de reprendre la forteresse de Louisbourg.
Les Français avaient réussi à bâtir ce pays d’Acadie années après années entourés par les Mi’kmaq, malgré les mille déboires dus aux Anglais leur jalousant ce pays, et les terres qu’ils avaient défrichées grâce à un labeur intense sur plusieurs générations. Ces Français, devenus au fil des ans des Acadiens, ne désiraient qu’une chose, celle de vivre en paix et surtout de rester « Neutres » au milieu des différends existant entre les deux couronnes française et anglaise, jusqu’au moment où l’ennemi d’Angleterre s’attaquera directement à eux !
Cela dura ainsi plus d’un siècle malgré les Anglais qui ne cessaient à intervalles réguliers de s’emparer de leur pays et d’en chasser les Français, parce qu’au gré des différents traités, l’Acadie était ensuite rendue à la France.
La France s’était établie en Amérique septentrionale où elle avait créé la Nouvelle France comprenant dès 1605 l’Acadie, puis le Canada avec le fort de Québec en 1608 le long du Saint Laurent. Au fil des explorations menées par des Français peu ordinaires, qui s’élanceront à travers cet immense pays, en plantant des croix fleurdelisées au nom du Roi de France, au fur et à mesure de leurs avancées, la Nouvelle France s’agrandira sans cesse avec de nouveaux territoires, jusqu’à la Baie d’Hudson au Nord, jusqu’aux Rocheuses à l’Ouest et jusqu’au golfe du Mexique au Sud, lors de la découverte de la grande Louisiane. Mais cependant, la France et les Français n’avaient aucunement l’intention, et cela s’est confirmé tout le long que dura le siècle et demi du Régime français, de déposséder les Premières Nations ni de leur liberté ni des richesses de leur pays et encore moins de leurs coutumes ou de leur façon de vivre. Rien ne changea en effet pour elles dans leur façon de vivre, aussi longtemps que les Français restèrent. Cette entente s’est largement observée aux nombreux rapprochements amicaux entre ces peuples pourtant si différents, et même des rapprochements plus qu’amicaux eurent lieu sans étonner personne, lors des mariages franco-amérindiens. Des personnages fort connus comme Pierre Boucher en Nouvelle France qui avait épousé une Wendat, ou Charles de la Tour, lieutenant général d’Acadie une Mi’kmaq, pour seuls exemples.
Cependant lorsque de grands remous apparaissaient en Europe cela se répercutait inévitablement en Amérique septentrionale, ainsi au moment de la succession d’Espagne, cela se termina par le traité d’Utrecht en 1713 où la France dut céder aux Anglais, non seulement la Baie d’Hudson, mais également l’Acadie. Ces derniers s’empressèrent de la rebaptiser «Nouvelle Ecosse » comme ils l’avaient déjà fait une première fois en 1613, mais cette fois définitivement. Les Mi’kmaq avaient assisté aux cruautés que ces étrangers d’Angleterre ne cessaient de faire aux autres Abénaquis de Pentagouët, mais aussi à tous les Acadiens, les « French Neutral » comme ils les appelaient, dès qu’ils le pouvaient depuis un siècle. Ils redoutaient terriblement avec raison la victoire des Anglais et de ceux des colonies de Nouvelle Angleterre sur les Français d’Acadie, comprenant parfaitement que cela serait tragique aussi pour eux.
Le Traité d’Utrecht sonnera alors le glas de l’Acadie française.
Lorsque les Anglais occupèrent définitivement l’Acadie et la Baie d’Hudson au traité d’Utrecht en 1713, la population Mi’kmaq était alors importante ce qui permit sans doute à cette nation amérindienne de pouvoir résister et survivre, aux nombreuses attaques contre elle.
Dès lors, les Anglais, une fois installés en conquérants, ont pu bien plus aisément continuer à s’attaquer aux Acadiens, et les résistances et les luttes de ces derniers pour tenter de survivre ont été d’autant plus rudes, que ces nouveaux venus sur ce sol les détestaient. Certes ils étaient considérés comme d’affreux papistes, certes ils étaient aussi comme des frères avec les Sauvages, mais pire que tout ils détenaient -pour les avoir eux-mêmes défrichées- les meilleures terres ! Ils ne voulaient qu’une chose se débarrasser d’eux, ce qu’ils arrivèrent à faire en fin de compte avec une inhumanité peu commune, lors d’une déportation barbare et monstrueuse, avec ce « Grand Dérangement » en 1755. Les Mi’kmaq étaient encore présents aux côtés des Acadiens, au moment où a eu lieu ces épouvantables arrestations, un grand nombre d’entre eux réussit à échapper aux Anglais et à s’enfuir à travers les bois, avant même d’être embarqués de force sur les navires pour être déportés. Ils tentèrent de rejoindre la partie de la Nouvelle France encore française, à la fois par terre ou encore en tentant de suivre les fleuves et les rivières ainsi que la vallée de la Matapédia. Les Mi’kmaq partagèrent aussi le triste sort des Acadiens, au cours de ce terrible et glacial hiver de 1756-57 au camp des réfugiés de Miramichi, soutenus, autant qu’il le pouvait lui-même, par le lieutenant Charles de Boishébert et le régiment français.
Il s’était créé entre ces Français d’Acadie et les tribus Mi’kmaq une telle fraternité que chacun alors protégeait l’autre des attaques anglaises. Cette protection mutuelle était fondée sur cette longue et profonde amitié mais aussi sur l’admiration, le respect de la culture de l’autre. Cette alliance indéfectible développée entre ces Français et les Mi’kmaq provenait également de l’esprit profond de la diplomatie de la France, préconisant naturellement ce vivre ensemble, proposant ainsi sans aucune différence l’instruction des enfants des Amérindiens, autant que ceux des enfants des Français. C’est ainsi que parmi ces Premières Nations si certains désiraient se rendre en France, ils pouvaient le faire tout autant qu’un « naturel François ».
Les alliances nouées par les Anglais avec les tribus amérindiennes n’étaient pour la plus grande part fondées que sur leur propre avantage, et s’ils se sont alliés avec certaines tribus, souvent les plus belliqueuses, ces alliances basées sur le seul intérêt loin de toute véritable amitié, ne duraient que le temps, où les deux côtés y trouvaient leur bénéfice, comme avec les Iroquois, ces ennemis ancestraux des Mi’kmaq.
Les Iroquois (Odinossonis) appelés aussi peuple des Cinq Cantons à cette époque, n’étaient cependant ni pour les Anglais ni pour les Français ils étaient pour les Iroquois ! C’est pourquoi on les verra au long des années pencher pour les uns ou pour les autres selon leurs seuls intérêts.
Les Micmac/Mi’kmaq d’Acadie faisaient partie de la confédération Waban Aqui, ainsi que les Abénaquis et les Malécites. Ce peuple algonquin de la côte Nord-Est de l’Amérique du Nord se répartissait sur de nombreux territoires d’Acadie, de l’île Saint Jean, de Gaspésie, ou de Terre-Neuve… Ceux vivant dans la région de la Listuguj/ Restigouche et autour de la Baie des Chaleurs, portaient un saumon comme emblème. Pour ceux de la région de Miramichi leur emblème représentait un guerrier armé d’une lance et d’un arc. Certains habitaient sur l’île Royale, aujourd’hui appelée Cap Breton, les Micmac l’avaient dénommée Onamag, elle est devenue le siège de leur grand Sachem ; Ils vivaient de chasse, de pêche et de cueillette, de racines sauvages et de fruits secs, à l’automne comme la grande majorité des autres peuples Amérindiens, ils partaient pour la chasse au caribou. Parents avec les Abénaquis de Pentagouët de Nouvelle Angleterre et les Malécites du Nouveau Brunswick, ils n’étaient pourtant pas agriculteurs. Ils n’habitaient pas dans des Tipis en peau, mais dans des Wigwam coniques qui étaient fabriqués sur la base d’un treillis de bois d’épinette, recouvert d’écorces de bouleau. Sur le sol, ils disposaient des branches fines de sapins qu’ils recouvraient de confortables fourrures. Leurs wigwams pouvaient être démontés et remontés facilement selon les besoins de leurs déplacements. Les hommes et les femmes portaient des vêtements à franges fabriqués en peau de Caribou, ils portaient tous les cheveux longs, autant les uns que les autres. Ils se servaient de deux sortes de raquettes, les plus grandes pour la neige poudreuse, les plus petites lorsque la neige était dure. Les funérailles chez ses peuples Mi’kmaq donnaient lieu à des cérémonies qui rassemblaient toute la tribu, et qui se terminaient par un grand festin. Ils se noircissaient le visage pendant trois jours entiers en signe de deuil, pourtant ils n’avaient pas particulièrement soigné leurs malades vieillissants, ils ne le nourrissaient plus et le chaman pour activer le décès, versait de l’eau glacée au niveau du nombril des vieillards ! Selon les personnes, certaines préparaient eux-mêmes leur propre mort, sans doute pour l’activer, connaissant le peu de soin qu’ils apportaient aux mourants, car les malades pouvaient aussi être purement et simplement abandonnés à leur sort !
Depuis la main mise anglaise sur l’Acadie devenue alors Nouvelle Ecosse les dirigeants anglais avaient tout tenté pour mettre les tribus Mi’kmaq de leur côté et les séparer des Français. Ils instaurèrent dans ce but de leur faire signer des traités, visant à obtenir leur soumission ni plus ni moins à la domination britannique ! Pourtant un des gouverneurs Edward Cornwallis déclarera sans s’en cacher : « les traités ne valent rien, seule la force prévaudra » Et c’est ce qui se passera, puisqu’ils étaient là pour prendre les terres de ces « Indiens » et pour y établir le plus de colons possibles !
La résistance à la domination britannique s’est encore accrue car les gouvernements anglais ont continué à faire venir de nombreux colons anglophones, à leur concéder des terres, y compris des concessions faisant plusieurs milliers d’acres, sans tenir compte de l’opposition acharnée des Mi’kmaq. Cette usurpation de terres sans leur consentement pouvait faire craindre aux autorités anglaises que ces derniers, à juste titre, ne tentent de faire cesser cette agression des Anglais en se retournant violemment contre eux. Ceux-ci pour se justifier arguaient que les Mi’kmaq avaient perdu leur droit de propriété sur la Nouvelle Ecosse parce qu’ils avaient pris les armes contre eux, ou encore que la France leur avait donné toutes leurs terres en même temps que le pays ! Ce que réfuta les Mi’kmaq, jamais les Français ne leur avaient pris leurs terres, ils ne pouvaient donc pas avoir pu les leur céder !
Après le départ de la France de l’Acadie, les exactions sur les Acadiens et sur les Mi’kmaq par les Britanniques n’eurent plus de mesures. Cette province de la Nouvelle France devenue province anglaise devait être colonisée et elle le serait !
Il fallait faire vite, si les hostilités reprenaient entre Français et Britanniques ils savaient parfaitement que les Mi’kmaq n’hésiteraient pas un instant à soutenir les Français. En 1740 les Anglais pressaient sans cesse les Acadiens de signer le serment d’allégeance à la couronne britannique, et les Acadiens subirent de plus en plus de contrôles dans leur vie de tous les jours, tout en augmentant le prix des impôts sur toutes leurs marchandises. En 1744 une nouvelle guerre, celle de la succession d’Autriche se déclara en Europe, se répercuta entre la France et l’Angleterre, aussitôt le Mi’kmaq prirent faits et causes pour les Français et se mirent sans surprise de leur côté.
Le gouvernement français de Québec jugeant que leurs vies étaient en danger envisagea de faire venir du côté français et d’y réinstaller tous ceux qui le désireraient, Acadiens et Micmacs. Certains acceptèrent mais ils ne furent pas nombreux, comment quitter sa maison et tout ce qui avait fait leur vie depuis un siècle et demi ? Ces lieux mêmes où leurs ancêtres français venus de France avaient si solidement replanté leurs racines et bâti ce pays ? Alors ceux qui restèrent furent soumis à des traitements si barbares de la part des Anglais, que les Acadiens avec les Mi’kmaq à leurs côtés n’ont pas eu d’autre choix que de résister, eux qui jusque-là voulaient rester Neutres… Mais tout était déjà bien orchestré et élaboré depuis Londres sous la direction de Lord Halifax. Ainsi en 1749 ce nouveau commissaire du Commerce et des Plantations fit venir encore davantage de colons protestants pour supplanter ces Français catholiques et repousser tous les Amérindiens et Edward Cornwallis, le gouverneur, établit une base militaire pour parer à la menace franco-amérindienne que cela allait déclencher. Immédiatement une nouvelle ville sera construite au nom de ce lord, ce sera Halifax, soigneusement entourée de fortifications.
Le 1er octobre 1749 Cornwallis lors du conseil qu’il réunit dans le port d’Halifax sur le navire le Beaufort, démontra sa parfaite cruauté en obtenant l’approbation de tous pour déclarer officiellement la guerre aux Mi’kmaq avec l’institution de la prime aux scalps ! « …Il ne faut pas les confirmer comme un peuple libre et indépendant, nous devons les traiter comme des bandits et des rebelles au gouvernement de sa majesté. Il faut donc les poursuivre jusque dans leurs repaires et leur montrer qu’ils ne sont nulle part en sécurité dans la province. » Aussitôt ils levèrent une compagnie de 50 personnes volontaires pour les pourchasser dans les bois dirigés par John Gorham, ils firent venir une autre compagnie de cent hommes pour les renforcer en prévision de l’hiver, sans oublier une récompense de dix guinées pour tout Mi’kmaq fait prisonnier…ou tué ! Une tentative d’éliminer les Mi’kmaq était donc bien commencée, au coût de dix guinées pour le Trésor du gouvernement fédéral anglophone. Ce n’était pas la première fois que Cornwallis démontrait autant d’inhumanité mais ses conseillers n’étaient certes pas à exempter !! Edward Cornwallis avait été le lieutenant-colonel stationné en Ecosse, il avait participé à la terrible bataille de Culloden, fin avril 1746, il avait encouragé et contribué avec ses troupes à la maltraitance barbare des Ecossais.
Le traité de 1749 renouvela celui de 1725 c’est-à-dire déposséder les Amérindiens Mi’kmaq et les autres petites nations, de leur liberté et de leurs terres. Les chefs Malécites ratifièrent ce traité de paix le 4 septembre 1749, les Mi’kmaq quant à eux ne l’acceptèrent pas, mais l’abandon d’une partie de leurs alliés Malécites, qui se mirent ainsi du côté de l’envahisseur anglais, leur démontra parfaitement qu’à présent leur situation allait se dégrader encore plus rapidement. Malgré cette perspective peu réjouissante, ils poursuivirent courageusement la résistance pour leur survie, avec l’aide des Acadiens aussi maltraités qu’eux, et de quelques petits groupes Malécites tenaces.
Dès septembre il est réaffirmé aux chefs Mi’kmaq ce qu’on leur demande depuis 1725 de se soumettre ni plus ni moins à la domination britannique confirmant leur crainte pour de nouveaux plans de la colonisation britannique. Très inquiets les Mi’kmaq non seulement renouvelèrent leur déclaration de guerre mais attaquèrent des cibles militaires et commerciales. Devant cette résistance, à l’expropriation de leurs terres à laquelle ils s’attendaient, les autorités par la voix du gouverneur affirma que cette guerre ne devrait pas se terminer par un accord de paix, mais « par l’éradication pure et simple de tous ces Mi’kmaq de la péninsule, une bonne fois pour toute » !
La vie d’un Amérindien semblait bien en effet n’avoir aucune valeur pour les Anglo-saxons ils ne lui accordaient aucun droit civil ou humain, cela avait été largement constaté depuis l’implantation même des colonies de Nouvelle Angleterre en 1620, depuis l’arrivée des premiers colons, les pères pèlerins ces fathers pilgrims, si un Anglais tuait un Indien cela n’était pas considéré comme un crime et restait totalement impuni.
Les Micmac/ Mi’kmaq ont lutté pour préserver leur liberté mais la proclamation barbare de 1749 a été dévastatrice pour eux, puisqu’en effet ont été massacrés autant les hommes que les femmes, les enfants, ou encore les vieillards et les infirmes, tous ceux que les chasseurs de prime ont pu attraper, ont été scalpés. Un groupe de rangers de Gorham ayant rapporté 25 scalps, a réclamé la prime de dix livres pour chacun. Mais tous ces scalps ne venaient pourtant pas uniquement d’Indiens certains venaient sans aucun doute possible de Blancs, c’est-à-dire des Français d’Acadie !
Cela ne les interpella pas un instant, sachant que parmi les Acadiens certains étaient métissés, ils les considéraient tout autant que les Sauvages ! Cette chasse aux scalps entraîna des réactions chez les Français de Louisbourg, écœurés de voir ce qui se passait dans leur ancienne Acadie, ils encouragèrent les Mi’kmaq à répliquer, en leur offrant à eux aussi une prime non pour des scalps anglais mais uniquement pour des soldats anglais faits prisonniers et vivants. A noter, cela ne visait pas les civils et encore moins les femmes et les enfants ! Cependant les soldats prisonniers amenés à la forteresse de Louisbourg étaient rapidement libérés sains et saufs par les Français, à la différence des prisonniers Mi’kmaq détenus par les Anglais, soit ils étaient détenus indéfiniment, soit envoyés à Boston pour y être pendus.
L’Abbé le Loutre, terriblement consterné de ce que les Anglais faisaient subir comme cruautés aux Acadiens et à « ses » Micmac/ Mi’kmaq dont il était le missionnaire attitré, n’a cessé de les défendre et certes s’il les a encouragés à ne pas se laisser faire, à résister, c’était parce que les Anglais eux-mêmes ne cessaient de brutaliser ces deux peuples et d’entreprendre des représailles envers eux, depuis des années. Cependant, en se mettant franchement avec eux, en travers des projets des Anglais, Le Loutre a, bien entendu, été détesté par ces derniers, qui ne cessaient d’être déterminés à chasser les Acadiens et à déposséder et assujettir totalement les Mi’kmaq. Excédés ils mirent la tête de l’abbé Le Loutre à prix !l C’est pourquoi les descriptions acerbes, et même davantage, que font les autorités anglaises et principalement le gouverneur Edward Cornwallis de ce prêtre, qui n’a jamais cessé de défendre les Mi’kmaq et les Acadiens et de les soutenir contre eux, ne sont donc pas étonnantes ! Un homme comme le Loutre s’il a considérablement aidé les tribus à faire face à leur situation, il a également proposé des arrangements de paix importants entre les Mi’kmaq et les Anglais, mais tous ont été repoussés avec mépris et… dérision ! Les Mi’kmaq s’étaient réunis en conseil le 23 août 1754, ils auraient été prêts à céder la plus grande partie de leur pays contre un plus petit territoire, où ils auraient pu rester et vivre tranquilles pour toujours, et même le partager avec des Malécites et d’autres petites nations. Leur lettre apportée par l’Abbé Le Loutre à Halifax pouvait amener une grande avancée pour les Britanniques, mais il fallait pour cela qu’ils désirent vraiment cette paix avec les Mi’kmaq. Bien au contraire le gouverneur Lawrence et tout le conseil rejetèrent les propositions, ils ne voulaient rien céder, et surtout pas un seul morceau de bonnes terres aux Indiens.
Après s’être lâchement et cruellement débarrassé des Acadiens en 1755 et 1758 il aurait été facile de penser néanmoins, puisque les Anglais avaient enfin réussi à s’emparer de l’Acadie puis à en chasser les Acadiens, comme les feuilles au vent sur le rivage, qu’ils allaient peut-être mener une politique coloniale moins épouvantable par rapport aux Mi’kmaq, ce premier peuple vivant sur ce sol, depuis des milliers d’années. Ils ont préféré accroître la pression sur ces tribus pour tenter de les assujettir, et si possible à long terme de s’en débarrasser comme ils s’étaient débarrassés des Acadiens en tentant de les exterminer, que ce soit par la force militaire ou les mauvais traitements, car ces tribus qu’ils décimaient jours après jours, représentaient encore pour eux une force à craindre.
Entre les Mi’kmaq et les Anglais tout ne se termina donc pas du tout tranquillement après la Déportation inhumaine des Acadiens, ni même après le traité de 1763 et le départ définitif de la France, de cette Amérique septentrionale, qu’ils revendiquaient pour leur seul bénéfice.
Après le précédent traité d’Utrecht, les Britanniques avaient enfin récupéré au traité de Paris de 1763, soit cinquante ans plus tard, la totalité de cette Nouvelle France qu’ils désiraient depuis plus d’un siècle. Une fois le traité signé, la guerre de conquête terminée les Mi’kmaq qui avaient déjà largement subi les gouvernements anglais depuis 1713 perdirent tout espoir. En effet ils avaient assisté mais partagé aussi durant toutes ces années, ce qu’ils avaient fait subir d’épouvantable aux Français d’Acadie, avec cette politique anglaise visant avec cruauté à soumettre ces « French Neutral » comme ils les appelaient, dans l’espoir d’en débarrasser toute la province, ce qu’ils arrivèrent à faire lors du monstrueux « Grand Dérangement » de 1755 suivi trois ans plus tard de celui de l’île Saint Jean en 1758.
Evidemment dans ces circonstances les tribus Mi’kmaq n’acceptèrent pas de faire la paix avec le conquérant anglais, une paix uniquement dictée par ces derniers pour leur seul bénéfice, les affrontements continuèrent… Ils s’amplifièrent encore davantage au moment où une grande révolte contre Londres se développa chez les colons anglais de Nouvelle Angleterre, ces colons révoltés furent désignés par Londres comme des « Insurgents ». Les Mi’kmaq prirent faits et causes pour eux espérant que s’ils gagnaient leur indépendance, cela aiderait les Français à revenir en Nouvelle France et à en chasser les Anglais ! Certains parmi eux se rendirent au Massachusetts et signèrent le traité de Watertown en juillet 1779, mais de leurs côté les Britanniques pour inciter les Mi’kmaq à rester neutres et à les empêcher de rejoindre les Insurgés leur fourniront aussitôt tout ce qui sera nécessaire à leur survie, ce qui perdura seulement jusqu’à la fin de la guerre d’indépendance des colonies britanniques avec le traité de 1783. En ces difficiles temps de rébellion dans leurs colonies de Nouvelle Angleterre ce n’était effectivement pas le moment pour eux d’avoir une autre guerre avec les Indiens.
Tout aussitôt les autres colons anglais restés loyaux à l’Angleterre arrivèrent alors très nombreux en Acadie et au Nouveau Brunswick, afin d’échapper aux représailles de ces nouveaux étasuniens, qu’ils n’avaient pas soutenus dans leur révolte. Ces Loyalistes comme ils ont été appelés, ont été au nombre de cinquante mille environ à se réfugier au Canada, récemment devenu anglais. Ils obtinrent immédiatement des terres du gouvernement britannique et dès 1783 presque quinze mille d’entre eux s’étaient déjà installés dans les provinces maritimes, repoussant toujours plus loin les Mi’kmaq sur leur sol.
Le gouvernement institua très officiellement pour ces tribus Mi’kmaq, des terrains qui seraient « réservés pour leur usage et leur bien ! » Les Réserves visaient à séparer les « Blancs » des « Peaux Rouges » méthode largement utilisée par les Anglo-saxons partout, que ce soit au Canada devenu anglais, en Nouvelle Ecosse mais aussi aux États-Unis d’Amérique…
En 1821 au total 20.765 acres au milieu de marécages, des tourbières ou des montagnes pierreuses, sans doute à grand-peine 10% de tous leurs immenses territoires. Hélas, repoussés sur ces terres incultes et arides, ils vont devenir des parias sur le sol de leur propre pays. A mesure que leurs territoires diminuaient, à mesure qu’ils furent installés dans ces terrains sordides, les Micmac commencèrent à devenir semi sédentaires, puis totalement sédentaires étant dans l’impossibilité de se nourrir sur leurs anciennes terres, dans leur propre pays !
Ainsi, ils subirent cette préemption de tous leurs territoires lors de l’arrivée de plus en plus nombreuse de colons anglais et écossais, qui empiétèrent même dans les « réserves » où ils avaient été assignés, ils assistèrent stupéfiés à l’abattage de leurs forêts restreignant l’habitat de l’Orignal et du Caribou, et par voie de conséquences, tous les autres animaux se sont également raréfiés. Mais les bouleversements ne s’arrêteront pas là, il se rajoutera également des barrages sur les rivières, noyant parfois des portions entières de leurs terres. Leur source alimentaire principale ainsi diminuée réduisit encore davantage ces tribus à des états de famine. Dépossédés de tout leur pays, de leurs moyens de subsistances, de leurs libertés et de leur dignité, les Mi’kmaq durant les années qui suivirent cessèrent, contraints et forcés, leurs hostilités se retrouvant seuls, les Français d’Acadie avaient été déportés et les Français étaient repartis en France ! De plus impossible de compter sur les insurgés anglo-saxons devenus grâce à la France les nouveaux étatsuniens, qui ne leur démontrèrent aucune reconnaissance pour leur précédent soutien, pas plus d’ailleurs qu’à la France !! Seule restait une petite population canadienne française le long du Saint Laurent elle aussi bien assujettie sous la main mise anglaise. Alors frappés par la pauvreté les Mi’kmaq furent contraints d’accepter une paix humiliante et injuste. Leur espoir du retour de la France s’amenuisa de plus en plus, seule une petite flamme s’alluma encore pour eux au moment de la Révolution française, qui espérèrent-ils alors, aurait pu permettre ce retour.
Ils durent vivre sous cette « English Liberty » qu’on leur imposait et sont devenus des proscrits dans leur propre pays, et pire en voie d’extinction. Malgré cela les Anglais les considéraient toujours comme une menace
La population Mi’kmaq avait continué à décliner jusqu’en 1847, elle était à un niveau si bas qu’elle faisait craindre la disparition totale de leur race, puis les observateurs ont vu leur nombre légèrement remonter en 1867, au moment de la Confédération où elle atteignit à grand peine 1600 personnes ce que confirmera le commissaire aux Affaires Indiennes Abraham Gesner. Mais cela non pas grâce à de meilleurs traitements, qui auraient favorisé de nouvelles naissances, mais dû au retour de Mi’kmaq d’autres régions, comme l’île saint Jean/ Prince Edouard, le Nouveau Brunswick, peut-être du Canada ou même des nouveaux états unis d’Amérique.
Un triste siècle passa ainsi pour les Mi’kmaq !
Ils virent le gouvernement de la Nouvelle Ecosse instaurer la loi sur les Indiens en 1842 A l’issue de cette loi Joseph Howe nommé commissaire des Affaires indiennes s’employa à soutenir la politique en faveur des Mi’kmaq avec le gouverneur Falkland. Sans ces deux personnages assez compatissants leur disparition, étant largement programmée, aurait été inévitable. Joseph Howe blâmait fortement le gouvernement pour avoir permis depuis tant d’années une telle pauvreté et une telle mortalité chez ce peuple. Il faisait le constat que les Amérindiens pouvaient parfaitement continuer à avoir eux aussi leur langue et leur culture. Il citait l’exemple des Acadiens, certains d’entre eux ayant survécu à la déportation honteuse et à leur terrible exil étaient revenus, depuis maintenant 80 ans, démontrant que les descendants Français vivant au milieu d’une population britannique étaient toujours Français ! Les Mi’kmaq ont accepté de vivre dans les réserves pensant que c’était leur seul moyen de survivre en tant que peuple distinct.
Après s’être emparés de leur pays, après plus de 119 ans les premières mesures d’éducation de la Loi sur les Indiens de 1876 se mirent en place, même si c’était principalement dans le but de les assimiler et de détruire leur langue amérindienne tout autant que leur culture Mi’kmaq ! « Cette loi n’a pas été élaborée pour voir prospérer les Indiens mais pour leur porter un coup fatal en les assimilant » Cf. Dany Paul un Micmac.
Les Indiens qui acceptaient de vivre dans les Réserves avaient été divisés en bandes ou groupes, permettant de les transformer en unités distinctes et de les diviser. Effectivement cela a élevé des frontières entre chaque communauté puisqu’il leur a été interdit de circuler librement sans avoir auparavant demandé l’accord des autres groupes y compris même par quel chemin passer. Impensable pour eux qui avaient toujours vécu libres sur tous ces immenses territoires se déplaçant au gré des saisons, de la pêche et de la chasse… Cette loi énonçait certes la souveraineté des Premières Nations, mais le gouvernement et les fonctionnaires ne cessaient ensuite de la nier, tout comme était reconnue l’indépendance des « bandes et de leurs conseils », mais par la suite ils s’efforçaient de les rendre complètement dépendants ! Pourtant, pire que tout, par cette loi le gouvernement anglais se permettait de décider qui avait le droit de se considérer Indien ou non. Ainsi une personne ayant réussi des études et obtenu un diplôme universitaire, perdait de fait, son statut d’Indien. Les études n’étaient pas interdites mais cette finalité a empêché bien des Indiens d’obtenir un diplôme. Le racisme était tel, qu’il était difficile à un Micmac d’aller en classe avec des anglophones, une jeune institutrice Micmac était parvenue à terminer ses études et enseignait dès lors dans les écoles. Félicitée pour son courage d’avoir résisté pendant ses années d’études au racisme anglais ambiant, elle expliqua qu’elle n’avait aucun mérite car elle avait toujours eu l’habitude, depuis toute petite, d’aller à l’école avec des Acadiens, ces Français ne connaissaient aucun racisme envers eux, cela l’avait confortée sur ce qu’elle était et sur l’égalité réelle de tous les êtres humains. Elle détailla alors que leurs liens d’amitié et d’estime avec les Français remontaient depuis Membertou et Samuel de Champlain, Pierre Dugua des Monts, Jean de Poutrincourt et tous les autres Français par la suite, ces liens n’avaient jamais faibli depuis.
Dans la loi sur les Indiens, une indienne qui épousait un non Indien perdait son statut d’indienne, mais une blanche qui épousait un Indien devenait indienne. C’était pourtant fondamental d’être inscrit sur le registre des Indiens pour affirmer ses droits ancestraux.
Cette discrimination par le sexe a été finalement abrogée … le 17 avril 1985.
Joseph Howe a poussé le gouvernement à faire davantage. Il est difficile de retrouver précisément tout ce qu’il a fait comme Surintendant aux affaires indiennes dans les archives. Est-ce que cela a été mis de côté parce qu’il dévoilait trop le racisme qui avait cours en Nouvelle Ecosse, causant tant de souffrances et de morts aux Indiens ? De même cela est des plus compliqué de trouver des rapports sur la politique des scalps induisant la conduite barbare des fonctionnaires anglais.
Les Mi’kmaq subirent les sanctions du gouvernement et des fonctionnaires gouvernementaux mais ils discernèrent en George Monk Surintendant aux affaires indiennes tout comme par la suite en Joseph Howe et Abraham Gesner des personnes qui ont eu de la compassion pour eux et ont tenté dans la mesure de leurs moyens de les soutenir.
Individuellement de nombreux colons anglais ont été également compatissants et ont cherché à les aider et à soutenir ceux mourant de faim, certains ont même établi des pétitions pour peser sur le gouvernement mais sans résultat, le gouvernement a toujours fermé les yeux sur leurs détresses, même si parfois il consentait à allouer une petite somme pour des vivres et des couvertures, cela était insuffisant et les Indiens ont continué à souffrir sans vêtements et sans soins médicaux.
De date en date leur existence est devenue de plus en plus épouvantable :
*Vers 1800 en plus de leurs ennuis sans fin de nombreuses maladies sont arrivées en Nouvelle Ecosse avec les nouveaux colons anglais et les migrants écossais, ainsi des épidémies de variole eurent lieu en 1826, de même un vaisseau porteur lui aussi de cette grave maladie infectieuse avait accosté au cap Breton puis suivirent le typhus et la fièvre thyroïde, tout cela terrassa facilement les Mi’kmaq, trop affaiblis physiquement.
*En 1831 leur situation, décrite par une nouvelle pétition, est désespérée.
*En 1838 un rapport sur la vie des Mi’kmaq indiquai qu’ils s’élevaient alors le 22 aout 1838 à 1425 individus, seuls restant alors sur les 200.000, recensés au moment de l’arrivée anglaise sur leur sol. Cela ne fit changer aucune politique à leur égard, avaient-ils alors l’intention d’attendre encore quelques années pour que le problème indien de la fin des Mi’kmaq se règle tout seul ?
*En 1834, Rien ne change là encore, que ce soit pour ceux de Windsor ou du Cap breton
*En 1840 la Nouvelle Ecosse était un pays florissant et abondant où tout poussait sur les bonnes terres des Acadiens, maintenant aux mains des Anglais. Peu de colons anglophones se trouvaient démunis, hormis les Mi’kmaq et les Acadiens dont certains avaient essayé de revenir vivre sur leur terre d’Acadie après le traité de 1763.
*En 1841 le grand chef Louis Benjamin Paul ou Passauhmigh de Shubenacadie désespéré pour son peuple ne recevant aucune réponse du gouvernement provincial écrivit à la reine Victoria, il lui exposa comment l’homme blanc d’Angleterre avait pris tout ce qui leur appartenait et lui demandant d’intervenir pour arrêter cette politique honteuse contre eux.
*En 1843 Joseph Howe envoya « des versements de charité » mais son inquiétude était grandissante, si on ne changeait pas davantage de politique envers eux, la race des Mi’kmaq risquait de s’éteindre dans les décennies suivantes.
*En 1846 malgré ces appels rien de plus n’étant entrepris, cela continua à s’aggraver et ceux de Digby continuèrent à mourir faute de nourriture
*En 1851 au Cap Breton la famine était là aussi, affreuse !
*En 1855 Ceux de New Glasgow étant presque tous morts de faim et la même chose pour ceux de Pictou en 1856 en 1861 le Surintendant des affaires indiennes les décrivit en 1861 « comme indigents et misérables »
Il a fallu attendre 1867 et la Confédération pour que le gouvernement fédéral reprenne à son compte leur terrible condition, mais il le fit du bout des lèvres, si bien que les années passèrent encore, sans que cela n’améliore vraiment leur triste existence.
Dans des années plus récentes encore, en 1982 un médecin, Virginia Miller, écrivit un rapport décrivant la totale misère des Mi’kmaq.
Les Premières Nations ont enduré toutes ces souffrances afin de conserver leur identité, si elles avaient accepté de s’assimiler elles n’existeraient plus ! Elles ont été ignorées et le gouvernement a conçu le Livre Blanc cependant « préserver la culture des Premières Nations n’était pas le but du gouvernement, les dirigeants voulaient qu’ils se fondent et disparaissent dans le grand creuset commun anglais » Pour établir ce Livre Blanc de nombreuses consultations ont été certes tenues avec les Premières Nations, mais subtilement avec ceux, parmi les Indiens, qui correspondaient aux idées proposées par le gouvernement anglais, alors « les consultations furent de pures … Plaisanteries. »
Le Livre Blanc explique parfaitement que les Premières Nations ont bien été victimes de discriminations ! Pourtant, le racisme, qui a été primordial pour entraîner ces ségrégations tant financières, économiques, ou éducatives, loin d’être retracé a été dissimulé voire occulté ! A cause de ce refus de la société de les faire participer à la vie économique du pays, les Amérindiens ont été dépendants des gouvernements, qui agissant avec un paternalisme humiliant, les ont empêchés d’améliorer les conditions consternantes de leur vie, dans laquelle on les a plongés.
Les Premières Nations de l’Amérique septentrionale vivaient sur ce sol depuis des milliers d’années avec leur civilisation et leurs cultures propres. Les Amérindiens ont été marginalisés sous tous les gouvernements canadiens anglophones successifs, privant ces peuples de leurs terres, de leurs ressources naturelles et les ont sans cesse contrôlés et assujettis. Joseph Howe lors de son discours anti-fédéraliste en 1867 avait exprimé sa tristesse, mais aussi son admiration pour les Mi’kmaq :
« … Leur race est en perdition mais même dans les jours de décadence et d’humiliation elle a toujours relevé le défi de conserver le respect. Quand le dernier des Micmac inclinera la tête dans son campement solitaire et qu’il confiera son âme à son créateur, il pourra repenser avec fierté à son passé et remercier le Grand Esprit que son peuple ne compte aucun Tupper ni Henry, ni Archibald ou Mc Cully… »
Sources
Archives de la Nouvelle Ecosse, le Canada français documents sur l’Acadie
Archives de la Confidency of Mainland Micmac
Documents publics
Modification Loi sur les Indiens 1876 à 1996
Loi du Canada « les Indiens inscrits deviennent citoyens canadiens » du 7 juin 1956
Registre général des Réserves
Daniel N. Paul responsable des affaires indiennes « Ce n’était pas nous les Sauvages » Editions le bouton d’or d’Acadie juin 2020
Les Mi’kmaq autant anéantis que les Français d’Acadie !
La présence Mi’kmaq est bien absente de l’Histoire du Canada anglophone et de la Nouvelle Ecosse, l’ancienne Acadie française.
Il est en effet difficile en remontant dans le passé, de trouver des références importantes, dans la presque totalité des textes de l’histoire coloniale anglaise de ce peuple amérindien. Au vu des traitements infligés à ces Premières Nations, les historiens anglophones ne peuvent pas avoir fait une omission si cruciale sans que cela ne nous interroge… Alors que la vie des Français d’Acadie a été largement répertoriée et bien décrite y compris au moment de leur inique déportation dans les colonies anglaises, pour la majorité d’entre eux.
Lors de l‘arrivée des Français avec Pierre Dugua de Mons et Samuel de Champlain en 1604, les Mi’kmaq/Micmac et leur chef Membertou qui vivaient dans la région située au bord de la baie, qu’ils avaient appelée tout simplement Baie des Français, à force de les voir aller et venir dans cette baie, (aujourd’hui baie de Fundy) les avaient accueillis avec bienveillance et sympathie, au moment de leur installation à cet endroit, lors de la construction du petit fort de Port Royal en 1605 puis très rapidement s’était créée avec eux une profonde amitié, elle ne s’est jamais démentie depuis, ils sont restés sans cesse présents à leurs côtés durant plus d’un siècle et demi, édifiant de vrais et solides liens d’amitié avec eux.
Ce peuple venu de France était arrivé en ami, et non en conquérant sur leur sol. Les Français avaient apporté le réel savoir-faire de leur pays, un savoir-faire qui leur a permis de rendre toutes ces terres fertiles, ajouté à leur travail acharné. Ils sont arrivés à cultiver toutes sortes de légumes ou de fruits inconnus jusqu’ici des Amérindiens, de ces régions… Les Mi’kmaq/Micmac auprès d’eux se sont beaucoup mieux nourris que lors de leurs seules chasses, pêches ou cueillettes…Ils ont toujours considéré les Français d’Acadie comme des frères, et lorsque l’adversité les submergeait, on les a chaque fois trouvés à leurs côtés ! Ils ont encore été là auprès des Acadiens, résistant tout autant qu’eux contre l’envahisseur anglo-saxon, les aidant pour tout y compris à s’emparer d’un bâtiment anglais, comme cela s’est produit dans le havre à l’étang, une goélette qui amenait du ravitaillement aux Anglais de Port Royal, - devenu Annapolis -, et tant de nombreuses autres actions de résistance ont été ainsi répertoriées, une résistance menée conjointement Acadiens et Micmac ! Ils étaient là aussi au moment où l’escadre du duc d’Anville, envoyée en 1646 par la France, était attendue pour tenter de reprendre la forteresse de Louisbourg.
Les Français avaient réussi à bâtir ce pays d’Acadie années après années entourés par les Mi’kmaq, malgré les mille déboires dus aux Anglais leur jalousant ce pays, et les terres qu’ils avaient défrichées grâce à un labeur intense sur plusieurs générations. Ces Français, devenus au fil des ans des Acadiens, ne désiraient qu’une chose, celle de vivre en paix et surtout de rester « Neutres » au milieu des différends existant entre les deux couronnes française et anglaise, jusqu’au moment où l’ennemi d’Angleterre s’attaquera directement à eux !
Cela dura ainsi plus d’un siècle malgré les Anglais qui ne cessaient à intervalles réguliers de s’emparer de leur pays et d’en chasser les Français, parce qu’au gré des différents traités, l’Acadie était ensuite rendue à la France.
La France s’était établie en Amérique septentrionale où elle avait créé la Nouvelle France comprenant dès 1605 l’Acadie, puis le Canada avec le fort de Québec en 1608 le long du Saint Laurent. Au fil des explorations menées par des Français peu ordinaires, qui s’élanceront à travers cet immense pays, en plantant des croix fleurdelisées au nom du Roi de France, au fur et à mesure de leurs avancées, la Nouvelle France s’agrandira sans cesse avec de nouveaux territoires, jusqu’à la Baie d’Hudson au Nord, jusqu’aux Rocheuses à l’Ouest et jusqu’au golfe du Mexique au Sud, lors de la découverte de la grande Louisiane. Mais cependant, la France et les Français n’avaient aucunement l’intention, et cela s’est confirmé tout le long que dura le siècle et demi du Régime français, de déposséder les Premières Nations ni de leur liberté ni des richesses de leur pays et encore moins de leurs coutumes ou de leur façon de vivre. Rien ne changea en effet pour elles dans leur façon de vivre, aussi longtemps que les Français restèrent. Cette entente s’est largement observée aux nombreux rapprochements amicaux entre ces peuples pourtant si différents, et même des rapprochements plus qu’amicaux eurent lieu sans étonner personne, lors des mariages franco-amérindiens. Des personnages fort connus comme Pierre Boucher en Nouvelle France qui avait épousé une Wendat, ou Charles de la Tour, lieutenant général d’Acadie une Mi’kmaq, pour seuls exemples.
Cependant lorsque de grands remous apparaissaient en Europe cela se répercutait inévitablement en Amérique septentrionale, ainsi au moment de la succession d’Espagne, cela se termina par le traité d’Utrecht en 1713 où la France dut céder aux Anglais, non seulement la Baie d’Hudson, mais également l’Acadie. Ces derniers s’empressèrent de la rebaptiser «Nouvelle Ecosse » comme ils l’avaient déjà fait une première fois en 1613, mais cette fois définitivement. Les Mi’kmaq avaient assisté aux cruautés que ces étrangers d’Angleterre ne cessaient de faire aux autres Abénaquis de Pentagouët, mais aussi à tous les Acadiens, les « French Neutral » comme ils les appelaient, dès qu’ils le pouvaient depuis un siècle. Ils redoutaient terriblement avec raison la victoire des Anglais et de ceux des colonies de Nouvelle Angleterre sur les Français d’Acadie, comprenant parfaitement que cela serait tragique aussi pour eux.
Le Traité d’Utrecht sonnera alors le glas de l’Acadie française.
Lorsque les Anglais occupèrent définitivement l’Acadie et la Baie d’Hudson au traité d’Utrecht en 1713, la population Mi’kmaq était alors importante ce qui permit sans doute à cette nation amérindienne de pouvoir résister et survivre, aux nombreuses attaques contre elle.
Dès lors, les Anglais, une fois installés en conquérants, ont pu bien plus aisément continuer à s’attaquer aux Acadiens, et les résistances et les luttes de ces derniers pour tenter de survivre ont été d’autant plus rudes, que ces nouveaux venus sur ce sol les détestaient. Certes ils étaient considérés comme d’affreux papistes, certes ils étaient aussi comme des frères avec les Sauvages, mais pire que tout ils détenaient -pour les avoir eux-mêmes défrichées- les meilleures terres ! Ils ne voulaient qu’une chose se débarrasser d’eux, ce qu’ils arrivèrent à faire en fin de compte avec une inhumanité peu commune, lors d’une déportation barbare et monstrueuse, avec ce « Grand Dérangement » en 1755. Les Mi’kmaq étaient encore présents aux côtés des Acadiens, au moment où a eu lieu ces épouvantables arrestations, un grand nombre d’entre eux réussit à échapper aux Anglais et à s’enfuir à travers les bois, avant même d’être embarqués de force sur les navires pour être déportés. Ils tentèrent de rejoindre la partie de la Nouvelle France encore française, à la fois par terre ou encore en tentant de suivre les fleuves et les rivières ainsi que la vallée de la Matapédia. Les Mi’kmaq partagèrent aussi le triste sort des Acadiens, au cours de ce terrible et glacial hiver de 1756-57 au camp des réfugiés de Miramichi, soutenus, autant qu’il le pouvait lui-même, par le lieutenant Charles de Boishébert et le régiment français.
Il s’était créé entre ces Français d’Acadie et les tribus Mi’kmaq une telle fraternité que chacun alors protégeait l’autre des attaques anglaises. Cette protection mutuelle était fondée sur cette longue et profonde amitié mais aussi sur l’admiration, le respect de la culture de l’autre. Cette alliance indéfectible développée entre ces Français et les Mi’kmaq provenait également de l’esprit profond de la diplomatie de la France, préconisant naturellement ce vivre ensemble, proposant ainsi sans aucune différence l’instruction des enfants des Amérindiens, autant que ceux des enfants des Français. C’est ainsi que parmi ces Premières Nations si certains désiraient se rendre en France, ils pouvaient le faire tout autant qu’un « naturel François ».
Les alliances nouées par les Anglais avec les tribus amérindiennes n’étaient pour la plus grande part fondées que sur leur propre avantage, et s’ils se sont alliés avec certaines tribus, souvent les plus belliqueuses, ces alliances basées sur le seul intérêt loin de toute véritable amitié, ne duraient que le temps, où les deux côtés y trouvaient leur bénéfice, comme avec les Iroquois, ces ennemis ancestraux des Mi’kmaq.
Les Iroquois (Odinossonis) appelés aussi peuple des Cinq Cantons à cette époque, n’étaient cependant ni pour les Anglais ni pour les Français ils étaient pour les Iroquois ! C’est pourquoi on les verra au long des années pencher pour les uns ou pour les autres selon leurs seuls intérêts.
Les Micmac/Mi’kmaq d’Acadie faisaient partie de la confédération Waban Aqui, ainsi que les Abénaquis et les Malécites. Ce peuple algonquin de la côte Nord-Est de l’Amérique du Nord se répartissait sur de nombreux territoires d’Acadie, de l’île Saint Jean, de Gaspésie, ou de Terre-Neuve… Ceux vivant dans la région de la Listuguj/ Restigouche et autour de la Baie des Chaleurs, portaient un saumon comme emblème. Pour ceux de la région de Miramichi leur emblème représentait un guerrier armé d’une lance et d’un arc. Certains habitaient sur l’île Royale, aujourd’hui appelée Cap Breton, les Micmac l’avaient dénommée Onamag, elle est devenue le siège de leur grand Sachem ; Ils vivaient de chasse, de pêche et de cueillette, de racines sauvages et de fruits secs, à l’automne comme la grande majorité des autres peuples Amérindiens, ils partaient pour la chasse au caribou. Parents avec les Abénaquis de Pentagouët de Nouvelle Angleterre et les Malécites du Nouveau Brunswick, ils n’étaient pourtant pas agriculteurs. Ils n’habitaient pas dans des Tipis en peau, mais dans des Wigwam coniques qui étaient fabriqués sur la base d’un treillis de bois d’épinette, recouvert d’écorces de bouleau. Sur le sol, ils disposaient des branches fines de sapins qu’ils recouvraient de confortables fourrures. Leurs wigwams pouvaient être démontés et remontés facilement selon les besoins de leurs déplacements. Les hommes et les femmes portaient des vêtements à franges fabriqués en peau de Caribou, ils portaient tous les cheveux longs, autant les uns que les autres. Ils se servaient de deux sortes de raquettes, les plus grandes pour la neige poudreuse, les plus petites lorsque la neige était dure. Les funérailles chez ses peuples Mi’kmaq donnaient lieu à des cérémonies qui rassemblaient toute la tribu, et qui se terminaient par un grand festin. Ils se noircissaient le visage pendant trois jours entiers en signe de deuil, pourtant ils n’avaient pas particulièrement soigné leurs malades vieillissants, ils ne le nourrissaient plus et le chaman pour activer le décès, versait de l’eau glacée au niveau du nombril des vieillards ! Selon les personnes, certaines préparaient eux-mêmes leur propre mort, sans doute pour l’activer, connaissant le peu de soin qu’ils apportaient aux mourants, car les malades pouvaient aussi être purement et simplement abandonnés à leur sort !
Depuis la main mise anglaise sur l’Acadie devenue alors Nouvelle Ecosse les dirigeants anglais avaient tout tenté pour mettre les tribus Mi’kmaq de leur côté et les séparer des Français. Ils instaurèrent dans ce but de leur faire signer des traités, visant à obtenir leur soumission ni plus ni moins à la domination britannique ! Pourtant un des gouverneurs Edward Cornwallis déclarera sans s’en cacher : « les traités ne valent rien, seule la force prévaudra » Et c’est ce qui se passera, puisqu’ils étaient là pour prendre les terres de ces « Indiens » et pour y établir le plus de colons possibles !
La résistance à la domination britannique s’est encore accrue car les gouvernements anglais ont continué à faire venir de nombreux colons anglophones, à leur concéder des terres, y compris des concessions faisant plusieurs milliers d’acres, sans tenir compte de l’opposition acharnée des Mi’kmaq. Cette usurpation de terres sans leur consentement pouvait faire craindre aux autorités anglaises que ces derniers, à juste titre, ne tentent de faire cesser cette agression des Anglais en se retournant violemment contre eux. Ceux-ci pour se justifier arguaient que les Mi’kmaq avaient perdu leur droit de propriété sur la Nouvelle Ecosse parce qu’ils avaient pris les armes contre eux, ou encore que la France leur avait donné toutes leurs terres en même temps que le pays ! Ce que réfuta les Mi’kmaq, jamais les Français ne leur avaient pris leurs terres, ils ne pouvaient donc pas avoir pu les leur céder !
Après le départ de la France de l’Acadie, les exactions sur les Acadiens et sur les Mi’kmaq par les Britanniques n’eurent plus de mesures. Cette province de la Nouvelle France devenue province anglaise devait être colonisée et elle le serait !
Il fallait faire vite, si les hostilités reprenaient entre Français et Britanniques ils savaient parfaitement que les Mi’kmaq n’hésiteraient pas un instant à soutenir les Français. En 1740 les Anglais pressaient sans cesse les Acadiens de signer le serment d’allégeance à la couronne britannique, et les Acadiens subirent de plus en plus de contrôles dans leur vie de tous les jours, tout en augmentant le prix des impôts sur toutes leurs marchandises. En 1744 une nouvelle guerre, celle de la succession d’Autriche se déclara en Europe, se répercuta entre la France et l’Angleterre, aussitôt le Mi’kmaq prirent faits et causes pour les Français et se mirent sans surprise de leur côté.
Le gouvernement français de Québec jugeant que leurs vies étaient en danger envisagea de faire venir du côté français et d’y réinstaller tous ceux qui le désireraient, Acadiens et Micmacs. Certains acceptèrent mais ils ne furent pas nombreux, comment quitter sa maison et tout ce qui avait fait leur vie depuis un siècle et demi ? Ces lieux mêmes où leurs ancêtres français venus de France avaient si solidement replanté leurs racines et bâti ce pays ? Alors ceux qui restèrent furent soumis à des traitements si barbares de la part des Anglais, que les Acadiens avec les Mi’kmaq à leurs côtés n’ont pas eu d’autre choix que de résister, eux qui jusque-là voulaient rester Neutres… Mais tout était déjà bien orchestré et élaboré depuis Londres sous la direction de Lord Halifax. Ainsi en 1749 ce nouveau commissaire du Commerce et des Plantations fit venir encore davantage de colons protestants pour supplanter ces Français catholiques et repousser tous les Amérindiens et Edward Cornwallis, le gouverneur, établit une base militaire pour parer à la menace franco-amérindienne que cela allait déclencher. Immédiatement une nouvelle ville sera construite au nom de ce lord, ce sera Halifax, soigneusement entourée de fortifications.
Le 1er octobre 1749 Cornwallis lors du conseil qu’il réunit dans le port d’Halifax sur le navire le Beaufort, démontra sa parfaite cruauté en obtenant l’approbation de tous pour déclarer officiellement la guerre aux Mi’kmaq avec l’institution de la prime aux scalps ! « …Il ne faut pas les confirmer comme un peuple libre et indépendant, nous devons les traiter comme des bandits et des rebelles au gouvernement de sa majesté. Il faut donc les poursuivre jusque dans leurs repaires et leur montrer qu’ils ne sont nulle part en sécurité dans la province. » Aussitôt ils levèrent une compagnie de 50 personnes volontaires pour les pourchasser dans les bois dirigés par John Gorham, ils firent venir une autre compagnie de cent hommes pour les renforcer en prévision de l’hiver, sans oublier une récompense de dix guinées pour tout Mi’kmaq fait prisonnier…ou tué ! Une tentative d’éliminer les Mi’kmaq était donc bien commencée, au coût de dix guinées pour le Trésor du gouvernement fédéral anglophone. Ce n’était pas la première fois que Cornwallis démontrait autant d’inhumanité mais ses conseillers n’étaient certes pas à exempter !! Edward Cornwallis avait été le lieutenant-colonel stationné en Ecosse, il avait participé à la terrible bataille de Culloden, fin avril 1746, il avait encouragé et contribué avec ses troupes à la maltraitance barbare des Ecossais.
Le traité de 1749 renouvela celui de 1725 c’est-à-dire déposséder les Amérindiens Mi’kmaq et les autres petites nations, de leur liberté et de leurs terres. Les chefs Malécites ratifièrent ce traité de paix le 4 septembre 1749, les Mi’kmaq quant à eux ne l’acceptèrent pas, mais l’abandon d’une partie de leurs alliés Malécites, qui se mirent ainsi du côté de l’envahisseur anglais, leur démontra parfaitement qu’à présent leur situation allait se dégrader encore plus rapidement. Malgré cette perspective peu réjouissante, ils poursuivirent courageusement la résistance pour leur survie, avec l’aide des Acadiens aussi maltraités qu’eux, et de quelques petits groupes Malécites tenaces.
Dès septembre il est réaffirmé aux chefs Mi’kmaq ce qu’on leur demande depuis 1725 de se soumettre ni plus ni moins à la domination britannique confirmant leur crainte pour de nouveaux plans de la colonisation britannique. Très inquiets les Mi’kmaq non seulement renouvelèrent leur déclaration de guerre mais attaquèrent des cibles militaires et commerciales. Devant cette résistance, à l’expropriation de leurs terres à laquelle ils s’attendaient, les autorités par la voix du gouverneur affirma que cette guerre ne devrait pas se terminer par un accord de paix, mais « par l’éradication pure et simple de tous ces Mi’kmaq de la péninsule, une bonne fois pour toute » !
La vie d’un Amérindien semblait bien en effet n’avoir aucune valeur pour les Anglo-saxons ils ne lui accordaient aucun droit civil ou humain, cela avait été largement constaté depuis l’implantation même des colonies de Nouvelle Angleterre en 1620, depuis l’arrivée des premiers colons, les pères pèlerins ces fathers pilgrims, si un Anglais tuait un Indien cela n’était pas considéré comme un crime et restait totalement impuni.
Les Micmac/ Mi’kmaq ont lutté pour préserver leur liberté mais la proclamation barbare de 1749 a été dévastatrice pour eux, puisqu’en effet ont été massacrés autant les hommes que les femmes, les enfants, ou encore les vieillards et les infirmes, tous ceux que les chasseurs de prime ont pu attraper, ont été scalpés. Un groupe de rangers de Gorham ayant rapporté 25 scalps, a réclamé la prime de dix livres pour chacun. Mais tous ces scalps ne venaient pourtant pas uniquement d’Indiens certains venaient sans aucun doute possible de Blancs, c’est-à-dire des Français d’Acadie !
Cela ne les interpella pas un instant, sachant que parmi les Acadiens certains étaient métissés, ils les considéraient tout autant que les Sauvages ! Cette chasse aux scalps entraîna des réactions chez les Français de Louisbourg, écœurés de voir ce qui se passait dans leur ancienne Acadie, ils encouragèrent les Mi’kmaq à répliquer, en leur offrant à eux aussi une prime non pour des scalps anglais mais uniquement pour des soldats anglais faits prisonniers et vivants. A noter, cela ne visait pas les civils et encore moins les femmes et les enfants ! Cependant les soldats prisonniers amenés à la forteresse de Louisbourg étaient rapidement libérés sains et saufs par les Français, à la différence des prisonniers Mi’kmaq détenus par les Anglais, soit ils étaient détenus indéfiniment, soit envoyés à Boston pour y être pendus.
L’Abbé le Loutre, terriblement consterné de ce que les Anglais faisaient subir comme cruautés aux Acadiens et à « ses » Micmac/ Mi’kmaq dont il était le missionnaire attitré, n’a cessé de les défendre et certes s’il les a encouragés à ne pas se laisser faire, à résister, c’était parce que les Anglais eux-mêmes ne cessaient de brutaliser ces deux peuples et d’entreprendre des représailles envers eux, depuis des années. Cependant, en se mettant franchement avec eux, en travers des projets des Anglais, Le Loutre a, bien entendu, été détesté par ces derniers, qui ne cessaient d’être déterminés à chasser les Acadiens et à déposséder et assujettir totalement les Mi’kmaq. Excédés ils mirent la tête de l’abbé Le Loutre à prix !l C’est pourquoi les descriptions acerbes, et même davantage, que font les autorités anglaises et principalement le gouverneur Edward Cornwallis de ce prêtre, qui n’a jamais cessé de défendre les Mi’kmaq et les Acadiens et de les soutenir contre eux, ne sont donc pas étonnantes ! Un homme comme le Loutre s’il a considérablement aidé les tribus à faire face à leur situation, il a également proposé des arrangements de paix importants entre les Mi’kmaq et les Anglais, mais tous ont été repoussés avec mépris et… dérision ! Les Mi’kmaq s’étaient réunis en conseil le 23 août 1754, ils auraient été prêts à céder la plus grande partie de leur pays contre un plus petit territoire, où ils auraient pu rester et vivre tranquilles pour toujours, et même le partager avec des Malécites et d’autres petites nations. Leur lettre apportée par l’Abbé Le Loutre à Halifax pouvait amener une grande avancée pour les Britanniques, mais il fallait pour cela qu’ils désirent vraiment cette paix avec les Mi’kmaq. Bien au contraire le gouverneur Lawrence et tout le conseil rejetèrent les propositions, ils ne voulaient rien céder, et surtout pas un seul morceau de bonnes terres aux Indiens.
Après s’être lâchement et cruellement débarrassé des Acadiens en 1755 et 1758 il aurait été facile de penser néanmoins, puisque les Anglais avaient enfin réussi à s’emparer de l’Acadie puis à en chasser les Acadiens, comme les feuilles au vent sur le rivage, qu’ils allaient peut-être mener une politique coloniale moins épouvantable par rapport aux Mi’kmaq, ce premier peuple vivant sur ce sol, depuis des milliers d’années. Ils ont préféré accroître la pression sur ces tribus pour tenter de les assujettir, et si possible à long terme de s’en débarrasser comme ils s’étaient débarrassés des Acadiens en tentant de les exterminer, que ce soit par la force militaire ou les mauvais traitements, car ces tribus qu’ils décimaient jours après jours, représentaient encore pour eux une force à craindre.
Entre les Mi’kmaq et les Anglais tout ne se termina donc pas du tout tranquillement après la Déportation inhumaine des Acadiens, ni même après le traité de 1763 et le départ définitif de la France, de cette Amérique septentrionale, qu’ils revendiquaient pour leur seul bénéfice.
Après le précédent traité d’Utrecht, les Britanniques avaient enfin récupéré au traité de Paris de 1763, soit cinquante ans plus tard, la totalité de cette Nouvelle France qu’ils désiraient depuis plus d’un siècle. Une fois le traité signé, la guerre de conquête terminée les Mi’kmaq qui avaient déjà largement subi les gouvernements anglais depuis 1713 perdirent tout espoir. En effet ils avaient assisté mais partagé aussi durant toutes ces années, ce qu’ils avaient fait subir d’épouvantable aux Français d’Acadie, avec cette politique anglaise visant avec cruauté à soumettre ces « French Neutral » comme ils les appelaient, dans l’espoir d’en débarrasser toute la province, ce qu’ils arrivèrent à faire lors du monstrueux « Grand Dérangement » de 1755 suivi trois ans plus tard de celui de l’île Saint Jean en 1758.
Evidemment dans ces circonstances les tribus Mi’kmaq n’acceptèrent pas de faire la paix avec le conquérant anglais, une paix uniquement dictée par ces derniers pour leur seul bénéfice, les affrontements continuèrent… Ils s’amplifièrent encore davantage au moment où une grande révolte contre Londres se développa chez les colons anglais de Nouvelle Angleterre, ces colons révoltés furent désignés par Londres comme des « Insurgents ». Les Mi’kmaq prirent faits et causes pour eux espérant que s’ils gagnaient leur indépendance, cela aiderait les Français à revenir en Nouvelle France et à en chasser les Anglais ! Certains parmi eux se rendirent au Massachusetts et signèrent le traité de Watertown en juillet 1779, mais de leurs côté les Britanniques pour inciter les Mi’kmaq à rester neutres et à les empêcher de rejoindre les Insurgés leur fourniront aussitôt tout ce qui sera nécessaire à leur survie, ce qui perdura seulement jusqu’à la fin de la guerre d’indépendance des colonies britanniques avec le traité de 1783. En ces difficiles temps de rébellion dans leurs colonies de Nouvelle Angleterre ce n’était effectivement pas le moment pour eux d’avoir une autre guerre avec les Indiens.
Tout aussitôt les autres colons anglais restés loyaux à l’Angleterre arrivèrent alors très nombreux en Acadie et au Nouveau Brunswick, afin d’échapper aux représailles de ces nouveaux étasuniens, qu’ils n’avaient pas soutenus dans leur révolte. Ces Loyalistes comme ils ont été appelés, ont été au nombre de cinquante mille environ à se réfugier au Canada, récemment devenu anglais. Ils obtinrent immédiatement des terres du gouvernement britannique et dès 1783 presque quinze mille d’entre eux s’étaient déjà installés dans les provinces maritimes, repoussant toujours plus loin les Mi’kmaq sur leur sol.
Le gouvernement institua très officiellement pour ces tribus Mi’kmaq, des terrains qui seraient « réservés pour leur usage et leur bien ! » Les Réserves visaient à séparer les « Blancs » des « Peaux Rouges » méthode largement utilisée par les Anglo-saxons partout, que ce soit au Canada devenu anglais, en Nouvelle Ecosse mais aussi aux États-Unis d’Amérique…
En 1821 au total 20.765 acres au milieu de marécages, des tourbières ou des montagnes pierreuses, sans doute à grand-peine 10% de tous leurs immenses territoires. Hélas, repoussés sur ces terres incultes et arides, ils vont devenir des parias sur le sol de leur propre pays. A mesure que leurs territoires diminuaient, à mesure qu’ils furent installés dans ces terrains sordides, les Micmac commencèrent à devenir semi sédentaires, puis totalement sédentaires étant dans l’impossibilité de se nourrir sur leurs anciennes terres, dans leur propre pays !
Ainsi, ils subirent cette préemption de tous leurs territoires lors de l’arrivée de plus en plus nombreuse de colons anglais et écossais, qui empiétèrent même dans les « réserves » où ils avaient été assignés, ils assistèrent stupéfiés à l’abattage de leurs forêts restreignant l’habitat de l’Orignal et du Caribou, et par voie de conséquences, tous les autres animaux se sont également raréfiés. Mais les bouleversements ne s’arrêteront pas là, il se rajoutera également des barrages sur les rivières, noyant parfois des portions entières de leurs terres. Leur source alimentaire principale ainsi diminuée réduisit encore davantage ces tribus à des états de famine. Dépossédés de tout leur pays, de leurs moyens de subsistances, de leurs libertés et de leur dignité, les Mi’kmaq durant les années qui suivirent cessèrent, contraints et forcés, leurs hostilités se retrouvant seuls, les Français d’Acadie avaient été déportés et les Français étaient repartis en France ! De plus impossible de compter sur les insurgés anglo-saxons devenus grâce à la France les nouveaux étatsuniens, qui ne leur démontrèrent aucune reconnaissance pour leur précédent soutien, pas plus d’ailleurs qu’à la France !! Seule restait une petite population canadienne française le long du Saint Laurent elle aussi bien assujettie sous la main mise anglaise. Alors frappés par la pauvreté les Mi’kmaq furent contraints d’accepter une paix humiliante et injuste. Leur espoir du retour de la France s’amenuisa de plus en plus, seule une petite flamme s’alluma encore pour eux au moment de la Révolution française, qui espérèrent-ils alors, aurait pu permettre ce retour.
Ils durent vivre sous cette « English Liberty » qu’on leur imposait et sont devenus des proscrits dans leur propre pays, et pire en voie d’extinction. Malgré cela les Anglais les considéraient toujours comme une menace
La population Mi’kmaq avait continué à décliner jusqu’en 1847, elle était à un niveau si bas qu’elle faisait craindre la disparition totale de leur race, puis les observateurs ont vu leur nombre légèrement remonter en 1867, au moment de la Confédération où elle atteignit à grand peine 1600 personnes ce que confirmera le commissaire aux Affaires Indiennes Abraham Gesner. Mais cela non pas grâce à de meilleurs traitements, qui auraient favorisé de nouvelles naissances, mais dû au retour de Mi’kmaq d’autres régions, comme l’île saint Jean/ Prince Edouard, le Nouveau Brunswick, peut-être du Canada ou même des nouveaux états unis d’Amérique.
Un triste siècle passa ainsi pour les Mi’kmaq !
Ils virent le gouvernement de la Nouvelle Ecosse instaurer la loi sur les Indiens en 1842 A l’issue de cette loi Joseph Howe nommé commissaire des Affaires indiennes s’employa à soutenir la politique en faveur des Mi’kmaq avec le gouverneur Falkland. Sans ces deux personnages assez compatissants leur disparition, étant largement programmée, aurait été inévitable. Joseph Howe blâmait fortement le gouvernement pour avoir permis depuis tant d’années une telle pauvreté et une telle mortalité chez ce peuple. Il faisait le constat que les Amérindiens pouvaient parfaitement continuer à avoir eux aussi leur langue et leur culture. Il citait l’exemple des Acadiens, certains d’entre eux ayant survécu à la déportation honteuse et à leur terrible exil étaient revenus, depuis maintenant 80 ans, démontrant que les descendants Français vivant au milieu d’une population britannique étaient toujours Français ! Les Mi’kmaq ont accepté de vivre dans les réserves pensant que c’était leur seul moyen de survivre en tant que peuple distinct.
Après s’être emparés de leur pays, après plus de 119 ans les premières mesures d’éducation de la Loi sur les Indiens de 1876 se mirent en place, même si c’était principalement dans le but de les assimiler et de détruire leur langue amérindienne tout autant que leur culture Mi’kmaq ! « Cette loi n’a pas été élaborée pour voir prospérer les Indiens mais pour leur porter un coup fatal en les assimilant » Cf. Dany Paul un Micmac.
Les Indiens qui acceptaient de vivre dans les Réserves avaient été divisés en bandes ou groupes, permettant de les transformer en unités distinctes et de les diviser. Effectivement cela a élevé des frontières entre chaque communauté puisqu’il leur a été interdit de circuler librement sans avoir auparavant demandé l’accord des autres groupes y compris même par quel chemin passer. Impensable pour eux qui avaient toujours vécu libres sur tous ces immenses territoires se déplaçant au gré des saisons, de la pêche et de la chasse… Cette loi énonçait certes la souveraineté des Premières Nations, mais le gouvernement et les fonctionnaires ne cessaient ensuite de la nier, tout comme était reconnue l’indépendance des « bandes et de leurs conseils », mais par la suite ils s’efforçaient de les rendre complètement dépendants ! Pourtant, pire que tout, par cette loi le gouvernement anglais se permettait de décider qui avait le droit de se considérer Indien ou non. Ainsi une personne ayant réussi des études et obtenu un diplôme universitaire, perdait de fait, son statut d’Indien. Les études n’étaient pas interdites mais cette finalité a empêché bien des Indiens d’obtenir un diplôme. Le racisme était tel, qu’il était difficile à un Micmac d’aller en classe avec des anglophones, une jeune institutrice Micmac était parvenue à terminer ses études et enseignait dès lors dans les écoles. Félicitée pour son courage d’avoir résisté pendant ses années d’études au racisme anglais ambiant, elle expliqua qu’elle n’avait aucun mérite car elle avait toujours eu l’habitude, depuis toute petite, d’aller à l’école avec des Acadiens, ces Français ne connaissaient aucun racisme envers eux, cela l’avait confortée sur ce qu’elle était et sur l’égalité réelle de tous les êtres humains. Elle détailla alors que leurs liens d’amitié et d’estime avec les Français remontaient depuis Membertou et Samuel de Champlain, Pierre Dugua des Monts, Jean de Poutrincourt et tous les autres Français par la suite, ces liens n’avaient jamais faibli depuis.
Dans la loi sur les Indiens, une indienne qui épousait un non Indien perdait son statut d’indienne, mais une blanche qui épousait un Indien devenait indienne. C’était pourtant fondamental d’être inscrit sur le registre des Indiens pour affirmer ses droits ancestraux.
Cette discrimination par le sexe a été finalement abrogée … le 17 avril 1985.
Joseph Howe a poussé le gouvernement à faire davantage. Il est difficile de retrouver précisément tout ce qu’il a fait comme Surintendant aux affaires indiennes dans les archives. Est-ce que cela a été mis de côté parce qu’il dévoilait trop le racisme qui avait cours en Nouvelle Ecosse, causant tant de souffrances et de morts aux Indiens ? De même cela est des plus compliqué de trouver des rapports sur la politique des scalps induisant la conduite barbare des fonctionnaires anglais.
Les Mi’kmaq subirent les sanctions du gouvernement et des fonctionnaires gouvernementaux mais ils discernèrent en George Monk Surintendant aux affaires indiennes tout comme par la suite en Joseph Howe et Abraham Gesner des personnes qui ont eu de la compassion pour eux et ont tenté dans la mesure de leurs moyens de les soutenir.
Individuellement de nombreux colons anglais ont été également compatissants et ont cherché à les aider et à soutenir ceux mourant de faim, certains ont même établi des pétitions pour peser sur le gouvernement mais sans résultat, le gouvernement a toujours fermé les yeux sur leurs détresses, même si parfois il consentait à allouer une petite somme pour des vivres et des couvertures, cela était insuffisant et les Indiens ont continué à souffrir sans vêtements et sans soins médicaux.
De date en date leur existence est devenue de plus en plus épouvantable :
*Vers 1800 en plus de leurs ennuis sans fin de nombreuses maladies sont arrivées en Nouvelle Ecosse avec les nouveaux colons anglais et les migrants écossais, ainsi des épidémies de variole eurent lieu en 1826, de même un vaisseau porteur lui aussi de cette grave maladie infectieuse avait accosté au cap Breton puis suivirent le typhus et la fièvre thyroïde, tout cela terrassa facilement les Mi’kmaq, trop affaiblis physiquement.
*En 1831 leur situation, décrite par une nouvelle pétition, est désespérée.
*En 1838 un rapport sur la vie des Mi’kmaq indiquai qu’ils s’élevaient alors le 22 aout 1838 à 1425 individus, seuls restant alors sur les 200.000, recensés au moment de l’arrivée anglaise sur leur sol. Cela ne fit changer aucune politique à leur égard, avaient-ils alors l’intention d’attendre encore quelques années pour que le problème indien de la fin des Mi’kmaq se règle tout seul ?
*En 1834, Rien ne change là encore, que ce soit pour ceux de Windsor ou du Cap breton
*En 1840 la Nouvelle Ecosse était un pays florissant et abondant où tout poussait sur les bonnes terres des Acadiens, maintenant aux mains des Anglais. Peu de colons anglophones se trouvaient démunis, hormis les Mi’kmaq et les Acadiens dont certains avaient essayé de revenir vivre sur leur terre d’Acadie après le traité de 1763.
*En 1841 le grand chef Louis Benjamin Paul ou Passauhmigh de Shubenacadie désespéré pour son peuple ne recevant aucune réponse du gouvernement provincial écrivit à la reine Victoria, il lui exposa comment l’homme blanc d’Angleterre avait pris tout ce qui leur appartenait et lui demandant d’intervenir pour arrêter cette politique honteuse contre eux.
*En 1843 Joseph Howe envoya « des versements de charité » mais son inquiétude était grandissante, si on ne changeait pas davantage de politique envers eux, la race des Mi’kmaq risquait de s’éteindre dans les décennies suivantes.
*En 1846 malgré ces appels rien de plus n’étant entrepris, cela continua à s’aggraver et ceux de Digby continuèrent à mourir faute de nourriture
*En 1851 au Cap Breton la famine était là aussi, affreuse !
*En 1855 Ceux de New Glasgow étant presque tous morts de faim et la même chose pour ceux de Pictou en 1856 en 1861 le Surintendant des affaires indiennes les décrivit en 1861 « comme indigents et misérables »
Il a fallu attendre 1867 et la Confédération pour que le gouvernement fédéral reprenne à son compte leur terrible condition, mais il le fit du bout des lèvres, si bien que les années passèrent encore, sans que cela n’améliore vraiment leur triste existence.
Dans des années plus récentes encore, en 1982 un médecin, Virginia Miller, écrivit un rapport décrivant la totale misère des Mi’kmaq.
Les Premières Nations ont enduré toutes ces souffrances afin de conserver leur identité, si elles avaient accepté de s’assimiler elles n’existeraient plus ! Elles ont été ignorées et le gouvernement a conçu le Livre Blanc cependant « préserver la culture des Premières Nations n’était pas le but du gouvernement, les dirigeants voulaient qu’ils se fondent et disparaissent dans le grand creuset commun anglais » Pour établir ce Livre Blanc de nombreuses consultations ont été certes tenues avec les Premières Nations, mais subtilement avec ceux, parmi les Indiens, qui correspondaient aux idées proposées par le gouvernement anglais, alors « les consultations furent de pures … Plaisanteries. »
Le Livre Blanc explique parfaitement que les Premières Nations ont bien été victimes de discriminations ! Pourtant, le racisme, qui a été primordial pour entraîner ces ségrégations tant financières, économiques, ou éducatives, loin d’être retracé a été dissimulé voire occulté ! A cause de ce refus de la société de les faire participer à la vie économique du pays, les Amérindiens ont été dépendants des gouvernements, qui agissant avec un paternalisme humiliant, les ont empêchés d’améliorer les conditions consternantes de leur vie, dans laquelle on les a plongés.
Les Premières Nations de l’Amérique septentrionale vivaient sur ce sol depuis des milliers d’années avec leur civilisation et leurs cultures propres. Les Amérindiens ont été marginalisés sous tous les gouvernements canadiens anglophones successifs, privant ces peuples de leurs terres, de leurs ressources naturelles et les ont sans cesse contrôlés et assujettis. Joseph Howe lors de son discours anti-fédéraliste en 1867 avait exprimé sa tristesse, mais aussi son admiration pour les Mi’kmaq :
« … Leur race est en perdition mais même dans les jours de décadence et d’humiliation elle a toujours relevé le défi de conserver le respect. Quand le dernier des Micmac inclinera la tête dans son campement solitaire et qu’il confiera son âme à son créateur, il pourra repenser avec fierté à son passé et remercier le Grand Esprit que son peuple ne compte aucun Tupper ni Henry, ni Archibald ou Mc Cully… »
Sources
Archives de la Nouvelle Ecosse, le Canada français documents sur l’Acadie
Archives de la Confidency of Mainland Micmac
Documents publics
Modification Loi sur les Indiens 1876 à 1996
Loi du Canada « les Indiens inscrits deviennent citoyens canadiens » du 7 juin 1956
Registre général des Réserves
Daniel N. Paul responsable des affaires indiennes « Ce n’était pas nous les Sauvages » Editions le bouton d’or d’Acadie juin 2020
Les Mi’kmaq autant anéantis que les Français d’Acadie !
La présence Mi’kmaq est bien absente de l’Histoire du Canada anglophone et de la Nouvelle Ecosse, l’ancienne Acadie française.
Il est en effet difficile en remontant dans le passé, de trouver des références importantes, dans la presque totalité des textes de l’histoire coloniale anglaise de ce peuple amérindien. Au vu des traitements infligés à ces Premières Nations, les historiens anglophones ne peuvent pas avoir fait une omission si cruciale sans que cela ne nous interroge… Alors que la vie des Français d’Acadie a été largement répertoriée et bien décrite y compris au moment de leur inique déportation dans les colonies anglaises, pour la majorité d’entre eux.
Lors de l‘arrivée des Français avec Pierre Dugua de Mons et Samuel de Champlain en 1604, les Mi’kmaq/Micmac et leur chef Membertou qui vivaient dans la région située au bord de la baie, qu’ils avaient appelée tout simplement Baie des Français, à force de les voir aller et venir dans cette baie, (aujourd’hui baie de Fundy) les avaient accueillis avec bienveillance et sympathie, au moment de leur installation à cet endroit, lors de la construction du petit fort de Port Royal en 1605 puis très rapidement s’était créée avec eux une profonde amitié, elle ne s’est jamais démentie depuis, ils sont restés sans cesse présents à leurs côtés durant plus d’un siècle et demi, édifiant de vrais et solides liens d’amitié avec eux.
Ce peuple venu de France était arrivé en ami, et non en conquérant sur leur sol. Les Français avaient apporté le réel savoir-faire de leur pays, un savoir-faire qui leur a permis de rendre toutes ces terres fertiles, ajouté à leur travail acharné. Ils sont arrivés à cultiver toutes sortes de légumes ou de fruits inconnus jusqu’ici des Amérindiens, de ces régions… Les Mi’kmaq/Micmac auprès d’eux se sont beaucoup mieux nourris que lors de leurs seules chasses, pêches ou cueillettes…Ils ont toujours considéré les Français d’Acadie comme des frères, et lorsque l’adversité les submergeait, on les a chaque fois trouvés à leurs côtés ! Ils ont encore été là auprès des Acadiens, résistant tout autant qu’eux contre l’envahisseur anglo-saxon, les aidant pour tout y compris à s’emparer d’un bâtiment anglais, comme cela s’est produit dans le havre à l’étang, une goélette qui amenait du ravitaillement aux Anglais de Port Royal, - devenu Annapolis -, et tant de nombreuses autres actions de résistance ont été ainsi répertoriées, une résistance menée conjointement Acadiens et Micmac ! Ils étaient là aussi au moment où l’escadre du duc d’Anville, envoyée en 1646 par la France, était attendue pour tenter de reprendre la forteresse de Louisbourg.
Les Français avaient réussi à bâtir ce pays d’Acadie années après années entourés par les Mi’kmaq, malgré les mille déboires dus aux Anglais leur jalousant ce pays, et les terres qu’ils avaient défrichées grâce à un labeur intense sur plusieurs générations. Ces Français, devenus au fil des ans des Acadiens, ne désiraient qu’une chose, celle de vivre en paix et surtout de rester « Neutres » au milieu des différends existant entre les deux couronnes française et anglaise, jusqu’au moment où l’ennemi d’Angleterre s’attaquera directement à eux !
Cela dura ainsi plus d’un siècle malgré les Anglais qui ne cessaient à intervalles réguliers de s’emparer de leur pays et d’en chasser les Français, parce qu’au gré des différents traités, l’Acadie était ensuite rendue à la France.
La France s’était établie en Amérique septentrionale où elle avait créé la Nouvelle France comprenant dès 1605 l’Acadie, puis le Canada avec le fort de Québec en 1608 le long du Saint Laurent. Au fil des explorations menées par des Français peu ordinaires, qui s’élanceront à travers cet immense pays, en plantant des croix fleurdelisées au nom du Roi de France, au fur et à mesure de leurs avancées, la Nouvelle France s’agrandira sans cesse avec de nouveaux territoires, jusqu’à la Baie d’Hudson au Nord, jusqu’aux Rocheuses à l’Ouest et jusqu’au golfe du Mexique au Sud, lors de la découverte de la grande Louisiane. Mais cependant, la France et les Français n’avaient aucunement l’intention, et cela s’est confirmé tout le long que dura le siècle et demi du Régime français, de déposséder les Premières Nations ni de leur liberté ni des richesses de leur pays et encore moins de leurs coutumes ou de leur façon de vivre. Rien ne changea en effet pour elles dans leur façon de vivre, aussi longtemps que les Français restèrent. Cette entente s’est largement observée aux nombreux rapprochements amicaux entre ces peuples pourtant si différents, et même des rapprochements plus qu’amicaux eurent lieu sans étonner personne, lors des mariages franco-amérindiens. Des personnages fort connus comme Pierre Boucher en Nouvelle France qui avait épousé une Wendat, ou Charles de la Tour, lieutenant général d’Acadie une Mi’kmaq, pour seuls exemples.
Cependant lorsque de grands remous apparaissaient en Europe cela se répercutait inévitablement en Amérique septentrionale, ainsi au moment de la succession d’Espagne, cela se termina par le traité d’Utrecht en 1713 où la France dut céder aux Anglais, non seulement la Baie d’Hudson, mais également l’Acadie. Ces derniers s’empressèrent de la rebaptiser «Nouvelle Ecosse » comme ils l’avaient déjà fait une première fois en 1613, mais cette fois définitivement. Les Mi’kmaq avaient assisté aux cruautés que ces étrangers d’Angleterre ne cessaient de faire aux autres Abénaquis de Pentagouët, mais aussi à tous les Acadiens, les « French Neutral » comme ils les appelaient, dès qu’ils le pouvaient depuis un siècle. Ils redoutaient terriblement avec raison la victoire des Anglais et de ceux des colonies de Nouvelle Angleterre sur les Français d’Acadie, comprenant parfaitement que cela serait tragique aussi pour eux.
Le Traité d’Utrecht sonnera alors le glas de l’Acadie française.
Lorsque les Anglais occupèrent définitivement l’Acadie et la Baie d’Hudson au traité d’Utrecht en 1713, la population Mi’kmaq était alors importante ce qui permit sans doute à cette nation amérindienne de pouvoir résister et survivre, aux nombreuses attaques contre elle.
Dès lors, les Anglais, une fois installés en conquérants, ont pu bien plus aisément continuer à s’attaquer aux Acadiens, et les résistances et les luttes de ces derniers pour tenter de survivre ont été d’autant plus rudes, que ces nouveaux venus sur ce sol les détestaient. Certes ils étaient considérés comme d’affreux papistes, certes ils étaient aussi comme des frères avec les Sauvages, mais pire que tout ils détenaient -pour les avoir eux-mêmes défrichées- les meilleures terres ! Ils ne voulaient qu’une chose se débarrasser d’eux, ce qu’ils arrivèrent à faire en fin de compte avec une inhumanité peu commune, lors d’une déportation barbare et monstrueuse, avec ce « Grand Dérangement » en 1755. Les Mi’kmaq étaient encore présents aux côtés des Acadiens, au moment où a eu lieu ces épouvantables arrestations, un grand nombre d’entre eux réussit à échapper aux Anglais et à s’enfuir à travers les bois, avant même d’être embarqués de force sur les navires pour être déportés. Ils tentèrent de rejoindre la partie de la Nouvelle France encore française, à la fois par terre ou encore en tentant de suivre les fleuves et les rivières ainsi que la vallée de la Matapédia. Les Mi’kmaq partagèrent aussi le triste sort des Acadiens, au cours de ce terrible et glacial hiver de 1756-57 au camp des réfugiés de Miramichi, soutenus, autant qu’il le pouvait lui-même, par le lieutenant Charles de Boishébert et le régiment français.
Il s’était créé entre ces Français d’Acadie et les tribus Mi’kmaq une telle fraternité que chacun alors protégeait l’autre des attaques anglaises. Cette protection mutuelle était fondée sur cette longue et profonde amitié mais aussi sur l’admiration, le respect de la culture de l’autre. Cette alliance indéfectible développée entre ces Français et les Mi’kmaq provenait également de l’esprit profond de la diplomatie de la France, préconisant naturellement ce vivre ensemble, proposant ainsi sans aucune différence l’instruction des enfants des Amérindiens, autant que ceux des enfants des Français. C’est ainsi que parmi ces Premières Nations si certains désiraient se rendre en France, ils pouvaient le faire tout autant qu’un « naturel François ».
Les alliances nouées par les Anglais avec les tribus amérindiennes n’étaient pour la plus grande part fondées que sur leur propre avantage, et s’ils se sont alliés avec certaines tribus, souvent les plus belliqueuses, ces alliances basées sur le seul intérêt loin de toute véritable amitié, ne duraient que le temps, où les deux côtés y trouvaient leur bénéfice, comme avec les Iroquois, ces ennemis ancestraux des Mi’kmaq.
Les Iroquois (Odinossonis) appelés aussi peuple des Cinq Cantons à cette époque, n’étaient cependant ni pour les Anglais ni pour les Français ils étaient pour les Iroquois ! C’est pourquoi on les verra au long des années pencher pour les uns ou pour les autres selon leurs seuls intérêts.
Les Micmac/Mi’kmaq d’Acadie faisaient partie de la confédération Waban Aqui, ainsi que les Abénaquis et les Malécites. Ce peuple algonquin de la côte Nord-Est de l’Amérique du Nord se répartissait sur de nombreux territoires d’Acadie, de l’île Saint Jean, de Gaspésie, ou de Terre-Neuve… Ceux vivant dans la région de la Listuguj/ Restigouche et autour de la Baie des Chaleurs, portaient un saumon comme emblème. Pour ceux de la région de Miramichi leur emblème représentait un guerrier armé d’une lance et d’un arc. Certains habitaient sur l’île Royale, aujourd’hui appelée Cap Breton, les Micmac l’avaient dénommée Onamag, elle est devenue le siège de leur grand Sachem ; Ils vivaient de chasse, de pêche et de cueillette, de racines sauvages et de fruits secs, à l’automne comme la grande majorité des autres peuples Amérindiens, ils partaient pour la chasse au caribou. Parents avec les Abénaquis de Pentagouët de Nouvelle Angleterre et les Malécites du Nouveau Brunswick, ils n’étaient pourtant pas agriculteurs. Ils n’habitaient pas dans des Tipis en peau, mais dans des Wigwam coniques qui étaient fabriqués sur la base d’un treillis de bois d’épinette, recouvert d’écorces de bouleau. Sur le sol, ils disposaient des branches fines de sapins qu’ils recouvraient de confortables fourrures. Leurs wigwams pouvaient être démontés et remontés facilement selon les besoins de leurs déplacements. Les hommes et les femmes portaient des vêtements à franges fabriqués en peau de Caribou, ils portaient tous les cheveux longs, autant les uns que les autres. Ils se servaient de deux sortes de raquettes, les plus grandes pour la neige poudreuse, les plus petites lorsque la neige était dure. Les funérailles chez ses peuples Mi’kmaq donnaient lieu à des cérémonies qui rassemblaient toute la tribu, et qui se terminaient par un grand festin. Ils se noircissaient le visage pendant trois jours entiers en signe de deuil, pourtant ils n’avaient pas particulièrement soigné leurs malades vieillissants, ils ne le nourrissaient plus et le chaman pour activer le décès, versait de l’eau glacée au niveau du nombril des vieillards ! Selon les personnes, certaines préparaient eux-mêmes leur propre mort, sans doute pour l’activer, connaissant le peu de soin qu’ils apportaient aux mourants, car les malades pouvaient aussi être purement et simplement abandonnés à leur sort !
Depuis la main mise anglaise sur l’Acadie devenue alors Nouvelle Ecosse les dirigeants anglais avaient tout tenté pour mettre les tribus Mi’kmaq de leur côté et les séparer des Français. Ils instaurèrent dans ce but de leur faire signer des traités, visant à obtenir leur soumission ni plus ni moins à la domination britannique ! Pourtant un des gouverneurs Edward Cornwallis déclarera sans s’en cacher : « les traités ne valent rien, seule la force prévaudra » Et c’est ce qui se passera, puisqu’ils étaient là pour prendre les terres de ces « Indiens » et pour y établir le plus de colons possibles !
La résistance à la domination britannique s’est encore accrue car les gouvernements anglais ont continué à faire venir de nombreux colons anglophones, à leur concéder des terres, y compris des concessions faisant plusieurs milliers d’acres, sans tenir compte de l’opposition acharnée des Mi’kmaq. Cette usurpation de terres sans leur consentement pouvait faire craindre aux autorités anglaises que ces derniers, à juste titre, ne tentent de faire cesser cette agression des Anglais en se retournant violemment contre eux. Ceux-ci pour se justifier arguaient que les Mi’kmaq avaient perdu leur droit de propriété sur la Nouvelle Ecosse parce qu’ils avaient pris les armes contre eux, ou encore que la France leur avait donné toutes leurs terres en même temps que le pays ! Ce que réfuta les Mi’kmaq, jamais les Français ne leur avaient pris leurs terres, ils ne pouvaient donc pas avoir pu les leur céder !
Après le départ de la France de l’Acadie, les exactions sur les Acadiens et sur les Mi’kmaq par les Britanniques n’eurent plus de mesures. Cette province de la Nouvelle France devenue province anglaise devait être colonisée et elle le serait !
Il fallait faire vite, si les hostilités reprenaient entre Français et Britanniques ils savaient parfaitement que les Mi’kmaq n’hésiteraient pas un instant à soutenir les Français. En 1740 les Anglais pressaient sans cesse les Acadiens de signer le serment d’allégeance à la couronne britannique, et les Acadiens subirent de plus en plus de contrôles dans leur vie de tous les jours, tout en augmentant le prix des impôts sur toutes leurs marchandises. En 1744 une nouvelle guerre, celle de la succession d’Autriche se déclara en Europe, se répercuta entre la France et l’Angleterre, aussitôt le Mi’kmaq prirent faits et causes pour les Français et se mirent sans surprise de leur côté.
Le gouvernement français de Québec jugeant que leurs vies étaient en danger envisagea de faire venir du côté français et d’y réinstaller tous ceux qui le désireraient, Acadiens et Micmacs. Certains acceptèrent mais ils ne furent pas nombreux, comment quitter sa maison et tout ce qui avait fait leur vie depuis un siècle et demi ? Ces lieux mêmes où leurs ancêtres français venus de France avaient si solidement replanté leurs racines et bâti ce pays ? Alors ceux qui restèrent furent soumis à des traitements si barbares de la part des Anglais, que les Acadiens avec les Mi’kmaq à leurs côtés n’ont pas eu d’autre choix que de résister, eux qui jusque-là voulaient rester Neutres… Mais tout était déjà bien orchestré et élaboré depuis Londres sous la direction de Lord Halifax. Ainsi en 1749 ce nouveau commissaire du Commerce et des Plantations fit venir encore davantage de colons protestants pour supplanter ces Français catholiques et repousser tous les Amérindiens et Edward Cornwallis, le gouverneur, établit une base militaire pour parer à la menace franco-amérindienne que cela allait déclencher. Immédiatement une nouvelle ville sera construite au nom de ce lord, ce sera Halifax, soigneusement entourée de fortifications.
Le 1er octobre 1749 Cornwallis lors du conseil qu’il réunit dans le port d’Halifax sur le navire le Beaufort, démontra sa parfaite cruauté en obtenant l’approbation de tous pour déclarer officiellement la guerre aux Mi’kmaq avec l’institution de la prime aux scalps ! « …Il ne faut pas les confirmer comme un peuple libre et indépendant, nous devons les traiter comme des bandits et des rebelles au gouvernement de sa majesté. Il faut donc les poursuivre jusque dans leurs repaires et leur montrer qu’ils ne sont nulle part en sécurité dans la province. » Aussitôt ils levèrent une compagnie de 50 personnes volontaires pour les pourchasser dans les bois dirigés par John Gorham, ils firent venir une autre compagnie de cent hommes pour les renforcer en prévision de l’hiver, sans oublier une récompense de dix guinées pour tout Mi’kmaq fait prisonnier…ou tué ! Une tentative d’éliminer les Mi’kmaq était donc bien commencée, au coût de dix guinées pour le Trésor du gouvernement fédéral anglophone. Ce n’était pas la première fois que Cornwallis démontrait autant d’inhumanité mais ses conseillers n’étaient certes pas à exempter !! Edward Cornwallis avait été le lieutenant-colonel stationné en Ecosse, il avait participé à la terrible bataille de Culloden, fin avril 1746, il avait encouragé et contribué avec ses troupes à la maltraitance barbare des Ecossais.
Le traité de 1749 renouvela celui de 1725 c’est-à-dire déposséder les Amérindiens Mi’kmaq et les autres petites nations, de leur liberté et de leurs terres. Les chefs Malécites ratifièrent ce traité de paix le 4 septembre 1749, les Mi’kmaq quant à eux ne l’acceptèrent pas, mais l’abandon d’une partie de leurs alliés Malécites, qui se mirent ainsi du côté de l’envahisseur anglais, leur démontra parfaitement qu’à présent leur situation allait se dégrader encore plus rapidement. Malgré cette perspective peu réjouissante, ils poursuivirent courageusement la résistance pour leur survie, avec l’aide des Acadiens aussi maltraités qu’eux, et de quelques petits groupes Malécites tenaces.
Dès septembre il est réaffirmé aux chefs Mi’kmaq ce qu’on leur demande depuis 1725 de se soumettre ni plus ni moins à la domination britannique confirmant leur crainte pour de nouveaux plans de la colonisation britannique. Très inquiets les Mi’kmaq non seulement renouvelèrent leur déclaration de guerre mais attaquèrent des cibles militaires et commerciales. Devant cette résistance, à l’expropriation de leurs terres à laquelle ils s’attendaient, les autorités par la voix du gouverneur affirma que cette guerre ne devrait pas se terminer par un accord de paix, mais « par l’éradication pure et simple de tous ces Mi’kmaq de la péninsule, une bonne fois pour toute » !
La vie d’un Amérindien semblait bien en effet n’avoir aucune valeur pour les Anglo-saxons ils ne lui accordaient aucun droit civil ou humain, cela avait été largement constaté depuis l’implantation même des colonies de Nouvelle Angleterre en 1620, depuis l’arrivée des premiers colons, les pères pèlerins ces fathers pilgrims, si un Anglais tuait un Indien cela n’était pas considéré comme un crime et restait totalement impuni.
Les Micmac/ Mi’kmaq ont lutté pour préserver leur liberté mais la proclamation barbare de 1749 a été dévastatrice pour eux, puisqu’en effet ont été massacrés autant les hommes que les femmes, les enfants, ou encore les vieillards et les infirmes, tous ceux que les chasseurs de prime ont pu attraper, ont été scalpés. Un groupe de rangers de Gorham ayant rapporté 25 scalps, a réclamé la prime de dix livres pour chacun. Mais tous ces scalps ne venaient pourtant pas uniquement d’Indiens certains venaient sans aucun doute possible de Blancs, c’est-à-dire des Français d’Acadie !
Cela ne les interpella pas un instant, sachant que parmi les Acadiens certains étaient métissés, ils les considéraient tout autant que les Sauvages ! Cette chasse aux scalps entraîna des réactions chez les Français de Louisbourg, écœurés de voir ce qui se passait dans leur ancienne Acadie, ils encouragèrent les Mi’kmaq à répliquer, en leur offrant à eux aussi une prime non pour des scalps anglais mais uniquement pour des soldats anglais faits prisonniers et vivants. A noter, cela ne visait pas les civils et encore moins les femmes et les enfants ! Cependant les soldats prisonniers amenés à la forteresse de Louisbourg étaient rapidement libérés sains et saufs par les Français, à la différence des prisonniers Mi’kmaq détenus par les Anglais, soit ils étaient détenus indéfiniment, soit envoyés à Boston pour y être pendus.
L’Abbé le Loutre, terriblement consterné de ce que les Anglais faisaient subir comme cruautés aux Acadiens et à « ses » Micmac/ Mi’kmaq dont il était le missionnaire attitré, n’a cessé de les défendre et certes s’il les a encouragés à ne pas se laisser faire, à résister, c’était parce que les Anglais eux-mêmes ne cessaient de brutaliser ces deux peuples et d’entreprendre des représailles envers eux, depuis des années. Cependant, en se mettant franchement avec eux, en travers des projets des Anglais, Le Loutre a, bien entendu, été détesté par ces derniers, qui ne cessaient d’être déterminés à chasser les Acadiens et à déposséder et assujettir totalement les Mi’kmaq. Excédés ils mirent la tête de l’abbé Le Loutre à prix !l C’est pourquoi les descriptions acerbes, et même davantage, que font les autorités anglaises et principalement le gouverneur Edward Cornwallis de ce prêtre, qui n’a jamais cessé de défendre les Mi’kmaq et les Acadiens et de les soutenir contre eux, ne sont donc pas étonnantes ! Un homme comme le Loutre s’il a considérablement aidé les tribus à faire face à leur situation, il a également proposé des arrangements de paix importants entre les Mi’kmaq et les Anglais, mais tous ont été repoussés avec mépris et… dérision ! Les Mi’kmaq s’étaient réunis en conseil le 23 août 1754, ils auraient été prêts à céder la plus grande partie de leur pays contre un plus petit territoire, où ils auraient pu rester et vivre tranquilles pour toujours, et même le partager avec des Malécites et d’autres petites nations. Leur lettre apportée par l’Abbé Le Loutre à Halifax pouvait amener une grande avancée pour les Britanniques, mais il fallait pour cela qu’ils désirent vraiment cette paix avec les Mi’kmaq. Bien au contraire le gouverneur Lawrence et tout le conseil rejetèrent les propositions, ils ne voulaient rien céder, et surtout pas un seul morceau de bonnes terres aux Indiens.
Après s’être lâchement et cruellement débarrassé des Acadiens en 1755 et 1758 il aurait été facile de penser néanmoins, puisque les Anglais avaient enfin réussi à s’emparer de l’Acadie puis à en chasser les Acadiens, comme les feuilles au vent sur le rivage, qu’ils allaient peut-être mener une politique coloniale moins épouvantable par rapport aux Mi’kmaq, ce premier peuple vivant sur ce sol, depuis des milliers d’années. Ils ont préféré accroître la pression sur ces tribus pour tenter de les assujettir, et si possible à long terme de s’en débarrasser comme ils s’étaient débarrassés des Acadiens en tentant de les exterminer, que ce soit par la force militaire ou les mauvais traitements, car ces tribus qu’ils décimaient jours après jours, représentaient encore pour eux une force à craindre.
Entre les Mi’kmaq et les Anglais tout ne se termina donc pas du tout tranquillement après la Déportation inhumaine des Acadiens, ni même après le traité de 1763 et le départ définitif de la France, de cette Amérique septentrionale, qu’ils revendiquaient pour leur seul bénéfice.
Après le précédent traité d’Utrecht, les Britanniques avaient enfin récupéré au traité de Paris de 1763, soit cinquante ans plus tard, la totalité de cette Nouvelle France qu’ils désiraient depuis plus d’un siècle. Une fois le traité signé, la guerre de conquête terminée les Mi’kmaq qui avaient déjà largement subi les gouvernements anglais depuis 1713 perdirent tout espoir. En effet ils avaient assisté mais partagé aussi durant toutes ces années, ce qu’ils avaient fait subir d’épouvantable aux Français d’Acadie, avec cette politique anglaise visant avec cruauté à soumettre ces « French Neutral » comme ils les appelaient, dans l’espoir d’en débarrasser toute la province, ce qu’ils arrivèrent à faire lors du monstrueux « Grand Dérangement » de 1755 suivi trois ans plus tard de celui de l’île Saint Jean en 1758.
Evidemment dans ces circonstances les tribus Mi’kmaq n’acceptèrent pas de faire la paix avec le conquérant anglais, une paix uniquement dictée par ces derniers pour leur seul bénéfice, les affrontements continuèrent… Ils s’amplifièrent encore davantage au moment où une grande révolte contre Londres se développa chez les colons anglais de Nouvelle Angleterre, ces colons révoltés furent désignés par Londres comme des « Insurgents ». Les Mi’kmaq prirent faits et causes pour eux espérant que s’ils gagnaient leur indépendance, cela aiderait les Français à revenir en Nouvelle France et à en chasser les Anglais ! Certains parmi eux se rendirent au Massachusetts et signèrent le traité de Watertown en juillet 1779, mais de leurs côté les Britanniques pour inciter les Mi’kmaq à rester neutres et à les empêcher de rejoindre les Insurgés leur fourniront aussitôt tout ce qui sera nécessaire à leur survie, ce qui perdura seulement jusqu’à la fin de la guerre d’indépendance des colonies britanniques avec le traité de 1783. En ces difficiles temps de rébellion dans leurs colonies de Nouvelle Angleterre ce n’était effectivement pas le moment pour eux d’avoir une autre guerre avec les Indiens.
Tout aussitôt les autres colons anglais restés loyaux à l’Angleterre arrivèrent alors très nombreux en Acadie et au Nouveau Brunswick, afin d’échapper aux représailles de ces nouveaux étasuniens, qu’ils n’avaient pas soutenus dans leur révolte. Ces Loyalistes comme ils ont été appelés, ont été au nombre de cinquante mille environ à se réfugier au Canada, récemment devenu anglais. Ils obtinrent immédiatement des terres du gouvernement britannique et dès 1783 presque quinze mille d’entre eux s’étaient déjà installés dans les provinces maritimes, repoussant toujours plus loin les Mi’kmaq sur leur sol.
Le gouvernement institua très officiellement pour ces tribus Mi’kmaq, des terrains qui seraient « réservés pour leur usage et leur bien ! » Les Réserves visaient à séparer les « Blancs » des « Peaux Rouges » méthode largement utilisée par les Anglo-saxons partout, que ce soit au Canada devenu anglais, en Nouvelle Ecosse mais aussi aux États-Unis d’Amérique…
En 1821 au total 20.765 acres au milieu de marécages, des tourbières ou des montagnes pierreuses, sans doute à grand-peine 10% de tous leurs immenses territoires. Hélas, repoussés sur ces terres incultes et arides, ils vont devenir des parias sur le sol de leur propre pays. A mesure que leurs territoires diminuaient, à mesure qu’ils furent installés dans ces terrains sordides, les Micmac commencèrent à devenir semi sédentaires, puis totalement sédentaires étant dans l’impossibilité de se nourrir sur leurs anciennes terres, dans leur propre pays !
Ainsi, ils subirent cette préemption de tous leurs territoires lors de l’arrivée de plus en plus nombreuse de colons anglais et écossais, qui empiétèrent même dans les « réserves » où ils avaient été assignés, ils assistèrent stupéfiés à l’abattage de leurs forêts restreignant l’habitat de l’Orignal et du Caribou, et par voie de conséquences, tous les autres animaux se sont également raréfiés. Mais les bouleversements ne s’arrêteront pas là, il se rajoutera également des barrages sur les rivières, noyant parfois des portions entières de leurs terres. Leur source alimentaire principale ainsi diminuée réduisit encore davantage ces tribus à des états de famine. Dépossédés de tout leur pays, de leurs moyens de subsistances, de leurs libertés et de leur dignité, les Mi’kmaq durant les années qui suivirent cessèrent, contraints et forcés, leurs hostilités se retrouvant seuls, les Français d’Acadie avaient été déportés et les Français étaient repartis en France ! De plus impossible de compter sur les insurgés anglo-saxons devenus grâce à la France les nouveaux étatsuniens, qui ne leur démontrèrent aucune reconnaissance pour leur précédent soutien, pas plus d’ailleurs qu’à la France !! Seule restait une petite population canadienne française le long du Saint Laurent elle aussi bien assujettie sous la main mise anglaise. Alors frappés par la pauvreté les Mi’kmaq furent contraints d’accepter une paix humiliante et injuste. Leur espoir du retour de la France s’amenuisa de plus en plus, seule une petite flamme s’alluma encore pour eux au moment de la Révolution française, qui espérèrent-ils alors, aurait pu permettre ce retour.
Ils durent vivre sous cette « English Liberty » qu’on leur imposait et sont devenus des proscrits dans leur propre pays, et pire en voie d’extinction. Malgré cela les Anglais les considéraient toujours comme une menace
La population Mi’kmaq avait continué à décliner jusqu’en 1847, elle était à un niveau si bas qu’elle faisait craindre la disparition totale de leur race, puis les observateurs ont vu leur nombre légèrement remonter en 1867, au moment de la Confédération où elle atteignit à grand peine 1600 personnes ce que confirmera le commissaire aux Affaires Indiennes Abraham Gesner. Mais cela non pas grâce à de meilleurs traitements, qui auraient favorisé de nouvelles naissances, mais dû au retour de Mi’kmaq d’autres régions, comme l’île saint Jean/ Prince Edouard, le Nouveau Brunswick, peut-être du Canada ou même des nouveaux états unis d’Amérique.
Un triste siècle passa ainsi pour les Mi’kmaq !
Ils virent le gouvernement de la Nouvelle Ecosse instaurer la loi sur les Indiens en 1842 A l’issue de cette loi Joseph Howe nommé commissaire des Affaires indiennes s’employa à soutenir la politique en faveur des Mi’kmaq avec le gouverneur Falkland. Sans ces deux personnages assez compatissants leur disparition, étant largement programmée, aurait été inévitable. Joseph Howe blâmait fortement le gouvernement pour avoir permis depuis tant d’années une telle pauvreté et une telle mortalité chez ce peuple. Il faisait le constat que les Amérindiens pouvaient parfaitement continuer à avoir eux aussi leur langue et leur culture. Il citait l’exemple des Acadiens, certains d’entre eux ayant survécu à la déportation honteuse et à leur terrible exil étaient revenus, depuis maintenant 80 ans, démontrant que les descendants Français vivant au milieu d’une population britannique étaient toujours Français ! Les Mi’kmaq ont accepté de vivre dans les réserves pensant que c’était leur seul moyen de survivre en tant que peuple distinct.
Après s’être emparés de leur pays, après plus de 119 ans les premières mesures d’éducation de la Loi sur les Indiens de 1876 se mirent en place, même si c’était principalement dans le but de les assimiler et de détruire leur langue amérindienne tout autant que leur culture Mi’kmaq ! « Cette loi n’a pas été élaborée pour voir prospérer les Indiens mais pour leur porter un coup fatal en les assimilant » Cf. Dany Paul un Micmac.
Les Indiens qui acceptaient de vivre dans les Réserves avaient été divisés en bandes ou groupes, permettant de les transformer en unités distinctes et de les diviser. Effectivement cela a élevé des frontières entre chaque communauté puisqu’il leur a été interdit de circuler librement sans avoir auparavant demandé l’accord des autres groupes y compris même par quel chemin passer. Impensable pour eux qui avaient toujours vécu libres sur tous ces immenses territoires se déplaçant au gré des saisons, de la pêche et de la chasse… Cette loi énonçait certes la souveraineté des Premières Nations, mais le gouvernement et les fonctionnaires ne cessaient ensuite de la nier, tout comme était reconnue l’indépendance des « bandes et de leurs conseils », mais par la suite ils s’efforçaient de les rendre complètement dépendants ! Pourtant, pire que tout, par cette loi le gouvernement anglais se permettait de décider qui avait le droit de se considérer Indien ou non. Ainsi une personne ayant réussi des études et obtenu un diplôme universitaire, perdait de fait, son statut d’Indien. Les études n’étaient pas interdites mais cette finalité a empêché bien des Indiens d’obtenir un diplôme. Le racisme était tel, qu’il était difficile à un Micmac d’aller en classe avec des anglophones, une jeune institutrice Micmac était parvenue à terminer ses études et enseignait dès lors dans les écoles. Félicitée pour son courage d’avoir résisté pendant ses années d’études au racisme anglais ambiant, elle expliqua qu’elle n’avait aucun mérite car elle avait toujours eu l’habitude, depuis toute petite, d’aller à l’école avec des Acadiens, ces Français ne connaissaient aucun racisme envers eux, cela l’avait confortée sur ce qu’elle était et sur l’égalité réelle de tous les êtres humains. Elle détailla alors que leurs liens d’amitié et d’estime avec les Français remontaient depuis Membertou et Samuel de Champlain, Pierre Dugua des Monts, Jean de Poutrincourt et tous les autres Français par la suite, ces liens n’avaient jamais faibli depuis.
Dans la loi sur les Indiens, une indienne qui épousait un non Indien perdait son statut d’indienne, mais une blanche qui épousait un Indien devenait indienne. C’était pourtant fondamental d’être inscrit sur le registre des Indiens pour affirmer ses droits ancestraux.
Cette discrimination par le sexe a été finalement abrogée … le 17 avril 1985.
Joseph Howe a poussé le gouvernement à faire davantage. Il est difficile de retrouver précisément tout ce qu’il a fait comme Surintendant aux affaires indiennes dans les archives. Est-ce que cela a été mis de côté parce qu’il dévoilait trop le racisme qui avait cours en Nouvelle Ecosse, causant tant de souffrances et de morts aux Indiens ? De même cela est des plus compliqué de trouver des rapports sur la politique des scalps induisant la conduite barbare des fonctionnaires anglais.
Les Mi’kmaq subirent les sanctions du gouvernement et des fonctionnaires gouvernementaux mais ils discernèrent en George Monk Surintendant aux affaires indiennes tout comme par la suite en Joseph Howe et Abraham Gesner des personnes qui ont eu de la compassion pour eux et ont tenté dans la mesure de leurs moyens de les soutenir.
Individuellement de nombreux colons anglais ont été également compatissants et ont cherché à les aider et à soutenir ceux mourant de faim, certains ont même établi des pétitions pour peser sur le gouvernement mais sans résultat, le gouvernement a toujours fermé les yeux sur leurs détresses, même si parfois il consentait à allouer une petite somme pour des vivres et des couvertures, cela était insuffisant et les Indiens ont continué à souffrir sans vêtements et sans soins médicaux.
De date en date leur existence est devenue de plus en plus épouvantable :
*Vers 1800 en plus de leurs ennuis sans fin de nombreuses maladies sont arrivées en Nouvelle Ecosse avec les nouveaux colons anglais et les migrants écossais, ainsi des épidémies de variole eurent lieu en 1826, de même un vaisseau porteur lui aussi de cette grave maladie infectieuse avait accosté au cap Breton puis suivirent le typhus et la fièvre thyroïde, tout cela terrassa facilement les Mi’kmaq, trop affaiblis physiquement.
*En 1831 leur situation, décrite par une nouvelle pétition, est désespérée.
*En 1838 un rapport sur la vie des Mi’kmaq indiquai qu’ils s’élevaient alors le 22 aout 1838 à 1425 individus, seuls restant alors sur les 200.000, recensés au moment de l’arrivée anglaise sur leur sol. Cela ne fit changer aucune politique à leur égard, avaient-ils alors l’intention d’attendre encore quelques années pour que le problème indien de la fin des Mi’kmaq se règle tout seul ?
*En 1834, Rien ne change là encore, que ce soit pour ceux de Windsor ou du Cap breton
*En 1840 la Nouvelle Ecosse était un pays florissant et abondant où tout poussait sur les bonnes terres des Acadiens, maintenant aux mains des Anglais. Peu de colons anglophones se trouvaient démunis, hormis les Mi’kmaq et les Acadiens dont certains avaient essayé de revenir vivre sur leur terre d’Acadie après le traité de 1763.
*En 1841 le grand chef Louis Benjamin Paul ou Passauhmigh de Shubenacadie désespéré pour son peuple ne recevant aucune réponse du gouvernement provincial écrivit à la reine Victoria, il lui exposa comment l’homme blanc d’Angleterre avait pris tout ce qui leur appartenait et lui demandant d’intervenir pour arrêter cette politique honteuse contre eux.
*En 1843 Joseph Howe envoya « des versements de charité » mais son inquiétude était grandissante, si on ne changeait pas davantage de politique envers eux, la race des Mi’kmaq risquait de s’éteindre dans les décennies suivantes.
*En 1846 malgré ces appels rien de plus n’étant entrepris, cela continua à s’aggraver et ceux de Digby continuèrent à mourir faute de nourriture
*En 1851 au Cap Breton la famine était là aussi, affreuse !
*En 1855 Ceux de New Glasgow étant presque tous morts de faim et la même chose pour ceux de Pictou en 1856 en 1861 le Surintendant des affaires indiennes les décrivit en 1861 « comme indigents et misérables »
Il a fallu attendre 1867 et la Confédération pour que le gouvernement fédéral reprenne à son compte leur terrible condition, mais il le fit du bout des lèvres, si bien que les années passèrent encore, sans que cela n’améliore vraiment leur triste existence.
Dans des années plus récentes encore, en 1982 un médecin, Virginia Miller, écrivit un rapport décrivant la totale misère des Mi’kmaq.
Les Premières Nations ont enduré toutes ces souffrances afin de conserver leur identité, si elles avaient accepté de s’assimiler elles n’existeraient plus ! Elles ont été ignorées et le gouvernement a conçu le Livre Blanc cependant « préserver la culture des Premières Nations n’était pas le but du gouvernement, les dirigeants voulaient qu’ils se fondent et disparaissent dans le grand creuset commun anglais » Pour établir ce Livre Blanc de nombreuses consultations ont été certes tenues avec les Premières Nations, mais subtilement avec ceux, parmi les Indiens, qui correspondaient aux idées proposées par le gouvernement anglais, alors « les consultations furent de pures … Plaisanteries. »
Le Livre Blanc explique parfaitement que les Premières Nations ont bien été victimes de discriminations ! Pourtant, le racisme, qui a été primordial pour entraîner ces ségrégations tant financières, économiques, ou éducatives, loin d’être retracé a été dissimulé voire occulté ! A cause de ce refus de la société de les faire participer à la vie économique du pays, les Amérindiens ont été dépendants des gouvernements, qui agissant avec un paternalisme humiliant, les ont empêchés d’améliorer les conditions consternantes de leur vie, dans laquelle on les a plongés.
Les Premières Nations de l’Amérique septentrionale vivaient sur ce sol depuis des milliers d’années avec leur civilisation et leurs cultures propres. Les Amérindiens ont été marginalisés sous tous les gouvernements canadiens anglophones successifs, privant ces peuples de leurs terres, de leurs ressources naturelles et les ont sans cesse contrôlés et assujettis. Joseph Howe lors de son discours anti-fédéraliste en 1867 avait exprimé sa tristesse, mais aussi son admiration pour les Mi’kmaq :
« … Leur race est en perdition mais même dans les jours de décadence et d’humiliation elle a toujours relevé le défi de conserver le respect. Quand le dernier des Micmac inclinera la tête dans son campement solitaire et qu’il confiera son âme à son créateur, il pourra repenser avec fierté à son passé et remercier le Grand Esprit que son peuple ne compte aucun Tupper ni Henry, ni Archibald ou Mc Cully… »
Sources
Archives de la Nouvelle Ecosse, le Canada français documents sur l’Acadie
Archives de la Confidency of Mainland Micmac
Documents publics
Modification Loi sur les Indiens 1876 à 1996
Loi du Canada « les Indiens inscrits deviennent citoyens canadiens » du 7 juin 1956
Registre général des Réserves
Daniel N. Paul responsable des affaires indiennes « Ce n’était pas nous les Sauvages » Editions le bouton d’or d’Acadie juin 2020
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