L'Union européenne est en crise

Les Irlandais disent clairement «non» au traité de Lisbonne

Le NON irlandais


Loïc VENNIN - Dublin - Les Irlandais ont dit «non» à une large majorité au traité européen de Lisbonne, plongeant hier l'Europe dans une nouvelle crise, trois ans après le rejet de la Constitution par les Français et les Néerlandais en 2005.
Le «non» l'a emporté avec 53,4 % des voix, contre 46,6 % de «oui», a annoncé à Dublin le président de la commission électorale, sous les cris de joie et les hourras d'altermondialistes.
Les pays membres de l'Union européenne se sont cependant pour la plupart dits décidés à aller de l'avant. Le traité de Lisbonne «n'est pas mort» et «les dirigeants européens devront décider lors du sommet européen des 19 et 20 juin comment continuer», ont affirmé le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, et le premier ministre slovène, Janez Jansa, dont le pays préside l'UE.
Mais «il est clair que le traité n'entrera pas en vigueur au 1er janvier 2009», a toutefois souligné le premier ministre luxembourgeois, Jean-Claude Juncker.
«Nous espérons que les autres États membres poursuivront le processus de ratification», ont ajouté le président français, Nicolas Sarkozy, et la chancelière allemande, Angela Merkel, dans une déclaration commune, au diapason des réactions de la plupart des dirigeants européens.
Le ministre britannique des Affaires étrangères, David Miliband, a ainsi indiqué que Londres allait poursuivre son processus de ratification.
Mais le président tchèque, Vaclav Klaus, a estimé que le traité de Lisbonne était «fini», qu'il n'était «plus possible de poursuivre sa ratification».
À Dublin, le premier ministre irlandais, Brian Cowen, a reconnu une «immense déception» et un «revers potentiel» pour l'UE. Le dirigeant centriste, qui n'est au pouvoir que depuis un mois, a toutefois prévenu qu'il n'y avait pas de «solution miracle» à la crise provoquée par le «non» irlandais.
«Nous ne devons pas en tirer des conclusions hâtives... L'Union [européenne] s'est déjà retrouvée dans cette situation auparavant et à chaque fois elle a trouvé par la concertation un moyen d'avancer. J'espère que nous pourrons encore le faire cette fois», a-t-il déclaré.
«Nous partageons toujours l'objectif [du traité] d'une union adaptée à ce siècle», a ajouté M. Cowen. «Nous prendrons le temps d'expliquer cela à nos partenaires européens et au reste de la communauté internationale.»
Dans le camp du «non», le président du parti nationaliste Sinn Fein, Gerry Adams, a déclaré: «C'est la fin du traité de Lisbonne.» Il a ajouté que la victoire du «non» était «une base pour une renégociation» du traité, appelant le premier ministre irlandais à se rendre à Bruxelles pour «obtenir un meilleur accord».
L'homme d'affaires Declan Ganley, figure de proue des partisans du «non», s'est félicité de ce «grand jour pour la démocratie». «C'est la troisième fois que le même message est envoyé par plusieurs millions de citoyens européens à une élite à Bruxelles non élue et qui n'a pas de comptes à rendre», a-t-il poursuivi.
Un peu plus de trois millions d'électeurs étaient appelés jeudi à voter lors du seul référendum organisé sur le traité de Lisbonne en Europe. Les 26 autres États membres de l'UE ont opté pour une ratification par la voie parlementaire.
Souvenirs de 2001 et 2005
Le rejet du traité par une île comptant 4,2 millions d'habitants, soit moins de 1 % des 495 millions d'Européens, n'est pas sans rappeler le «non» opposé à la Constitution européenne en 2005 par la France et les Pays-Bas, ainsi que par les Irlandais en 2001 au traité de Nice.
Il avait alors fallu organiser un deuxième vote en Irlande pour faire adopter le texte. Interrogé à la télévision publique RTE sur la possibilité d'un second référendum après le «non» de jeudi, le premier ministre irlandais a refusé «d'exclure quoi que ce soit».
Dublin avait justifié en 2001 un deuxième vote par la faible participation connue alors (moins de
35 %). Cette fois-ci en revanche, plus de 53 % des électeurs irlandais se sont rendus jeudi aux urnes.
Le traité doit être ratifié dans l'ensemble des 27 pays de l'UE pour entrer en vigueur.


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