Les infirmières inquiètes

Et le premier ministre dans tout ça? Comme toujours, il dit que c'est la faute du Parti Québécois.

Chronique d'André Savard

Pour libérer les couloirs des hôpitaux, on a tendance à favoriser les soins à domicile. Cette pratique a été nommée le virage ambulatoire. Elle a permis en un premier temps de consacrer les équipements des hôpitaux aux cas qui avaient vraiment besoin d'un suivi médical constant.
On a dit du virage ambulatoire mené avec grand courage par le docteur Rochon qu'il avait sauvé notre système de santé. Il reste à voir si ce sauvetage n'est pas en réalité qu'un sursis.
Dans le périodique Perspective Infirmière, on fait état de l'inconfort grandissant des infirmières. Dans un dossier qui réunit deux articles, on relate le cas suivant: "En décembre 2006, une dame de 87 ans est transportée à l'hôpital dans un état de dégradation physique grave. Elle meurt quelques jours plus tard. Elle recevait des visites à domicile quotidiennes d'intervenants du CLSC. Dans son rapport, le coroner remet en question les limites des soins à domicile et du consentement."
Le premier article est signée par Andrée Duplantie, infirmière et détentrice d'une maîtrise en bioéthique. On est porté à croire que ceux qui reçoivent des soins à domicile sont des cas légers. Ce n'est plus vrai. Des gens qui nécessitent l'aide de plusieurs spécialistes se voient dispenser de l'aide selon les horaires de visite de chacun. Chacun fait son travail du mieux qu'il peut en général mais il arrive que la personne responsable dans l'équipe ne soit pas bien identifiée.
À mesure que les soins à domicile se sont complexifiés, les intervenants se sont multipliés sans que des mécanismes d'encadrement suffisants soient mis en place. Dans un autre article signé par une infirmière, Rachel Javier Lafrenière et Marie Beaulieu, doctoresse, on lit: "... les infirmières regrettent que l'organisation de leur journée de travail, moitié à domicile, moitié au bureau, ne leur laisse pas toujours suffisamment de temps à consacrer aux interventions cliniques et thérapeutiques."
Si les impacts positifs du virage ambulatoire sont nombreux auprès de la plupart des personnes soignées à domicile, l'article souligne des impacts négatifs notables: manque de temps, absence de certains soins spécialisés, communication déficiente entre les établissements ayant trait au patient. Les infirmières se demandent souvent, surtout devant les personnes très âgées si le contexte du domicile respecte vraiment la sécurité des personnes qui y sont soignées.
L'article note: "... le fait de discuter du retour à domicile d'une personne âgée ou de son relogement sans vérifier son avis sur la question démontre que la reconnaissance de cette autonomie a des limites, principalement dans les cas où la santé de la personne est fragilisée. Par ailleurs, la tentation de prendre en charge totalement une personne âgée en perte d'autonomie, tentation à laquelle succombent plusieurs intervenants par souci de bienfaisance, est aussi un exemple de non-respect de l'autonomie."
Il serait temps que le docteur Yves Bolduc prête l'oreille aux doléances des infirmières. Espérons surtout qu'il saura le faire dans la bonne entente. Il se chamaille avec le président de l'ordre des médecins spécialistes, un représentant légitime de son milieu, engueule l'un, décrie l'autre.
Et le premier ministre dans tout ça? Comme toujours, il dit que c'est la faute du Parti Québécois.
André Savard


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1 commentaire

  • Archives de Vigile Répondre

    5 septembre 2009

    « La maladie la plus répandue chez les hommes politiques est l'amnésie. »
    André Frossard (1915-1995)
    Journaliste et philosophe français