Le Fonds monétaire international multiplie la publication de sombres rapports économiques depuis près de deux semaines maintenant. L’enseignement y est riche en leçons à tirer sur ces vieux réflexes de stimulation économique qui ne fonctionnent plus. La non-croissance est venue alimenter une dialectique opposant désormais création de la richesse et réduction de la pauvreté.
Un mot prend le dessus sur l’autre. L’hystérésis remplace la stagnation séculaire dans le discours économique. Ainsi, l’économie mondiale renoue avec les conséquences de la crise, ou les répercussions des réponses à la crise, mais en l’absence de la cause. Le FMI prévient. L’endettement public est remonté à un sommet jamais vu depuis la Dépression dans les pays industrialisés, et les menaces à la stabilité économique n’ont jamais été aussi nombreuses. L’institution aurait pu ressortir ses rapports sur le creusement des inégalités pour rappeler, comme l’a déjà fait l’OCDE, que le fossé entre les riches et les pauvres ne va qu’en grandissant. Le portrait aurait alors été plus représentatif des ratés des modèles néolibéraux dont l’application était prônée par ces mêmes institutions il y a peu de temps.
Un texte du quotidien Le Monde publié lundi braquait les projecteurs sur l’économiste en chef de la Banque mondiale, Kaushik Basu, qualifié d’éclectique et de décalé. Il s’est longtemps moqué du mantra du FMI multipliant les appels trop longtemps vides de sens aux réformes structurelles. L’économiste de la « banque des pays pauvres » partage la croyance voulant que la croissance économique ne soit pas un remède suffisant contre la pauvreté, voire qu’elle peut masquer un accroissement des inégalités et de l’extrême pauvreté, peut-on lire. Il est aussi rappelé son souhait de voir chaque programme de son institution être soumis au test du changement qu’il a eu sur les 40 % les plus pauvres d’un pays, et non sur le PIB.
Richesse plus concentrée
Cette approche visant à mesurer l’impact sur la réduction de la pauvreté plutôt que sur la création d’une richesse toujours plus concentrée a également été mise en lumière dans un rapport de l’OCDE publié en décembre 2013. On pouvait y lire que la redistribution est le moyen le plus direct de corriger les inégalités. Que les bienfaits de la croissance ne se propagent pas d’eux-mêmes aux couches les plus modestes et que cette redistribution n’est pas un frein à la croissance. En fait, toute amplification de ces inégalités fait chuter la croissance. À l’inverse, ajoute l’OCDE, « les politiques qui contribuent à en enrayer le développement (des inégalités) ou à inverser la tendance feront les sociétés les plus riches, en plus de les rendre moins injustes ».
Et l’OCDE exhortait les pouvoirs publics à ne pas se concentrer que sur les 10 % les plus pauvres, pour élargir l’intervention aux 40 % les plus défavorisés. Elle constatait du même souffle que « jamais en 30 ans le fossé entre riches et pauvres n’a été aussi prononcé dans la plupart des pays » membres.
Le FMI a précisé sa pensée la semaine dernière, et adapte également son discours en ce sens. L’institution incite désormais les pays industrialisés à prioriser la mise en place de réformes structurelles en matière de main-d’oeuvre et d’accès au marché du travail dans un souci de synchronisme et d’adaptabilité aux différentes étapes du cycle économique.
Laissez un commentaire Votre adresse courriel ne sera pas publiée.
Veuillez vous connecter afin de laisser un commentaire.
Aucun commentaire trouvé