Réplique à Michel Seymour

Le vent a tourné, monsieur Seymour

Ce qui serait moralement condamnable, ça ne serait pas de faire la souveraineté du Québec sans offrir au préalable encore une dernière chance au Canada anglais; ça serait d’empêcher que le Québec sorte de cette ronde absurde de négociations constitutionnelles ratées d’avance (...)

Vigile


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[Monsieur Seymour,->37765]
Réformer le fédéralisme, êtes-vous sérieux? Va-t-on vraiment, encore une fois, voir le débat public se faire noyer de l’idée qui a le plus contribué à l’immobilisme, au cynisme et au désengagement de la nation québécoise? Les bras m’en tombent autant que lorsque mon chum recommence à fumer après des semaines d’efforts héroïques pour se débarrasser de la cigarette. Encore! Va-t-on vraiment reprendre cette sempiternelle ritournelle sous prétexte qu’il ne serait pas moralement gentil de faire la souveraineté, comme si nous n’avions pas déjà assez accumulé de bonnes raisons de la faire au fil de notre histoire conflictuelle avec le ?
Vraiment? Retourner pour la millième fois dans notre histoire récente pleine de murs, ce beau risque de René Lévesque qui crut, lui aussi, que le fédéralisme était réformable, et qui l’eut dans la gueule lorsqu’il se réveilla le lendemain de la Nuit des longs couteaux avec une Constitution qui avait été signée sans lui et qui ne prévoyait plus, comme il l’avait négocié, ce fameux droit de retrait des programmes fédéraux avec compensation financière? Ce René Lévesque qui l’eut dans la gueule lorsqu’il se rendit compte qu’en plus d’avoir été littéralement tassé parce qu’on ne voulait pas des chichis du Québec dans le ROC, on lui imposait sans son consentement une nouvelle Charte des droits qui allait petit à petit vider la loi 101 de son essence?
Allons-nous retourner nager une millième fois dans l’histoire de cet humiliant soufflet du Lac Meech, cette entente qui promettait au Québec une reconnaissance comme société distincte en plus de ce fameux droit de retrait des programmes fédéraux, et qui fut cavalièrement rejetée par le Canada anglais? Faut-il, en plus, mentionner que Brian Mulroney, l’homme à l’origine de cette tentative de réconciliation, avait été élu principalement sur une promesse claire de ramener le Québec dans la famille canadienne et de lui faire signer la Constitution dans l’honneur et l’enthousiasme – une promesse un million de fois plus claire, plus compromettante et plus sincère que celle, toute molle et relativement opportuniste, de Jack Layton à la fin de la dernière campagne…?
Et vous osez mentionner le rapport Allaire et la loi 150 de Bourassa, qui proposaient que le Canada fasse une offre satisfaisante au Québec, sans quoi le Parti Libéral du Québec (oui, oui, lui) ferait un référendum sur la souveraineté – une espèce de police d’assurance… Vous osez soutenir que tel devrait être, aujourd’hui, le point consensuel de la classe politique québécoise! Comme si cette idée de « souverainisme de conclusion », de « donnez-nous ça ou bedon on s’en va », n’avait pas été bafouée à grandes claques lorsque ce même rapport Allaire et cette même loi 150 ont été littéralement tassés et vidés de leur substance, causant à l’intérieur du Parti lui-même et dans toute la société québécoise un véritable sentiment d’abandon par le PLQ qui s’était fait le porte-étendard de ce souverainisme de conclusion et qui avait ensuite noyé le poisson! Vos exemples sont bien mal choisis, monsieur Seymour, et il est beaucoup trop facile de les citer sans mentionner la triste fin qu’ils ont connue.
Mais vous persistez. « En appuyant le NPD, dites-vous, les Québécois disent qu’ils veulent à nouveau chercher un arrangement à l’intérieur du Canada ». Supposons que cela fût vrai pour une partie d’entre eux. Pourquoi, maintenant que les jeux sont faits, faites-vous mine de ne pas voir l’éléphant au milieu de la pièce? Pourquoi faites-vous comme si les Québécois, qui ont voté NPD en bloc contre les Conservateurs et qui se retrouvent avec un gouvernement conservateur majoritaire, n’étaient pas en train d’en venir à cette trop évidente conclusion qu’ils avaient été encore une fois un peu fous de croire qu’il était possible de faire quelque chose de cool avec le Canada? Pourquoi faites-vous comme si les Québécois n’étaient pas en train de se dire, sur tous les réseaux sociaux et à travers une foule de médias, que la solution évidente, sensée, toute indiquée, celle qui revient à l’esprit au galop, c’est la souveraineté?
Les Québécois ne veulent pas poser un geste « moralement condamnable », dites-vous? Ce qui serait moralement condamnable, ça ne serait pas de faire la souveraineté du Québec sans offrir au préalable encore une dernière chance au Canada anglais; ça serait d’empêcher que le Québec sorte de cette ronde absurde de négociations constitutionnelles ratées d’avance, ça serait d’empêcher qu’il naisse enfin au monde comme viennent de le faire les quelque quarante nouveaux États qui ont obtenu leur siège à l’ONU depuis le référendum de 1980.
Vous dites que le Québec a rejeté le Bloc parce qu’il n’avait pas envie d’être replongé dans un débat sur la question nationale. Je doute de la véracité de cette affirmation mais imaginons tout de même que cela soit vrai – avant le 2 mai. Les résultats de l’élection ne peuvent que donner au Québec l’envie de faire resurgir ce débat avec force, et la teneur même de votre article en est un indice. On a tellement répété aux souverainistes qu’il fallait passer à autre chose. Mais on se rend compte aujourd’hui qu’il n’y a pas mille façons de passer à autre chose. Il faut sortir de cette espèce de supplice de Sisyphe collectif dans lequel des arguments comme le vôtre nous gardent. L’État du Québec, plus populeux que 120 des pays qui siègent aujourd’hui à l’ONU, d’une étendue territoriale et d’une économie qui surpassent ceux d’environ 90% des États dans le monde, doté d’une des populations les plus scolarisées de la planète, possédant des ressources naturelles qui en font, du point de vue de l’eau douce (de plus en plus rare) et de l’énergie propre, l’Arabie Saoudite de demain, est clairement à la hauteur de ses velléités d’indépendance politique. Il pourrait, au lieu d’être pogné dans un rapport de force inutile avec un gouvernement qui ne le représente pas, se gouverner lui-même selon ses propres valeurs, sa propre culture, ses propres lois et surtout selon ses propres intérêts. Mais l’économie! L’économie!, direz-vous. N’ayez plus peur : l’économie n’appartient plus au Canada; elle appartient au monde entier. Elle ne dépend plus d’une vieille union fédérale faite pour un autre siècle, elle dépend d’une mondialisation économique à laquelle notre bien commun québécois commande aujourd’hui que nous participions.
Le 2 mai, le vent a tourné, monsieur Seymour. Ce sont les souverainistes qui ont, à partir d’aujourd’hui, en plus du rêve, la force du pragmatisme et du réalisme. Il est dans notre plus pur intérêt d’accéder à l’état de pays, et il me semble étrangement déraisonné, presque passionnel, de vouloir demeurer, comme par un attachement atavique, bizarre et nostalgique, à cet autre pays, le Canada, qui ne nous a donné par le passé (ni ne nous donne dans le présent) aucune bonne raison de ne pas faire notre chemin sans lui.
Je termine avec une pensée particulière pour tous ces Canadiens du ROC qui ont voté contre Harper et qui doivent très mal dormir ces jours-ci. Ce sera bien sûr une très maigre consolation pour eux, mais je tiens tout de même à les rassurer : il risque d’y avoir bientôt à leurs portes un nouvel État accueillant, aux antipodes de ce que le Canada est en train de fabriquer et de devenir, et dans lequel ils seront plus que bienvenus.
Catherine Dorion, auteure, slammeuse et militante souverainiste, diplômée d’une maîtrise en Conflict, Security & Development à King’s College London, d’un baccalauréat en Relations internationales et Droit international à l’UQÀM et du Conservatoire d’art dramatique de Québec.
Le 4 mai 2011


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16 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    10 mai 2011

    Une photo qui en dit long: venons-nous de découvrir notre Marseillaise à nous?
    May West

  • Archives de Vigile Répondre

    10 mai 2011

    cet article publié sur la Tribune libre de Vigile: la date à corriger: 20 août 2010 (pas 2011, évidemment);
    on a accès à cet article en passant par la section : auteurs.
    Dans les Essais de Montaigne:
    "où se parjurer n'est pas un vice mais façon de parler" se trouve dans le livre 2 au chapitre XVIII;
    "le masque de la fonction", c'est du Montaigne.

    Je crois que la citation telle quelle a été fabriquée selon l'esprit de Montaigne.
    A Catherine, une citation de Montaigne:
    "Plus le singe monte haut dans l'arbre, plus il montre son cul."
    rbg
    A l'engagé, salut et je me mets à la lecture de votre commentaire.

  • L'engagé Répondre

    9 mai 2011

    Rectificatif :
    J'ai écrit : « Qui dit annexion qui remplacement. Remplacement de quoi me demanderez-vous? Remplacement de "l'agir par soi-même" (le pléonasme est de Séguin lui-même). »
    Je voulais écrire « Qui dit annexion dit remplacement »...
    Pardon

  • L'engagé Répondre

    9 mai 2011

    J'aimerais faire une nuance en me servant du commentaire de Monsieur Barberis-Gervais (que je salue au passage), il est vrai que nous devons tenir compte des réalités suivantes :
    « 3- le point de départ de Seymour est un sondage Drouilly-Cotnoir selon lequel les 2/3 des Québécois croient qu’on peut réformer le fédéralisme de manière à répondre à certaines demandes légitimes du Québec (Seymour les énumère) ; mais tient-il compte (comme vous le faites) que, selon ce même sondage, au moins 80% des Canadians ne veulent rien savoir de ces demandes du Québec.
    4- toute stratégie d’accession à l’indépendance doit tenir compte du fait que les 2/3 des Québécois croient que le fédéralisme est réformable ; évidemment, l’élection récente des députés NPD amène de l’eau à leur moulin»
    Toutefois, l'indépendance doit être perçue, enseignée, diffusée, communiquée, débattue à partir du postulat suivant : Vivre c'est agir.
    Même un système fédéral très très très décentralisé demeurerait une forme d'oppression, une forme d'annexion.
    Qui dit annexion qui remplacement. Remplacement de quoi me demanderez-vous? Remplacement de «l'agir par soi-même» (le pléonasme est de Séguin lui-même).
    Séguin voit trois degrés aux luttes nationales, ces niveaux permettent d'entrevoir cette question primordiale de l'agir d'une nation (je vais citer ici Deshaies et Séguin en amalgamant leurs propos à des exemples contemporains)
    « Le premier est au niveau du sentiment, du rejet de l'autre, «frog» , «speak white» sont des exemples que vous pourrez immédiatement saisir. C'est la merde que nous pouvons lire sur nous dans les journaux du ROC.
    Le deuxième niveau oppose des idées des politiques et des stratégies. Les luttes se déplacent du sentiment aux rapports sociaux, ce sont les luttes à l'intérieur du régime sur la manière de se gouverner. Un bon exemple serait par exemple les récriminations du Bloc ou des autres sur le financement par le fédéral d'un projet hydroélectrique ou d'un changement dans la péréquation.
    Le troisième niveau porte sur le contrôle de son propre agir et pose directement la question de l'annexion d'une nation face à une autre, ce niveau porte sur les impacts du remplacement, sur le fait de démontrer qu'être administré par un autre c'est un mal en soi.
    Ainsi, dans la question de l'élection de députés NPD et de la quasi- disparition du Bloc, on demeure au deuxième niveau. Si les préoccupations du Bloc sont du troisième niveau, son combat, sa pertinence et ses stratégies furent de l'ordre du deuxième.
    De la même façon, faire l'indépendance , parce que le fédéralisme ne marche pas, c'est ramener le débat au deuxième niveau, car le non-fonctionnement du Canada est une interprétation que tirent certains acteurs dans le cadre d'une joute politique à l'intérieur du système et non d'acteurs qui agissent de l'extérieur. Justifier, comme l'a souvent fait Duceppe, que le Canada n'a plus rien à offrir, c'est se cantonner à des divergences de politiques, d'institutions ou de mentalité, mais ce n'est pas se servir d'une manière lucide des avantages pour une nation que d'agir par soi. En somme deux nationalités se querellent sur un grand nombre de points secondaires et ce sont les divergences entre ces dernières qui accaparent les esprits (ex. financer 65 avions plutôt que la culture).
    La lutte nationale au troisième degré est de loin la plus abstraite, mais elle est infiniment plus importante : agir par soi apporte un enrichissement en soi : des expériences, des habitudes de penser et d'agir, cela met la nation en contact avec les autres (nations) et permet au peuple qui agit ainsi de se frotter directement à la réalité, sans intermédiaire.
    Le discours indépendantiste des dernières années reste malheureusement cantonné dans l'analyse du deuxième degré de lutte. C'est ce qui explique en partie qu'il vieillisse. Il est plus difficile de faire voir le troisième niveau de lutte, mais une fois que c'est fait, aucun contre-argument ne peut briser la conviction inébranlable qu'aura acquise celui qui sait que vivre c'est agir et que le Québec, quelque soit le régime fédéral, est annexé, donc perpétuellement diminué dans son agir.
    Le second aspect de Séguin, c'est l'impact pour les nations de l'interaction des facteurs politiques, économiques et culturels.
    Séguin explique qu'il s'agit d'un système dynamique et que ces facteurs se renforcent les uns les autres.
    Plus une nation agit ou est libre d'agir sur l'un des facteurs, plus cela est susceptible d'influencer positivement les autres facteurs. Ainsi, une nation qui agit positivement sur le plan culturel, par exemple en éducation, peut voir des effets de cette action et un enrichissement sur le plan économique.
    Comme le Québec est bloqué au plan politique. L'enrichissement est également bloqué et c'est constamment une perte d'initiative et d'expérience qui mine ainsi les efforts de la nation québécoise, d'où cette grande fatigue culturelle (Aquin).
    Ainsi, que le Canada soit réformable ou non, que les Québécois le croient réformable ou non, doit peut-être être pris en compte dans la stratégie, mais la pédagogie de l'indépendance doit être indépendante (ce jeu de mots est fortuit) de la conjoncture et c'est par la formation de militants et par la diffusion des idées fondées sur une lutte du troisième niveau que pourront naitre une énergie et une foi inébranlable en notre projet.

  • Archives de Vigile Répondre

    8 mai 2011

    Bonjour Catherine,
    1- oui tu devrais continuer à lire Maurice Séguin
    2- une demande: le premier vidéo sur ton blogue; tu cites Montaigne:
    "Dans un monde plombé où les seules valeurs sont le profit et l'ambition, où le visage des hommes se cache derrière le masque de leur fonction, où se parjurer n'est plus un vice mais façon de parler, je ne veux pas répondre par le mensonge à cette époque de mensonge."
    Pourrais-tu m'indiquer la référence exacte dans les Essais.
    3- le point de départ de Seymour est un sondage Drouilly-Cotnoir selon lequel les 2/3 des Québécois croient qu'on peut réformer le fédéralisme de manière à répondre à certaines demandes légitimes du Québec (Seymour les énumère); mais tient-il compte (comme vous le faites) que, selon ce même sondage, au moins 80% des Canadians ne veulent rien savoir de ces demandes du Québec.
    4- toute stratégie d'accession à l'indépendance doit tenir compte du fait que les 2/3 des Québécois croient que le fédéralisme est réformable; évidemment, l'élection récente des députés NPD amène de l'eau à leur moulin;
    5- Je vous suggère de lire mon article: Le cadre stratégique de Robert Laplante
    Le plan Marois est-il compatible avec l’élection décisionnelle ? Robert Barberis-Gervais, Vendredi, 20 août 2011. (voir section auteurs) Il faut aussi s'intéresser aux idées de Me André. Binette et à celles de René-Marcel Sauvé. Tous ça est dans l'article que je vous conseille de lire.
    6- J'aime beaucoup votre style, votre élan, la précision de vos arguments, votre connaissance de l'histoire, votre culot, votre saine virulence (votre usage du mot "marketing" pour parler de l'être et du paraître de Martin Buber me réjouit), en somme l'ensemble de votre personnalité. Quelle créativité!
    Recevez mes salutations les plus amicales. Après la dure défaite que nous venons de subir, vous nous redonnez le goût de nous battre, à nous les marathoniens de l'indépendance (depuis 1965...)
    Robert Barberis-Gervais, Vieux-Longueuil, 8 mai 2011

  • Laurent Desbois Répondre

    8 mai 2011


    À lire les journaux canadians…. un point positif : il n'y aura pas de «love in» la prochaine fois !!!!!
    http://www.cyberpresse.ca/le-soleil/actualites/politique/201105/07/01-4397287-des-editorialistes-du-roc-reclament-labolition-du-financement-public-des-partis-politiques.php?utm_categorieinterne=trafficdrivers&utm_contenuinterne=cyberpresse_les-plus-populaires-le-soleil_article_ECRAN1POS2
    Le Winnipeg Free Press ne cache pas son bonheur de voir l'effondrement du Bloc québécois., écrit le quotidien du Manitoba.
    « Il est temps de marginaliser les demandes des politiciens québécois. » Y-inclus les nouveaux NDP et John-James??? Rien de neuf!!!!
    Bravo! Finalement, un beau parlement canadian!!! Le beau rêve à Trudeau est fini dans le Canada anglais aussi !

  • Archives de Vigile Répondre

    7 mai 2011

    Monsieur benoit t dit : « Est-ce que les souverainistes sont à ce point craintifs de la conséquence d’un Québec heureux au sein d’un Canada uni ? »
    Heureux, peut-être. Anglophone, inévitablement !
    Guy Le Sieur
    Vive la République de l'Amérique Française

  • Archives de Vigile Répondre

    6 mai 2011

    Merci Mme Dorion de votre réponse étoffée à mon commentaire, j'apprécie votre pensée et je vous suis entièrement. Vous avez raison, le bon diagnostic n'est pas très utile s'il n'est pas suivi par l'action. Une des choses qui m'horripile chez nos élites est cet argument qu'on ne peut pas faire ceci ou cela parce que les sondages ne sont pas favorables. Quel raisonnement tordu. Ces gens ne sont pas là pour diriger, juste pour gérer les affaires, pour faire durer l'État, pas pour le transformer. On veut faire la révolution sans bousculer personne.
    Souvent les gens mélangent le fait qu'en démocratie, les décisions prises représentent le voeu de la majorité, et le fait que cela ne signifie pas que la majorité a toujours raison. La majorité peut avoir tort même si nous sommes obligés de se plier à sa volonté. Cette majorité peut très bien entrainer tout le peuple à la mort sans s'en rendre compte. Il y a urgence, urgence de conscientiser les gens, urgence d'éveiller leur sens critique, mais le PQ ne le voit pas, il ne pense encore et toujours qu'au pouvoir pour le pouvoir.
    Mes salutations

  • Archives de Vigile Répondre

    6 mai 2011

    Cher engagé,
    j'ai essayé de lire Maurice Séguin, mais n'ai pas persévéré. Le devrais-je?

  • Archives de Vigile Répondre

    6 mai 2011

    Je suis d'accord avec vous, qu'on ne peut pas seulement faire comme si 2/3 des Québécois ne croyaient pas que le fédéralisme soit réformable.
    Il y avait dans mon texte un paragraphe que j'ai coupé où je demandais à Monsieur Seymour pourquoi il s'en remettait aux sondages d'opinion comme à une vérité divine, inaliénable. Les mouvements militants indépendantistes des années 60 militaient dans un Québec qui était à 5, 10% indépendantiste, et ils ont fait du chemin, beaucoup de chemin.
    Se sont-ils assis pour dire : "Bon, on a un problème. Il faut essayer de trouver un stratagène qui, par frustration, à la longue, fera rendre compte aux gens que nous avons raison". Non. Ils se sont assis pour dire : "Il faut parler, écrire, convaincre, faire grimper ce chiffre".
    Si les Québécois avaient à se rendre compte, à la longue, par frustration, que l'État était à faire, ils l'auraient fait. Mais nous oublions, comme dans la vie chaque individu fait longtemps la même erreur avant de se dire : "bon, là, j'ai un noyau, là".
    Les Québécois ne seraient pas avec moi? Je ne nie pas la réalité. Mais je ne dis pas que, parce qu'ils sont majoritaires à croire quelque chose, cette chose-là est bonne et vraie. Si j'ai foi en quelque chose à laquelle ils n'adhèrent que partiellement, je peux essayer de les convaincre. C'est ce que je veux faire avec cet article, qui sera publié demain dans le Devoir.
    Je ne veux pas occulter la réalité des penchants de l'opinion publique, je veux travailler sur elle, je veux travailler à convaincre plutôt qu'à la prendre comme une barrière de béton inbougeable.
    Mon article va dans ce sens : il rappelle des éléments des écueils passés et tente de convaincre que nous n'en sommes plus là.
    Vous dites : "Les Québécois sont encore là, à peu près", et moi j'avance que, depuis le 2 mai, peut-être que non, ils ne sont plus là. Je prétends qu'ils ne sont plus là et que quelque chose est en train de se passer. Je pourrais avoir tort, mais pour l'instant c'est ce que je crois.
    Ne vous inquiétez pas : je suis la première à détester prêcher aux convertis, et quand je prêche aux convertis c'est souvent pour dire : "Allons prêcher dehors, pis vite, et avec douceur, avec compréhension, avec persévérance!!"
    Je fais partie de ceux qui veulent voir la réalité en face et travailler avec, mais qui le font avec un optimisme chronique. Je crois aussi que de faire ça comme ça, c'est ma seule chance de convaincre qui que ce soit.
    Merci beaucoup de votre commentaire.
    Très cordialement,
    Catherine Dorion

  • L'engagé Répondre

    5 mai 2011

    Catherine Dorion,
    L'engagé vous admire. Je vous ai entendu à une manif il y a un an et j'avais été soufflé par la différence entre « votre discours et les autres »
    « Il faut sortir de cette espèce de supplice de Sisyphe collectif dans lequel des arguments comme le vôtre nous gardent.»
    Puis-je vous poser une question? Avez-vous lu Maurice Séguin? Le connaissez-vous?

  • Archives de Vigile Répondre

    5 mai 2011

    Ça me désole Mme Dorion de savoir que le seul argument qu'il vous reste est celui de la fatigue. Cette fatigue que vous avez si bien décrite de voir ces tentatives des fédéralistes d'améliorer le sort des Québecois. Eh bien moi, je leur dis : chapeau! Au moins ils ont fait l'effort, eux.
    Pourquoi blâmer le peuple Québecois qui a massivement voté pour ce renouveau. Je ne comprend pas ce déchirement des souverainistes qui veulent à tout prix empêcher la majorité Québecoise de tenter d'améliorer son sort à l'intérieur du Canada...
    Est-ce que les souverainistes sont à ce point craintifs de la conséquence d'un Québec heureux au sein d'un Canada uni?
    Comme dirait l'autre... quand on se compare à ces fameux 120 pays moins populeux que nous... qu'est-ce qu'on a à leur envier? SVP me dire ce qu'ils ont à nous offrir de plus?

  • Archives de Vigile Répondre

    5 mai 2011

    Bonjour Mme Dorion,
    Pour moi, quand M. Seymour parle de la moralité des actes ou du consensus politique, je n’entends pas que c’est ce qu’il pense lui-même, il dit simplement que c’est ainsi que pensent encore les gens en majorité.
    Vous êtes choquée de qu’il propose (moi-aussi je suis contre) et vous semblez rejeter aussi sa lecture des événements. Visiblement vous ne croyez pas que la population se balance complètement des considérations stratégiques, vous semblez croire plutôt qu’elle pense à peu près comme nous, les militants souverainistes. Est-ce une transposition ? Pourquoi tant et tant de militants souverainistes peinent-ils à observer froidement et objectivement le comportement des québécois en général ? Pourquoi est-il si difficile d’admettre que pour eux la souveraineté c’est une idée comme une autre, même si ça n’a pas de bon sens? Notre ère hypermédiatisée a achevé d’annihiler l’esprit critique des gens, qui ne sont plus que des producteurs, des consommateurs et des bénéficiaires. On est loin des assemblées politiques populaires des années 40 et 50.
    Ecoutez, je suis d’accord avec ce que vous dites, et si une majorité de québécois comprenaient cela il n’y aurait pas de problème, la voie serait claire et limpide. Si Pauline Marois parlait comme vous le faites, si le PQ avait parlé ainsi pendant la dernière décennie… Tout le problème est ici, cette mauvaise compréhension (par nous les militants souverainistes) de l’état d’esprit des gens (qui ne réalisent pas ce qui leur arrive en tant que peuple). On saute une étape, on part mal le chantier. Tout un pan de ce travail essentiel de conscientisation a été abandonné en cours de route par les élites souverainistes, bien qu’ils n’aient jamais eu les moyens de se battre contre les forces ennemies (les médias, les financiers, etc.). Même si tout ça semble insurmontable on ne peut pas sérieusement travailler à la naissance du pays en occultant cette réalité.
    Même si je partage le constat que fait M. Seymour, je ne partage pas sa vision d’une « reconnaissance de la province de Québec par le Canada », je ne veux pas revivre l’humiliation des années 90, vous avez raison, mais il faut admettre que c’est à cette époque que le taux de soutien à l’indépendance fut le plus haut (65% à 70%). C’est vrai que le PLQ a déçu tout le monde mais qu’est-ce que ça change, M . Seymour a raison, les Québécois en sont encore là, à peu près. C’est terrible, c’est comme si toutes ces années depuis avec le PQ au gouvernement n’avaient rien donné … C’est bien ça.
    Je suis aussi contre la proposition de M. Seymour « d’un ensemble de principes de fonctionnement qui nous inciteraient à mettre de côté la souveraineté ». Les gens voient probablement les choses ainsi (je crois cela) mais il est impossible d’y arriver sans d’abord devenir indépendant, alors c’est à cela qu’il faut travailler, nous sommes d’accords. Mais il faut écouter les gens ordinaires et leur parler à eux, et cesser de se prêcher l’indépendance entre nous.
    Même si j’ai proposé de prendre acte de cet état d’esprit des québécois dans mon dernier texte, ce n’est pas pour réintégrer le Canada, au contraire, c’est surtout pour éveiller les gens à la nécessité de se prendre en main, les obliger à suivre ce qui se passe, à se positionner pour en venir à comprendre par eux-mêmes la nécessité de l’indépendance. Je propose de construire concrètement le rapport de force dont parle M. Pomerleau. Il y a bien d’autres moyens d’arriver un jour à notre émancipation mais on ne peut pas faire semblant que les gens pensent comme nous, ce n’est pas le cas et occulter cela, c’est partir sur de fausses prémisses. Et depuis des années je vous le dis, les militants et les élites indépendantistes ne veulent pas voir la réalité en face, se font des accroires et se surprennent des résultats.
    Mes salutations

  • Archives de Vigile Répondre

    5 mai 2011


    Je viens de visionner quelques uns de vos vidéos, je suis toujours sur le derrière mais en pire : c'est comme si un ange avait pissé dans mes cheveux !
    André Vincent

  • Archives de Vigile Répondre

    5 mai 2011


    Catherine Dorion, vous venez tout juste de me faire tomber sur mon derrière.
    Merci d'avoir pris la peine de le faire. Ce texte est un bijou.
    André Vincent

  • Jean-Claude Pomerleau Répondre

    5 mai 2011

    Michel Seymour reprend l'argumentaire de M. Éric Schwimmer dans son livre (*):
    (...)
    Ce n'est pas tant la crainte de devenir une entité en soi qui nous fait hésiter que l'horreur de la colère et de la rupture des liens entre notre terre locale et le Monde...
    ''Si le Québec proposait, dans une démarche légitime , de modifier plutôt que de rompre avec le Canada et si celui-ci refusait, le Canada deviendrait le responsable du refus, et le Québec n'aurait pas violé de règle morale. Nombre de Québécois préféreraient une telle démarche, même si elle aboutissait à un refus. On pourrait dire alors que le Canada nous a mis dehors. Ce serait plus supportable.'' (page 155-156)
    (*) Éric SCHWIMMER (avec la collaboration de Michel Chartier), Le Syndrome des Plaines d'Abraham, Montréal, Boréal, 1995, 205 p.,
    ....
    En fait, cette lecture sociologique de la situation, démontre tout simplement que le rapport de force entre l'État du Québec avec l'État canadien n'est pas favorable à un changement de statut. Et peu importe la game que l'on joue et les simagrées et postures que le Québec peut prendre, tout cela ne donnera rien, si on a pas compris une évidence géopolitique: Seul un rapport de force favorable mène à un changement de statut (de province à souveraineté).
    Trève d’intellectualité. Nous avons deux choses à comprendre de toute urgence: 1) Québec doit bâtir ce rapport de force favorable; 2) Et comprendre que cela urge car ce défi est vital à notre existence même, si non c'est la louisinaisation qui commence.
    JCPOmerleau