[->2568] Quelques jours avant la mise en étalages des Beaujolais nouveaux, nous avons pu assister à l'arrivée à l'avant-scène du Trudeau nouveau. Drapée d'une robe rouge toujours aussi immaculée, la nouvelle cuvée, [du nom de Justin, s'est permis une incursion dans la course au leadership du Parti libéral du Canada->2568]. Se portant à la défense de l'héritage de son pepa, il a qualifié Michael Ignatieff, que plusieurs analystes comparent à Pierre-Elliott, d'être indigne de la succession politique et intellectuelle de son père. Selon Justin Trudeau, dans une syntaxe impeccable, Ignatieff «c'est pas quelqu'un qui a la sagesse nécessaire» (sic). «Avec Ignatieff, il est un peu partout des fois (sic). Il dit ceci, il dit cela, il se contredit parfois. Il n'a pas la clarté que mon père a pu avoir.» Sick d'écrire sic!
Au cours des dernières années, plusieurs ont parlé d'un possible saut en politique du fils Trudeau. Défendant l'œuvre de son père corps et âme depuis que ce dernier lui a fait rencontrer le Père Noël, le vrai Père Noël en personne, au Pôle Nord, le vrai Pôle Nord (voir l'éloge funèbre prononcée par Justin aux funérailles de PET), Justin est en droite ligne avec l'héritage de Pierre-Elliott. Lorsque confronté à la question d'un avenir politique, le principal intéressé répond humblement : «Pour l'instant, je fais tout ce que je peux pour essayer de sauver le monde. Et j'espère qu'un jour je pourrai faire encore plus. Peut-être que ça sera en politique [...].»
Pour nous parer à toute éventualité, je crois sain de faire l'exercice consistant à imaginer le Canada de Justin Trudeau. Avec un héritage paternel fort et en tant «qu'homme du Monde», il est certain que Justin saurait modeler le Canada à son image et en faire un havre de paix «d'un océan à l'autre à l'autre» (sic) où tous sauraient mettre leurs différences de côté afin de réaliser des voyages «packsac» d'Iqaluit à Victoria dans la plus pure volupté canadienne.
Après la Trudeaumanie, voici le Trudeau-mini:
1- Abolition du ministère des Affaires étrangères.
Exécrant les frontières étatiques, barrières de la fraternité humaine, Justin aura tôt fait de mettre la hache dans le ministère des Affaires étrangères, «l'étrange» vivant dans un autre pays n'étant en fait qu'un Canadien errant parti à la découverte du monde et jubilant à l'idée de son retour au pays.
En lieu et place de nos diplomates et hauts fonctionnaires répartis à travers le monde, nous enverront les jeunes de Katimavik, écusson canadien cousu au sac à dos, négocier nos ententes internationales. Ils agiront bien sûr à titre de bénévoles et devront prendre leur retraite à 21 ans pour laisser place à la relève.
2- Politique culturelle
a) La nation
«Malheureusement, il y a des gens ces jours-ci qui se drapent de cette idée de reconnaître le Québec comme une nation, ce qui va à l'encontre de tout ce que mon père a toujours cru» - Justin Trudeau
La nation canadienne étant la seule réalité nationale valable à l'échelle planétaire, tous les humains de la Terre pourront en faire partie. Il suffira pour eux d'en faire la demande via la poste, un formulaire Internet ou simplement en le souhaitant très très fort en se couchant le soir, les petits poings fermés et les paupières plissées, pour qu'ils soient reconnus citoyens canadiens.
Comme son papa a dit non, la reconnaissance nationale du Québec sera un geste banni de toute discussion publique. Les protagonistes surpris en flagrant délit d'opinion seront amenés de force à la tombe de son père et devront s'excuser par 10 fois. Toute récidive leur vaudra le tatouage d'un unifolié sur la poitrine.
b) Multiculturalisme
Pour pousser davantage l'héritage de PET, Justin revisitera la politique du bilinguisme et du multiculturalisme. Elle se traduira dans les termes suivants:
- Au Québec, chaque habitant devra parler anglais, espagnol et arménien. Le français sera également toléré. Tout signe distinctif dénotant un héritage canadien-français catholique devra être caché de la vue du public. La croix du Mont-Royal sera démontée, transportée à Laval et servira de nouveau viaduc pour l'autoroute 19. Le défilé de la Saint-Jean-Baptiste, afin de ne blesser personne dans leur différence uniforme, se déroulera désormais à l'abri des regards indiscrets, à l'intérieur du Tunnel Louis-H Lafontaine. Chaque communauté culturelle présente sur le territoire du Québec devra recevoir le même montant d'argent que celui que reçoit la Société nationale des Québécois afin d'organiser leur fête nationale.
- In the ROC, nothing changes, it's business as usual. Every person demanding a special cultural right is strongly suggested to move to Quebec and to refer to the precedent paragraph. Reluctant citizens will be prosecuted.
c) Ouverture sur le monde
Pour s'adapter à cette réalité multiculturelle-planétaire du nouveau Canada, si le Québec souhaite garder le privilège d'un système d'écoles francophones, il lui faudra aussi mettre à la disposition des parents un système en langue ouzbèke, lituanienne, inuktitut et respecter une politique d'accommodement raisonnable envers les élèves talibans désirant apporter un AK-47 en classe. Ce dernier devra se porter en bandoulière en tout temps et pas plus d'une recharge de munitions ne pourra être mise à la ceinture à l'école primaire. Les explosifs devront rester dans le sac d'école même lors des récréations. Les policières intervenant auprès de juifs hassidims devront, avant toute chose, faire une révérence et leur demander pardon pour avoir accédé à la fonction policière malgré leur statut inférieur.
3- Mets national
Le mets national canadien sera dorénavant la macédoine. Mélange de légumes dont toute substance, subtilité, différence aura été soigneusement aplanie par un savant tour de cocotte-minute canadienne, elle sera servie lors de chaque rencontre officielle de chefs d'États. Le Ô Canada devra être entonné avant l'ingestion de toute plottée de macédoine.
Seule exception, le Québec restera, en honneur aux réflexions profondes de son paternel sur notre identité culturelle, un peuple de mangeux de hot-dogs.
4- Sécurité nationale
C'est quelque chose que c'est sûr que si tu parles aux gens y disent «Ah non, des tanks dans les rues pis 400 gens arrêtés ça leur a vraiment heurté. Depuis ce moment-là, on en a pas eu de terrorisme au Canada. [...] Ça a peut-être valu la peine. [...] Moi je trouve qu'il (PET) a bien agi. - Justin Trudeau
Bien qu'il semble évident que j'aie trafiqué cette citation pour me moquer de l'accent ontarien de Justin Trudeau, il n'en est rien. Il s'agit du rapport fidèle de ses propos tenus sur les ondes de Radio-Canada.
Les partisans des Canadiens de Montréal semblant être épris d'une nouvelle fougue depuis quelques années, il est du devoir du gouvernement canadien de voir à la sécurité du reste de nos multiconcitoyens. Les partisans étant principalement formés de Québécois francophones blancs, une dérive vers un courant souverainiste extrémiste est facile à prévoir. Dans cette optique, les Forces armées canadiennes seront déployées dans les rues de Montréal après chaque victoire des Canadiens. Les tanks entoureront le Centre Bell, les libertés civiles seront suspendues jusqu'à la prochaine partie et un quota minimal de 400 supporteurs devront être emprisonnés. De plus, la GRC aura le mandat d'analyser toute conversation téléphonique comportant le vocable «Go Habs Go». La liste des membres du fan club des Canadiens sera ajoutée à celle des contrôles frontaliers systématiques.
5- Royauté
Pierre-Elliott ayant été le plus grand citoyen de l'histoire du Canada, Justin marchant dans ses pas, Michel Trudeau, autre fils de PET, étant décédé dans les montagnes Rocheuses et Sacha étant au «tu» et au «toi» avec Fidel Castro, il semble bien évident que la transcendance canadienne suinte des Trudeau. Pour reconnaître ce fait, la famille est dorénavant qualifiée de quasi-royale. La gouverneure générale Michaël Jean pourra conserver son titre de bouffonne du roi.
Voilà l'essentiel du programme politique de Justin Trudeau. Pour tous les pans de sa pensée qu'il n'a pas encore développés, et Dieu nous garde qu'il relève le défi de la compléter, il nous prie de bien vouloir se référer à ce que son papa pensait. Il semble donc que le Trudeau nouveau, outre une étiquette renouvelée, n'a qu'un bien faible potentiel à nous offrir. Le millésime 1971 du cep Trudeau a définitivement un accent de vinaigre en bouche et laisse un arrière-goût fort désagréable. C'est à se demander pour quelle raison nous lui donnons tant de place sur nos étalages. À défaut d'être un bon vin, le Trudeau nouveau accompagne à merveille un hot-dog lors d'une partie de hockey.
Renaud Plante
Propédeutique
Sciences juridiques
UQAM
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