Le statut bilingue d'Ottawa s'invite dans la partielle

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Ottawa, un embarras pour le fédéralisme canadien

Pendant sa carrière, le défunt député libéral Mauril Bélanger a longtemps défendu l'idée de faire d'Ottawa une ville bilingue. La candidate libérale qui pourrait lui succéder lundi dans le château fort libéral d'Ottawa-Vanier s'engage à reprendre le flambeau si elle est élue. Mais réussira-t-elle à mettre fin à une impasse qui dure depuis plus d'une quinzaine d'années dans la capitale nationale du Canada ?
Le statut bilingue d'Ottawa a été un enjeu important de la campagne pour l'élection dans Ottawa-Vanier, mais aussi lors de la campagne à l'investiture du Parti libéral du Canada, a souligné la politologue Linda Cardinal, qui est titulaire de la Chaire de recherche sur la francophonie et les politiques publiques de l'Université d'Ottawa.
Elle note que ce débat revient continuellement depuis quelques années à Ottawa parce que plusieurs événements ont ramené le sujet dans l'actualité et que la cause a rallié plusieurs partisans, dont l'ex-commissaire aux langues officielles du Canada, Graham Fraser, et l'écrivain John Ralston Saul.
La Ville d'Ottawa a une politique de bilinguisme, mais elle n'est pas contraignante, donc n'importe quelle administration municipale peut s'y soustraire. Mme Cardinal cite en exemple le maire, Jim Watson, qui viole sa propre politique en nommant des directeurs de services qui sont unilingues anglais.
En entrevue téléphonique, Mona Fortier, la candidate libérale dans Ottawa-Vanier, a rappelé qu'elle a été impliquée plus de 25 ans dans cette cause et elle s'engage à poursuivre sur cette lancée si elle gagne un siège à la Chambre des communes.
Elle promet de « sensibiliser » le caucus et le premier ministre Justin Trudeau sur l'importance d'appuyer le projet pour qu'Ottawa devienne officiellement bilingue.
De son côté, Emilie Taman, candidate néo-démocrate dans la circonscription, doute que le premier ministre soit réceptif à la cause, rappelant la singulière déclaration de M. Trudeau lors d'une entrevue de fin d'année à Radio-Canada.
Le premier ministre s'était fait interroger sur le sujet par l'animateur Patrice Roy, et il avait répondu du tac au tac : « Est-ce que la Ville de Gatineau serait ouverte à devenir une ville bilingue, elle ? »
Lors d'un entretien subséquent avec La Presse canadienne, il avait avoué avoir été « baveux », mais il avait fait remarquer que la décision appartenait aux élus municipaux.
Le fédéral a un rôle aussi

Mais ce n'est pas tout à fait vrai, estime la politologue Linda Cardinal. Pour que la capitale devienne bilingue, le conseil municipal devrait voter pour demander au gouvernement provincial de changer la loi fondatrice de la ville.
Et le gouvernement fédéral a aussi un rôle à jouer, selon la spécialiste. Il pourrait notamment s'engager à payer l'ensemble ou une partie des coûts liés au statut bilingue de la ville.
« Ottawa pourrait intervenir financièrement, mais il pourrait intervenir aussi publiquement en disant : ''Nous, comme gouvernement fédéral, on voudrait que la ville soit officiellement bilingue'' », a-t-elle indiqué.
« Je pense les gens qui sont dans le mouvement Ottawa ville bilingue auraient aimé que le gouvernement fédéral et le premier ministre interviennent clairement, haut et fort, pour dire que c'est une valeur importante, les langues officielles », a-t-elle ajouté.
Les politiciens qui disent qu'ils ne veulent pas intervenir dans le champ de compétences des autres ne se gênent pas pour le faire lorsqu'ils le jugent nécessaire, a souligné Mme Cardinal.
« Les gouvernements peuvent passer outre assez facilement aux champs de juridiction des uns et des autres quand ils jugent que c'est important », a-t-elle conclu.
Un débat de longue date

Pour faire l'historique de ce débat, il faut remonter aux années 70. La Commission royale d'enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme avait fait cette recommandation dans l'un de ses rapports.
« La capitale symbolise l'ensemble du pays. Elle devrait exprimer le plus exactement possible les valeurs du pays tout entier, son mode de vie, sa richesse et sa diversité culturelle, ses conceptions sociales et ses aspirations. [...] Il faudrait que les citoyens, de quelque région qu'ils viennent, trouvent dans leur capitale un reflet plus fidèle des traditions du pays et éprouvent de la fierté à s'identifier à elle », est-il écrit dans le rapport.


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