Le refus global de Stephen Harper

Dérives démocratiques - la société confrontée à sa propre impuissance

Ce week-end, Hélène Buzetti du Devoir nous a appris qu'après avoir menacé de retirer toute subvention aux films qui vont à l'encontre de la morale publique, Stephen Harper a aboli un programme de 4,7 millions de dollars destiné à aider les artistes et les intellectuels canadiens à se produire à l'étranger.
La raison ? Le premier ministre ne veut pas que des radicaux et des marginaux ternissent l'image du pays.
HEE HAW !
La première fois que j'ai vu Stephen Harper à la télé, je me suis dit : «Oh boy, voilà un gros cow-boy de l'Ouest qui se fout de la culture comme de sa première côte de boeuf...»
Mais je me suis tout de suite ravisé en me disant qu'il ne faut jamais juger les hommes à leur apparence et qu'il faut toujours donner la chance au coureur.
Or, vous savez quoi ? Ma première impression était la bonne. Stephen Harper est un gros cow-boy de l'Ouest qui se fout de la culture comme de sa première côte de boeuf. Cet homme ne comprend strictement rien aux arts.
Pour lui, les seules oeuvres d'art qui méritent d'être financées par l'État sont celles qui font du bien, qui prônent de bonnes valeurs et qui montrent à quel point le Canada est le plusse beau pays du monde.
Des sculptures inuites. Des courtepointes montrant des fermiers en train de travailler la terre. Des rigodons d'Aspen Cove et de Harbour Breton.
Le gars est tellement straight et tellement plate qu'il ferait passer l'ancien pavillon du Canada de l'Expo 67 pour le quartier général de Hustler.
UN CONTREPOINT IRONIQUE
Une source conservatrice très bien placée a expliqué au Devoir que le programme était aboli parce qu'il avait déjà servi à financer les voyages de personnes ou de groupes qui «ne faisaient pas consensus».
Or, l'art intéressant ne fait jamais consensus ! Le rôle d'un artiste n'est pas de plaire à tout le monde, mais d'explorer des sujets délicats, controversés.
Quoiqu'en pense sa Bedonnesse, il y a de la vie après le Groupe des Sept ! C'est bien beau, le parc Algonquin et les grands paysages canadiens, mais l'art ne sert pas qu'à peindre des épinettes et des orignaux.
Le plus ironique dans toute cette histoire est que cette nouvelle est sortie le même week-end où l'on célébrait le soixantième anniversaire du Refus Global.
On n'aurait pas pu trouver un contrepoint plus savoureux.
À BAS LE RISQUE
Voici comment Borduas décrivait le Québec des années 40-50 :
«Un petit peuple serré de près aux soutanes restées les seules dépositaires de la foi, du savoir, de la vérité et de la richesse nationale. Tenu à l'écart de l'évolution universelle de la pensée pleine de risques et de dangers... Les oeuvres révolutionnaires, quand par hasard elles tombent sous la main, paraissent les fruits amers d'un groupe d'excentriques...» On dirait le Canada selon Stephen Harper.
Un pays gnan-gnan qui ne fait pas de vague et qui refuse de donner 10 000 $ à une troupe de danseurs sous prétexte qu'ils montrent parfois leurs tétons, mais qui n'hésite pas deux secondes à dépenser 292 millions de dollars pour l'achat de six hélicoptères militaires. Comme quoi la notion d'obscénité est toute relative.


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