ÉTATS-UNIS

Le président de la Chambre des représentants démissionne

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Développement majeur sur la scène politique américaine

Les divisions déchirant le parti républicain aux États-Unis ont éclaté au grand jour vendredi avec la démission du président de la Chambre des représentants, contesté par l’aile conservatrice qui lui reprochait un manque d’agressivité face à Barack Obama et aux démocrates.

À la surprise générale, John Boehner, 65 ans, a annoncé vendredi à ses troupes qu’il quitterait le Congrès à la fin du mois d’octobre, constatant son impuissance à unifier le parti. Il occupait le poste, deuxième dans l’ordre de succession présidentielle après le vice-président, depuis janvier 2011.

La gorge serrée mais l’air jovial, John Boehner a expliqué aux journalistes qu’il avait prévu de démissionner à la fin de l’année, mais qu’en se réveillant vendredi matin, il avait décidé d’avancer son annonce. En aucun cas il n’a été limogé, a-t-il dit, sûr de remporter le vote de défiance que des rebelles préparaient.

« Ma première responsabilité est envers l’institution », a-t-il dit. « Cette tourmente prolongée sur la direction de la Chambre causerait des dégâts irréparables à l’institution. »

Dissensions de fond

Mais pas sûr que son départ résolve les dissensions entre les deux branches qui cohabitent au sein du parti républicain depuis 2010. D’un côté, les républicains dits traditionnels, conservateurs sur le fond mais réalistes sur les responsabilités du pouvoir, depuis qu’ils ont les clés du Congrès.

De l’autre, plusieurs dizaines de frondeurs pour la plupart élus lors de la vague anti-Obama du Tea Party de 2010, et partisans de l’intransigeance sur la réduction des dépenses publiques ou l’avortement, des têtes brûlées que John Boehner méprisait en privé mais dont il ne pouvait pas se passer.

Le « Speaker » était ainsi forcé de négocier avec sa propre majorité, un affrontement permanent qui a provoqué une série de crises depuis 2011. Les États-Unis avaient frôlé le défaut de paiement à l’été 2011 et en octobre 2013, quand la faction du Tea Party avait cherché à empêcher le relèvement de la limite de la dette américaine.

Décidés à abroger la réforme du système de santé de Barack Obama, les élus avaient, par leur chantage, provoqué une fermeture partielle de l’État fédéral pendant deux semaines en 2013, du jamais vu depuis 1996.

Les Américains avaient jugé le parti républicain irresponsable, mais le Tea Party promettait que ce ne serait qu’un premier round. Le sénateur texan Ted Cruz, meneur des rebelles, s’était félicité d’« une victoire remarquable ».

Le « Tea Party » n’est plus un terme très revendiqué, mais ses élus sont toujours là. Ils s’enorgueillissent d’avoir contribué à la grande victoire républicaine aux législatives de novembre 2014, conquérant la majorité du Sénat.

Aujourd’hui, leur pouvoir est tel qu’ils menaçaient de paralyser à nouveau l’État fédéral, en raison d’une controverse sur les avortements opérés dans une grande organisation de planning familial, Planned Parenthood, qui reçoit des fonds publics. Ils conditionnaient le vote d’une loi de finances générale à la suppression des crédits pour Planned Parenthood, ce que Barack Obama refuse. Or la loi de finances doit être adoptée avant le début de la nouvelle année budgétaire, jeudi prochain.

Mais John Boehner, libéré des contraintes politiques internes, a les mains libres pour chercher l’appui des démocrates et surmonter la rébellion de son camp, et éviter un nouveau « shutdown ».

Signe de l’impopularité de John Boehner chez les plus conservateurs, la nouvelle de sa démission a déclenché une ovation lors d’une conférence conservatrice vendredi à Washington, le Values Voter Summit, où défilaient des candidats aux primaires présidentielles.

« Vous savez à quel point vous terrifiez Washington ? Hier encore, John Boehner était président de la Chambre », a lancé un Ted Cruz radieux et acclamé, que le hasard du calendrier avait programmé au même moment.

Les démocrates ont vu dans sa démission la main d’une faction « extrémiste ».

John Boehner « est quelqu’un qui comprend que pour gouverner, on ne peut avoir 100 % de ce qu’on veut, il faut travailler avec les gens avec qui on n’est pas d’accord, parfois fortement », a déclaré Barack Obama, avec qui les relations ont pourtant été tumultueuses.

Le groupe républicain doit désormais se choisir un nouveau chef. Le numéro deux, Kevin McCarthy, est favori, mais il lui faudra composer avec les 40 ou 50 « ultras » qui ont eu raison de John Boehner. Un choix qui donnera le « la » du parti pour la prochaine année, en pleine campagne présidentielle.


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