Le peuple québécois est-il de trop chez lui?

L'éradication tranquille






L’agence Presse canadienne nous apprenait que des figures importantes des universités McGill et Concordia trouvent trop encombrantes les exigences liées au français dans l’embauche des professeurs.




Cela les empêche de recruter des sommités. Ils ont demandé au gouvernement de les ramener à la baisse et il s’est discrètement plié à leur demande en décembre. Mais ce n’est pas assez. Il faudrait aller encore plus loin. Ou encore plus bas.




Le message implicite est compris: une fois passé l’obstacle administratif du français, ces professeurs pourront vivre à Montréal sans en parler un traître mot et n’en subiront aucun préjudice. Autrement dit, il est possible de vivre à Montréal en se contrefoutant de la langue et de la culture de la société d’accueil. Le français au Québec serait une contrain­te administrative et non pas une nécessité vitale. Confessons toutefois que c’est rigoureusement vrai.




Mondialisation




D’ailleurs, on nous répondra que la société d’accueil n’est pas le Québec, mais Montréal, et que dans la métropole, le français n’est qu’un choix sur deux. Aujourd’hui, les grandes villes déclasseraient les pays et les nations. Elles chercheraient à jouer leur carte dans la mondialisation anglophone, où circulent des citoyens du monde cosmopolite. Et l’identité montréalaise aurait de moins en moins de points communs avec l’identité québécoise.




Mais revenons sur Terre un instant. Ce que nous disent McGill et Concordia, et en cela, ils trouvent un écho chez le Conseil du patronat qui estime qu’on donne trop d’importance au français dans la sélection du français chez les immigrants, c’est que le français est de trop au Québec. Ils peuvent bien faire des poèmes sur cette langue belle, ils la présentent pratiquement comme un obstacle au progrès, comme la cause de nos retards.




Héritage linguistique




On nous dit: le peuple québécois est de trop chez lui. C’est son identité linguistique et culturelle qui l’empêche de tirer pleinement avantage de la mondialisation. S’il s’en délivrait, comme un homme se libère d’une obsession qui l’empêche d’avancer dans la vie, il pourrait enfin être riche. En un mot, c’est son existence qui pose problème. Les Québécois ne devraient plus, aujour­d’hui, se libérer du Canada, mais de leur propre langue pour vivre heureux.




Le gouvernement libéral n’a qu’une envie: céder. L’héritage linguistique de la Révolution tranquille s’est effrité. Ils sont de moins en moins nombreux à croire que le français doit être la seule langue officielle. L’idéologie du bilinguisme obligatoire gagne du terrain. On s’indigne moins de l’ignorance du français chez les immigrants que de la connaissance trop limitée de l’anglais chez les Québécois. On les aimerait bilingues en sortant du berceau.




C’est l’instinct de survie qui semble s’affaiblir chez les Québécois. Ou du moins, chez leurs élites. Il faut convenir qu’il n’a jamais été très fort chez elles: elles s’accommodent de notre subordination. Après de longues batailles, le Québécois semble dire avec la chanson de Starmania: «Je voudrais seulement dormir/M’étendre sur l’asphalte/Et me laisser mourir.»



 




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