Lettre à un Québec urbain, fasciste, hygiéniste et assimilé
Pendant que certaines régions du monde connaissent des stress hydriques dont nous ne voyons à ce jour que la pointe de l’iceberg qui, en passant, fond toujours au moment où on se parle. Pendant que les hommes ont encore faim et soif un peu partout sur le globe. Pendant que les femmes sont battues au coin de votre rue comme dans les ruelles d’Afghanistan. Hier, les chaînes de télévision d’information québécoises étaient mobilisées; prêtes à mordre; prêtes à l’attaque. Un drame monumental s’était produit à Montréal : un jeune garçon de sept ans a conduit sur une route perdue de la Côte-Nord un véhicule moteur. Notez au passage, l’illogisme (Montréal-Côte-Nord) qui ici est malheureusement semble-il de mise. Montréal et son contrôle de l’opinion publique devait venir faire son ménage. La pensée citadine ne supporte pas la rudesse que demande l’arrière pays.
Un événement majeur donc : un enfant et un véhicule moteur. Oui oui, chers amis (e), vous avez bien entendu : un véhicule moteur, cela même qui était, bien avant l’époque de la langue de bois technobureaucratique sécrétée par le monstre étatique qui gouverne notre coin d’Amérique; communément appelé, voire vulgairement, une automobile. Disions-je ? Nos âmes sensibles de citoyens responsables et sécuritaires n’étaient pas prêtes à une scène d’horreur d’une telle ampleur qui, du haut de son podium prioritaire, mérite semble-il la palme de notre indignation. La propreté; l’ordre factice de nos vaines sociétés a été entachée. Réagissons. Sous les encouragements d’un père de bonne volonté mais, avouons le, un peu tête en l’air, une famille a péché et mérite l’opprobre social. Ces comportements ne sauraient être tolérés : enfermez le !
À des années lumières de ces petits étages; pendant ce temps, l’Allemagne, nous demandait en pleine face pourquoi notre pays, le Canada : la plus meilleure terre au monde disions-je, est le paradis rêvé des criminels ? Et nous de répondre : on en sait rien ? Pourquoi on en savait rien ? Pourquoi on en savions rien ? Parce qu’on est trop occupé à arracher le tracteur de l’agriculteur; à mépriser le Québec des régions, à péter de la broue devant un bar branché à l’absinthe sur tous les plateaux croûteux; disions-je, plateau de croûtons de tous les Montréal (s) pétarades de ce monde.
Les citadins sont insipides, où que vous les trouviez : Paris, Bruxelles, Dakar, c’est la même chose; à moins qu’ils ne soient des déracinés ou des déclassés, les citadins ont la froideur de leur pudeur démesurée. Ici, en plus, les citadins sont une caricature de l’occident chauvin et ignorant. Au Québec, comme on ne lit pas, on s’émoustille de tout et de rien. On croit à chaque coin de rue découvrir le sens de l’univers alors qu’en fait, tout ou presque a déjà été dit.
Mais, pas d’inquiétudes : les québécois moralisateurs sont de retour mais sans la soutane cette fois ci et s’il vous plaît, ‘yes sire’, les ‘boomers’ s’incarnent en leur propre dérision. Jogging d’une main, luzerne dans l’autre : ils sont finalement passés au vert. J’y pense, j’ai la solution. Il nous faut urgemment une nouvelle armée de zouaves qui viendra sauvegarder les valeurs collectives qui sont rappelons le issues de la précieuse Révolution tranquille. Cette armée jouerait le rôle d’une police des mœurs et de la chambre à coucher de son voisin. C’est pourrait on dire confondre nos affaires avec celles des autres ou, plus directement, ne pas se mêler de ses affaires. Mais n’oublions pas, afin de chasser les derniers scrupules, quoi de mieux que de tuer l’ennui d’un peuple sans avenir avec, soit une caisse de 24, soit des ragots de Margots et de M. « Thibodeau ».
Fallait-il mobiliser toutes les chaînes de télévision d’information pour apprendre aux citadins que depuis que le moteur sur quatre roues existe, tous les petits garçons (et toutes les petites filles depuis disons 40 ans) du Québec rural, apprennent les rudiments de la conduite sur un chemin de terre ? Certainement oui. Il n’y a aucune économie qui tienne en matière de sécurité … les terroristes sont à nos portes. Danger, danger, danger … vilains, vilains, vilains … le Québec n’a pas seulement perdu son latin, il a aussi perdu la boule par la même occasion et dans le fossé par-dessus le marché.
Non mais, décidément, l’événement, quant à moi grotesque du jeune garçon de la Côte-Nord est le symptôme d’un Québec profondément déchiré entre urbanité et ruralité le tout sur une toile d’ignorance qui pullule à la grandeur du pays. Ignorance des uns qui croient que la vie sans risque est saine en oubliant que cela équivaut avant tout à une vie sans liberté et, ignorance des autres qui croient que la valeur d’un homme, qu’il soit jeune ou vieux, se mesure à la performance de son auto, à l’épaisseur de son porte feuille, à la force de ses bras et de son pied sur un accélérateur et, qui sait, à la performance de sa queue.
Entre hygiénisme et abâtardissement, remarquez que, si j’ai à choisir entre les deux, je préfère encore l’ignorance crasse que l’ignorance aseptisée. La première rend triste, la deuxième vous révolte et vous donne le goût de frapper; de mordre; de crier; de hurler. La deuxième depuis la nuit des temps se nourrit de l’exploitation de l’autre et, entre les deux, dans cette ronde, il y a des artistes et des penseurs de rien du tout qui en arrive à ne plus vouloir prendre position du tout parce que le niveau du débat est tellement bas que même y participer c’est se salir non pas les mains mais bien l’esprit et aussi, tient, pourquoi pas, se mettre les pieds où je pense.
La pollution de l’esprit disait Florent Veilleux, un pataphysicien québécois accompli, est la mère de toutes les pollutions et le problème avec elle comme avec toutes les pollutions d’ailleurs c’est qu’elle laisse des traces. La deuxième partie est de moi. Mon remède est l’ironie et j’espère sérieusement que vous avez le vôtre par ces temps gris; par « ces âges de ténèbres » comme disait Denys Arcand. Revenons en néanmois aux faits. Que certains soient tombés de leur chaise en apprenant la nouvelle côte-nordienne d’hier me fait tout simplement dire après tout qu’il est vraiment urgent de permettre aux Montréalais et autres obtus de toutes espèces de sortir un peu de leur couronne et de venir fraterniser avec leurs cousins des régions. Peut-être pourrait-il apprendre quelques rudiments de décence même s’il nous est permis d’en douter.
En effet, manquons-nous à ce point d’enjeux collectifs pour que nous en revenions à une chasse aux sorcières; à une grande noirceur; à une diminution généralisée des libertés ? Et de dire les autorités; d’en rajouter : « Imaginez ce qui serait arrivé s’il y avait eu un orignal qui était passé par là » ? Non mais là … on frôle le délire. Ça va faire comme on dit. Il faut arrêter ou alors cesser de s’étonner que nos terres engendre un tel taux de suicide. On fustige l’intelligence à gauche et à droite : malmenée est le mot juste.
Froidement, en terminant, je l’annonce à ceux qui ne le savent pas encore. Il n’y a pas un Québec, mais bien deux Québec. Il y a Montréal qui se gargarise d’un discours et de valeurs non plus enracinées dans l’expérience du vivre mais, plutôt, calqués sur une idéologie de bienséance fasciste; un discours mâché; un discours assimilé; un discours qui ne réfléchit plus; un discours cliché que l’on peut retrouver dans tous les bons manuels occidentaux et uniformisants sécrétés par la globalisation capitaliste économique aux visées planétaires.
Loin derrière, en repli, avec pour toute arme une colère sourde, il y a l’autre Québec, celui dont la frontière culturelle se dresse quelque part au resto chez Benny sur l’autoroute 40 en direction du grand village de Québec, dernier espoir d’un peuple qui se meurt. Décidément, hier j’aurais dû ne pas ouvrir mon téléviseur tout comme mes persiennes d’ailleurs, peut-être aurais-je alors été à l’abri de cette réalité si crue qu’on voudrait l’ incendier; l’oublier; la décapiter; la nier.
Aux parents de ce jeune garçon de la Côte-Nord je dis avec vous : j’emmerde le Québec au complet et tous ses bien pensants,
La prochaine fois par contre, il vaut mieux laisser la caméra à la maison on ne sait jamais qui nous regarde ces temps ci.
Sacki Carignan Deschamps
Sociologue
Saint-Jean-des-Piles : Shawinigan
Sacki Carignan Deschamps
Sociologue
csacki LCL hotmail.com
Le petit garçon de la Côte-Nord
Aux parents de ce jeune garçon de la Côte-Nord je dis avec vous : j’emmerde le Québec au complet et tous ses bien pensants,
Tribune libre
Sacki Carignan Deschamps3 articles
Sociologue et maître en études internationales (diplomatie et négociations stratégiques)
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5 commentaires
Archives de Vigile Répondre
5 août 2009Pas rapport... comme dirait l’autre! Vous mêlez tout à la Jeff.
La conduite d’une automobile par un jeune de sept ans, sous la «surveillance» d’un adulte supposément intelligent relève de la pure bêtise. Manque complet de jugement parental.
Ce n’est pas être moralisateur que de dire que c’est de l’irresponsabilité et je ne vois vraiment pas ce que la faim dans le monde, l’Afghanistan, les villes de Paris Dakar, Bruxelles et le fascisme viennent faire dans votre commentaire complètement sauté!
Je suis néanmoins d’accord avec vous sur un seul point, nos médias rapportent trop peu souvent ce qui se passent réellement non seulement dans le monde mais surtout au Québec. Nous n’avons droit, surtout à Radio-Can, qu’à du sensationnalisme, de la télé divertissement journalistique à la Berlusconi.
Il n’en reste pas moins que c’était stupide, dangereux, périlleux (d’autres personnes, sans ceinture de sécurité, étaient à bord de cette voiture y compris un bébé d’environ un an) de laisser conduire un véhicule automobile par un jeune de sept ans. Et fait encore plus aberrant, la vidéo a été mise sur Youtube pendant X semaines (combien au juste, semaines ou mois?).
Michel Guay Répondre
5 août 2009Les médias au Québec sont à l'image des colonisateurs et des colonisés fédéralistes et ne ressemble pas du tout à la nation Québecoise
Le rôle des médias colonisateurs au Québec est de désinformer amuser et mentir si nécessaire pour protéger le système colonial et d'extrème droite des canadians
Si les médias informaient vraiment les Québecois sur le Québec et le monde il y a longtemps qe le ptit gars menteur et son auberge de Sahwinigan seraient dans la poubelle
Effectivement cette histoire de mauvaise conduite est entièrement exagérée par nos médias colons à la canadian
Archives de Vigile Répondre
4 août 2009Et v'lan! Mais c'est un chef-d'oeuvre votre propos, M. Carignan.
Et ensuite on se plaint que nos garçons n'ont plus de modèles masculins; désertent l'école; ont des complexes d'infériorité; se sentent dévalorisés, se révoltent et deviennent rapidement des décrocheurs. Et éventuellement des consommateurs...
Et l'on veut faire un pays avec ces garçons qui n'ont même plus d'identité personnelle.
Dans certains milieux, particulièrement en régions, ce comportement est culturel. Mes frères ont tous appris à conduire de cette manière et ils sont décédés de maladie et non d'accidents. Mes beaux-frères conduisaient le tracteur de ferme à 10 ans.
Autrefois, il y avait des initiations, des rites de passage et aujourd'hui???...!!! Non, on préfère les emmaillotter, les surprotéger. C'est plus facile; c'est moins de trouble.
Les médias et les bien pensants urbains, comme des hyènes, cherchent une raison d'exister et de justifier leur emploi, en dévorant sur la place publique cet authentique père de famille québécois.
Pôvre enfant! Pôvre homme! Pôvre famille! Pôvre Québec ! Tous pareils! Tous formatés! Tous réglementés! Bientôt tous des androïdes!
Pathétique! Comme si la vie n'était pas un risque de la naissance à la mort.
De grâce, ressaisissons-nous...
Marie Mance Vallée
Raymond Poulin Répondre
4 août 2009Bien vu, M. Carignan-Deschamps!
Archives de Vigile Répondre
4 août 2009Si orignal il y à, a 7 ans ou 77 ans le mur est le même. À 5 ans Mozart composait des symphonies au grand plaisir des gentes dames et damoiseaux.
SI le ti cul a du talent à conduire un VUS, ou est le problème sur une route perdu.
J’aime mieux voir un babin avec un volant entre les mains qu’une mitraillette et scander HALLA!