Le jeu du déficit

Élection Québec - 8 décembre 2008


Les grands argentiers des provinces qui se rencontrent ce matin savent à quoi s'attendre. Ottawa n'aura pas les moyens de leur verser des paiements de péréquation aussi généreux que prévu, a prévenu leur vis-à-vis fédéral, Jim Flaherty, la semaine dernière. Voilà qui n'annonce rien de bon pour l'équilibre budgétaire du Québec.
«Nous veillerons à ce que la croissance du programme se poursuive de manière viable, c'est-à-dire à un rythme plus proche de celui de l'économie», a indiqué le ministre Flaherty dans un discours la semaine dernière. Même pas besoin de lire entre les lignes. Si la croissance des paiements de péréquation suit celle du PIB, elle sera au mieux modeste. Un changement radical par rapport aux cinq dernières années, marquées par une hausse de 56% selon les calculs d'Ottawa.
Le programme de redistribution des richesses entre les provinces revient une nouvelle fois hanter les conservateurs. Après s'être mis à dos la Saskatchewan, la Nouvelle-Écosse et Terre-Neuve pour avoir inclus les revenus du pétrole dans sa nouvelle formule de calcul, le gouvernement Harper veut maintenant rajuster le tir pour la même raison. Les cours du pétrole, encore très élevés jusqu'à tout récemment, ont créé des obligations auxquelles Ottawa pourra difficilement faire face en cette période difficile. Et cette fois, c'est l'Ontario qui déchire sa chemise. Son économie est tellement amochée qu'elle pourrait bientôt se retrouver dans le camp de celles qui reçoivent de la péréquation - une première puisqu'elle a toujours été une contributrice nette au régime. C'est précisément ce qu'Ottawa chercherait à éviter, pour ne pas déséquilibrer le système, croient plusieurs observateurs. Le gouvernement ontarien, évidemment, est furieux. Son ministre des Finances a promis de se battre «bec et ongles».
La ministre Monique Jérôme-Forget est sûrement mieux équipée d'ongles que son homologue Dwight Duncan, mais elle serait malvenue de les utiliser. Le Québec, contrairement à l'Ontario, ne peut pas plaider le juste retour des choses, car il profite depuis longtemps de la péréquation. Il est même très avantagé par la nouvelle formule de calcul. Par conséquent, c'est l'une des provinces qui a le plus à perdre de la nouvelle approche fédérale. Combien? On n'aura sans doute pas de chiffres précis aujourd'hui puisque le gouvernement conservateur doit présenter sa mise à jour économique plus tard en novembre.
Le ministre Flaherty a promis qu'il n'équilibrerait pas son budget sur le dos des provinces. Cependant, il ne faut pas s'attendre à ce qu'il porte tout le poids d'un éventuel déficit. Monique Jérôme-Forget aurait intérêt à faire preuve de modestie dans sa propre mise à jour demain. Les politiques fédérales des prochains mois risquent de l'obliger à puiser dans cette sacoche dont elle nous a tant vanté les réserves. Mais peut-être est-ce trop demander d'un gouvernement qui s'apprête à se lancer en campagne électorale? On a vu l'entêtement ridicule avec lequel Stephen Harper a nié la possibilité d'un déficit, et la rapidité avec laquelle il a changé de discours après avoir été réélu. Ce genre de stratégie est une insulte à l'intelligence des électeurs. Heureusement, ceux-ci ont d'autres sources que les politiciens jovialistes pour s'informer sur l'état de l'économie.


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