Le grand dérapage

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En taxant la CAQ de raciste et de misogyne, le régime libéral s'aliène encore un peu plus les francophones

S’il y avait une recette parfaite pour décourager encore plus les Québécois de la politique, Philippe Couillard vient peut-être de la trouver. Le premier ministre et ses troupes ont entrepris de tirer à boulets rouges sur la CAQ à coups de la pire accusation qui soit.


Face à leur principal adversaire – et croupissant eux-mêmes à 16 % d’appuis chez les francophones –, les libéraux présentent François Legault et son parti comme d’immondes xénophobes. Hier, le ministre Pierre Moreau y ajoutait même l’accusation de « misogynie ».


Tenter de définir son adversaire de la manière la plus péjorative possible est certes un grand classique. Encore faut-il qu’il y ait au moins un semblant de vérité au contenu des attaques. Ce qui, pour ce qui est d’une CAQ supposément « xénophobe » ou même « misogyne », n’est pas le cas.


Boomerang


À part d’essayer de faire peur à sa propre base anglophone et allophone en dépeignant la CAQ comme raciste, la stratégie libérale de l’attaque constante sur des questions aussi sensibles rappelle surtout le vieil adage : « Tout ce qui est excessif est insignifiant. »


Chez les francophones, cette stratégie méprisable risque plutôt de se transformer pour le PLQ en un douloureux boomerang. Que Philippe Couillard s’y abaisse n’a toutefois rien de surprenant. Depuis son élection, il se drape dans la vertu de l’« ouverture » pendant qu’il accuse le PQ et la CAQ de souffler sur les « braises de l’intolérance ».


Àsix mois des élections, la différence est que sur ce terrain fortement miné, il s’en prend exclusivement à la CAQ, elle-même au premier rang dans les sondages. D’où le malaise de voir Jean-François Lisée s’aventurer à jouer dans le même film.


Cette semaine, à la période de questions, le chef du PQ s’est allié au premier ministre pour attaquer les positions de la CAQ sur l’immigration. Que le PQ ait des désaccords marqués avec la CAQ sur le sujet est normal. Que son chef les exprime de concert avec M. Couillard qui, lui, le fait en accusant la CAQ d’être « contre les étrangers » l’est beaucoup moins.


Sale boulot


Le malaise est d’autant plus grand que le PQ, depuis sa fondation, est lui-même l’objet d’accusations semblables et tout aussi malhonnêtes. C’est pourquoi, quand ces mêmes débats refont surface, les péquistes devraient se garder de verser dans ce même travers face à la CAQ.


Dès qu’on prend un peu de distance face au spectacle navrant auquel on assiste, on en sort carrément inquiets pour la démocratie québécoise. Lancer encore et toujours de la boue sur le front dit « identitaire » au lieu d’en débattre raisonnablement, est-ce vraiment le genre de politique que l’on entend servir aux citoyens d’ici le scrutin du 1er octobre ?


Si oui, force sera de conclure que les libéraux n’ont même plus besoin des éditoriaux de The Montreal Gazette ou du Globe and Mail pour taxer leurs adversaires et concitoyens nationalistes d’intolérance atavique. Sous Philippe Couillard, ils semblent tout à fait capables de faire ce sale boulot eux-mêmes.