Le français malmené dans un communiqué du Sénat

Le "crime blanc de collier", ce terrible fléau

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17. Actualité archives 2007



Leduc, Louise - Il y a de ces redoutables menaces qui planent sur le pays et dont on ne sait rien. Le dernier en lice: le "crime blanc de collier". Le quoi?
Le "crime blanc de collier" s'est retrouvé hier en titre d'un communiqué envoyé aux médias par le Sénat, malencontreuse traduction au mot à mot d'une expression qui renvoyait en fait à ces fraudes commises par les cols blancs. La fraude à cravate, quoi.
C'était gênant. Quelques heures plus tard, une version corrigée était donc renvoyée aux médias, avec un titre adéquatement traduit. Le contenu du communiqué corrigé, qui ne faisait toujours pas 20 lignes, a-t-il été relu? Pas sûr, à en croire cette "Région Central" toujours mal orthographiée (et qui, en français, n'évoque pas trop les provinces des Prairies).
Une mauvaise journée? Une étourderie comme on en fait tous? Pas pour Yvon Godin, député du NPD et porte-parole du dossier des langues officielles. "Je serais prêt à mettre ma main au feu que "crime blanc de collier", ça ne vient pas d'un être humain, mais d'un logiciel de traduction automatisée. Est-il vraiment nécessaire d'économiser de l'argent sur le dos de la francophonie?"
C'est qu'il y a un précédent. L'an dernier, le ministre de la Défense, Gordon O'Connor, avait aussi confié la traduction de son site internet à une machine. Avec un succès tout relatif. Il y était question de "carte de l'équitation" (traduction malheureuse de "map of riding", c'est-à-dire "carte de la circonscription"). On apprenait aussi que Gordon avait obtenu "56% des voix moulées dans des moulins du Carleton-Mississippi" (56% of the votes cast in Carleton-Mississippi Mills).
Pour le Bloc québécois, étourderie ou pas, "le crime blanc de collier", ça ne passe pas. "Ce sont des choses qui arrivent trop souvent, dit Richard Nadeau, député de Gatineau. C'est un manque de respect, c'est du laxisme de la part de l'État fédéral canadien. Tout parlementaire peut obtenir gratuitement l'expertise de traducteurs professionnels de la Chambre des communes. Pourquoi négliger de faire appel à eux?"
La sénatrice Céline Hervieux-Payette, elle, dit que si le français du Sénat n'était pas correct, elle serait la première à râler. Ce n'est pas le cas, à son avis. Pour elle, "le crime blanc de collier" est un fait isolé, une rare coquille émanant peut-être d'un de ces jeunes communicateurs à qui l'on a peut-être trop peu fait faire de dictées.
Dans son plus récent rapport, le commissaire aux langues officielles, Graham Fraser, reprochait aux institutions fédérales une "approche minimaliste" en matière de service public et de langue de travail. Fraser évoquait au demeurant un "manque apparent de volonté" et un "relâchement" dans l'application de la Loi sur les langues officielles.


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