Le fédéral octroie un contrat douteux de 5,5 millions à Postmedia

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Le petit jeu des lobbies canadiens

L'entreprise a eu ses entrées auprès de l'administration Trudeau entre 2016 et 2019 concernant l'étude des médias au pays.


Voici la ou les sources de cet article : Blacklock's, Commissariat au Lobbying du Canada #1 et #2 / Voici la source de la photo : Radio Television Malacañang, Domaine public (Image rognée)


La nomination des associations composant le « groupe indépendant d'experts » appelé à choisir les journaux et les sites web se qualifiant pour l'obtention de fonds fédéraux sous forme de crédits d'impôt avait provoqué cynisme et protestations. En effet, plusieurs étaient ceux qui s'interrogeaient par rapport à la sélection de ces organisations parmi lesquelles on retrouve le syndicat Unifor, mais aussi une pléthore d'autres groupes comportant des représentants de presque tous les grands joueurs de l'industrie médiatique.


Or, avant que ne soient déliés les cordons de la bourse dans ce dossier, on apprend que l'administration Trudeau s'est affairée à sous-traiter de l'ouvrage à l'entreprise Postmedia. Celle-ci a ainsi reçu un contrat sans appel d'offre de 5,5 millions du gouvernement fédéral le premier avril dernier en échange de services de recherche en communication.


Le montant a de quoi faire sourciller et il serait intéressant de savoir quelles économies a bien pu faire Ottawa en recourant de la sorte à un fournisseur externe. C'est que Postmedia avait des entrées au gouvernement fédéral depuis belle lurette, s'étant enregistré auprès du Commissariat au Lobbying du Canada entre 2011 et 2019.


Des ramifications révélatrices


Les représentants de Postmedia ont courtisé différents ministères au gouvernement fédéral au cours de cette période, l'entreprise ayant notamment dépêché des lobbyistes de la compagnie ontarienne Capital Hill Group afin de faire avancer ses intérêts.


Les ministères sollicités par ces émissaires allaient de Patrimoine Canada (PCH) au Bureau du Conseil privé (BCP) en passant par le Cabinet du Premier ministre (CPM), Finances Canada (FN) ou Innovation, Sciences et Développement économique Canada (ISDE), pour ne nommer que ceux-là. Les parlementaires et les sénateurs à Ottawa étaient également dans la mire des lobbyistes de Postmedia.


Le mandat qui était donné à ces lobbyistes visait au tout départ à sensibiliser le gouvernement de façon à ce qu'il autorise des investissements étrangers dans les journaux canadiens. Ce mandat s'est ensuite progressivement transformé lors de l'arrivée des libéraux au pouvoir. L'entreprise a donc changé d'approche, cherchant désormais à attirer l'attention du gouvernement et du Comité permanent du patrimoine canadien (CHPC) sur l'apport qu'elle pourrait leur fournir relativement à l'étude du Comité sur l'état des médias au Canada.


Peut-on conclure avec certitude que l'octroi par l'administration Trudeau du contrat sans appel d'offre dont a bénéficié Postmedia l'a été exclusivement en raison de ses activités de lobbying menées pendant les trois dernières années ? Non ; bien qu'on soit fortement tenté d'y voir un lien de causalité direct.