NATIONALISME

La Fédération des Canadiens-Français a un an et elle mord

Le patriotisme québécois est un leurre

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Chronique de Gilles Verrier

L'objet de la lutte a changé



Surprenant, Robert Comeau écrit dans l'Action nationale que les Québécois combattaient les Iroquois en Nouvelle-France. Dans la présentation de sa biographie, Lionel Groulx est présenté comme « l'un des maîtres à penser du nationalisme


québécois ». Ces exemples d'un révisionnisme impudique en histoire, qui s'efforce d'asservir l'identité et les œuvres canadiennes-françaises à la gloriole de l'identité québécoise sont pernicieux. Si le procédé suggère une certaine continuité historique, on y trouve en réalité une rupture. L'objet de la lutte n'est plus le même. C'est ce que nous allons tenter de démontrer ici à ceux qui croient que « les Canadiens-Français sont devenus des Québécois », comme si la démolition en règle de l'identité canadienne-française pouvait être passée sur le compte d'une évolution naturelle !





 À la fin de 1980, quelques mois après le fiasco référendaire, François-Albert Angers nous alertait de la confusion identitaire dans laquelle nous entraînait la ¨québécitude¨. "Le sens de la lutte a changé", écrivait-il avec une étonnante lucidité. Président de l'Action nationale depuis quelques décennies, ses propos n'auront hélas eu que peu d'écho, mais l'avenir lui donnera entièrement raison. 


 




 

Le peuple canadien-français n'est pas soluble dans l'identité québécoise  





Du coté des néonationalistes on a trop cru que l'instrumentalisation de la richesse intellectuelle des Canadiens-Français, qui émanait d'une fidélité nationale largement partagée et enracinée, pouvait servir de caution à une identité québécoise plurinationale, au sein de laquelle, faut-il le rappeler, les Canadiens-Français devaient être bientôt déshérités de leur statut de fondateurs par Québec. 


« Dans un sursaut de fierté anti-colonialiste mal dirigée, on a voulu mettre à l'index jusqu'au nom "Canadien", pour ne plus être que des "Québécois". Cela a correspondu d'ailleurs avec un processus général de répudiation des valeurs que véhiculait notre histoire nationale,.. pour procéder à la construction d'un nouveau nationalisme proprement québécois qui n'aurait rien de commun avec l'ancien, dont on voulait totalement se dissocier. » (François-Albert Angers, Bilan du référendum, ptie 2) 


Nos néonationalistes ont voulu se dissocier des Canadiens-Français tout en se servant de leur patrimoine comme un réservoir d'appropriation culturelle au service d'une autre cause. Pour briser le mythe de la continuité dans la lutte dite nationale, les Canadiens-Français devront se mobiliser pour faire éclater l'arnaque. Le peuple canadien-français n'a jamais été soluble dans une identité québécoise qui a plutôt tentée de l'éteindre. 

Il faut faire ressortir l'incohérence de la pensé dans laquelle les acteurs du souverainisme institutionnel nous entretiennent. Il y aurait lieu de barrer la route à ceux qui, tout en étant de la "québécitude", se réclament du même souffle les héritiers du Canada-Français et de la Nouvelle-France. S'ils puisent dans notre héritage pour s'approprier à la carte une richesse évocatrice que ne possède pas l'identité québécoise, ils n'en rejettent pas moins l'essence et la finalité. 


Comment cela a-t-il pu se produire ?  


Une dérive en trois actes

 


Dans l'espace de 15 ans, entre 1965 et 1980, le sens d'une lutte nationale de quatre siècles a été détourné et travesti. Le tout s'est déroulé en 3 actes.  




Le premier acte  se comprend aisément quant on considère les deux doctrines opposées de l'époque. La première était contenue dans le livre Égalité ou indépendance de Daniel Johnson, publié en 1965; la seconde, élaborée dans Option Québec, le manifeste de René Lévesque paru en janvier 1968. 


Daniel Johnson père proposait une formule ouverte d'égalité ou l'indépendance pour les Canadiens-Français. Quoi qu'on en pense, René Lévesque viendra parasiter cette approche prometteuse au lieu de l'enrichir. Tournant le dos aux ambitions de Johnson pour les Canadiens-Français, il proposera avec beaucoup d'élucubrations un pacte de souveraineté-association pour le Canada. Ce pacte excluait l'échec des futures négociations qu'il appelait de ses voeux et, par conséquent, la possibilité que l'indépendance survienne à la suite d'un échec.



Johnson ne dérogeait pas au devoir du peuple canadien-français de se perpétuer dans son être collectif et, à cette fin, de se doter d'un État national. En revanche, Lévesque voulait restructurer la "maison de fous" qu'était devenue le fédéralisme pour le rendre plus rationnel. Ses arguments les plus étayés portaient sur l'ordre économique et structurel du Canada. 



Si les propositions de Johnson partaient et allaient vers les Canadiens-Français, celles de Lévesque préconisaient une solution canadienne bi-nationale. C'est dès ce premier acte qu'apparaît la rupture irréductible entre deux visions : la vision canadienne-française, légitime, enraciné et historique; et la vision québécoise dénationalisée, libérale, progressiste et cosmopolite. 


La victoire facile de Lévesque sur Daniel Johnson, qui venait de mourir, marque le début de ce que sera le passage d'une cause nationale à une autre. 


Le deuxième acte va se jouer avec l'adoption de l'étapisme, en novembre 1974. C'était l'acte fondateur de la québécitude, car il lui manquait encore de s'imposer officiellement. Avec l'adoption de la démarche référendaire on fera disparaître le droit historique et légitime des Canadiens-Français à posséder le Québec. On se reconnaîtra désormais une obligation de le partager avec la puissante minorité anglophone, ce qui fera d'elle une force ascendante. En filigranne, elle venait d'être investie d'un droit de veto sur le destin national des Canadiens-Français. Le Parti québécois venait de diminuer délibérément, à l'occasion de son cinquième congrès le potentiel des pouvoirs et des prérogatives de la nation canadienne-française.


Le troisième acte prend forme avec la défaite référendaire prévisible de 1980, mais lancée quand même, le référendum était l'expérimentation de la dérive commencée avec Option Québec (premeir acte) et confirmée par l'étapisme (deuxième acte). Tout ce qui avait été mis en place se conjuguerait désormais sous la forme d'un repli ininterrompu des Canadiens-Français. Un nationalisme purement civique mènera le Parti québécois à imposer d'autres mesures contre les intérêts nationaux des Canadiens-Français. Un PQ très politiquement correct ne voulait surtout pas avoir à se défendre de quelque favoritisme envers les Canadiens-Français. 


* * *


À partir de 1980, tout était plié. Le reste n'a été que la poursuite de la chute. Ayant accepté de se dépouiller de toute représentation politique indépendante, les Canadiens-Français ne pourront tirer aucun bénéfice de s'être exprimés à hauteur de 61 % pour des changements constitutionnels en 1995. Ainsi, Jacques Parizeau avalera sans délai une défaite contestable, mais il ne revendiquera aucune forme de victoire. C'était le prix à payer pour avoir fait le deuil de son identité canadienne-française, remplacée par une communauté de destin inédite avec la communauté d'expression anglaise aux droits consacrés. De nouveaux  ¨compatriotes¨ nous étaient donnés, ils nous tiendraient captifs plus que jamais auparavant.


 




Et pour éliminer la possibilité qu'un sursaut canadien-français ne vienne qu'à se produire plus tard, le Parti québécois fermera la porte à double tour. Il rayera les Canadiens-Français pour éviter leur résurgence dans l'avenir. C'est ce qui se produisit avec l'adoption d'une loi fondamentale, la loi 99 (2000), qui définit largement un peuple québécois pluri-national, mais sans jamais faire état d'un peuple canadien-français, ne serait-ce qu'à titre de rappel historique. Retenons tout de même qu'en cinquante ans de néonationalisme piloté par le Parti québécois, nous sommes passés de l'ambition de faire du Québec un État national des Canadiens-Français à celui d'un État qui nie leur existence. Il n'y a donc pas de continuité mais, comme nous l'affirmions plus haut, une rupture.


Sous couvert de faire une place à « tous les Québécois », en pratique, c'est une place toujours plus grande qui sera faite à ceux qui, depuis la Conquête, nous privent de nos droits nationaux avec souvent beaucoup d'hostilité. Sous la québécitude, le discours public envers cette minorité, qui n'en a jamais été vraiment une, évoluera comme suit : on parlera d'abord d'avantages généreusement consentis, puis de droits acquis et finalement de droits consacrés. Quel contraste avec la place réservée aux Canadiens-Français qui ne fera que décliner.


Pour couronner l'imposture, on insistera pour nous présenter l'État du Québec comme notre État national, terme ambiguë derrière lequel l'État officie lui-même à l'imposture. 


La Fédération des Canadiens-Français va s'efforcer au cours de l'année 2021 de dévoiler l'incohérence des nôtres qui persistent à nous dire que les Canadiens-Français sont devenus des Québécois. Il n'en est rien.


Pour paraphraser Viktor Orbán, tout doit être dirigé pour entretenir et défendre la nation, un droit et un devoir tant il s'agit de la perpétuer dans son être. 



« C'est aussi un atout déterminant dans le monde contemporain. Elle permet de bâtir une démocratie souveraine, par opposition aux États faibles, dominés par des intérêts étrangers ». 





En 2021, la Fédération des Canadiens-Français entend redonner une voix politique aux Canadiens-Français, ce qu'elle a commencé à faire modestement en 2020. Elle entend aussi rétablir une vérité historique malmenée et remplacée par des mythes et des fantasmes décollés de la réalité, mais maintenus à flot au profit d'un souverainisme institutionnalisé et tout à fait inoffensif. 


*    *    *


Pour que la nation canadienne-française retrouve une existence politique indépendante, 


rejoignez la Fédération des Canadiens-Français.


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Pour poursuivre la réflexion :


Annonce de fondation de la Fédération des Canadiens-Français, 31 décembre 2019


https://gilles-verrier.blogspot.com/2019/12/federation-des-canadiens-francais.html


François-Albert Angers avait tout compris dès 1980


https://gilles-verrier.blogspot.com/2019/01/francois-albert-angers-avait-tout.html


L'Identité québécoise ne peut mener qu'à une indépendance trudeauiste


https://gilles-verrier.blogspot.com/2020/03/lidentite-quebecoise-ne-peut-mener-qua.html


 


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Gilles Verrier140 articles

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Entrepreneur à la retraite, intellectuel à force de curiosité et autodidacte. Je tiens de mon père un intérêt précoce pour les affaires publiques. Partenaire de Vigile avec Bernard Frappier pour initier à contre-courant la relance d'un souverainisme ambitieux, peu après le référendum de 1995. On peut communiquer avec moi et commenter mon blogue : http://gilles-verrier.blogspot.ca