La dépendance est dépassée

Le message est on ne peut plus clair : la nation québécoise, l’autre peuple fondateur, le Canada s’en fout.

Actualité du Québec-dans-le-Canada - Le Québec entravé



Je vous préviens : le prochain qui me dit que le projet de souveraineté du Québec est dépassé, je l’envoie suivre une cure de désintoxication idéologique. Il y a une limite, en effet, à pratiquer l’aveuglement volontaire. Comme l’écrit avec raison Joseph Facal dans Le Journal de Montréal du 21 novembre 2011, « il faudrait être lâche ou de mauvaise foi pour ne pas admettre que le Québec français recule sur tous les fronts ».

À Ottawa, le gouvernement conservateur est en train de faire la preuve définitive que les Québécois francophones ne sont pas à leur place dans le Canada. Depuis deux mois, il a multiplié les nominations d’anglophones unilingues à des postes-clés comme ceux de vérificateur général, de juge à la Cour suprême et de directeur des communications.
Pour bien enfoncer le clou, il a aussi multiplié les décisions qui vont à l’encontre des valeurs québécoises : abolition du registre des armes d’épaule, durcissement du Code criminel en matière de jeunes contrevenants, réduction de la représentation du Québec à la Chambre des communes, mise en valeur ostentatoire de l’armée et retour en force des symboles monarchiques dans les institutions canadiennes. Le message est on ne peut plus clair : la nation québécoise, l’autre peuple fondateur, le Canada s’en fout.
L’exemple est suivi par les institutions civiles canadiennes. Le 17 novembre dernier, le Comité olympique canadien organise une importante conférence de presse à Montréal. Cet organisme, faut-il le rappeler, avait été blâmé en 2010 pour avoir négligé d’accorder au français une juste place lors des Jeux de Vancouver. Or, il n’a rien appris. Dans La Presse du 18 novembre, Philippe Cantin rapporte que, lors du récent événement, le ministre d’État fédéral aux Sports, Bal Gosal, n’a pas dit un seul mot en français. On a même demandé à Alexandre Despaties « de s’adresser uniquement en anglais aux invités ». Cet organisme, pourtant présidé par Marcel Aubut, n’essaie même plus de cacher son mépris des francophones.
Dans Le Devoir du 10 novembre 2011, le Franco-ontarien Elmer Smith, juge à la retraite de la Cour suprême de l’Ontario, parle franchement. Le Canada hors Québec, écrit-il, est « une terre hostile à la culture et à la langue françaises ». Il cite le regretté sociologue Roger Bernard : « Or, si le Canada est officiellement un pays bilingue, il est effectivement, dans la vie de tous les jours, un pays de langue anglaise et de culture anglo-saxonne. »
En s’entêtant à demeurer dans cet espace politique qui le méprise et le nie, le Québec s’enferme dans une logique provinciale qui se répercute sur le statut du français. Si le Québec était souverain, le français serait une langue nationale qui s’imposerait. Pour le moment, le français n’est qu’une langue provinciale, minoritaire, sans prestige. Une langue de subalternes, quoi, comme le démontrent la présence de cadres unilingues anglophones à la Caisse de dépôt et la résistance de nombreux immigrants à apprendre cette langue.
« Au cœur du recul actuel, explique Joseph Facal, il y a notre refus de voir et de nommer l’éléphant dans le salon. Cet éléphant est la dimension politique et collective de la question linguistique. Si un peuple dort au gaz, s’il vote contre ses propres intérêts, s’il rate tous ses grands rendez-vous avec l’Histoire, s’il pense que fuir ses responsabilités n’a jamais de conséquences, tous ceux qui se fichent de lui en prendront bonne note. »
Et ce qui est vrai pour la langue l’est pour le reste. Quand je lis dans L’Actualité du 1er novembre 2011 que « les jeunes s’intéressent aux affaires internationales, à l’environnement et aux causes sociales bien avant la souveraineté », je me dis qu’il y a de la pédagogie à faire. Le Québec province, sur la scène internationale, n’existe pas. Dans les débats concernant l’environnement, il n’a pas voix au chapitre et doit se rallier à la position canadienne qui contredit la sienne, comme il doit supporter, malgré lui, l’approche canadienne répressive en matière de criminalité.
Ne faut-il pas conclure, de ce triste portrait, que ce n’est pas l’indépendance, mais bien la dépendance qui est dépassée, si le Québec français veut vivre?
louisco@sympatico.ca


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