L’UE a-t-elle livré les dépôts bancaires européens aux marchés spéculatifs pour sauver l’euro?

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La technique a été mise au point par Henri-Paul Rousseau au Québec en 2009 pour régler le cas du PCAA. Résultat : les Québécois ont trinqué

Directive « renflouement interne des banques »: l’UE a-t-elle livré les dépôts bancaires européens aux marchés spéculatifs pour sauver l’euro?
Le système de paiement TARGET2, destiné à être remplacé graduellement, à partir de juin 2015 par le système T2S (pour TARGET2-SECURITIES), est présenté par le site de la BCE comme « appartenant à et étant opéré par l’Eurosystème ».
Dans une publication récente, la BCE mettait en relation le lancement de la plateforme T2S avec certaines « mesures de soutien au marché repo ». Elle précisait en outre que:
« Le marché repo joue un rôle important dans le système financier de la zone euro […]. Après le ralentissement consécutif à la crise financière, la valeur du marché repo interbancaire […] a augmenté jusqu’à atteindre € 5’499 milliards d’euros environ à la fin 2013. »
Tout d’abord, nous allons voir que la plateforme TARGET2 – dont le rôle central dans le sauvetage de la zone euro a notamment été souligné par le président de la Banque fédérale allemande (1), se retrouve également au cœur du commerce de certains produits « repo » portant sur de la dette (privée et publique) européenne.
Nous verrons ensuite que les mêmes produits « repo » sont justement mis à l’abri de la directive européenne « renflouement interne des banques », qui prévoit notamment la ponction des dépôts bancaires comme mesure de préservation du système financier, ce qui paraît cohérent avec l’hypothèse d’un sauvetage de la zone euro via la spéculation bancaire.
De Target2 à T2S: le sauvetage de l’euro passe-t-il par le « marché repo »?
Dans une publication précédente (2), nous avions déjà mis en évidence le fait que la politique monétaire de la Banque nationale suisse (BNS) était financée en grande partie par des institutions financières privées, lesquelles recevaient en contrepartie des liquidités en francs suisses sur la plateforme « SIC », gérée par la société suisse SIX Group. Nous y avions également observé que ces liquidités pouvaient être échangées contre de la dette publique et privée dans des opérations « repo », via des instruments tels que les produits structurés « COSI », une « prestation » de SIX Group justement (3), que l’on retrouve dans l’offre de produits de la société allemande Eurex Repo.
De même, il peut être intéressant de rappeler que les achats d’actifs de la BCE (via les opérations dites « LTRO ») consistent précisément à fournir des liquidités au secteur bancaire, en échange de titres de dette européenne « éligibles par la BCE » (4).
Or, des instruments tels que les produits « GC Pooling » et « SecLend Market » d’Eurex Repo permettent d’échanger divers actifs – dont de la dette privée et publique européenne – contre des liquidités tant en francs suisses (via un compte auprès de la Banque nationale suisse) qu’en euros (via un compte auprès de la Banque fédérale allemande).
Précisons enfin que, pour ces produits, les transferts de liquidités en euros s’effectuent via le système TARGET2 – ou la plateforme euroSIC de SIX Group, reliée tant à TARGET2 qu’à la Banque fédérale allemande (5).
Source: Eurex Clearing – Cash collateral: http://www.eurexclearing.com/clearing-en/collateral-management/cash-collateral
Peut-on dès lors exclure que les banques qui participent aux « plans de sauvetage » de la BCE utilisent les liquidités mises à leur disposition dans des opérations spéculatives? Voire même que la finalité de la plateforme T2S (voir intro) consiste précisément à faciliter la spéculation sur la dette d’institutions (publiques et privées) européennes en difficulté, afin d’en réduire les coûts de financement?
L’utilisation en circuit fermé des liquidités du LTRO dans des opérations « repo » portant sur de la dette européenne pourrait en effet présenter l’avantage d’empêcher des montants colossaux de monnaie créée par la « planche à billets » d’atteindre l’économie réelle, permettant ainsi à la BCE de limiter l’impact de ses « injections de liquidités » en termes de hausse des prix à la consommation…
Cette possibilité semble d’ailleurs très bien s’accorder avec ce qu’expliquait le président de la Bundesbank à la Frankfurter Allgemeine quant à la méthode employée par la BCE pour renflouer les pays en difficulté de la zone euro (voir note 1):
« L´Eurosystème a pour mission de mettre l´argent de la banque centrale à disposition des banques solvables, en échange de garanties et sans menacer la stabilité des prix. »
Elle serait enfin compatible avec le fait que, tout comme le système de trafic des paiements de la BNS, la plateforme TARGET2 sert à la fois pour des « opérations de politique monétaire » et pour des paiements interbancaires (6)…
Quand la spéculation bancaire et la politique monétaire cohabitent sur la même plateforme…
Tout d’abord, voici un communiqué de presse d’Eurex Repo qui semble indiquer que le marché des produits « repos » sur la dette européenne se porte plutôt bien:
« Eurex Repo, plateforme leader pour le financement collatéralisé (secured financing and funding) international, a continué à croître en 2014. La moyenne des volumes en circulation a atteint un nouveau niveau record de 200 milliards d’euros environ sur une base annuelle pour les marchés GC Pooling et Euro Repo. Sur ce montant, le marché GC Pooling représentait un volume moyen de 158.5 millards d’euros en circulation, une augmentation de 3% par rapport à 2013. »
Source : http://www.eurexrepo.com/repo-en/info-center/press-releases/Eurex-Repo-sees-continued-growth-in-2014/1353436
Parmi ces produits, relevons la présence du « GC Pooling Market – ECB Extended Basket », qui porte sur « plus de 21’000 actifs éligibles par la BCE » dont la note de crédit peut descendre jusqu’à BBB-, et qui peuvent être échangés contre des liquidités en francs suisses, euros et dollars.


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