Écoles passerelles

L'école anglaise sera accessible après un parcours authentique et... onéreux

Écoles passerelles - Loi 115


Robert Dutrisac Québec — Le gouvernement Charest a décidé de faire fi de l'avis du Conseil supérieur de la langue française (CSLF) en permettant à des parents fortunés de procurer à leurs enfants le droit à l'enseignement en anglais dans les écoles publiques ou privées subventionnées du Québec.
Lors de la période de questions à l'Assemblée nationale hier, le premier ministre Jean Charest a confirmé que son gouvernement allait «définir de façon plus élaborée ce que c'est, le parcours authentique», comme le décrivait la Cour suprême dans son jugement invalidant la loi 104. La ministre responsable de la Charte de langue française, Christine St-Pierre, présentera aujourd'hui un projet de loi pour se conformer au jugement.
C'est donc dire qu'un enfant qui n'a pas accès à l'école publique anglaise au Québec en vertu de la Charte de la langue française, parce que l'un ou l'autre de ses parents n'a pas reçu son éducation en anglais au Canada, pourra obtenir ce droit après un passage de quelques années dans une école privée non subventionnée dans la mesure où son «parcours» scolaire est jugé «authentique» en raison de facteurs tant quantitatifs (la durée) que qualitatifs, c'est-à-dire des circonstances individuelles jugées au cas par cas. Soulignons qu'une fois que le droit de fréquenter l'école anglaise est acquis pour un enfant d'une famille, il s'étend à ses frères et soeurs et à tous leurs descendants.
La chef de l'opposition officielle, Pauline Marois, a répété hier qu'il est «inacceptable» d'appliquer cette notion de «parcours authentique» qui permet à des parents qui en ont les moyens d'acheter un droit pour leurs enfants. Mme Marois a rappelé que l'Assemblée nationale avait adopté à l'unanimité la semaine dernière une motion allant dans ce sens. Il faut tout simplement étendre la loi 101 aux écoles privées non subventionnées, comme l'a recommandé le CSLF, croit Mme Marois.
Dans son avis rendu public en mars dernier, le CSLF critiquait le jugement de la Cour suprême qui force le Québec à retourner à un processus qui s'apparente à celui de la loi 22, adoptée en 1974, où des tests linguistiques étaient imposés aux élèves. «Il ne devrait pas être possible de s'acheter un droit constitutionnel», avait déclaré le président du CSLF, Conrad Ouellon, qui y voyait «une question sociale». On créerait deux classes d'immigrants, «ceux qui ont la capacité de passer à côté de la loi et ceux qui suivent la loi», avait fait valoir M. Ouellon.
Le gouvernement a décidé de ne pas tenir compte de cet avis. Il introduira une forme d'inégalité touchant les droits linguistiques, en favorisant les plus riches, mais tentera de limiter au maximum le nombre d'enfants visés. Selon les informations données à La Presse la semaine dernière, un passage de trois ans serait exigé et plusieurs autres critères seraient appliqués, comme la provenance des parents. Les enfants d'immigrants en provenance de pays anglophones gagneraient des points tandis que les petits Québécois francophones en perdraient dans cette grille évaluant le parcours authentique.


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