Être payé pour apprendre le français, puis démissionner

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Encore un mauvais coup du bilinguisme canadien

Le groupe Impératif français, le Bloc québécois et le Nouveau Parti démocratique s’insurgent contre le fait qu’un haut fonctionnaire fédéral ait pu être payé pendant près d’un an et demi pour apprendre le français à temps plein pour ensuite démissionner (en anglais seulement !) sans jamais être revenu dans ses fonctions.


Tous réclament que les postes désignés bilingues dans la fonction publique soient pourvus par des candidats qui maîtrisent déjà les deux langues officielles.


« Ça ne devrait pas exister. Quand on affiche un poste, on demande des choses : de l’expérience, des compétences, de la formation. Admettons que j’affiche un poste de chauffeur d’autobus, mais que le candidat [retenu] n’a pas son permis. Est-ce que cela a du sens ? Non. Alors, si on affiche un poste bilingue, il faut que la personne soit bilingue », illustre la députée bloquiste dissidente Monique Pauzé.



 Si on affiche un poste bilingue, il faut que la personne soit bilingue


— Monique Pauzé, députée bloquiste dissidente




L’Ottawa Citizen a fait état vendredi du cas de Ian Potter, un unilingue anglophone qui a été nommé en mai 2011 vice-président du Conseil national de recherches du Canada (CNRC), un poste à Ottawa désigné bilingue.


Six ans après sa nomination, M. Potter est retourné à son domicile albertain pour suivre des cours de français à temps plein. Il a conservé son salaire, qui se situe dans la fourchette de 168 500 $ à 202 300 $. Quelqu’un d’autre a occupé ses fonctions pendant son absence et ses cours particuliers ont été payés par Ottawa.


La facture s’est élevée à presque 90 000 $, confirme le CNRC, qui comptabilisera sous peu le coût du mois d’avril pour obtenir le coût total.


M. Potter devait rester en formation linguistique jusqu’en août, mais il a démissionné cette semaine. Son message de départ envoyé aux employés était rédigé en anglais seulement, quoiqu’intitulé « Goodbye/Au revoir ».


Exigence à l’embauche


« C’est encore un constat d’échec de la politique linguistique fédérale qui autorise ce genre d’abus, et ce n’est pas la première fois que ça se produit », lance Jean-Paul Perreault, le président d’Impératif français.


« On voit surtout au Canada anglais des gens s’offrir des vacances généreusement payées par nos impôts pour obtenir une formation, une connaissance, une expertise linguistique qui aurait dû être exigée à l’embauche. »


Et à ceux qui avancent qu’empêcher les unilingues d’accéder aux hauts postes de direction avantagerait de facto les francophones, plus bilingues, M. Perreault n’a qu’une chose à dire : « C’est de leur faute. […] Que le Canada anglais adopte des mesures qui s’imposent pour que le français, langue officielle canadienne, soit adéquatement enseigné dans tout le système scolaire. Le problème est là. »


Postes bilingues


Selon les statistiques de 2016, 43 % des postes de la fonction publique fédérale sont désignés bilingues. Une tranche de 50 % exige la maîtrise de l’anglais. Seulement 4 % des postes n’exigent que la maîtrise du français.


Il est très difficile d’obtenir des données sur le nombre de fonctionnaires bénéficiant de cours linguistiques à temps plein puisque chaque ministère et agence compile les siennes.


À titre d’exemple, fin 2011, Travaux publics avait indiqué au Devoirqu’au moins 1300 de ses employés (la compilation n’était pas exhaustive, reconnaissait-on) étaient dans une telle situation, au coût de 2,5 millions. Il est impossible de connaître la répartition anglais-français.


C’est là où le bât blesse, selon Mme Pauzé. À son avis, ce sont surtout des anglophones qui bénéficient de ce traitement.


« Je ne suis vraiment pas sûre que ça existe dans les deux sens. Depuis que je suis élue, en 2015, je me rends compte que les deux langues officielles, comme le disait Gilles Duceppe, c’est l’anglais et la traduction. »


> Lire la suite sur Le Devoir.



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