La décision récente de la Cour supérieure du Québec qui s'oppose à la demande de parents d'exempter leurs enfants du programme Éthique et culture religieuse (ECR) ne fait que relancer une controverse qui perdure.
Depuis son implantation en septembre 2008, le programme ECR a soulevé une multitude de revendications presque exclusivement liées à son caractère religieux. Pour preuve, le jugement rendu par le juge Jean-Guy Dubois qui mentionne que «le tribunal ne voit pas comment le cours ECR brime la liberté de conscience et de religion des demandeurs pour les enfants, alors que l'on fait une présentation globale de diverses religions sans obliger les enfants à y adhérer». Il est déplorable de constater que ce débat en soit réduit à l'aspect strictement religieux de ce programme qui aurait dû être intégré au programme d'histoire et non d'éthique.
Qu'en est-il de l'éthique proprement dite? En effet, les multiples tollés suscités par le contenu lié à la culture religieuse ont relégué aux oubliettes le débat fondamental sur l'enseignement de l'éthique. Cela laisse sous-entendre que l'éthique présentée au sein de ce programme convient à tous et ne choque personne.
Un programme d'éthique doit offrir à chaque nouvelle génération de Québécois un référentiel commun de valeurs susceptibles de les guider dans leurs comportements tant individuels que collectifs. Mais comment fonder ces valeurs et les justifier? Là se situe le vrai débat. De telles valeurs, pour qu'elles constituent une éthique universelle, doivent être fondées sur une source commune. Ce n'est pas leur référence, tantôt empruntée aux livres sacrés des religions, tantôt à la Déclaration des droits de l'homme, tantôt aux chartes des droits et libertés, qui doit faire foi de tout. Le débat doit être recentré sur l'éthique.
Étant donné que le système québécois d'éducation est laïque, sur quoi doit-on faire reposer l'éthique que nous transmettrons à nos enfants et adolescents? Cette réflexion est devenue incontournable dans la conjoncture du peuple québécois. L'éthique ne peut pas être l'apanage de telles ou telles croyances religieuses. Elle ne peut pas se limiter davantage à la réalité culturelle de telle province, de tel pays ou de telle civilisation. Surtout, elle ne doit pas être un amalgame improvisé de valeurs, si bonnes soient-elles, sans fondement.
Les valeurs qu'une éthique laïque doit véhiculer doivent être fondées sur une caractéristique qui nous rejoint tous, celle de notre propre nature et de notre appartenance commune à l'espèce humaine. Ce débat doit faire éclore une conception naturelle, donc universelle, de l'être humain qui soit justifiée par les connaissances les plus à jour que nous possédons sur les exigences de bon développement et de bon fonctionnement de l'être humain dans ses rapports avec la réalité, l'environnement, la vie, lui-même, autrui, la société et l'humanité.
L'humain doit donc être au courant de toute éthique afin que chacun s'y reconnaisse. Si ce débat n'a pas lieu, il est alors inutile de croire que le programme ECR donnera aux futures générations les bases communes nécessaires à un «vivre-ensemble» harmonieux et pacifique.
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Christophe Navel, Étudiant au doctorat, faculté des sciences de l'éducation, Université Laval
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