Énergie Est: l'Ontario craint qu'il y ait plus de risques que de bénéfices

B65b69e32a150404d292e72b41315853

Un coup de masse sur les ambitions de Trans-Canada, de l'Alberta et du gouvernement Harper

La Commission de l'énergie de l'Ontario conclut que le projet d'oléoduc Énergie Est comporte plus de risques environnementaux et économiques que de bénéfices pour les Ontariens - et qu'il fera en plus grimper le prix du gaz naturel dans cette province.
Dans son rapport sur le projet de TransCanada rédigé à la suite de 15 mois de consultations publiques, la commission note que les Ontariens s'inquiètent particulièrement des impacts que pourrait avoir un déversement de pétrole sur les lacs, les rivières et l'eau potable. La commission recommande d'ailleurs que le tracé soit dévié pour s'éloigner de zones sensibles, et que TransCanada implique les résidents lors de la construction et de l'exploitation du projet.
«Nous ne pouvons pas déclarer que le projet respecte les normes techniques les plus élevées qui soient puisque le promoteur n'a pas encore déposé de demande complète», a précisé Rosemarie Leclair, présidente-directrice générale de la commission, en déposant le rapport, jeudi matin.
La société TransCanada souhaite acheminer 1,1 million de barils par jour de pétrole brut de l'Alberta jusqu'à des raffineries au Québec et au Nouveau-Brunswick, puis à un terminal portuaire de Saint-Jean, au Nouveau-Brunswick, pour exportation. De l'Alberta jusqu'à l'est de l'Ontario, TransCanada projette de convertir un gazoduc existant en oléoduc; pour le Québec et le Nouveau-Brunswick, la société albertaine construirait un nouvel oléoduc.
La commission affirme que les résidents de l'Ontario sont aussi préoccupés par l'impact que pourrait avoir le projet sur les réserves et le prix du gaz naturel dans cette province, lorsque le gazoduc existant sera converti en oléoduc, et que l'approvisionnement en gaz sera ainsi réduit.
Les experts de la commission ont estimé que sur une période de 20 ans, le prix du gaz naturel en hiver augmenterait en moyenne de 11,9% dans l'est de l'Ontario si Énergie Est allait de l'avant. Le distributeur Union Gas croit lui aussi que les prix augmenteront si le gazoduc est converti en oléoduc, et souhaite négocier avec TransCanada pour que les tarifs actuels soient protégés.
Du côté des avantages, la commission estime que le projet Énergie Est aura un impact économique de 12 à 19 milliards sur le PIB de l'Ontario, et créera jusqu'à 114 000 «emplois équivalents temps plein». Mais la commission rappelle que ce type d'estimations ne tient pas compte des coûts associés à ces projets - comme la préparation supplémentaire aux situations d'urgence.
TransCanada réplique qu'elle travaillera avec le gouvernement de l'Ontario pour «s'assurer que le projet respectera toutes les normes établies de sécurité et de protection de l'environnement, tout en offrant d'importants bénéfices économiques», a indiqué le porte-parole François Poirier.
Le rapport de la commission servira de base à la position du gouvernement de l'Ontario lors des audiences de l'Office national de l'énergie, prévues en 2016. Le ministre ontarien de l'Énergie, Bob Chiarelli, promet déjà de jouer un rôle très actif devant l'agence fédérale.
Les environnementalistes ont accueilli avec soulagement le rapport de la commission. «La participation citoyenne a clairement démontré que ce projet risqué n'est pas accepté par les riverains de l'oléoduc en Ontario», a indiqué Adam Scott, de l'organisme Environmental Defense. Même son de cloche chez Greenpeace: Keith Stewart parle d'un projet «à haut risque mais à bénéfices réduits, aussi bien pour l'Ontario que pour tout le pays».
Les Manufacturiers et Exportateurs du Canada ont indiqué que plusieurs regroupements ontariens appuient le projet, notamment la Chambre de commerce, la Fédération des municipalités du nord de l'Ontario et l'industrie de la construction.
Le premier ministre Philippe Couillard a prévenu cet été que le Québec devrait pouvoir bénéficier de retombées économiques du projet avant que son gouvernement n'accorde son feu vert. TransCanada avait déjà indiqué en avril qu'elle renonçait à son projet de terminal maritime et de réservoirs de stockage de pétrole au Québec, à proximité du port de Gros Cacouna - une zone fréquentée par des bélugas de l'estuaire du Saint-Laurent.


Laissez un commentaire



Aucun commentaire trouvé