Incompatible avec la lutte aux changements climatiques

Disons non au projet Énergie-Est

Retombées économiques illusoires

Tribune libre

Dans un texte d’opinion paru dans La Presse Plus du 11 juillet 2016, un collectif manifeste son appui au projet d’oléoduc Énergie Est. Ce collectif rassemble des chambres de commerce, un syndicat, des associations industrielles du domaine de la construction et du génie. Vouloir miser sur un grand projet pour créer de l’emploi, c’est légitime, mais encore faut-il choisir son grand projet!

Le texte publié conjugue constats d’ordre général, données hypothétiques, vœux pieux et mensonges.

Je suis d’accord avec les signataires sur certains points, notamment le fait qu’en 2030, 40 % de nos besoins énergétiques proviendront – hélas – encore des hydrocarbures. Mais justement, l’ensemble du Québec, et du Canada, doit travailler à réduire cette dépendance. La construction de l’oléoduc Énergie Est irait à l’encontre de cette volonté.
Comme l’ont montré de multiples études et mémoires, notamment ceux qui ont été présentés aux audiences du BAPE avorté, les retombées économiques d’Énergie Est sont illusoires, alors que les risques environnementaux sont énormes.

Mais les aspects les plus importants – et c’est là que j’appelle le collectif à prendre ses responsabilités – c’est que le projet Énergie Est est incompatible avec la lutte contre les changements climatiques, que la pétroéconomie est vouée à l’extinction à moyen terme, et qu’il est grand temps d’investir argent et savoir-faire dans la transition énergétique. Cette transition énergétique ne peut en aucune façon être soutenue par l’exploitation des hydrocarbures non conventionnels comme ceux tirés des sables bitumineux et du schiste.

Cessez de prétendre qu’Énergie Est permettrait d’« acheter local » : le pétrole qu’il transporterait (produit pas seulement en Alberta, mais aussi aux États-Unis) est destiné à 90 % à l’exportation, alors que les perspectives des marchés ne sont pas favorables à ce produit coûteux et polluant. Oui, nous avons encore besoin du pétrole pour un temps, mais les entreprises l’achèteront toujours au prix le plus bas du marché.

De plus, la construction d’Énergie Est favoriserait l’augmentation de la production de pétrole des sables bitumineux en amont, et en aval la consommation de pétrole, alors que les scientifiques appellent à une réduction de l’offre d’hydrocarbures.

Vous parlez de développement durable et d’acceptabilité sociale : les citoyens du Québec sont en majorité opposés à l’oléoduc et favorables aux énergies renouvelables.
Vous parlez de renforcement de l’expertise des travailleurs : à vous de les orienter vers l’économie de l’avenir, au lieu de les confiner à des filières sans lendemain.

C’est là votre responsabilité de chefs d’entreprises et de citoyens : au lieu de miser sur des promesses illusoires de contrats juteux à court terme, soyez visionnaires : l’avenir n’est pas dans les hydrocarbures fossiles.


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1 commentaire

  • Archives de Vigile Répondre

    14 juillet 2016

    Parmi les aspects les plus importants, Madame Campillo, il y a aussi la menace environnementale qui pèserait sur le Québec, sur son bassin hydrographique et les ressources halieutiques de l'Atlantique Nord-Ouest en cas de déversement majeur.
    On ne prévoit pas de retirer les structures du pipeline après leur vie utile, dans 40 ou 50 ans. C'est donc dire que la menace sera perpétuelle car même si le "boyau" ne sera plus en service, il contiendra toujours du pétrole résiduel, du Dilbit, avec tout son potentiel polluant. Il y a bon an mal an plus de 50 déversements pétroliers dans le réseau de pipeline actuel. Ce n'est donc qu'une question de temps avant qu'un désastre se produise.
    Nous n'avons pas le droit de prendre ce risque au nom de nos descendants. Comme le dit cette belle réflexion, ce pensez-y bien, nous ne sommes pas les propriétaires de la planète, nous n'en sommes que les fiduciaires qui devrons la remettre à nos enfants ... et autant que possible en bon état.
    D'autre part, accepter Énergie Est serait créer un précédent car personne ne peut nous assurer que les besoins d'exportation grandissant ne demanderont pas de nouveaux pipelines. Si nous cédons une première fois ...
    Si nous poussons un peu plus loin la projection et si nous laissons faire, les pétrolières de l'Alberta seront bientôt devenues pour le Canada une industrie « Too big to fail » qui compromettra sérieusement l'atteinte de nos engagements de la COP21 de Paris l'an dernier.
    Mis à part le profit immédiat de quelques-uns, tous les autres devront payer très cher cette folie. Non, ce n'est vraiment pas une bonne idée que ce pipeline.