Des pagodes vandalisées à Montréal

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S'agit-il d'une attaque islamiste contre des « idoles » ?


Défigurées, renversées, les statues qui trônent devant la pagode Chua Quan Am Montreal font mal à voir depuis quelques semaines. Et pour cause.




Les œuvres religieuses du temple bouddhiste de l’avenue de Courtrai, dans le quartier Côte-des-Neiges, à Montréal, ont été saccagées à deux reprises, le mois dernier, au grand dam de la communauté vietnamienne qui la fréquente.


Les vidéos de surveillance montrent qu’un suspect armé d’une masse est venu pour la première fois dans la nuit du 1er au 2 février pour endommager les statues. Et que la même scène s’est reproduite trois semaines plus tard, dans la nuit du 22 au 23 février.



Dans les deux cas, les moines n’ont rien entendu, raconte le responsable de l’entretien de la pagode, Anh Kiet le Van. Ils dormaient paisiblement dans un bâtiment voisin, dont la construction n’est pas encore terminée.



M. Kiet a d’abord cru qu’un voisin avait voulu se venger des nuisances causées par les travaux. Mais il a changé d’avis après avoir appris que d’autres pagodes vietnamiennes avaient été vandalisées elles aussi, dans l’arrondissement de Rosemont–La Petite-Patrie.


Deux autres incidents


À l’Association bouddhique Thuyen Ton, rue Alma, nous rencontrons la nonne bouddhiste Tran Dinh, qui nous explique avoir constaté les dégâts vendredi dernier. Là aussi, plusieurs statues ont été partiellement détruites devant l’établissement.


Tran Dinh ne sait pas pourquoi sa communauté religieuse est visée de la sorte. Je suis très triste, admet-elle, dans un anglais hésitant. Un peu fâchée, aussi.


Pourquoi ces gens s’en sont-ils pris à nos statues?, demande-t-elle.


Tran Dinh assise à une table devant un autel dédié au bouddha.

Tran Dinh est vice-présidente de l’Association bouddhique Thuyen Ton.


Photo : Radio-Canada / Ivanoh Demers




Troisième arrêt, rue Chambord, une scène similaire nous attend.


Les deux lions qui bordent l’entrée du centre socioculturel bouddhique Huyen Khong ont bien mauvaise mine, mais le temple est vide, ou presque, et personne n’est en mesure de nous expliquer ce qui s’est passé.


Les lions ne sont plus reconnaissables.

Le centre socioculturel bouddhique Huyen Khong n'a pas échappé à la vague de méfaits dont sont victimes les pagodes de Montréal depuis le mois dernier.


Photo : Radio-Canada / Ivanoh Demers




Bénévole au temple Chua Quan Am, Louis Le pense pour sa part que tous ces événements sont liés. La théorie la plus probable, en ce moment, je pense que c’est l’affaire avec le coronavirus; le monde associe ça aux Asiatiques, constate-t-il.


Ce jeune étudiant de 24 ans, qui est également réserviste dans l’armée canadienne, déplore qu’il y ait des choses qui se passent comme ça, en 2020 et que sa communauté soit victime de préjugés et d’injustices pour des raisons complètement stupides.


C’est pour cette raison qu’il a lancé un cri du cœur sur Facebook (Nouvelle fenêtre), lundi – une publication qui, mardi soir, avait déjà été partagée plus de 2800 fois sur le réseau social.


Louis Le avec les statues vandalisées.

Louis Le est un peu découragé. Les statues qui ont été saccagées avaient été importées du Vietnam. Elles coûteront cher à remplacer.


Photo : Radio-Canada / Ivanoh Demers




Ladite publication faisait aussi état d’un acte de vandalisme perpétré la fin de semaine dernière contre les deux statues de lion qui bordent l’entrée sud du Quartier chinois, sur le boulevard Saint-Laurent.



Les graffitis peints sur les sculptures avaient déjà été effacés par les travaux publics de l’arrondissement de Ville-Marie, mardi midi. Mais ils n’ont pas échappé à l'œil attentif des commerçants du quartier.


Moi je trouve que c’est un peu comme du racisme, estime Janne Nguyen, du comptoir Hoang Oanh Sandwich.


Ce sont des monuments symboliques; ça n’a aucun rapport avec le coronavirus!, s’exclame-t-elle.


Le SPVM enquête


Le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) confirme avoir reçu des plaintes concernant certains de ces méfaits.


Étant donné qu’il s’agit de gestes commis envers des signes religieux, ils sont traités comme des crimes haineux, a indiqué une porte-parole dans un courriel transmis à Radio-Canada.


Le SPVM ne se prononce toutefois pas sur les motifs qui auraient pu inciter le ou les malfaiteurs à s’en prendre aux statues des pagodes et du Quartier chinois. C’est l’enquête qui permettra de démontrer les motivations derrière ces actes, se limite-t-il à dire.


Anh Kiet le Van et Louis Le espèrent que la police prendra l’affaire au sérieux. Persuadés que les actes de vandalisme perpétrés à la pagode Chua Quan Am sont l’œuvre d’un seul et même homme, ils craignent notamment pour la sécurité des moines et des fidèles, qui sont nombreux à se rendre au temple la fin de semaine.




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