Des enquêteurs de la SQ ont «déshonoré» leur profession

La journaliste d’enquête Marie-Maude Denis a dénoncé les méthodes de la SQ

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Bavure policière






Des enquêteurs de la Sûreté du Québec ont «déshonoré» leur profession en espionnant six journalistes et en utilisant des ragots mensongers pour obtenir des registres téléphoniques, a dénoncé jeudi la journaliste Marie-Maude Denis.




«Le message est très clair, en particulier aux policiers: ne parlez jamais à un journaliste, parce que ça peut juste vous mettre dans le trouble [...] et encore moins à une journaliste femme, car vous devrez nier avoir eu une relation», a tonné la journaliste d’enquête de Radio-Canada, devant la commission Chamberland sur la protection des sources journalistiques.




Plus tôt cette semaine, l’inspecteur Denis Morin avait dû nier avoir eu une «relation intime» avec la journaliste, comme des confrères l’avaient indiqué dans un affidavit remis sous serment à une juge de paix pour obtenir une autorisation judiciaire. La SQ le soupçonnait d’être une source confidentielle de Marie-Maude Denis.




«C’est terrible pour les journalistes, c’est terrible pour le message que ça envoie aux sources en général, c’est terrible pour les femmes qui essaient de juste faire honnêtement leur travail. Mais je trouve ça terrible aussi pour les policiers qui se font salir par ce genre de situation», a-t-elle raconté.




La SQ avait obtenu en 2013 les registres de six journalistes, dont son conjoint Éric Thibault, du Journal, lors d’une enquête sur les fuites dans les médias au sujet de l’écoute électronique de l’ex-président de la FTQ, Michel Arsenault.




« Extrêmement intrusif »




«C’est extrêmement intrusif [...] Après 20 minutes j’ai arrêté [de lire les registres téléphoniques], j’étais trop dégoûtée, les policiers ont toute ma vie pendant cinq ans», a déploré Marie-Maude Denis.




Dans son cas, les policiers avaient aussi réclamé et obtenu la localisation des tours cellulaires, en plus de cinq ans de numéros d’appels entrants et sortants.




Elle a aussi d’abord cru à une blague quand elle a su ce qui avait été écrit dans un affidavit par un enquêteur.




«Il n’y a pas le début du commencement d’une once de vérité», a-t-elle dit, soulignant que la personne à l’origine des ragots, dont l’identité n’est pas dévoilée, ne la connaît ni de près ni de loin.




«Ça ébranle vraiment ma confiance envers le travail qu’on peut faire dans la police», a-t-elle poursuivi, jetant une ombre sur ceux qui travaillent sérieusement et honnêtement au sein des forces policières.




Enquêtes trop lentes




Cette semaine, les enquêteurs de la SQ avaient avancé que les reportages publiés par les médias nuisaient à leurs enquêtes dans le projet Diligence, sur l’infiltration du crime organisé dans l’économie légale.




«C’est commode de nous blâmer pour une enquête qui a possiblement déraillé pour d’autres raisons», a dit Mme Denis, ajoutant que les journalistes ne peuvent pas tenir compte de l’emploi du temps de la police.




«[Les enquêtes] ça prend des années et des années [...] On ne peut pas attendre que tout le monde ait été honoré par la Chambre de commerce et vive sa retraite de façon honorable», a-t-elle déploré.




Le journalisme d’enquête est «fondamental» dans une démocratie en santé, selon elle, et doit être présent pour «contrecarrer les tentatives d’embellir la vérité».




 



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