Dans 20 ans, une bonne part de votre « viande » ne sera plus animale, selon un rapport

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Le lent déclin de la viande


La majeure partie de la « viande » que nous mangerons en 2040 ne proviendra plus des animaux d’élevage, selon le rapport d’une firme de consultants internationale qui s’est penchée sur les changements dans l’industrie.




Dans 20 ans, 60 % de l’offre de « viande » sera en fait constituée de produits de remplacement de la viande classique, comme les nouveaux substituts fabriqués à partir de plantes et la viande cultivée in vitro, prévoit la firme AT Kearney (Nouvelle fenêtre), basée aux États-Unis.


Cette nouvelle offre, qui est toujours en développement à l’heure actuelle, chamboulera l’industrie agroalimentaire, estime-t-on.


La chaîne de production de la viande à l’échelle planétaire représente aujourd’hui 1900 milliards de dollars américains, souligne la firme.



Mais cette chaîne n’est pas durable, notamment en raison de son impact sur les changements climatiques et de la surutilisation des terres et de l'eau, note-t-on. Sans compter que la population mondiale augmentera, passant de 7,7 milliards aujourd’hui à 9,1 milliards en 2040.


De plus, l’utilisation massive d’antibiotiques chez les animaux d’élevage contribue à la résistance des microbes pathogènes, ce qui représente une menace importante pour la santé mondiale.


« Nous pourrions nourrir deux fois plus d’êtres humains avec les plantes que nous cultivons aujourd’hui si nous les consommions directement au lieu d’alimenter les animaux d’élevage », peut-on lire dans le document.


La firme note aussi que de plus en plus de gens s’opposent à l’élevage et à l’abattage industriels. Parallèlement, les consommateurs sont de plus en plus nombreux à opter pour une alimentation à base de plantes en totalité ou en partie, ce qui représente un immense marché, juge la firme qui s’est fondée dans son analyse sur les statistiques mondiales, des entrevues avec des experts de l’industrie et des sondages dans différents pays.


De la nouveauté dans l’assiette


Néanmoins, selon le rapport, le marché des produits végétariens classiques faits de tofu ou de seitan, par exemple, a atteint son point de saturation. Leur goût, leur texture et leur apparence sont trop éloignés de la viande pour aller gruger des parts de marché chez les consommateurs de viande « traditionnels ».


Du côté des produits à base d’insectes (grillons, vers), la croissance prévue est plutôt limitée dans les pays occidentaux, où le manque d’acceptabilité est toujours un frein. Il s’agit d’un marché de niche, selon le rapport.


C’est du côté des « nouveaux produits de remplacement » et de la viande créée in vitro que la croissance prévue est grande, estime la firme, d’autant que leur empreinte écologique est proche de celle des produits classiques végétariens, écrit-elle.


Des compagnies comme Beyond Meat, Impossible Foods ou Just Foods offrent déjà depuis quelques années des substituts à base de plantes (galettes à burgers, saucisses, œufs brouillés, etc.), dont le processus de production est hautement sophistiqué, et qui se rapprochent davantage de la viande en matière de texture et de goût.


Du côté de la viande synthétique (qui nécessite au départ des cellules animales qui se multiplient dans un bioréacteur), les experts de l’industrie croient que la production de masse commencera véritablement en 2021. Mais les coûts demeureront élevés tant et aussi longtemps que les procédés ne seront pas plus perfectionnés.


Cette viande synthétique dominera le marché à long terme, car c’est elle qui se rapproche le plus de la viande animale au chapitre du goût et de la texture, selon AT Kearney.


Pour les « carnivores passionnés », la viande de synthèse veut dire qu’ils pourront continuer à manger ce qu’ils aiment sans les coûts environnementaux et éthiques qui y sont associés, selon la firme.


Les prédictions sont qu’en 2040, 35 % du marché sera dominé par la viande de synthèse et 25 % sera constitué des produits de remplacement végétaux. Les 40 % qui restent seront la viande des animaux d'élevage.



Optimiser les ressources


Près de la moitié des cultures agricoles servent en ce moment à nourrir des bêtes.


Lorsqu’on convertit les plantes en viande animale, seulement 15 % de l’apport calorique initial des plantes sert aux humains. À l’opposé, la viande synthétique et les produits végétariens permettent de conserver environ les trois quarts de l’apport calorique des plantes, selon le rapport.


Ces derniers produits ont aussi une plus grande durée de vie sur les tablettes et requièrent moins de réfrigération lors du transport, puisqu’ils ne comportent pas de bactéries comme la salmonelle ou E. coli. De plus, ils n’entraînent pas de risque d’épidémies, par exemple la maladie de la vache folle ou la grippe aviaire.


Un marché en développement


Pour ce qui est de la viande synthétique, la cible réaliste est de 10 % du marché d’ici 10 ans, juge quant à lui Sylvain Charlebois, professeur en distribution et en politiques agroalimentaires de l'Université Dalhousie, en Nouvelle-Écosse.


« Le marché sera en croissance, mais il n’en demeure pas moins que nous sommes des humains, des bêtes d’habitudes et de traditions. La technologie en laboratoire s’est développée de façon spectaculaire depuis quelques années. Le coût pour "fabriquer" un morceau de 150 grammes est à peine 5 $ US maintenant. Alors les marges sont déjà intéressantes », écrit-il par courriel.


« Développer un cadre alimentaire pour ce genre de produits est moins simple, mais nous estimons que les Américains risquent d’y arriver d’ici deux ans. Le Canada pourrait suivre, éventuellement. Alors les choses changent assez rapidement », remarque-t-il.


Avec The Guardian et The Independent




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