Comprendre le saccage de l’industrie navale québécoise

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« En affaiblissant l’industrie québécoise et en la privant de son expertise, le gouvernement d’Ottawa s’assure ainsi d’anéantir le rapport de force de l’État québécois dans la fédération. »

Chantier Davie est le plus imposant chantier maritime au Canada. À lui seul, il représente près de 50 % de la capacité de production navale canadienne. En 2015, il a remporté le titre de «chantier naval nord-américain de l’année», battant au passage les plus prestigieux et performants chantiers maritimes américains. Pôle majeur de l’industrie maritime québécoise, il garantit des milliers d’emplois qualifiés et spécialisés.


Les retombés économiques directes et indirectes découlant des opérations du chantier de Lévis profitent à tout le Québec. Pour tous les États du monde, un tel complexe industriel constitue une infrastructure nationale hautement stratégique.


Le problème est que Chantier Davie et tout le secteur industriel maritime québécois sont menacés de fermeture à moyen terme.


La stratégie fédérale de construction navale du Canada consiste essentiellement à renouveler la flotte de guerre vieillissante. Le coût de ce projet d’acquisition du gouvernement canadien est actuellement estimé à plus de 100 milliards $ sur les 30 prochaines années.


N’oubliez pas que 23 % de cette somme proviendra des impôts québécois. À l’heure actuelle, l’industrie navale québécoise reçoit à peine 1 % des contrats.


Il va sans dire qu’un projet impliquant un renouvellement presque total de la flottefédérale doit s’opérer rapidement et efficacement. Les dépassements de coûts importants et l’inflation impliquent des conséquences négatives pour les contribuables, tout en affectant gravement la capacité opérationnelle de la Marine et de la Garde côtière canadienne.


Lorsqu’il s’agit de contrats sensibles liés à la défense nationale, les gouvernements veillent habituellement à privilégier leurs industries nationales. En écartant 50 % de la capacité de production navale du Canada, le gouvernement du Canada nuit aux besoins opérationnels militaires de la Marine et de la Garde côtière, cause du tort aux finances publiques canadiennes et asphyxie l’industrie navale québécoise.


Il est évident que les contrats devraient être octroyés en tenant compte de la capacité de production et des retards importants de livraison des chantiers maritimes Seaspan et Irving, qui ont reçu à eux-seuls plus de 75 milliards $. Ce n’est pas le cas en ce moment. Chantier Davie semble être victime d’une discrimination politique visant à le pousser à la famine et éventuellement à la faillite. C’est environ 1 % des 100 milliards $ de contrats fédéraux que touchera la Davie au profit du monopole exercé par les deux autres chantiers de Vancouver et Halifax. Ces derniers croulent sous les contrats fédéraux et n’ont toujours livré aucun navire après un délai de production de 8 ans alors que les coûts estimés de production ne cessent d’augmenter.


Le seul navire livré dans les délais est le navire ravitailleur Astérix, construit par Chantier Davie en seulement 24 mois. C’est le plus grand navire militaire jamais livré à la Marine depuis les 20 dernières années et il a été livré au quart du prix des navires qui doivent être construits par les chantiers maritimes Seaspan et Irving. L’excellence du navire ravitailleur Asterix a été reconnue par tous nos partenaires au sein de l’OTAN.


Chantier Davie possède l’expertise et la capacité de production; son historique de livraison récent frôle l’excellence. Près du quart de la facture relative à la construction et l’entretien des navires de la Marine et de la Garde côtière canadienne est pris en charge par les contribuables québécois. Le seul défaut dont souffre Chantier Davie est d’être situé au Québec. Tant sous le règne des Conservateurs que des Libéraux de Justin Trudeau, Chantier Davie est victime d’une stratégie nationale de sabotage.


En affaiblissant l’industrie québécoise et en la privant de son expertise, le gouvernement d’Ottawa s’assure ainsi d’anéantir le rapport de force de l’État québécois dans la fédération. Cela se fait même au détriment de la Marine, de la Garde côtière et des contribuables canadiens. Lorsque les États-Unis, la France, la Suède ou toute autre nation du monde renouvelle sa flotte militaire, ces États souverains s’assurent defavoriser leurs industries nationales d’abord et avant tout.


Un Québec indépendant devra construire et déployer sa propre flotte. Il assurerait ainsi 30 ans de plein-emploi pour ses chantiers maritimes en fonction de ses choix et orientations en matière de défense et de politique internationale. Déjà aujourd’hui, nous consacrons 20 milliards $ pour une Marine et une Garde côtière gérées par d’autres et construites ailleurs. Payer 20 milliards pour créer du chômage chez nous, détruire nos industries et favoriser la concurrence, c’est cher payé.


C’est l’un des prix à payer pour demeurer inféodé à la Fédération canadienne.