CHUM: plus qu'une question de site...

CHUM



Plusieurs, dont même Jean-Robert Sansfaçon à en lire son éditorial du 28 août dernier, auront été surpris de l'intervention de la FMSQ dans le dossier du nouveau CHUM. De notre côté, nous ne l'avons pas été de la première réaction de la plupart des observateurs qui, encore une fois, résument tout à une simple querelle de site, comme c'est le cas depuis plus de dix ans. Pas surprenant quand on sait que, depuis le début, l'essentiel de ce dossier a été maintenu dans un quasi-secret d'état, laissant ainsi en pâture à l'opinion publique l'insipide et inutile querelle de site.
Pourtant, ce n'est pas d'un site qu'il s'agit, mais bien de la population québécoise francophone elle-même. De l'accès pour celle-ci à des soins de la première à la quatrième ligne. Des soins, dont il faut s'assurer tant en terme de qualité que de disponibilité en tout temps pour la population. Et pour prendre les décisions éclairées, c'est plus simple en se basant sur les mêmes critères que tout le monde sur la planète considère dans ce genre de dossier.
Cinq éléments fondamentaux guident cette décision: la taille de l'établissement; la capacité d'attraction et de rétention du personnel; l'accessibilité physique de l'établissement; l'intégration à l'université en termes d'enseignement; la pérennité de l'institution. À cela s'ajoute, le cas échéant, une problématique de transition, particulièrement si le projet implique de substantielles rénovations, comme c'est malheureusement le cas ici.
La taille de l'établissement
Question de nombre de lits, mais aussi de plateau technique (nombre de salles d'opération, d'endoscopie, d'hémodynamie d'imagerie médicale...) Question également de volume de visites offertes en cliniques externes et de quantité de soins offerts en mode ambulatoire. Assurer la mission d'enseignement de l'institution, et ce, dans toutes les sphères de la médecine, pour la totalité du continuum de celles-ci, et des sciences connexes. On prévoit faire passer le nombre de salles d'opération de 45 à 30. Il a même été envisagé début juillet 2008 de n'en construire que 28!
Le personnel
Voilà qui est tout aussi important que tout ce qui concerne la pratique médicale à proprement parler. Partout, au Canada ou ailleurs, recruter et retenir le personnel constitue un défi colossal. Partout, la solution passe par un environnement de travail optimal. Partout, on tente de faciliter la vie quotidienne du personnel notamment en agissant sur ces moments obligés qui alourdissent une journée de travail déjà bien remplie. Prenons, un petit exemple concernant le stationnement: 1500 espaces de stationnement sont prévus au plan. Prioritairement pour le public. Or, il en faudrait au moins deux fois plus.
L'accessibilité
Par définition, par sa nature, le CHUM recevra des patients venant d'un immense territoire. Ceux qui ont eu la malchance d'être malade nous disent toujours que le plus désagréable est le trajet pour se rendre à l'hôpital. Retourner à Saint-Jérôme après une journée de chimiothérapie, c'est fatigant.
L'intégration à l'université
Les États-Unis et l'Europe ont depuis longtemps pris le virage multiprofessionnel en médecine. Or, il nous semble grossièrement évident que pour n'importe quel observateur, la conjugaison sur un même site de la source de la connaissance et de l'application de celle-ci (d'un maximum de facultés liées à la santé) et de son hôpital universitaire apporte une inestimable valeur ajoutée. Que si la médecine est multiprofessionnelle, il faudrait peut-être l'enseigner ainsi.
La pérennité
Tout édifice a, par définition, une durée de vie finie. Arrivera inévitablement le jour où il faudra soit agrandir, soit reconstruire à neuf. Mais un hôpital universitaire n'est ni une maison ni une usine, en ce qu'il est intimement lié à son pendant purement académique ou de recherche. Qui plus est, si l'on accepte la plus-value de l'intégration, il faut tenter d'éviter à long terme de l'extirper de ses liens intriqués avec, par exemple, l'université et toutes les activités de recherche qui y sont rattachées. En clair, une telle institution devrait disposer au départ de terrains lui permettant d'évoluer en ce sens au fil du temps. Le projet actuel du nouveau CHUM ne mentionne même pas cet aspect.
La transition
La capacité finale du CHUM serait, dans au moins un secteur, diminuée par rapport à sa capacité actuelle. Or, nous apprenions début juillet qu'à cause des substantielles rénovations prévues au plan, l'administration sortante du CHUM avait demandé à ses médecins de prévoir une réduction d'activités de 20 à 30 % durant les cinq années de construction. Malheureusement, en plus de cette réduction, aucun plan n'existe à ce jour pour s'engager dans cette période de transition.
[...]
Ce à quoi nous et le public nous attendons n'est pas un autre commentaire sur le site, mais plutôt que la classe politique s'avance, bien au-dessus de la mêlée, et annonce ceci: Mesdames et Messieurs, parce que toute institution hospitalière universitaire, que ce soit à Montréal ou ailleurs, doit satisfaire entièrement aux paramètres A, B, C, D, E, F, qui eux sont reconnus dans tout le monde occidental, nous convenons de revoir rapidement le dossier du nouveau CHUM au bénéfice de la population.
Nous pensons que, peu importe le site, les patients et le personnel du futur CHUM méritent une institution de calibre mondial. Et vous?
***
Gaétan Barrette, Médecin et président de la Fédération des médecins spécialistes du Québec


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