Des centaines de milliers de Vénézuéliens et plus d'une trentaine de chefs d'État et de gouvernement s'apprêtent à assister vendredi aux funérailles nationales du défunt président Hugo Chavez qui sera embaumé «comme Lénine».
Par AFP Pierre AUSSEILL
CARACAS - Des milliers de Vénézuéliens vêtus de rouge affluaient vendredi vers l'esplanade de l'Académie militaire de Caracas pour assister aux funérailles d'État du leader de la gauche radicale sud-américaine Hugo Chavez, en présence d'une trentaine de chefs d'État étrangers.
Le défunt président Chavez, dont la dépouille exposée dans un cercueil à demi-ouvert a été vénérée par deux millions de partisans depuis mercredi selon les autorités, sera ensuite embaumé «comme Lénine» et son corps exposé au public au moins sept jours de plus.
Certains ont passé toute la nuit sur l'immense esplanade militaire jouxtant le bâtiment, dormant sur des cartons, des journaux.
D'autres continuaient de faire inlassablement la queue à l'entrée de l'Académie, pour s'incliner devant la dépouille du charismatique dirigeant bolivarien, décédé mardi à Caracas d'un cancer, après 14 ans de pouvoir qui ont marqué le Venezuela d'une empreinte profonde.
L'esplanade était jonchée de détritus abandonnés par les «pèlerins» chavistes.
Gianelly Rangel, drapeau vénézuélien sur les épaules, explique qu'elle fait la queue depuis plus de 24 heures avec ses deux filles et sa soeur pour saluer son héros, «le grand homme du XXIe siècle.
«Je suis très fière de voir tous les chefs d'État»; Chavez «doit aller au Panthéon, il le mérite», déclare-t-elle.
Plus de 30 chefs d'État et de gouvernement doivent participer à la cérémonie qui doit débuter à 11 h (10 h 30, heure de Montréal).
Presque tous les présidents latino-américains ont fait le déplacement, les alliés de l'axe socialiste, comme le Cubain Raul Castro ou le Bolivien Evo Morales, les amis, comme la Brésilienne Dilma Rousseff et son prédécesseur Lula, mais aussi des présidents de droite, comme le Colombien Juan Manuel Santos.
Les présidents de deux pays mis au ban par une grande partie de la communauté internationale, mais qui ont été soutenus par Hugo Chavez, l'Iranien Mahmoud Ahmadinejad et le Bélarusse Alexandre Loukachenko, feront une apparition remarquée en l'honneur du leader «anti-impérialiste», qui avait également tissé des liens diplomatiques avec la Syrie de Bachar al-Assad et la Libye à l'époque de Mouammar Kadhafi.
Les États-Unis, cibles de prédilection des diatribes enflammées d'Hugo Chavez, et les Européens, n'ont envoyé que des délégations de second rang. À l'exception de l'Espagne, qui, protocole oblige, a dépêché le prince héritier Felipe.
Dans la soirée, l'ancien vice-président Nicolas Maduro, désigné par M. Chavez comme son dauphin, prêtera serment comme président par intérim.
Il «convoquera des élections en temps voulu, dans les 30 jours à venir, en accord avec la Constitution», a annoncé le président de l'Assemblée nationale, Diosdado Cabello.
M. Maduro a fait sensation jeudi en annonçant que le leader sud-américain serait «embaumé» comme les grands révolutionnaires du XXe siècle, Lénine, Hô Chi Minh et Mao Zedong et que son corps serait «visible au moins sept jours de plus».
«Pour l'éternité»
«Nous voulons que puissent le voir tous ceux qui le veulent», a-t-il expliqué.
«Il a été décidé de préparer le corps du comandante, de l'embaumer, pour qu'il puisse être exposé dans un cercueil en verre, et que le peuple puisse l'avoir avec lui dans son musée de la Révolution pour l'éternité», a précisé M. Maduro.
Les autorités vénézuéliennes ont toutefois livré des informations contradictoires sur le moment où la dépouille de M. Chavez serait transférée à «la caserne de la Montagne», à l'ouest de Caracas, où un Musée de la Révolution bolivarienne est en construction.
M. Maduro a d'abord indiqué que ce transfert aurait lieu vendredi, après les funérailles d'État.
Mais le ministre des Sciences et Technologies et beau-fils de Chavez, Jorge Arreaza, a indiqué plus tard que la dépouille de l'ancien président resterait exposée pendant «au mois sept jours à l'Académie militaire».
Jeudi soir, sitôt arrivés à Caracas, le président cubain Raul Castro, la présidente brésilienne Dilma Rousseff, son prédécesseur Luiz Inacio Lula de Silva et le président équatorien Rafael Correa se sont recueillis devant la dépouille de Hugo Chavez.
Hugo Chavez était considéré comme le principal allié politique et économique de Cuba et se présentait souvent comme le fils spirituel du père de la Révolution cubaine, Fidel Castro.
Le président iranien Mahmoud Ahmadinejad, arrivé tôt vendredi à Caracas, a exprimé ses condoléances «les plus profondes au peuple vénézuélien et à tous les peuples du monde, en particulier latino-américains» ajoutant que «le président Chavez a été le symbole de tous ceux qui cherchent la justice, l'amour et la paix dans le monde». Hugo Chavez était le principal allié de Téhéran en Amérique latine.
L'annonce de la mort du chef de file de la gauche latino-américaine a provoqué une véritable onde de choc au Venezuela et ouvre une période d'incertitude.
L'opposition fait pour le moment profil bas. Mais le massif et ultime déferlement d'idolâtrie chaviste ne fait pas l'unanimité.
«La seule chose que Chavez a faite a été de répandre la haine et la division. Ils veulent faire de lui un martyr. Cela me fait rire», grognait José Mendez, un programmateur informatique de 28 ans.
En 14 ans au pouvoir, Hugo Chavez a ravivé la flamme de la gauche latino-américaine «anti-impérialiste» sur le continent latino-américain.
Au Venezuela, il a forgé sa popularité dans les couches défavorisées avec des programmes sociaux financés par une manne pétrolière infinie, et grâce à son charisme exubérant.
Mais il a aussi fortement creusé les clivages de la société vénézuélienne, sans parvenir à endiguer les pénuries et une violence urbaine croissante.
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