Charest ne veut pas aller en commission parlementaire

Que craint donc Jean Charest?


M. Charest estime que la mise sous surveillance de la CDP, formulée dans un communiqué publié jeudi par l'agence Standard & Poor's, s'adresse davantage au Parti québécois qu'au gouvernement. La Presse Canadienne

Denis Lessard - (Lévis) Le premier ministre Jean Charest n'a pas l'intention d'aller témoigner à une éventuelle commission parlementaire chargée de mettre en lumière les causes du dérapage financier de 40 milliards de dollars à la Caisse de dépôt en 2008.
Le dur verdict de la firme américaine Standards and Poor's, qui mettait jeudi «sous surveillance» la cote de la caisse, est pour lui un «message percutant» au Parti québécois qui veut politiser le débat en le convoquant à une commission parlementaire. «Je réponds à vos questions, on répond aux questions à l'Assemblée (nationale)», a-t-il dit dans un bref point de presse, tout juste avant d'entrer à la réunion de son caucus près de Québec. Hier, la firme de crédit Standard and Poor's plaçait «sous surveillance» avec «perspectives négatives» la cote de crédit de la CDP à cause de rendements «nettement inférieurs» a ceux réalisés par les autres fonds de retraite au pays.

André-Philippe Côté, Le Soleil 28 février 2009
La firme de notation torontoise a précisé qu'au terme de la période de surveillance de trois mois, elle va «vraisemblablement» maintenir la cote à long terme AAA de la Caisse - le niveau le plus élevé - tout en lui accolant une perspective négative ou encore la réduire d'un échelon. Le dur verdict a été fait après l'annonce, mercredi, d'un rendement négatif de 25,6 pour cent pour l'année 2008, des pertes de 39,8 milliards de dollars, soit une performance «nettement pire» que celle des autres grandes caisses de retraite canadiennes qui ont jusqu'ici divulgué leurs résultats.
La firme américaine relève que Caisse de dépôt souffre d'un manque de stabilité et de leadership au sein de sa haute direction à un moment où elle en aurait bien besoin. Le prochain PDG sera le troisième en douze mois, après le départ d'Henri-Paul Rousseau en mai 2008, son remplacement par Richard Guay en septembre, lui-même remplacé par le vice-président Fernand Perreault, par intérim, depuis novembre. Pour Nicola Swann, analyste chez S&P, «il pourrait y avoir un débat au sein de la classe politique quant à la possibilité qu'il y ait des changements plus fondamentaux sur les liens entre la Caisse et le gouvernement du Québec, ce qui pourrait réduire le niveau d'indépendance dans le choix des décisions d'investissement». Pour lui, quand la décision sera rendue, dans trois mois, les options les plus probables sont que la cote AAA soit réaffirmée, mais taxée d'une «perspective négative», ou qu'elle soit réduite d'un cran.
Mais pour Jean Charest, le message de la firme américaine est avant tout «un message percutant au Parti québécois, sur la politisation à outrance du dossier de la Caisse. C'est une question importante qui doit être traitée avec plus de respect qu'en montre le PQ actuellement», dit M. Charest. Pour lui, les gestionnaires de la CDP doivent venir s'expliquer. Cette commission serait un moment important pour l'avenir de la CDP, selon lui.
Quand on lui demande pourquoi il ne veut pas y témoigner - le PQ réclame que le premier ministre et sa ministre des Finances soient entendus à la commission parlementaire - M. Charest repousse l'argument. «On répond aux questions, je réponds à vos question tous les jours, quand on est avec vous...à l'Assemblée (nationale), ce n'est pas ça l'enjeu», a-t-il dit.
Pour lui, «la partie qui concerne le gouvernement» c'est le conseil d'administration, le choix du président directeur général. Or, la firme américaine relève justement le manque de stabilité à la barre de l'organisme, conséquence du mauvais choix du gouvernement en septembre - un PDG qui a croulé sous la pression au bout de trois mois seulement. Commentant les résultats désastreux mercredi, Mme Jérome-Forget avait soutenu que le choix de M. Guay était en fait celui d'Henri-Paul Rousseau, qui avait fait une campagne assidue pour que son lieutenant soit retenu pour le remplacer.
Pour le ministre Raymond Bachand, responsable du Développement économique, ce qui inquiète S&P avant tout «c'est la partisannerie politique». Pour lui, c'est aux dirigeants de la CDP et à l'ancien patron, Henri-Paul Rousseau, de venir s'expliquer rapidement, dès la semaine prochaine. Ce n'est qu'après la tenue de la commission que le gouvernement pourra nommer une nouvelle direction, a-t-il laissé entendre.
Standard and Poor's souligne aussi qu'elle continue de considérer la Caisse dans une situation financière «solide» quant à sa capacité de faire face à ses obligations, insistait-on hier dans l'entourage du premier ministre Charest.
À l'entrée du caucus libéral, tous les ministres avaient la même réaction, interprétant le verdict des Américains comme une mise en garde au PQ.
«Évitons de politiser la Caisse, c'est ce que nous dit Standards and Poor's», soutenait Line Beauchamp, titulaire de l'Environnement, par exemple. «Que le PQ se le tienne pour dit, il n'est pas question de politiser la Caisse», a ajouté la vice-première ministre Nathalie Normandeau. Même si la firme américaine demande qu'on mette fin rapidement à l'incertitude à la barre de la Caisse, Mme Normandeau a répété hier que l'on allait procéder à la nomination du PDG de la Caisse «dans un délai de six mois maximum», un délai qui a fait sourciller l'entourage du premier ministre Charest, hier.


Laissez un commentaire



Aucun commentaire trouvé