Le métier politique est noble mais ingrat et il perd toute sa grandeur s'il n'est pas exercé d'abord dans l'intérêt public. C'est pour cela que Jean Charest n'est plus apte à diriger notre état national. Maintenant presque tout le monde le sait.
Même en 2003, il ne suscitait pas l'enthousiasme. Le P.Q. était encore à 53% de satisfaction populaire et il fut battu essentiellement en raison des fusions municipales, pourtant indispensables, mais qui lui ont coûté vingt-cinq circonscriptions. Charest a fait preuve, il est vrai, d'une certaine habilité, même mensongère dans un débat qui a contribué à son élection. Nouvelle chance en 2007. Le P.Q. s'effondre dans la catastrophe Boisclair, cruelle en particulier pour cet homme qui n'a pu survivre politiquement à une consommation de cocaïne alors qu'il était membre du conseil des ministres. Dans aucun pays il n'aurait pu s'en tirer. Charest en profita.
À l'élection suivante, le P.Q. remonte de façon spectaculaire, mais la division du vote francophone, cadeau de l'A.D.Q. et de Q.S. sauve encore Charest, qui entre-temps n'avait rien fait qui puisse vraiment faire avancer le Québec. Au contraire, une série de bourdes marquait déjà son régime. À commencer par la défusion, sur des bases ethno-linguistique d'une ile de Montréal que Lucien Bouchard avait eu le courage d'unifier comme tous ses maires le demandaient depuis Jean Drapeau, et que Jean Charest déconstruisit bêtement. Voilà une monstruosité historique que les Montréalais et les Québécois paieront cher et pour longtemps.
Puis se succèdent une série de tragi-comédies menant nulle part. Du Mont Orford aux écoles juives subventionnées à 100%, jusqu'au calendrier scolaire inutilement modifié. Enfin le rétablissement des écoles passerelles, abolies par le P.Q., mais en faisant payer plus cher le droit déshonorant d'échapper à la fondamentale Loi 101.
Et ces odeurs de scandales qui touchent même les garderies dont nous étions si fiers. Quant au secteur vital de la construction, il est devenu si suspect que presque toute la population veut le faire scruter par une enquête publique. Comme Jean Charest la refuse obstinément, la sagesse populaire en conclut justement qu'elle est nécessaire.
Un budget vient ensuite, malgré certains bons aspects, enrager les gens peu fortunés en particulier, qui devront payer une contribution santé égale à celle des millionnaires. Déjà depuis ce jour, le Premier ministre était le moins estimé de toute l'histoire du Québec. Duplessis avait d'énormes défauts mais jamais il n'a atteint le niveau d'insatisfaction de Jean Charest.
À cette triste situation, il manquait le bouquet et Charest nous l'a offert: la commission Bastarache. Après avoir intenté une poursuite personnelle privée devant la Cour supérieure qui l'aurait jugée de façon neutre, notre Premier ministre invente une commission spectacle dont il nomme lui-même le juge. Déjà dans l'abîme, Charest s'enfonce encore, et son ancien ministre accusateur est beaucoup plus cru que lui.
Quand on a conduit le parti de Jean Lesage et de Robert Bourassa à la presque marginalité, on ne peut continuer à diriger efficacement notre gouvernement national.
Bernard Landry
L'opinion de Bernard Landry #83
Charest foit partir
Quand on a conduit le parti de Jean Lesage et de Robert Bourassa à la presque marginalité, on ne peut continuer à diriger efficacement notre gouvernement national.
Enquête publique - un PM complice?
Bernard Landry116 articles
Ancien premier ministre du Québec, professeur à l'UQAM et professeur associé à l'École polytechnique
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