Les Montréalais ne pourront pas savoir pourquoi le Centre de prévention de la radicalisation a été placé sous «administration provisoire» à la mi-mars. Montréal a lourdement caviardé le rapport du contrôleur général qui a enquêté sur l'utilisation des fonds publics.
À la mi-mars, la Ville de Montréal mettait fin au mandat du directeur général Herman Deparice-Okomba au Centre. La majorité des membres du conseil d'administration ont également démissionné à la suite du dépôt d'un rapport du contrôleur général.
La Presse a demandé copie du document en vertu de la Loi sur l'accès à l'information, mais plus des deux tiers ont été caviardés. En effet, sur 47 pages, 33 sont entièrement couvertes de ratures noires.
L'administration Plante a expliqué que «c'est le traitement qui a été fait par le responsable de l'Accès à l'information en fonction des critères de la loi».
La Ville de Montréal a invoqué pas moins de cinq motifs différents pour justifier ce lourd caviardage. La métropole estime qu'une partie du rapport concerne un secret industriel d'un tiers. La Loi autorise également un organisme public à garder secret pendant 10 ans un avis ou une recommandation ayant mené à une décision. La même protection pour le travail d'un consultant. La Ville ajoute pouvoir refuser l'accès à un document concernant une « décision en cours ». Enfin, la métropole indique que certaines parties du document contiennent des renseignements personnels qui sont confidentiels.
Même la table des matières a été en partie caviardée. Ainsi, trois des neuf éléments ayant fait l'objet de cette enquête du contrôleur général ont été masqués.
À noter, un consultant externe a également déposé un rapport en décembre 2018 sur la gestion du Centre de prévention de la radicalisation, mais la Ville et le gouvernement du Québec n'ont pas encore statué s'ils comptaient le rendre public.
Bonis interdits
Dans les rares portions libérées du rapport du contrôleur général, le document indique que celui-ci a été mandaté en novembre 2018 alors que «des doutes ont été soulevés quant à l'utilisation des fonds publics montréalais». On ajoute que «plusieurs intervenants du milieu [de la prévention de la radicalisation] se questionnent sur la mission de l'organisme et des moyens déployés pour la réaliser».
Le rapport évoque que le directeur Herman Deparice-Okomba a touché des bonis de performance alors que ce n'était pas autorisé. «Les conditions de travail des cadres de la Ville de Montréal stipulent que les cadres prêtés à un organisme externe à la Ville de Montréal, notamment à une société paramunicipale, ne sont pas assujettis au Programme de gestion de la performance», peut-on lire.
Le contrôleur général s'est également penché sur des prises de position publiques de membres. Il s'inquiétait de certaines opinions émises en août 2017 par Herman Deparice-Okomba sur la Meute.
Les nombreuses apparitions publiques d'un employé, Maxime Fiset, qui a produit un documentaire, ont aussi attiré l'attention du contrôleur. Le rapport cite une conférence donnée à Alma où il a émis plusieurs opinions, notamment en affirmant que la tuerie à la mosquée de Québec était du terrorisme. Une entrevue mouvementée avec l'animatrice Sophie Durocher est aussi évoquée, le rapport indiquant que l'homme avait insulté l'animatrice.
Le contrôleur général précise que le code de conduite du Centre de prévention prévoit que ses employés fassent preuve de professionnalisme et ne nuisent pas à l'image de l'organisation.
- Avec William Leclerc